LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
+10
Spin
Jans
indian
-Ren-
da_niel
Idriss
Doute-Pieux
Coeur de Loi
Roque
Yahia
14 participants
Page 1 sur 6
Page 1 sur 6 • 1, 2, 3, 4, 5, 6
LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Voici un texte fort intéressant d'un athée militant laïc belge:
http://orbi.ulg.ac.be/handle/2268/132757
En voici mon commentaire : Cet article fort intéressant et bien argumenté. Je suis assez stupéfait par l'argumentation néo-platonicienne de Peña-Ruiz, dont j'avoue avoir tout ignoré avant de le lire. Cet type de raisonnement idéiste ne peut mener qu'au dogmatisme, à l'intolérance, et à des pratiques inquisitoriales pour" faire le bonheur des gens" malgré eux. C'est à juste titre que l'auteur rappelle à quelles dérives étatiques les prétentions universalistes des idéologies ont déjà mené. Je ne me prétends pas de gauche pour ma part, tout en ayant bien ancrée en moi le souci d'une justice sociale. Mais il m'étonne très fort que l'on puisse prétendre d'un penseur, même socialement bienveillant, qu'il est "de gauche", s'il n'inscrit pas dans sa réflexion, les conditions socio-économiques qui génèrent les idéologies... Une pensée de type idéiste, néo-platonicienne me semble foncièrement conservatrice, voire liberticide. Il n'y a donc plus d'écho de Marx chez les penseurs dits" de gauche" ? Je ne suis par marxiste cependant, plutôt sceptique, et je finis par me dire qu'une certaine dose de relativisme reste , de nos jours, la seule manière de résister à tous ces dogmes laïcs ou non que l'on voudrait m'imposer.
L'article complet est téléchargeable.
LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Dans le numéro de Politique Revue de Débats qui sort ce vendredi, un article de réflexion critique sur Henri Peña-Ruiz, penseur de la laicité "à la française".
Pourquoi Peña Ruiz ? Parce que c'est le principal penseur de ce courant laïque, peut-être le seul qui a tenté de le fonder sur une véritable réflexion philosophique débarrassée de la couche de préjugés ethnocentriques qui entoure en général cette conception en France. C’est donc chez lui qu’on trouve les « racines » fondamentales du laïcisme, sans déformation ni récupération. Et c’est là que la critique est la plus essentielle.
Merci de diffuser ce texte sans modération.
http://orbi.ulg.ac.be/handle/2268/132757
En voici mon commentaire : Cet article fort intéressant et bien argumenté. Je suis assez stupéfait par l'argumentation néo-platonicienne de Peña-Ruiz, dont j'avoue avoir tout ignoré avant de le lire. Cet type de raisonnement idéiste ne peut mener qu'au dogmatisme, à l'intolérance, et à des pratiques inquisitoriales pour" faire le bonheur des gens" malgré eux. C'est à juste titre que l'auteur rappelle à quelles dérives étatiques les prétentions universalistes des idéologies ont déjà mené. Je ne me prétends pas de gauche pour ma part, tout en ayant bien ancrée en moi le souci d'une justice sociale. Mais il m'étonne très fort que l'on puisse prétendre d'un penseur, même socialement bienveillant, qu'il est "de gauche", s'il n'inscrit pas dans sa réflexion, les conditions socio-économiques qui génèrent les idéologies... Une pensée de type idéiste, néo-platonicienne me semble foncièrement conservatrice, voire liberticide. Il n'y a donc plus d'écho de Marx chez les penseurs dits" de gauche" ? Je ne suis par marxiste cependant, plutôt sceptique, et je finis par me dire qu'une certaine dose de relativisme reste , de nos jours, la seule manière de résister à tous ces dogmes laïcs ou non que l'on voudrait m'imposer.
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Mais quand le relativisme devient lui-même le dogme, quand le champ est totalement libre et qu'il n'est plus possible de se positionner " en réaction contre " (position finalement bien confortable et économique d'efforts démesurés) ... on cherche à inventer quelque chose pour sortir du grand flou ou faire recours à de vieux systèmes un peu éculés ...Yahia a écrit:je finis par me dire qu'une certaine dose de relativisme reste , de nos jours, la seule manière de résister à tous ces dogmes laïcs ou non que l'on voudrait m'imposer.
L'esprit humain est fertile, mais ne peut inventer ses solutions à l'infini. A moins que tu aies une idée ...
Ayant oublié un instant que tu étais belge, et répondant à ta question en titre, j'allais dire que l'idée que la France est au centre du monde et brandit le drapeau de la liberté de pensée date du XVIIIème siècle. Elle ne m'effleure même pas, j'avais oublié qu'on pouvait encore le penser.
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Je pense que ça vaut la peine de jeter un oeil sur le texte dont voici un extrait de la première partie, mais suivez plutôt le lien
http://orbi.ulg.ac.be/bitstream/2268/132757/1/La%20France%20%C3%A9clairant%20le%20Monde.pdf
Henri Peña-Ruiz ou la France éclairant le monde
par Marc jacquemain sociologue, Université de Liège
Henri Peña-Ruiz est professeur de philosophie au lycée Fénelon (Paris) et maître de conférence à l’Institut d’études politiques de Paris. Il est notamment l’auteur de Dieu et
Marianne. Philosophie de la laïcité (PUF, 1999), de Qu’est-ce que la laïcité ? (Gallimard, 2003) et de Histoire de la laïcité. Genèse d’un idéal (Gallimard, « Découvertes », 2005). Il était un des vingt membres de la Commission de réflexion sur le principe de laïcité dans la République présidée par Bernard Stasi (2003), dont les travaux furent à la base de la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux ostensibles dans les lycées et collège. Il a soutenu la candidature de Jean-Luc Mélenchon à la dernière élection présidentielle française et est membre du Parti de gauche, dont il a inspiré une « Proposition de loi-cadre relative à la promotion de la laïcité » (http://www.lepartidegauche.fr/system/documents/textes-ppl%20pg%20laicite.pdf).
Il est généralement considéré comme le principal théoricien de la « laïcité à la française » sous sa forme la plus intransigeante, telle qu’elle s’est radicalisée depuis une vingtaine d’années.
En 1999 paraît aux Presses universitaires de France un gros essai philosophique : Dieu et Marianne.
Philosophie de la laïcité. L’auteur, Henri Peña-Ruiz, a peu écrit auparavant. Mais il écrira beaucoup dans les années qui suivent. C’est qu’avec Dieu et Marianne, Peña-Ruiz s’est imposé comme « le » philosophe de la laïcité républicaine à la française.
C’est une définition qu’il récuserait sans aucun doute : il n’y a pas, pour lui, de laïcité « à la française». Il y a une laïcité unique, universelle et éternelle, que la France a seulement eu le mérite de découvrir avant les autres. Dieu et Marianne est un ouvrage dense de 375 pages, souvent érudit, parfois passionnant, qui tente une fondation éthicométaphysique de la laïcité républicaine : le genre de texte qu’on cite beaucoup plus qu’on ne le lit.
Quel est l’intérêt de le passer ici au scalpel ? Si la laïcité française fait l’objet de beaucoup d’affirmations, de polémiques et de récupérations, il en existe peu d’élaborations systématiques et aucune autre de l’ampleur de celle proposée par Peña-Ruiz. Elle a d’ailleurs valu à son auteur une réelle notoriété et un statut de quasi « référence obligée » sur le sujet. La deuxième raison qui justifie une discussion en profondeur de ce travail est qu’il élabore une pensée « non contaminée » de cette forme de laïcité.
On veut dire par là que, dans un contexte où cette conception est revendiquée par la droite et même la droite extrême pour couvrir des logiques xénophobes, Peña-Ruiz est, de son côté, un penseur indiscutablement de gauche. Venu du marxisme, membre du Parti de Gauche, il est proche conseiller de Jean-Luc Mélenchon. Dans Dieu et Marianne, la critique du capitalisme
contemporain est constamment présente en toile de fond (même si c’est d’une manière fort abstraite) et la laïcité est présentée
comme indissociable de la justice sociale. Enfin, le livre est construit comme un texte exclusivement théorique en dehors du contexte polémique actuel : l’islam, par exemple, n’y est presque jamais cité (à l’inverse du catholicisme, abondamment abordé,
mais surtout dans une perspective historique)1.
Ce livre est donc un point de départ idéal pour déplacer le débat et juger la laïcité républicaine sur ses fondements, indépendamment des instrumentalisations parfois fort déplaisantes dont elle fait l’objet. Le pari que l’on fait ici est qu’il vaut donc la peine, à un moment donné, de prendre un peu de hauteur par rapport aux enjeux pratiques pour passer au crible les théories qui prétendent les fonder. C’est un argument a fortiori : si on peut repérer les faiblesses de cette conception de la laïcité dans son élaboration théorique la plus aboutie, alors on comprendra mieux les dérives dans ses usages pratiques et contextualisés. Mais l’analyse théorique proposée ici ne prend évidemment son sens qu’en relation aux disputes très concrètes qu’elle permet d’éclairer2.
Au commencement était le Laos
Le livre de Peña-Ruiz commence par une longue histoire des rapports compliqués entre
pouvoir politique et pouvoir religieux dans l’histoire de France, qui va de Clovis à la loi de séparation de 19053. Mais pour saisir le fondement de la laïcité, il faut attendre le moment où il introduit « le peuple ». Il y a deux façons de définir le «peuple » pour l’auteur : le Démos, à savoir le peuple « réel », issu d’une histoire et partageant une culture, un territoire, voire des croyances communes. Et puis il y a le Laos, peuple potentiel ou « idéel », en quelque sorte, où la seule condition d’humain est déterminante :
« Au sein de la multitude, du Laos, la référence à cette qualité d’homme, avec tout ce qu’elle implique, suffit à esquisser le fondement d’un principe, où s’appellent réciproquement l’idée du peuple et celle des hommes qui le composent en amont de toute différenciation sociale ou politique » (p. 123). Ce passage (et bien d’autres semblables) indique clairement à la fois la méthode de raisonnement et la nature de la métaphysique sous-jacente : il y a un peuple « en puissance », derrière le peuple réel. La laïcité (qui vient étymologiquement de « Laos ») est la reconnaissance de cette « unité première » supposée précéder toute différentiation réelle. Bien sûr, on n’accusera pas Peña-Ruiz de naïveté philosophique : il s’agit bien d’un concept théorique et non d’une tentative de description historique. Le Laos c’est le peuple « idéel » avant qu’il s’incarne en un peuple réel, fruit d’une histoire. Si l’unité du « Laos » est donnée a priori, alors, l’idée de « laïcité » devient assez immédiate : « la seule loi qui vaille
est celle que les hommes, tous les hommes, se donnent à eux-mêmes et non celle que certains donneraient à d’autres » (p. 123). Dans la réalité, ce sont bien sûr toujours certains hommes qui « donnent des lois à tous », mais il n’est
pas question de réalité, ici, seulement de principe idéal. Et dans cet idéal, le peuple peut être « conçu comme une totalité indivisible » (p. 238).
un peuple abstrait
On peut alors se demander en quoi il serait moins légitime de partir d’un peuple abstrait comme le fait Peña-Ruiz, que d’un individu abstrait, comme le fait, par exemple, le libéralisme de Rawls 4. Or, tout est là. Dans le libéralisme comme dans le multiculturalisme, c’est la reconnaissance de la pluralité qui est première et l’enjeu majeur est de définir comment, à partir de cette pluralité on peut construire du commun. Dans le Laos républicain, l’unité est donnée d’emblée ; la question n’est donc pas d’arbitrer les conflits, de définir le juste et l’injuste mais de respecter l’indivisibilité première du peuple : « si, de la totalité du Laos, du peuple, une partie se détache et entend ériger sa conviction particulière en croyance obligée pour tous, elle s’engage dans une démarche cléricale» (p. 160). La métaphysique holiste du « peuple abstrait » fait donc l’impasse sur les questions centrales de la philosophie politique contemporaine : le pluralisme, le conflit, le « différend » sont évacués puisque le peuple « uni » est « toujours déjà là ». Et donc, il « transcende » en quelque sorte, comme on le verra plus bas, le « peuple réel » qui est lui, toujours divisé et pluriel. On ne fera pas ici de faux procès : l’unité du peuple est bien,
on y insiste, un « principe régulateur » et non une réalité concrète historiquement située. Mais on sent bien, à la lumière
des quelques extraits proposés, comme ce principe pèse lourd : comment une philosophie qui fait de l’unité le point de départ
et non l’aboutissement de la politique va-t-elle aider à régler les questions réelles, à départager ce qui est de l’ordre du commun et ce qui est de l’ordre du particulier ? Comment rend-elle compte du conflit au coeur du social ? Redescendons
un moment sur terre : quelle chaîne argumentative peut lier l’unité du Laos et le débat en termes de libertés publiques sur le port du voile ou encore la place des pratiques religieuses dans l’espace public ? On peut penser qu’il n’y en a pas : la philosophie dont
nous avons besoin face à n’importe quelle réalité concrète doit au contraire nous aider à définir un intérêt général dont l’existence
n’est jamais donnée a priori. La Raison et la volonté générale Une fois posée l’unité indivisible du Laos, il reste à comprendre comment celle-ci régit la construction des institutions. Pour cela, il faut faire appel à la Raison et à la Volonté générale,qui méritent bien leur majuscule vu le poids qu’elles prennent dans le raisonnement. Pour l’auteur, le refus du dogmatisme religieux n’est pas lerègne de l’opinion (la « doxa » de Platon) : il s’appuie sur « la souveraineté de la pensée rationnelle qui ainsi peut se réapproprier
chaque figure spirituelle et en dépasser la particularité »(p. 104). Mais comment définirat-on la raison ou, du moins, comment
la définira-t-on d’une manière qui lui permette d’intervenir dans les débats concrets ? À aucun moment, dans Dieu et Marianne,
il n’est possible de donner un contenu à la raison, qui n’est présentée que dans son opposition abstraite à la foi. Dès lors, on aboutit assez facilement à une version parfaitement dogmatique: « la vérité du savoir repose sur l’accord avec l’objet et les jugements de tout entendement s’y rapportant ne peuvent que coïncider» (p. 219). Peña-Ruiz fait à nouveau l’impasse sur ce qui est aujourd’hui au coeur du débat philosophique sur la raison (ou le savoir) : son caractère essentiellementproblématique. Les
philosophes de l’école de Francfort (Adorno, Horkheimer, Habermas et dans leur foulée, Gorz) ont montré que la raison pouvait aisément s’inverser en son contraire lorsque domine la raison instrumentale, qui a servi de matrice commune au scientisme, au racisme colonial, au communisme soviétique, au capitalisme le plus sauvage et même, en partie, au nazisme. La raison est certes essentielle comme potentialité humaine, mais elle existe sur le mode du problème ou de la question et non sur le mode de l’affirmation dogmatique. En d’autres mots, ce qui pose problème dans le travail de Peña-Ruiz, c’est sa référence à un concept « précritique» de la raison, comme si c’était une notion entendue et non controversée.
On peut faire la même analyse de la notion de « Volonté générale» qui occupe une place centrale dans la légitimation de la
laïcité républicaine. Puisque le Laos est « un », il est assez cohérent de considérer qu’il est immédiatement doté d’une volonté
générale : celle-ci n’est pas le résultat d’un processus de négociation et de délibération à partir d’intérêts et valeurs contradictoires,
elle est déjà présente comme « référence interne » au sein de chaque être humain rationnel. Ainsi, « la volonté de vouloir ce qui vaut pour tous n’existe que si chacun peut se déprendre de l’empire de ses croyances ou de ses intérêts exclusifs, et si la société
tout entière peut se mettre également à distance de ses représentations immédiates, réglées le plus souvent par un rapport de
forces idéologiques » (p. 213). Il n’y a donc pas à construire la volonté générale mais à la « reconnaître». L’idée d’une volonté
générale « interne à chacun de nous » (idée bien sûr inspirée de Rousseau) nous évite de poser les questions vraiment difficiles: comment construire la volonté générale ? Qui va s’en faire l’interprète ? À nouveau l’essentiel est manqué. C’est lorsque les vraies questions commencent que la philosophie de Peña-Ruiz nous abandonne.
L’Universel
Pour clôturer l’édifice, il manquait en quelque sorte, un toit. C’est la référence à « l’universel » qui vient boucler la laïcité sur
elle-même : « L’idéal laïque fonde le lien politique sur le droit et le droit sur la référence à l’universel» (p. 210). Mais qu’est-ce que
l’universel ? Comment y accède-t-on ? Comment le sépare-t-on du particulier ? L’universel n’est évidemment pas empiriquement
observable (et on ne peut raisonnablement soupçonner Peña-Ruiz de le croire) : sinon, il serait vide, puisque précisément, tous
les droits et valeurs que nous revendiquons comme « universels »n’ont cessé d’être contestés ou bafoués au cours de l’histoire.
L’universel n’est donc jamais donné et toujours « à construire ». La conception dominante en France de la laïcité n’a d’ailleurs, en fait,rien d’universel ; elle est même assez isolée dans le monde.
C’est, comme le dirait la théoricienne féministe Christine Delphy, un « universalisme fort particulier ».
Mais qu’importe si la France est isolée : « Souligner la relative solitude de la France dans sa conception de la laïcité républicaine inscrite comme principe constitutionnel, c’est se situer sur le plan du fait et non du droit » (p. 246). En clair, ce n’est pas parce que la France est seule qu’elle a tort.
Certes. Mais la position de « l’irréductible village gaulois » n’est pas légitime en théorie politique : il importe de débattre avec le reste du monde. Or, c’est bien le problème de tout le travail de l’auteur: on y trouve un cheminement qui va de Spinoza à RégisDebray en passant par Condorcet,Rousseau, Comte et Jules Ferry.Mais rien sur ce qui s’écrit depuis soixante ans dans le monde ;rien sur Rawls, Walzer, Kymlicka, Elster, Taylor, Barry, Modood, Parekh, Bader… rien non plus sur Adorno, Horkheimer, Habermas ou Honneth ; même pas un mot sur le républicanisme philosophique en dehors de la France comme celui de Benjamin Barber.Tous ceux qui ont proposé, depuis la Seconde Guerre mondiale, uneréflexion sur le contrat social, la rationalité, l’universalisme ou la citoyenneté sont tout simplement absents. Cette espèce d’autisme philosophique dans un ouvrage pourtant longuement pesé ne se comprend que si l’on saisit la dynamique sous-jacente. « En 1789, la France était seule également » nous dit l’auteur (p. 246). Tout est là : pour la laïcité, le moment fondateur est 1789. Ce moment sera, certes, effacé pour un siècle par Napoléon et la Restauration. Mais il sera « réitéré » en quelque sorte par la Troisième République et la loi de séparation de 1905. Au plan théorique, la laïcité est donc tout entière constituée depuis plus de cent ans. Pourquoi dès lors aller se préoccuper de la philosophie du XXe siècle (même pas française, de surcroît) ?
Le constat est identique lorsqu’on lit Qu’est-ce que la laïcité (2003) : « La souveraineté du peuple sur lui-même se prépare dans la souveraineté de chaque homme sur ses pensées telles que l’ouverture à la culture universelle permet de la construire… »6. C’est
d’ailleurs dans ce dernier livre que le recours à l’universel est le plus envahissant. Il est présent presque à toutes les pages. Mais on n‘y trouve pas davantage d’indices sur la manière de le reconnaître, ou plus précisément, sur la manière de le construire, si on
admet (contre l’auteur) qu’il n’est pas « déjà là en droit ».
Peut-on sauver la laïcité républicaine ?
Il reste à se demander pourquoi la laïcité républicaine que défend Peña-Ruiz connaît un tel succès en France. C’est que Dieu
et Marianne, et plus immédiatement encore ses ouvrages plus accessibles tels que Qu’est-ce que la laïcité ? et Qu’est-ce que l’école ? peuvent sembler répondre à des angoisses bien réelles des sociétés européennes.
En premier lieu, on ne rendrait pas justice à l’auteur si on ne lui reconnaissait pas une sensibilité marquée à l’injustice sociale. La
laïcité qu’il décrit ne peut prospérer sur l’injustice. Ainsi, dans Dieu et Marianne, ce passage sur la Révolution française : « La libération juridico-politique est difficilement pensable indépendamment de la libération socio-économique, et l’émancipation du droit n’a pas lieu dans le pur éther des idées simples. La sacralisation du droit de propriété par exemple, ne résonne pas de la même façon pour les sans-culottes au ventre creux et pour les propriétaires nantis… ». Et immédiatement après : « Deux siècles après Robespierre et Condorcet, la menace sur la sphère publique vient surtout des intérêts privés qui rêvent de la rançonner » (p. 89). Si les passages de cet ordre abondent et si, par exemple dans Qu’est-ce que la laïcité ?, Peña-Ruiz promeut une vigoureuse politique anti-discrimination, ce en quoi on ne peut que le soutenir, il reste que nous avons besoin d’une théorie de la laïcité, non pour la société idéale que l’on veut faire advenir, mais d’abord pour la société telle qu’elle est. Il ne fait pas de doute qu’affronter les discriminations et les inégalités est la plus urgente des stratégies. Mais en attendant une société juste (ou moins injuste), il faut une théorie de la liberté de conscience et de l’égalité entre citoyens qui soit défendable aussi ici et maintenant, dans cette société saturée d’injustices sociales où nous devons vivre.
La deuxième raison du succès de la laïcité républicaine est qu’elle vient répondre à une demande de transcendance pour laquelle les religions, dans nos pays d’Europe occidentale, ne sont plus crédibles. On retombe là sur une thématique qui, paradoxalement, occupe, en France au moins, la même place centrale dans la pensée catholique la plus traditionaliste et dans la laïcité républicaine : la dénonciation du relativisme. Des deux côtés, on déplore le « désenchantement du monde » qui semble vouer à l’échec toute forme de vérité en matière morale, toute transcendance.
Mais là où les penseurs de tradition catholique7 attribuent le « désenchantement du monde » à l’affaiblissement du religieux, Peña-Ruiz, et on peut le soutenir en partie sur ce point, l’impute à la marchandisation généralisée du capitalisme : « Car enfin, une société du sexe-fric et des messageries roses, de la pornographie étalée dans la mercantilisation universelle du désir et du corps, confondant licence et liberté de la même façon qu’elle fait du licenciement un “droit” peut-elle donner la leçon ? » (p. 276).
C’est dans ce contexte que l’auteur introduit la nécessité d’une « transcendance laïque », c’est-à- dire une forme de vérité morale et politique qui s’impose à ceux-là mêmes qui l’ont énoncée parce qu’elle les « dépasse ». Cette proposition de vérités « supérieures» correspond effectivement à une demande sociale contemporaine. Mais contrairement à ce dont Peña-Ruiz semble convaincu, cette demande n’est réconciliable ni avec les valeurs démocratiques fondamentales, ni avec la logique des Lumières. C’est une erreur d’attribuer la relativisation (partielle) des valeurs à la seule capacité destructrice du capitalisme : cette relativisation tient aussi, et pour une part essentielle, au mouvement même de la modernité, dont la trajectoire est précisément de désacraliser la « Vérité » et d’instiller le doute dans toutes les entreprises humaines8.
Elle tient tout autant à l’incertitude démocratique, à l’indétermination d’un régime politique sans garant ultime, sans autorité suprême où le pouvoir, selon les termes de Claude Lefort est « un lieu vide ». Entre la transcendance divine dont les lois s’imposent à l’humanité tout entière et la transcendance d’un « Laos » dont les lois s’imposent au « démos », le fossé n’est que théorique et il se franchit aisément dans la pratique. À force de combattre le catholicisme, la laïcité républicaine en a donc repris le dogmatisme fondamental : elle a « épousé son ennemi ».
Une idéologie pour fonctionnaires
Avec un peu de recul, on comprend mieux pourquoi le succès de ces idées en France (mais aussi en Belgique francophone) est particulièrement marqué dans les milieux de fonctionnaires et d’enseignants.
Les uns et les autres voient au fil des années se déliter non seulement leur situation sociale mais aussi leur situation symbolique : l’État cesse d’être « l’arbitre » du bien commun pour devenir un acteur comme un autre du jeu social, de moins en moins capable d’imposer des choix collectifs contre les intérêts privés et de moins en moins capable, d’ailleurs, de distinguer ses propres objectifs et modes de gestion de ceux du privé. Quant aux enseignants, confrontés depuis cinq décennies aux vagues successives de massification de l’école (et aux désillusions pédagogiques), ils voient s’effriter leur statut social et moral. Ils sont donc en demande particulière d’une forme de « rappel à assez isolée dans le monde.
Si vous avez tenu jusqu'ici, la suite sur le lien...
http://orbi.ulg.ac.be/bitstream/2268/132757/1/La%20France%20%C3%A9clairant%20le%20Monde.pdf
Henri Peña-Ruiz ou la France éclairant le monde
par Marc jacquemain sociologue, Université de Liège
Henri Peña-Ruiz est professeur de philosophie au lycée Fénelon (Paris) et maître de conférence à l’Institut d’études politiques de Paris. Il est notamment l’auteur de Dieu et
Marianne. Philosophie de la laïcité (PUF, 1999), de Qu’est-ce que la laïcité ? (Gallimard, 2003) et de Histoire de la laïcité. Genèse d’un idéal (Gallimard, « Découvertes », 2005). Il était un des vingt membres de la Commission de réflexion sur le principe de laïcité dans la République présidée par Bernard Stasi (2003), dont les travaux furent à la base de la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux ostensibles dans les lycées et collège. Il a soutenu la candidature de Jean-Luc Mélenchon à la dernière élection présidentielle française et est membre du Parti de gauche, dont il a inspiré une « Proposition de loi-cadre relative à la promotion de la laïcité » (http://www.lepartidegauche.fr/system/documents/textes-ppl%20pg%20laicite.pdf).
Il est généralement considéré comme le principal théoricien de la « laïcité à la française » sous sa forme la plus intransigeante, telle qu’elle s’est radicalisée depuis une vingtaine d’années.
En 1999 paraît aux Presses universitaires de France un gros essai philosophique : Dieu et Marianne.
Philosophie de la laïcité. L’auteur, Henri Peña-Ruiz, a peu écrit auparavant. Mais il écrira beaucoup dans les années qui suivent. C’est qu’avec Dieu et Marianne, Peña-Ruiz s’est imposé comme « le » philosophe de la laïcité républicaine à la française.
C’est une définition qu’il récuserait sans aucun doute : il n’y a pas, pour lui, de laïcité « à la française». Il y a une laïcité unique, universelle et éternelle, que la France a seulement eu le mérite de découvrir avant les autres. Dieu et Marianne est un ouvrage dense de 375 pages, souvent érudit, parfois passionnant, qui tente une fondation éthicométaphysique de la laïcité républicaine : le genre de texte qu’on cite beaucoup plus qu’on ne le lit.
Quel est l’intérêt de le passer ici au scalpel ? Si la laïcité française fait l’objet de beaucoup d’affirmations, de polémiques et de récupérations, il en existe peu d’élaborations systématiques et aucune autre de l’ampleur de celle proposée par Peña-Ruiz. Elle a d’ailleurs valu à son auteur une réelle notoriété et un statut de quasi « référence obligée » sur le sujet. La deuxième raison qui justifie une discussion en profondeur de ce travail est qu’il élabore une pensée « non contaminée » de cette forme de laïcité.
On veut dire par là que, dans un contexte où cette conception est revendiquée par la droite et même la droite extrême pour couvrir des logiques xénophobes, Peña-Ruiz est, de son côté, un penseur indiscutablement de gauche. Venu du marxisme, membre du Parti de Gauche, il est proche conseiller de Jean-Luc Mélenchon. Dans Dieu et Marianne, la critique du capitalisme
contemporain est constamment présente en toile de fond (même si c’est d’une manière fort abstraite) et la laïcité est présentée
comme indissociable de la justice sociale. Enfin, le livre est construit comme un texte exclusivement théorique en dehors du contexte polémique actuel : l’islam, par exemple, n’y est presque jamais cité (à l’inverse du catholicisme, abondamment abordé,
mais surtout dans une perspective historique)1.
Ce livre est donc un point de départ idéal pour déplacer le débat et juger la laïcité républicaine sur ses fondements, indépendamment des instrumentalisations parfois fort déplaisantes dont elle fait l’objet. Le pari que l’on fait ici est qu’il vaut donc la peine, à un moment donné, de prendre un peu de hauteur par rapport aux enjeux pratiques pour passer au crible les théories qui prétendent les fonder. C’est un argument a fortiori : si on peut repérer les faiblesses de cette conception de la laïcité dans son élaboration théorique la plus aboutie, alors on comprendra mieux les dérives dans ses usages pratiques et contextualisés. Mais l’analyse théorique proposée ici ne prend évidemment son sens qu’en relation aux disputes très concrètes qu’elle permet d’éclairer2.
Au commencement était le Laos
Le livre de Peña-Ruiz commence par une longue histoire des rapports compliqués entre
pouvoir politique et pouvoir religieux dans l’histoire de France, qui va de Clovis à la loi de séparation de 19053. Mais pour saisir le fondement de la laïcité, il faut attendre le moment où il introduit « le peuple ». Il y a deux façons de définir le «peuple » pour l’auteur : le Démos, à savoir le peuple « réel », issu d’une histoire et partageant une culture, un territoire, voire des croyances communes. Et puis il y a le Laos, peuple potentiel ou « idéel », en quelque sorte, où la seule condition d’humain est déterminante :
« Au sein de la multitude, du Laos, la référence à cette qualité d’homme, avec tout ce qu’elle implique, suffit à esquisser le fondement d’un principe, où s’appellent réciproquement l’idée du peuple et celle des hommes qui le composent en amont de toute différenciation sociale ou politique » (p. 123). Ce passage (et bien d’autres semblables) indique clairement à la fois la méthode de raisonnement et la nature de la métaphysique sous-jacente : il y a un peuple « en puissance », derrière le peuple réel. La laïcité (qui vient étymologiquement de « Laos ») est la reconnaissance de cette « unité première » supposée précéder toute différentiation réelle. Bien sûr, on n’accusera pas Peña-Ruiz de naïveté philosophique : il s’agit bien d’un concept théorique et non d’une tentative de description historique. Le Laos c’est le peuple « idéel » avant qu’il s’incarne en un peuple réel, fruit d’une histoire. Si l’unité du « Laos » est donnée a priori, alors, l’idée de « laïcité » devient assez immédiate : « la seule loi qui vaille
est celle que les hommes, tous les hommes, se donnent à eux-mêmes et non celle que certains donneraient à d’autres » (p. 123). Dans la réalité, ce sont bien sûr toujours certains hommes qui « donnent des lois à tous », mais il n’est
pas question de réalité, ici, seulement de principe idéal. Et dans cet idéal, le peuple peut être « conçu comme une totalité indivisible » (p. 238).
un peuple abstrait
On peut alors se demander en quoi il serait moins légitime de partir d’un peuple abstrait comme le fait Peña-Ruiz, que d’un individu abstrait, comme le fait, par exemple, le libéralisme de Rawls 4. Or, tout est là. Dans le libéralisme comme dans le multiculturalisme, c’est la reconnaissance de la pluralité qui est première et l’enjeu majeur est de définir comment, à partir de cette pluralité on peut construire du commun. Dans le Laos républicain, l’unité est donnée d’emblée ; la question n’est donc pas d’arbitrer les conflits, de définir le juste et l’injuste mais de respecter l’indivisibilité première du peuple : « si, de la totalité du Laos, du peuple, une partie se détache et entend ériger sa conviction particulière en croyance obligée pour tous, elle s’engage dans une démarche cléricale» (p. 160). La métaphysique holiste du « peuple abstrait » fait donc l’impasse sur les questions centrales de la philosophie politique contemporaine : le pluralisme, le conflit, le « différend » sont évacués puisque le peuple « uni » est « toujours déjà là ». Et donc, il « transcende » en quelque sorte, comme on le verra plus bas, le « peuple réel » qui est lui, toujours divisé et pluriel. On ne fera pas ici de faux procès : l’unité du peuple est bien,
on y insiste, un « principe régulateur » et non une réalité concrète historiquement située. Mais on sent bien, à la lumière
des quelques extraits proposés, comme ce principe pèse lourd : comment une philosophie qui fait de l’unité le point de départ
et non l’aboutissement de la politique va-t-elle aider à régler les questions réelles, à départager ce qui est de l’ordre du commun et ce qui est de l’ordre du particulier ? Comment rend-elle compte du conflit au coeur du social ? Redescendons
un moment sur terre : quelle chaîne argumentative peut lier l’unité du Laos et le débat en termes de libertés publiques sur le port du voile ou encore la place des pratiques religieuses dans l’espace public ? On peut penser qu’il n’y en a pas : la philosophie dont
nous avons besoin face à n’importe quelle réalité concrète doit au contraire nous aider à définir un intérêt général dont l’existence
n’est jamais donnée a priori. La Raison et la volonté générale Une fois posée l’unité indivisible du Laos, il reste à comprendre comment celle-ci régit la construction des institutions. Pour cela, il faut faire appel à la Raison et à la Volonté générale,qui méritent bien leur majuscule vu le poids qu’elles prennent dans le raisonnement. Pour l’auteur, le refus du dogmatisme religieux n’est pas lerègne de l’opinion (la « doxa » de Platon) : il s’appuie sur « la souveraineté de la pensée rationnelle qui ainsi peut se réapproprier
chaque figure spirituelle et en dépasser la particularité »(p. 104). Mais comment définirat-on la raison ou, du moins, comment
la définira-t-on d’une manière qui lui permette d’intervenir dans les débats concrets ? À aucun moment, dans Dieu et Marianne,
il n’est possible de donner un contenu à la raison, qui n’est présentée que dans son opposition abstraite à la foi. Dès lors, on aboutit assez facilement à une version parfaitement dogmatique: « la vérité du savoir repose sur l’accord avec l’objet et les jugements de tout entendement s’y rapportant ne peuvent que coïncider» (p. 219). Peña-Ruiz fait à nouveau l’impasse sur ce qui est aujourd’hui au coeur du débat philosophique sur la raison (ou le savoir) : son caractère essentiellementproblématique. Les
philosophes de l’école de Francfort (Adorno, Horkheimer, Habermas et dans leur foulée, Gorz) ont montré que la raison pouvait aisément s’inverser en son contraire lorsque domine la raison instrumentale, qui a servi de matrice commune au scientisme, au racisme colonial, au communisme soviétique, au capitalisme le plus sauvage et même, en partie, au nazisme. La raison est certes essentielle comme potentialité humaine, mais elle existe sur le mode du problème ou de la question et non sur le mode de l’affirmation dogmatique. En d’autres mots, ce qui pose problème dans le travail de Peña-Ruiz, c’est sa référence à un concept « précritique» de la raison, comme si c’était une notion entendue et non controversée.
On peut faire la même analyse de la notion de « Volonté générale» qui occupe une place centrale dans la légitimation de la
laïcité républicaine. Puisque le Laos est « un », il est assez cohérent de considérer qu’il est immédiatement doté d’une volonté
générale : celle-ci n’est pas le résultat d’un processus de négociation et de délibération à partir d’intérêts et valeurs contradictoires,
elle est déjà présente comme « référence interne » au sein de chaque être humain rationnel. Ainsi, « la volonté de vouloir ce qui vaut pour tous n’existe que si chacun peut se déprendre de l’empire de ses croyances ou de ses intérêts exclusifs, et si la société
tout entière peut se mettre également à distance de ses représentations immédiates, réglées le plus souvent par un rapport de
forces idéologiques » (p. 213). Il n’y a donc pas à construire la volonté générale mais à la « reconnaître». L’idée d’une volonté
générale « interne à chacun de nous » (idée bien sûr inspirée de Rousseau) nous évite de poser les questions vraiment difficiles: comment construire la volonté générale ? Qui va s’en faire l’interprète ? À nouveau l’essentiel est manqué. C’est lorsque les vraies questions commencent que la philosophie de Peña-Ruiz nous abandonne.
L’Universel
Pour clôturer l’édifice, il manquait en quelque sorte, un toit. C’est la référence à « l’universel » qui vient boucler la laïcité sur
elle-même : « L’idéal laïque fonde le lien politique sur le droit et le droit sur la référence à l’universel» (p. 210). Mais qu’est-ce que
l’universel ? Comment y accède-t-on ? Comment le sépare-t-on du particulier ? L’universel n’est évidemment pas empiriquement
observable (et on ne peut raisonnablement soupçonner Peña-Ruiz de le croire) : sinon, il serait vide, puisque précisément, tous
les droits et valeurs que nous revendiquons comme « universels »n’ont cessé d’être contestés ou bafoués au cours de l’histoire.
L’universel n’est donc jamais donné et toujours « à construire ». La conception dominante en France de la laïcité n’a d’ailleurs, en fait,rien d’universel ; elle est même assez isolée dans le monde.
C’est, comme le dirait la théoricienne féministe Christine Delphy, un « universalisme fort particulier ».
Mais qu’importe si la France est isolée : « Souligner la relative solitude de la France dans sa conception de la laïcité républicaine inscrite comme principe constitutionnel, c’est se situer sur le plan du fait et non du droit » (p. 246). En clair, ce n’est pas parce que la France est seule qu’elle a tort.
Certes. Mais la position de « l’irréductible village gaulois » n’est pas légitime en théorie politique : il importe de débattre avec le reste du monde. Or, c’est bien le problème de tout le travail de l’auteur: on y trouve un cheminement qui va de Spinoza à RégisDebray en passant par Condorcet,Rousseau, Comte et Jules Ferry.Mais rien sur ce qui s’écrit depuis soixante ans dans le monde ;rien sur Rawls, Walzer, Kymlicka, Elster, Taylor, Barry, Modood, Parekh, Bader… rien non plus sur Adorno, Horkheimer, Habermas ou Honneth ; même pas un mot sur le républicanisme philosophique en dehors de la France comme celui de Benjamin Barber.Tous ceux qui ont proposé, depuis la Seconde Guerre mondiale, uneréflexion sur le contrat social, la rationalité, l’universalisme ou la citoyenneté sont tout simplement absents. Cette espèce d’autisme philosophique dans un ouvrage pourtant longuement pesé ne se comprend que si l’on saisit la dynamique sous-jacente. « En 1789, la France était seule également » nous dit l’auteur (p. 246). Tout est là : pour la laïcité, le moment fondateur est 1789. Ce moment sera, certes, effacé pour un siècle par Napoléon et la Restauration. Mais il sera « réitéré » en quelque sorte par la Troisième République et la loi de séparation de 1905. Au plan théorique, la laïcité est donc tout entière constituée depuis plus de cent ans. Pourquoi dès lors aller se préoccuper de la philosophie du XXe siècle (même pas française, de surcroît) ?
Le constat est identique lorsqu’on lit Qu’est-ce que la laïcité (2003) : « La souveraineté du peuple sur lui-même se prépare dans la souveraineté de chaque homme sur ses pensées telles que l’ouverture à la culture universelle permet de la construire… »6. C’est
d’ailleurs dans ce dernier livre que le recours à l’universel est le plus envahissant. Il est présent presque à toutes les pages. Mais on n‘y trouve pas davantage d’indices sur la manière de le reconnaître, ou plus précisément, sur la manière de le construire, si on
admet (contre l’auteur) qu’il n’est pas « déjà là en droit ».
Peut-on sauver la laïcité républicaine ?
Il reste à se demander pourquoi la laïcité républicaine que défend Peña-Ruiz connaît un tel succès en France. C’est que Dieu
et Marianne, et plus immédiatement encore ses ouvrages plus accessibles tels que Qu’est-ce que la laïcité ? et Qu’est-ce que l’école ? peuvent sembler répondre à des angoisses bien réelles des sociétés européennes.
En premier lieu, on ne rendrait pas justice à l’auteur si on ne lui reconnaissait pas une sensibilité marquée à l’injustice sociale. La
laïcité qu’il décrit ne peut prospérer sur l’injustice. Ainsi, dans Dieu et Marianne, ce passage sur la Révolution française : « La libération juridico-politique est difficilement pensable indépendamment de la libération socio-économique, et l’émancipation du droit n’a pas lieu dans le pur éther des idées simples. La sacralisation du droit de propriété par exemple, ne résonne pas de la même façon pour les sans-culottes au ventre creux et pour les propriétaires nantis… ». Et immédiatement après : « Deux siècles après Robespierre et Condorcet, la menace sur la sphère publique vient surtout des intérêts privés qui rêvent de la rançonner » (p. 89). Si les passages de cet ordre abondent et si, par exemple dans Qu’est-ce que la laïcité ?, Peña-Ruiz promeut une vigoureuse politique anti-discrimination, ce en quoi on ne peut que le soutenir, il reste que nous avons besoin d’une théorie de la laïcité, non pour la société idéale que l’on veut faire advenir, mais d’abord pour la société telle qu’elle est. Il ne fait pas de doute qu’affronter les discriminations et les inégalités est la plus urgente des stratégies. Mais en attendant une société juste (ou moins injuste), il faut une théorie de la liberté de conscience et de l’égalité entre citoyens qui soit défendable aussi ici et maintenant, dans cette société saturée d’injustices sociales où nous devons vivre.
La deuxième raison du succès de la laïcité républicaine est qu’elle vient répondre à une demande de transcendance pour laquelle les religions, dans nos pays d’Europe occidentale, ne sont plus crédibles. On retombe là sur une thématique qui, paradoxalement, occupe, en France au moins, la même place centrale dans la pensée catholique la plus traditionaliste et dans la laïcité républicaine : la dénonciation du relativisme. Des deux côtés, on déplore le « désenchantement du monde » qui semble vouer à l’échec toute forme de vérité en matière morale, toute transcendance.
Mais là où les penseurs de tradition catholique7 attribuent le « désenchantement du monde » à l’affaiblissement du religieux, Peña-Ruiz, et on peut le soutenir en partie sur ce point, l’impute à la marchandisation généralisée du capitalisme : « Car enfin, une société du sexe-fric et des messageries roses, de la pornographie étalée dans la mercantilisation universelle du désir et du corps, confondant licence et liberté de la même façon qu’elle fait du licenciement un “droit” peut-elle donner la leçon ? » (p. 276).
C’est dans ce contexte que l’auteur introduit la nécessité d’une « transcendance laïque », c’est-à- dire une forme de vérité morale et politique qui s’impose à ceux-là mêmes qui l’ont énoncée parce qu’elle les « dépasse ». Cette proposition de vérités « supérieures» correspond effectivement à une demande sociale contemporaine. Mais contrairement à ce dont Peña-Ruiz semble convaincu, cette demande n’est réconciliable ni avec les valeurs démocratiques fondamentales, ni avec la logique des Lumières. C’est une erreur d’attribuer la relativisation (partielle) des valeurs à la seule capacité destructrice du capitalisme : cette relativisation tient aussi, et pour une part essentielle, au mouvement même de la modernité, dont la trajectoire est précisément de désacraliser la « Vérité » et d’instiller le doute dans toutes les entreprises humaines8.
Elle tient tout autant à l’incertitude démocratique, à l’indétermination d’un régime politique sans garant ultime, sans autorité suprême où le pouvoir, selon les termes de Claude Lefort est « un lieu vide ». Entre la transcendance divine dont les lois s’imposent à l’humanité tout entière et la transcendance d’un « Laos » dont les lois s’imposent au « démos », le fossé n’est que théorique et il se franchit aisément dans la pratique. À force de combattre le catholicisme, la laïcité républicaine en a donc repris le dogmatisme fondamental : elle a « épousé son ennemi ».
Une idéologie pour fonctionnaires
Avec un peu de recul, on comprend mieux pourquoi le succès de ces idées en France (mais aussi en Belgique francophone) est particulièrement marqué dans les milieux de fonctionnaires et d’enseignants.
Les uns et les autres voient au fil des années se déliter non seulement leur situation sociale mais aussi leur situation symbolique : l’État cesse d’être « l’arbitre » du bien commun pour devenir un acteur comme un autre du jeu social, de moins en moins capable d’imposer des choix collectifs contre les intérêts privés et de moins en moins capable, d’ailleurs, de distinguer ses propres objectifs et modes de gestion de ceux du privé. Quant aux enseignants, confrontés depuis cinq décennies aux vagues successives de massification de l’école (et aux désillusions pédagogiques), ils voient s’effriter leur statut social et moral. Ils sont donc en demande particulière d’une forme de « rappel à assez isolée dans le monde.
Si vous avez tenu jusqu'ici, la suite sur le lien...
Dernière édition par Yahia le Jeu 8 Nov - 23:18, édité 1 fois
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Yahia a écrit:http://orbi.ulg.ac.be/bitstream/2268/132757/1/La%20France%20%C3%A9clairant%20le%20Monde.pdf
Un idéologue, quoi. C'est une espèce qui peut vivre totalement isolée du reste de l'humanité. On est libre de dire ce qu'on pense y compris des sonneries !Il est généralement considéré comme le principal théoricien de la « laïcité à la française » sous forme la plus intransigeante, telle qu’elle s’est radicalisée depuis une vingtaine d’années.
Pas du tout impressionné, malgré ses titres ronflants ! Je ne perçois même pas l'interêt de cette théologie laïqueparce que les valeurs laïques n'ont pas plus d'existence que les Idées platoniciennes.
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Roque a écrit:Yahia a écrit:http://orbi.ulg.ac.be/bitstream/2268/132757/1/La%20France%20%C3%A9clairant%20le%20Monde.pdfUn idéologue, quoi. C'est une espèce qui peut vivre totalement isolée du reste de l'humanité. On est libre de dire ce qu'on pense y compris des sonneries !Il est généralement considéré comme le principal théoricien de la « laïcité à la française » sous forme la plus intransigeante, telle qu’elle s’est radicalisée depuis une vingtaine d’années.
Pas du tout impressionné, malgré ses titres ronflants ! Je ne perçois même pas l'interêt de cette théologie laïqueparce que les valeurs laïques n'ont pas plus d'existence que les Idées platoniciennes.
Nous somme d'accord , Roque, mais ,L'intérêt c'est qu'il sert de référence à toute l'idéologie mise en jeu dans vos médias et vos "élites" qui vous gouvernent ( et hélas par ricochet touchent les nôtres), et que cet article de Jacquemain( autre laïc , plus subtil) s'y oppose en démontant la logique de ces raisonnements qui me paraissent également mal fondés.
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Je choisis de faire remonter ce fil pour vous inviter à aller voir la nouvelle totalement aberrante que je viens de recevoir : https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t1758-coexister-n-est-plus-d-interet-general
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/05/01/un-rapport-americain-critique-la-laicite-tres-agressive-de-la-france_3169091_3224.htmlPour la première fois, la commission américaine sur les libertés religieuses internationales, dont les membres sont nommés par le président américain et le Congrès, a consacré un chapitre de son épais rapport annuel, publié mardi 30 avril, à l'Europe occidentale (...)
"Parfois, comme l'Europe de l'Ouest a en général un très bon bilan en matière de liberté religieuse, il est facile de négliger le fait qu'il existe des questions problématiques en ce qui concerne les vêtements religieux, certains rituels et certaines traditions religieuses" a expliqué la présidente, Katrina Lantos Swett, lors d'une conférence téléphonique. "Dans certains pays, une laïcité très agressive place les personnes religieuses dans des positions inconfortables et difficiles en ce qui concerne le plein exercice de leurs convictions et croyances" (...)
Le rapport cite les restrictions croissante votées ces dernières années en Europe concernant les signes religieux, l'abattage rituel des animaux, la circoncision en Allemagne et la construction de mosquées et minarets en Suisse. Les restrictions "créent une atmosphère d'intimidation contre certaines formes d'activité religieuse en Europe occidentale", expliquent les auteurs. "Ces restrictions limitent aussi gravement l'intégration sociale et les opportunités en termes d'éducation et d'emploi pour les individus affectés".
La commission évoque plus précisément les interdictions du voile intégral votées en 2011 en France et en Belgique. "Cela soulève des inquiétudes en termes de discrimination", dit-elle. "Tout en cherchant à répondre aux inquiétudes sur la coercition, une telle loi appliquée trop largement soulève des questions sur les droits parentaux et la liberté de choix".
Le rapport souligne ensuite que le président François Hollande et d'autres ministres ont appelé au vote d'une loi sur les signes religieux dans certains lieux privés, notamment les structures de petite enfance. "Ces restrictions limitent les opportunités d'emploi et économiques, particulièrement pour les femmes musulmanes qui portent le foulard" (...)
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Réaction de défiance viscérale !-Ren- a écrit:Pour la première fois, la commission américaine sur les libertés religieuses internationales, dont les membres sont nommés par le président américain et le Congrès.
De quel droit, ces américains veulent-ils donner leur avis sur tout. Quelle est cette commission subitement sortie d'une boîte ? Que ce soit pour le mariage gay, pour la financiarisation, pour le réchauffement climatique, pour le domaine religieux, pour l'hégémonie commerciale ou pour la paix mondiale (menace nucléaire !), je ne leur accorde ni crédit moral, ni préseance. Qu'ils restent donc chez eux et s'occupent de leurs affaires !
Beien que cette déclaration semble verser de l'eau à mon moulin, leur logique pourrie par ailleurs me laisse profondément sceptique. La pollution qui s'étend à partir de leurs pratiques et de leurs croyances perverties - dans de multiples domaines - m'indisposent fortement certains jours !
Désolé, Ren !
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Pas de quoi, je ne fais que communiquer l'info pour alimenter le débat, je n'ai émis aucun avis sur le rapport en questionRoque a écrit:Désolé, Ren !
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Voici d'ailleurs le lien direct : http://www.uscirf.gov/images/2013%20USCIRF%20Annual%20Report%281%29.pdf
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Être chrétien c'est être pour la laicité.
(Rendez à César ce qui lui appartient)
(Rendez à César ce qui lui appartient)
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
La laicité en france comporte beaucoup de défaut, mais elle a le mérite d'exister, ce qui n'est pas autant le cas dans les pays Européens.
Le symbole de cette corruption c'est l'Alsace-Moselle qui n'est pas laique.
Le symbole de cette corruption c'est l'Alsace-Moselle qui n'est pas laique.
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Faire de Pena-Ruiz, le champion de la "laïcité à la française" est extrêmement orienté !
Il est l'un des penseurs contemporains majeurs d'une laïcité française fermée dans la continuité de Buisson et de l'ultra-laïcisme de la IIIème République, ce militant le sait bien. Il soutient le Front de Gauche, ce qui est très révélateur concernant cette thématique...
Baubérot et Poulat sont bien plus savants dans ce domaine. La France est absolument pas représentatif des systèmes laïques, c'est de l'enfumage, nous ne sommes ni les inventeurs de la laïcité ni ses exportateurs. Par contre de l'ultra-laïcisme, c'est autre chose...
Il est l'un des penseurs contemporains majeurs d'une laïcité française fermée dans la continuité de Buisson et de l'ultra-laïcisme de la IIIème République, ce militant le sait bien. Il soutient le Front de Gauche, ce qui est très révélateur concernant cette thématique...
Baubérot et Poulat sont bien plus savants dans ce domaine. La France est absolument pas représentatif des systèmes laïques, c'est de l'enfumage, nous ne sommes ni les inventeurs de la laïcité ni ses exportateurs. Par contre de l'ultra-laïcisme, c'est autre chose...
Doute-Pieux- Messages : 243
Réputation : 0
Date d'inscription : 26/04/2012
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Ce fil a été lancé par notre ami belge avec un petit soupçon de provocationDoute-Pieux a écrit:Faire de Pena-Ruiz, le champion de la "laïcité à la française" est extrêmement orienté
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Quel pays est plus laic que la France ?
Cherchez bien...
Cherchez bien...
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Le Monde des Religions a consacré plusieurs articles à la laïcité.
http://www.lemondedesreligions.fr/savoir/quelle-laicite-pour-l-europe-15-04-2014-3816_110.php
http://www.lemondedesreligions.fr/actualite/vers-la-construction-d-une-laicite-europeenne-15-04-2014-3817_118.php
http://www.lemondedesreligions.fr/entretiens/comment-vivre-la-laicite-au-quotidien-15-04-2014-3815_111.php
http://www.lemondedesreligions.fr/dossiers/laicite/les-partis-politiques-a-l-assaut-de-la-laicite-17-04-2014-3820_206.php
Il devait être intéressant ce colloque !
À la lecture des articles, la thématique a été abordée au-delà des raccourcis habituelles que l'on peut subir dans les mass-médias ou les meetings politiques.
http://www.lemondedesreligions.fr/savoir/quelle-laicite-pour-l-europe-15-04-2014-3816_110.php
http://www.lemondedesreligions.fr/actualite/vers-la-construction-d-une-laicite-europeenne-15-04-2014-3817_118.php
http://www.lemondedesreligions.fr/entretiens/comment-vivre-la-laicite-au-quotidien-15-04-2014-3815_111.php
http://www.lemondedesreligions.fr/dossiers/laicite/les-partis-politiques-a-l-assaut-de-la-laicite-17-04-2014-3820_206.php
Il devait être intéressant ce colloque !
À la lecture des articles, la thématique a été abordée au-delà des raccourcis habituelles que l'on peut subir dans les mass-médias ou les meetings politiques.
Doute-Pieux- Messages : 243
Réputation : 0
Date d'inscription : 26/04/2012
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Divers aspects de la pensée contemporaine sur France culture le dimanche matin
Cette émission est confiée en alternance aux différentes obédiences maçonniques et de libre pensée.
Aujourd'hui Michel ancien président de la ligue des droits de l'homme:
Cette émission est confiée en alternance aux différentes obédiences maçonniques et de libre pensée.
Aujourd'hui Michel ancien président de la ligue des droits de l'homme:
Actuellement tous le monde est laïc vous l'aurez remarquez, , même ceux qui dans le passé n'ont jamais cessé de combattre la laïcité, se découvre un amour immodéré de la laïcité souvent il faut bien le reconnaitre parce que ce qui les anime avant tout c'est d'être anti musulman, la laïcité devenant un glaive contre les musulmans.
La laïcité instrumentalisé pour restreindre les libertés un contre sens
Lois d’exception lutte contre le terrorisme :échanger de la liberté contre de la sécurité est un marché de dupe...
Idriss- Messages : 7075
Réputation : 35
Date d'inscription : 25/05/2012
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Indre : un instituteur muté d'office pour avoir travaillé sur la Bible
L'inspection académique de l'Indre a sanctionné un professeur des écoles de Malicornay d'une mutation d'office pour avoir utilisé la Bible dans un cours.
Suspendu depuis plusieurs mois, un instituteur de Malicornay dans l'Indre a finalement été condamné à une mutation d'office par la commission de discipline de l'inspection académique de l'Indre. Après avoir fait étudier des passages de la Bible en classe, il a été sanctionné vendredi pour entorse à la laïcité, rapporte France Bleu Berry.
http://www.europe1.fr/societe/indre-un-instituteur-mute-doffice-pour-avoir-travaille-sur-la-bible-3350015
Soit on considère qu' il n' y a pas de textes sacré et la bible est un texte comme un autre qui appartiens au patrimoine de l'humanité au même titre que l’Iliade et l’odyssée et il peut servir de support d'étude ...soit on considère que la bible est un texte sacré et là c'est autre chose ...Ceux qui sanctionnent n'ont donc pas un point de vue laïc ! Reste à savoir si ce prof n' a pas fait de prosélytisme pour , mais aussi contre! L'athéisme ou l'agnosticisme étant une autre croyance parmi les croyances. Bref une part importante de notre patrimoine culturel fait référence à des allusion bibliques, si on a pas des bases on ne peut comprendre ! Une justice à la Salomon, la paille et la poutre dans l’œil!
Idriss- Messages : 7075
Réputation : 35
Date d'inscription : 25/05/2012
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
"Résolution" du cas typique de l'EducNat : quand il y a un scandale, on bouge la personne ailleurs...Suspendu depuis plusieurs mois, un instituteur de Malicornay dans l'Indre a finalement été condamné à une mutation d'office par la commission de discipline de l'inspection académique de l'Indre. Après avoir fait étudier des passages de la Bible en classe, il a été sanctionné vendredi pour entorse à la laïcité, rapporte France Bleu Berry
Le souci, c'est le motif : "entorse à la laïcité" ? Travailler sur la Bible est explicitement au programme !
Certes, c'est en 6e : "On étudie en lien avec le programme d'histoire (thème 2 : « Croyances et récits fondateurs dans la Méditerranée antique au 1er millénaire avant Jésus-Christ »), un extrait long de La Genèse dans la Bible" ( http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=94708 ). Mais depuis la réforme, CM1/CM2 et 6e font partie du même cycle, ce n'est donc qu'une toute petite entorse au programme.
J'ai été voir comment l'enseignant présente son point de vue :
http://www.lanouvellerepublique.fr/Indre/Actualite/Education/n/Contenus/Articles/2017/06/03/Malicornay-la-sanction-tombe-et-revolte-3121092L'entrevue aura duré moins d'une heure, hier matin, dans les locaux de l'inspection académique de Châteauroux. L'enseignant des CM1 et CM2 de l'école de Malicornay a appris à cette occasion son « déplacement d'office ». En clair, une mutation forcée. « On l'avait annoncé avec mon avocat dès lundi. Nous saisissons immédiatement le tribunal administratif pour faire annuler la sanction. »
L'homme ne dévie pas de sa position. « Je cherche et tout le monde cherche où est mon erreur. » Lui qui a plaidé pendant trois heures lundi sur ces faits qui lui sont reprochés a, ces derniers mois, fait l'analyse de ses propres cours. Ces textes de la Bible « étudiés entre Sherlock Holmes et Harry Potter pour donner aux élèves une culture qu'ils n'auront pas, sinon. »
Il explique cet enseignement du fait religieux, sans prosélytisme. « J'ai relu mon projet, j'ai relu les recommandations remises par Régis Debré sur le fait religieux en 2002, je lui ai soumis mes cours : ils sont en règle », défend-il, expliquant que ce projet lui aura pris six heures et demie au total, contre le double pour la thématique Sherlock Holmes. « Je trouve cette sanction injuste, intolérable et injustifiée. » (...)
...Dans ce témoignage, je ne vois RIEN à lui reprocher.
Je vois en plus qu'il est soutenu par les parents :
http://www.lanouvellerepublique.fr/Indre/Actualite/Faits-divers-justice/n/Contenus/Articles/2017/04/15/Malicornay-les-parents-restent-mobilises-3069000(...) Les parents vont donc solliciter un entretien auprès du médiateur de l'Éducation nationale et auprès du Défenseur des enfants. « Les enfants ont tous en tête que le maître n'a rien fait de mal. Ils sont perturbés. Il y a, d'un côté l'enseignant et sa famille, et de l'autre, vingt-cinq enfants qui souffrent », assènent les parents en colère.
Cette même classe avait eu la douleur de vivre, il y a deux ans, le décès de son enseignante (...)
Bref, c'est du pur délire !!!
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
On notera :
Dans la grande tradition épistolaire française qui a connu son apogée entre 1940 et 1945 ...
Les primes aux dénonciations anonyme , je ne sais pas si c'est une bonne idée...Mais bon du moment que l'on vote au deuxiéme tour tous les 5 ans pour faire barrage au fascisme, entre ces périodes de résistance active on peut tous se permettre et accepter .
Les commentaires sur le FB d'Europe 1:
C'est la faute aux musulmans ...si c'était la Coran ou la Thora il aurait été félicité...
L'article ne dit pas si c'était un passage du NT ou de l'AT ...mais l'auditeur ignore sans doute que le texte de la bible et de la Thora sont jumeaux homozygote ...ha si l'école lui avait transmis un minimum de culture biblique .
C'est une lettre anonyme envoyée à l'inspection académique qui a servi de point de départ à cette affaire,
Dans la grande tradition épistolaire française qui a connu son apogée entre 1940 et 1945 ...
Les primes aux dénonciations anonyme , je ne sais pas si c'est une bonne idée...Mais bon du moment que l'on vote au deuxiéme tour tous les 5 ans pour faire barrage au fascisme, entre ces périodes de résistance active on peut tous se permettre et accepter .
Les commentaires sur le FB d'Europe 1:
C'est la faute aux musulmans ...si c'était la Coran ou la Thora il aurait été félicité...
L'article ne dit pas si c'était un passage du NT ou de l'AT ...mais l'auditeur ignore sans doute que le texte de la bible et de la Thora sont jumeaux homozygote ...ha si l'école lui avait transmis un minimum de culture biblique .
Idriss- Messages : 7075
Réputation : 35
Date d'inscription : 25/05/2012
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Interview de Me Jean-Raphaël Mongis, avocat de l'enseignant muté de force :
http://www.lavie.fr/actualite/societe/sanctionne-pour-avoir-fait-etudier-la-bible-en-classe-une-decision-infondee-et-ideologique-06-06-2017-82644_7.phpL’inspection de l’éducation nationale de l'Indre a reçu il y a quatre mois un courrier anonyme dénonçant l'enseignant qui aurait fait du prosélytisme. Dès le lendemain, un inspecteur a été dépêché dans la classe de mon client, et il a été suspendu à titre conservatoire pour quatre mois. Une enquête administrative a eu lieu. Le 29 mai dernier, il est passé en commission de discipline. La sanction est tombée le 2 juin : une mutation d’office.
Initialement, on reprochait à mon client des faits de prosélytisme. Or assez vite l'enquête administrative a mis en évidence qu’il n’en était rien. Aussi bien par le profil de mon client (qui est agnostique, marié civilement et dont les enfants ne sont pas baptisés) que les différents témoignages recueillis, l’accusation de prosélytisme a été abandonnée car elle ne tenait pas.
Ce qui lui était reproché est en fait d’avoir fait étudier à ses élèves certains textes issus de la Bible. Nous leur avons donc présenté différents textes, notamment le rapport Debray de 2002 (...) Alors ils ont changé leur fusil d’épaule et ont pointé l’étude de textes bibliques qui iraient « au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour l’étude du fait religieux ». Donc on lui reproche une étude trop intense du fait religieux. Selon les calculs de l’administration (tels que prononcés en commission de discipline à partir de l’enquête sur les cours de mon client) cela revient à 6h40 de cours (...)
Une année scolaire fait un peu plus de 1000 heures. Nous estimons que 0,6% du temps total de cours ne paraît pas exagéré. Cette décision est tout a fait hypocrite, car en réalité on ne reproche pas à mon client d’avoir fait étudier Marcel Aymé, Harry Potter ou encore L’Iliade et L’Odyssée plus de six heures. C’est parce que c’est la Bible qui est étudiée que le directeur académique de l’Indre a cru devoir faire un exemple. Et ce pour des motifs qui correspondent à des conceptions philosophiques qui dépassent le cadre de la laïcité (...)
On nous a accusé de tout et son contraire. Par exemple, on a reproché à mon client d’avoir fait étudier l'épisode de la femme adultère, sous prétexte que c’est un texte misogyne, parce que c'est à une femme qu’on reprochait l’adultère (...) En outre, dans la décision de la commission, c’est amusant car on reproche à mon client l’étude de textes « issus de la Bible et des évangiles » alors qu’en réalité les évangiles font partie de la Bible (...) On nous a reproché que les textes étudiés soient directement issus du christianisme au détriment d'autres religions. Pourtant, en abordant l’Ancien Testament, ce sont de textes communs à au moins deux grands monothéismes (...)
C’est quand même assez étonnant que l’Éducation nationale s'en soit saisie… Ce genre de lettre aurait dû finir à la poubelle (...) A mon avis, il s’agit d’un seul parent : il y a sans doute un lapsus dans la lettre, car à un moment donné il y est question de « mon enfant ». Nous avons déposé une plainte contre X pour dénonciation calomnieuse (...)
On va saisir le Tribunal administratif de Limoges d’un recours en annulation. En procédure d’urgence, on espère avoir une audience le plus tôt possible, entre une semaine et un mois. Mon client – qui a donc été muté de sa classe et va assurer des remplacements dans d’autres écoles – souhaiterait retourner dans l'école et reprendre sa vie tranquillement.
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Intéressant. Le parent qui a porté plainte est de quelle religion, on le sait ?
da_niel- Membre banni
- Messages : 297
Réputation : 0
Date d'inscription : 03/12/2016
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Lisez ci-dessus : on ne sait RIEN ; on suppose uniquement un parent de cette classe.da_niel a écrit:Intéressant. Le parent qui a porté plainte est de quelle religion, on le sait ?
Mais regardez de quelle commune il est question : https://fr.wikipedia.org/wiki/Malicornay
...je connais bien le coin (oui, oui, j'ai des attaches par là aussi), et je peux vous dire si vous y tenez qu'a priori, on peut supposer que la plainte vient d'un parent athée (car là-bas, à part quelques cathos, et une majorité d'indifférents, vous ne trouvez pas vraiment d'autre positionnement religieux)
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Quelques précisions sur le courrier de dénonciation anonyme :
...sérieusement, un courrier pareil n'aurait jamais dû déclencher quoi que ce soit...
http://www.lavie.fr/actualite/societe/l-ecole-est-finie-pour-l-instit-qui-voulait-etudier-la-bible-en-classe-07-07-2017-83501_7.php(...) Le 30 janvier 2017, l’IEN de La Châtre, Jean-Éric Rouyer, reçoit une lettre anonyme venant de « parents et de grands-parents d’élèves d’enfants (sic) scolarisés à l’école de Malicornay » (...)
La lettre dactylographiée, déposée directement dans la boîte aux lettres de l’Inspection, fait trois pages. Elle est titrée : « Cas de prosélithysme (sic) religieux (ces deux derniers mots sont écrits en gras) à l’école de Malicornay »
« Ne voulant pas mettre nos enfants dans une position très inconfortable en allant nous adresser à leur maître, nous préférons solliciter votre aide pour indiquer son grand égarement à ce professeur vis-à-vis des principes de l’école laïque et républicaine » (...)
Le ou les auteurs détaillent ensuite précisément le contenu des cours menés par l’enseignant « entre le lundi 16 janvier et le vendredi 27 janvier » en dressant une liste des épisodes les plus connus de la vie de Jésus (une petite vingtaine), assortis ici ou là de commentaires outrés. Par exemple : « la lapidation de la femme adultère (avec explication de la lapidation comme mort très dure !!!) ». Ils relèvent aussi que l’enseignant a fait visiter l’église du village aux enfants et qu’il a – moins choquant pour les auteurs, semble-t-il – « l’habitude d’emmener les enfants faire chorale à l’église » en raison de l’acoustique du lieu (...)
...sérieusement, un courrier pareil n'aurait jamais dû déclencher quoi que ce soit...
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: LAÏCITE : LA FRANCE ECLAIRE-T-ELLE LE MONDE ?
Pitoyable, en effet.
On ne sait jamais, ces " gens là " peuvent être agressifs ...Ne voulant pas mettre nos enfants dans une position très inconfortable en allant nous adresser à leur maître,
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Page 1 sur 6 • 1, 2, 3, 4, 5, 6
Sujets similaires
» La laïcité en France, un athéisme d'Etat ? (Article du Monde)
» En quoi la venue de Jésus a-t-elle changé le monde ?
» Laïcité... parlons-en, si vous le voulez bien.
» La Laïcité, mère porteuse de l'islam ?
» Anna Muzitsuk, championne du monde des échecs ne participera pas au championnat du monde en Arabie Saoudite
» En quoi la venue de Jésus a-t-elle changé le monde ?
» Laïcité... parlons-en, si vous le voulez bien.
» La Laïcité, mère porteuse de l'islam ?
» Anna Muzitsuk, championne du monde des échecs ne participera pas au championnat du monde en Arabie Saoudite
Page 1 sur 6
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum