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Débats sur la mise par écrit des Evangiles

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Libremax Lun 19 Déc - 14:46

Les deux premiers tomes nous montrent clairement que la tradition protomassorétique n'a nullement le monopole de l'Écriture Sainte et que les manuscrits "fautifs" (par rapport à notre canon actuel) sont fréquents.

Oui, encore le judaïsme du Second Temple ne se réduisait-il pas à la seule tradition protomassorétique, dans lequel il ne faut pas voir non plus l'origine de toutes les traditions juives.
J'avais souvenir quant à moi d'une conservation rigoureuse du texte d'Isaïe (?), me semble-t-il, attestée justement par Qumran.

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Roque Lun 19 Déc - 19:40

C'est un sujet très intéressant, mais je suggère que la transmission proto- et massorétique fasse l'objet d'un sujet à part. En effet la transmission des Evangiles s'est faite essentiellement en grec et éventuellement en araméen.

Roque

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Invité Lun 19 Déc - 22:01

Bonjour à toutes et à tous,

Libremax a écrit:J'avais souvenir quant à moi d'une conservation rigoureuse du texte d'Isaïe (?), me semble-t-il, attestée justement par Qumran.

Si mes souvenirs sont bons, il y a deux grands témoins qumraniens, l'un très proche du texte massorétique et un autre truffé de fautes.

La question qui se pose à mes yeux est de savoir si notre exigence moderne d'exactitude textuelle (vis à vis de quel original ?) n'est pas complètement anachronique pour parler de la transmission des Très Saintes Écritures en quelque langues que ce soit, pour n'importe quelle Tradition.

À mon avis, je reconnais très personnel, seule la transmission orale répond "naturellement" à la question de la fidélité. (je songe notamment aux Védas que l'on date souvent du second ou troisième millénaire alors que l'Inde n'a consenti à l'écriture qu'au quatrième siècle... le tout avant l'ère chrétienne)

Le passage à l'écrit ne peut être qu'un renoncement auquel les communautés sont contraintes quand elles ne peuvent plus faire confiance à la personne qui parle et qu'elles doivent, dorénavant, donner crédit à la matérialité suspecte d'un écrit anonyme.

Très amicalement

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Libremax Lun 19 Déc - 23:01

pauline.px a écrit:La question qui se pose à mes yeux est de savoir si notre exigence moderne d'exactitude textuelle (vis à vis de quel original ?) n'est pas complètement anachronique pour parler de la transmission des Très Saintes Écritures en quelque langues que ce soit, pour n'importe quelle Tradition.

À mon avis, je reconnais très personnel, seule la transmission orale répond "naturellement" à la question de la fidélité. (je songe notamment aux Védas que l'on date souvent du second ou troisième millénaire alors que l'Inde n'a consenti à l'écriture qu'au quatrième siècle... le tout avant l'ère chrétienne)

Le passage à l'écrit ne peut être qu'un renoncement auquel les communautés sont contraintes quand elles ne peuvent plus faire confiance à la personne qui parle et qu'elles doivent, dorénavant, donner crédit à la matérialité suspecte d'un écrit anonyme.

Très amicalement

Oui, c'est une position que je défends.
Cela dit, il semblerait que certaines cultures soient plus aptes à transmettre, même par écrit une tradition plus fidèlement que d'autres.
Il n'y a qu'à comparer les différentes versions grecques et les versions araméennes (ainsi que leurs traces à travers les citations patristiques ou mêmes certaines versions grecques particulièrement proches)
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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Evangile de Jean, oralité

Message  Invité Ven 7 Juin - 12:17

[Sujet fusionné ; ce message répond à https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t1528p120-sd-que-tous-soient-un#40835 ]
Bonjour Roque,

Roque a écrit:
pauline.px a écrit:Ce genre de détails (souvent occultés par nos traductions) me confirment dans l'idée du caractère éminemment juif de l'évangile de saint Jean.
C'est à cette conviction que j'en étais resté. Cette empreinte très juive de Jean est d'ailleurs un problème pour l'approche historico-critique - je parle de celle qui est hostile au christianisme. En effet cette approche postule que les Evangiles ont été composés et même recomposés (!) à la deuxième, voire à la troisième génération après Jésus (fin du premier siècle et après ... Cf. : Introduction au Nouveau Testament de Daniel Marguerat) en milieu héllénistique.

Il n'est pas nécessaire d'être hostile au christianisme pour répéter ce Credo.

Néanmoins de plus en plus de voix s'élèvent pour réévaluer l'évangile selon saint Jean.
Par exemple, je viens d'acheter la revue Geo Histoire N° 9 consacré à Jésus.
Une illustration porte un commentaire confessant que c'est l'évangile selon saint Jean qui est le plus fiable chronologiquement.
J'ai parlé naguère du professeur Daniel Boyarin et de la professeure Marie-Françoise Baslez...

En fait, la critique reste scotchée au témoignage de l'arien Eusèbe de Césarée (et néglige le témoignage antérieur d'Origène) et elle se débat pour expliquer pourquoi un évangile tardif offrirait une chronologie si singulière, des détails concrets précis et serait attesté par le plus ancien fragment de manuscrit du Nouveau Testament.
On comprend mal encore les défauts de structure, etc... Pourquoi il ne prophétise pas la chute de Jérusalem... etc.

La datation très tardive n'explique rien de concret, elle ne sert qu'à sous-évaluer le message.

Roque a écrit:
outre que Jean n'est pas pris en compte part la belle théorie de la source Q ne s'apliquant qu'aux synoptiques, le plus tardif des Evangiles est irréductiblement juif (avec Matthieu, bien entendu).

Là encore, l'hypothèse de la source Q repose sur le refus forcené d'une transmission orale, transmission appuyée ou non sur des écrits, simple aide-mémoire, modeste catéchèse ou évangile plus construit...

Je m'étonne car je n'ai pas l'impression que les historiens procèdent ainsi pour les Védas dont peu de gens remettent en question leur haute origine en dépit de l'apparition fort récente de l'écriture en Inde.
Cela ne dérange personne de dater les Védas du XVème (voire XXIIème) siècle avant Jésus-Christ alors que l'écriture n'est apparue en Inde qu'au -IVème siècle.

À cet égard, l'oeuvre de Pierre Perrier (membre de l'Académie des Sciences) est fort contestable mais je ne l'ai jamais vue contestée précisément.
Peut-être l'un(e) de nos ami(e)s aurait des références prenant suffisamment au sérieux ces travaux pour les critiquer avec pertinence...

J'en profite pour noter que tous ceux qui essaient de théoriser autour de l' "invention du Christianisme au début du quatrième siècle" sont non seulement obligés de dévaloriser le corpus johannique mais de surcroît peinent à prendre en considération les vénérables Église orientales (Arménienne, Chaldéenne, Géorgienne, Éthiopienne, etc)

très cordialement

votre soeur
pauline

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Roque Lun 10 Juin - 20:55

pauline.px … comme c’est un sujet qui m’intéresse, j’essaie de répondre.

pauline.px a écrit:Il n'est pas nécessaire d'être hostile au christianisme pour répéter ce Credo
.
Veux-tu parler du Credo de Marguerat and Co ? Évidemment si croire que le « Jésus de la foi » est une fiction, c’est-à-dire qu’il n’est pas le Jésus historique … ou … si croire que dans les Évangiles nous ne possédons pas la Parole transmise – ni par Jésus, ni par les Apôtres – c’est être « chrétien », Marguerat and Co sont effectivement « chrétiens ». Cette façon « Marguerat » d’être « chrétien » - n’a plus grande chose à voir ni avec une réalité quelconque, ni avec aucune branche historique du christianisme (arianisme compris). Je lui dénie cette dénomination. Note bien que j'ai lu le livre auquel j’ai fait allusion (bien malgré moi d'ailleurs).

Pour « l’hostilité » au christianisme, ce serait trop long. C’est dans la méthode. Disons que l’approche n’est pas « rationnelle » et sereine, mais rationaliste et militante. Deux exemples : le livre en arrive à affirmer que certains propos n’ont pas été tenus par Jésus sur des arguments de style et de doctrine ou en arrive à écarter certains autres versets sur l’argument que ce sont des versets « confessants ». Il me semble que la « critique de la forme » (Formgeschichte) équilibrée ne permet que de questionner et de mettre en doute des versets, non de les nier ou d’en écarter certains. Cette critique de la forme littéraire est un échauffage intellectuel trop fragile pour permettre rationnellement de telles conclusions dans un ensemble si complexe de questions combinées. Cependant Marguerat and Co ne se gênent pas pour trancher contre la réalité de Jésus, contre Sa Parole tout en bénéficiant d'une étiquette " chrétienne " qui est à mon avis usurpée Il y a un parti pris très net dans ce livre !

Mais avec le temps, une approche historico-critique plus sereine - compatible avec la foi a fait son apparition. Même Benoit XVI y fait allusion dans ses livres sur Jésus, par exemple, comme il parle du fait que le christianisme n’est pas un fondamentalisme. Ce dont je me réjouis.
pauline.px a écrit:En fait, la critique reste scotchée au témoignage de l'arien Eusèbe de Césarée (et néglige le témoignage antérieur d'Origène) et elle se débat pour expliquer pourquoi un évangile tardif offrirait une chronologie si singulière, des détails concrets précis et serait attesté par le plus ancien fragment de manuscrit du Nouveau Testament.
A quel témoignage d’Eusèbe de Césarée fais-tu allusion ? Est-ce celui-ci ?
- « Au temps où Luc et Marc éditaient un Evangile par écrit à cause de leur éloignement de leur communauté, Jean continuait encore sa prédication tout le temps sans mise par écrit. » (Eusèbe, H.E. 3, 24, 8) ;

Sur l’Evangile de Jean, il en existe d’autres comme :
- « La première mise par écrit de l’Evangile de Jean avait été faite à Antioche. » (Ephrem, memra sur Jean) ;
- « Jean l’évangéliste fit mettre par écrit trente ans après l’Ascension du Seigneur à Ephèse. » (Isho Dad) ;
- « Jean a été mis par écrit la 32ème année après l’Ascension de notre Seigneur. » (Codex géorgien 19) ;
- « Jean lui aussi a voulu livrer par écrit la tradition qui manquait aux autres évangélistes, il s’est efforcé de les compléter et de mettre les paroles et les actes dans l’ordre où ils avaient été dits et faits par le Seigneur. Il a par contre laissé de côté beaucoup de choses déjà dites par ses compagnons. » (Théodore Bar Koni, Scholies T. 7).

Plusieurs témoignages parlent de cette récitation par coeur des Apôtres :
- « Aussi Matthieu parmi les Hébreux produisit au dehors aussi dans leur propre dialecte un texte écrit d’Evangile, Pierre et Paul, étant en train parmi les Romains d’évangéliser et de fonder Ecclésia. Après le départ en exil de ceux-ci, Marc, le disciple et traducteur de Pierre, lui aussi nous transmit une mise par écrit de ce qu’était en train de prêcher Pierre. Et Luc aussi accompagnateur de Paul établit dans un manuscrit (rouleau) l’Evangile qu’était en train de prêcher Paul. Après Jean … aussi livra au-delà de son entourage un texte … » (A .H III.1.1) ;
- « Pierre annonçait la Parole publiquement à Rome et proférait l’Evangile sous l’inspiration de l’Esprit. Ceux qui étaient présents, et ils étaient nombreux, demandèrent à Marc, vu qu’il l’accompagnait depuis longtemps et savait par cœur les choses dites de les mettre par écrit. Il le fit et donna « l’Evangelion » à ceux qui le demandaient. Ce qu’ayant appris, Pierre ne fit rien pour empêcher, ni pour pousser ce projet. » (Clément d’Alexandrie dans Eusèbe H.E III).
:arrow: https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t47-debats-sur-la-mise-par-ecrit-des-evangiles#438
Papias, évêque qui fut disciple de Jean, déclarait -selon Eusèbe- que " si quelque part venait quelqu'un qui avait été dans la compagnie des presbytres, je m'informais des paroles des presbytres : ce qu'ont dit André ou Pierre, ou Philippe, ou Thomas, ou Jacques, ou Jean, ou Matthieu, ou quelque autre des disciples du Seigneur ; et ce que disent Aristion et le presbytre Jean, disciples du Seigneur. Je ne pensais pas que les choses qui proviennent des livres me fussent aussi utiles que ce qui vient d'une parole vivante et durable"...
:arrow: https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t47-debats-sur-la-mise-par-ecrit-des-evangiles#438

A quel témoignage d’Origène fais-tu allusion. Je ne me connais pas. En quoi est-il différent d’Eusèbe – notamment sur l’Evangile de Jean ?
pauline.px a écrit:Là encore, l'hypothèse de la source Q repose sur le refus forcené d'une transmission orale, transmission appuyée ou non sur des écrits, simple aide-mémoire, modeste catéchèse ou évangile plus construit...
Pour être exact, l’idée qu’a l’équipe de Marguerat and Co sur la tradition orale est très vague et peu structurée. Ils n’ont manifestement ni étudié, ni pris au sérieux cette éventualité. Ils restent cramponnés sur le texte grec comme la plupart des universitaires « chrétiens » ou non. En un mot leur idée de la chose ne dépasse pas l'idée reçue sur la transmission orale des historiettes, fables ou chansons de nos grands-mères dans notre milieu européen.
pauline.px a écrit:À cet égard, l'œuvre de Pierre Perrier (membre de l'Académie des Sciences) est fort contestable mais je ne l'ai jamais vue contestée précisément.
A cet égard … signifie – pour moi : « de ce point de vue » ? Bien au contraire de ton précèdent paragraphe, tout le travail de Pierre Pierrier plaide pour l’existence d’une tradition orale contemporaine de Jésus. Une tradition pas du tout informelle, mais solidement organisée et vivante dans la tradition rabbinique. Sa thèse est que Jésus a simplement utilisé cette tradition d’élaboration, de mémorisation et des transmissions des témoignages oraux. A la base, le récit évangélique est un témoignage. Ses thèses sont jusqu'à ce jour assez confidentielles.
pauline.px a écrit:Peut-être l'un(e) de nos ami(e)s aurait des références prenant suffisamment au sérieux ces travaux pour les critiquer avec pertinence...
Je trouve très intéressantes les thèses de Pierre Perrier, mais je peux dire ce qui fait que mon adhésion est encore conditionnelle. Les « faiblesses » des thèses de Pierre Perrier sont à mon sens :
1. Le fait qu’on n’ait jamais découvert de manuscrit des Évangiles en araméen du premier et du deuxième siècle plaide contre l'hypothèse d'une mise par écrit d'un texte araméen avant le texte grec. Après tout, il y avait des textes araméens à Qumran, pourquoi n'en a-t-on par retrouvé parmi les judéo-chrétiens - ne serait-ce que des papyri ?
2. La nature de la « preuve » de l'authenticité des textes araméens avancée par Pierre Perrier (le tissage du texte araméen en perles et colliers, la symétrie, la rythmique, etc ...) est d'accès impossible et réservées aux super spécialistes. Du point de vue d'une amateur c'est aussi au moins subjectif que l'analyse de la forme littéraire ;

L’impression d’ensemble : il donne l’impression d’avoir un parti pris minimaliste (dates de rédaction très proches de l’Ascension) qui est l’inverse du parti pris maximaliste, par exemple de l’école de Marguerat (rédaction fin du premier siècle, voire première moitié du deuxième siècle).

Mais à mon sens les faiblesses des thèses de Marguerat sont encore plus importantes. Ma position actuelle est que ce sont des thèses de recherche et qu’il faut encore attendre. C’est le temps qui fera que d’autres chercheurs adopteront, réaménageront ou abandonneront des éléments des thèses de Pierre Perrier. En attendant il a un « élève » prometteur qui a déjà traduit en français la récitation orale à plusieurs voix, rythmée et gestuée (en araméen : Karozoutha) de trois Évangiles en araméen (Matthieu, Marc et Luc). Ça existe en librairie à Paris, j’en sors.
pauline.px a écrit:On comprend mal encore les défauts de structure, etc... Pourquoi il ne prophétise pas la chute de Jérusalem... etc.
Pour ce qui est de cette structure de Jean, Pierre Perrier a proposé une explication. Il pense avec sa théorie des « colliers évangéliques » pouvoir reconnaître les ruptures dans les chaînes régulières de récitation. Avec les témoignages (dont certains ci-dessus) et avec l’étude des strates de rédaction, Pierre Perrier repère 4 étape de rédaction à partir d’un noyau initial : il témoignage sur la mort et la résurrection du Seigneur. Il vaut mieux lire les livres de Pierre Perrier.

Je ne peux pas terminer sans recommander sur le même sujet le travail de Libremax sur le forum partenaire d'où je tire ceci :
La première karozoutha (récital gestué de la Parole à plusieurs voix) des Apôtres est, comme nous le montre le début des Actes, celle de Pierre et Jean, qui prêchaient tous les deux dans le Temple. C’est un récital à deux voix, un témoignage double, conforme comme tel à la coutume juive. Par la suite, Pierre et Jean seront amenés à enseigner séparément. Chacun des deux conservera son témoignage propre et l’enrichira avec des récits supplémentaires.
Très probablement avant l’an 40, Matthieu termine une collection qui servira de lectionnaire liturgique pour les chrétiens de Jérusalem, ciselée à la perfection pour la mnémotechnique et le calendrier juifs. C’est l’évangile de Matthieu.
Peu de temps après, Pierre enseigne aux Romains de Césarée une catéchèse allégée des contenus qui font trop appel à la culture juive. A leur demande, il accepte qu’il en soit écrit une traduction grecque. C’est l’évangile de Marc.
Le témoignage de Jean, plus mystique que celui de Pierre, donnera lieu progressivement à un texte particulièrement travaillé. Jean s’inspire de la structure du Cantique des Cantiques et compose un véritable filet de colliers, un entrecroisement de perles qui peut se lire dans plusieurs sens. Il en établit deux moutures, enrichissant sa première karozoutha des témoignages de Marie et des ultimes enseignements du Maître. Il en fera une mise par écrit en 60, en quittant sa communauté d’Ephèse. C’est l’évangile de Jean.
Durant son ministère, Jésus appelle les 72 et les envoie à travers le pays comme les Apôtres. Après sa conversion, Paul est formé par Ananie, l’un des 72, qui sont le deuxième corps de missionnaires après les Douze. Paul se retire au désert durant trois ans, et y compose une karozoutha structurée selon un modèle qu’on retrouve souvent dans les enseignements des rabbis pharisiens. Il fait contrôler son témoignage par les Apôtres. Luc, son assistant, recueille sa prédication, y ajoute des témoignages de Marie et de Jean, et le fera non seulement contrôler par les Apôtres mais compléter et homogénéiser sur le texte de Matthieu. C’est l’évangile de Luc.
:arrow: http://www.dialogueislam-chretien.com/t228-les-colliers-evangeliques

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Message  Libremax Lun 10 Juin - 22:01

Je me permets de faire une petite réponse...

Roque a écrit: Je trouve très intéressantes les thèses de Pierre Perrier, mais je peux dire ce qui fait que mon adhésion est encore conditionnelle. Les « faiblesses » des thèses de Pierre Perrier sont à mon sens :
1. Le fait qu’on n’ait jamais découvert de manuscrit des Évangiles en araméen du premier et du deuxième siècle plaide contre l'hypothèse d'une mise par écrit d'un texte araméen avant le texte grec. Après tout, il y avait des textes araméens à Qumran, pourquoi n'en a-t-on par retrouvé parmi les judéo-chrétiens - ne serait-ce que des papyri ?
2. La nature de la « preuve » de l'authenticité des textes araméens avancée par Pierre Perrier (le tissage du texte araméen en perles et colliers, la symétrie, la rythmique, etc ...) est d'accès impossible et réservées aux super spécialistes. Du point de vue d'une amateur c'est aussi au moins subjectif que l'analyse de la forme littéraire ;

L’impression d’ensemble : il donne l’impression d’avoir un parti pris minimaliste (dates de rédaction très proches de l’Ascension) qui est l’inverse du parti pris maximaliste, par exemple de l’école de Marguerat (rédaction fin du premier siècle, voire première moitié du deuxième siècle).

Mais à mon sens les faiblesses des thèses de Marguerat sont encore plus importantes. Ma position actuelle est que ce sont des thèses de recherche et qu’il faut encore attendre. C’est le temps qui fera que d’autres chercheurs adopteront, réaménageront ou abandonneront des éléments des thèses de Pierre Perrier. En attendant il a un « élève » prometteur qui a déjà traduit en français la récitation orale à plusieurs voix, rythmée et gestuée (en araméen : Karozoutha) de trois Évangiles en araméen (Matthieu, Marc et Luc). Ça existe en librairie à Paris, j’en sors.

Il faut rappeler ce que la conservation des manuscrits de Qumran ou même de Nag Hammadi a d'exceptionnel dans les pays sud-méditerranéens. Le climat y est tout bêtement particulièrement hostile. Il existe en outre des témoignages d'une volonté déterminée de brûler tout manuscrit chrétien lors des persécutions juives, même si ceux-ci contenaient le nom de Dieu, ce qui témoigne d'un acharnement particulier, là aussi.
Il est très significatif que l'argument du tissage du texte araméen soit inaccessible aux non-initiés : c'est un argument dont le principe de base est purement linguistique, et les biblistes araméophones en occident sont rares. Tout le monde se base sur le grec et le latin, et un peu l'hébreu. Quand on voit l'écart gigantesque entre ces deux premières et l'araméen sur l'arbre généalogique des dialectes, on comprend qu'il y a un monde entre nos textes et celui des chaldéens. De fait, Pierre Perrier n'est pas du tout seul à parler de cet argument. Il a travaillé avec des évêques chaldéens, et l' "élève" dont il est question prend totalement la relève dans ses travaux. Il s'appelle Frédéric Guigain, et malgré qu'il soit d'origine française, il est prêtre maronite.
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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Invité Mar 11 Juin - 11:16

Bonjour Roque

Le Christ est ressuscité !

Pour le Hors Sujet....

Roque a écrit:Évidemment si croire que le « Jésus de la foi » est une fiction, c’est-à-dire qu’il n’est pas le Jésus historique … ou … si croire que dans les Évangiles nous ne possédons pas la Parole transmise – ni par Jésus, ni par les Apôtres – c’est être « chrétien »
C'est complexe.
J'ai rencontré des chrétiens pratiquants qui confessaient un Jésus purement théologique. Sans soulever de difficultés, le Jésus décrit par le Nouveau Testament pouvait, à leur yeux, être une fiction.
Pour ce christianisme désincarné, seul le "message de foi, d'amour et d'espérance" importe.

Dans la discussion je percevais bien que non seulement ils me trouvaient naïve mais encore ils me considéraient comme une attardée engluée dans une mentalité prélogique. Mon Christianisme à moi leur paraissait corrompu par le merveilleux, la superstition, etc. Bref ! par tout ce qui a été inventé et couché par écrit dans le Nouveau Testament.
Ma foi lamentable n'était que croyance sentimentale en des fables alors que la vraie foi, épurée, a su se dégager de cette gangue un peu ridicule pour pointer vers l'essentiel.

Roque a écrit:
Disons que l’approche n’est pas « rationnelle » et sereine, mais rationaliste et militante.
Je crois que c'est plus simple.
Il y a une forte pression des pairs.
Pour paraître sérieux désormais, l'exégèse et même l'herméneutique doivent obligatoirement poser le principe que la Bible en général et les Évangiles en particulier comportent une bonne part d'exagération et d'invention. Pour faire sérieux, il faut poser que les rédacteurs qui se sont succédé n'ont cessé de remanier le corpus à l'aune de leur préoccupations du moment, des tensions au sein de leur communauté, des relations avec les autres communautés, etc.

Un auteur sérieux se révèlera par la qualité et la pertinence des soupçons dont il nourrit son travail.
Ne pouvant pas tout rejeter du corpus biblique au risque de se retrouver au chômage, l'auteur sérieux doit opérer un tri savant entre l'authentique et le frelaté (Plus l'authentique est rare dans l'océan de frelaté et plus il apparaît comme la perle précieuse...). Pour ce faire, il devra déployer tout son talent à énumérer des règles précises, scientifiques, chirurgicales (et surtout consensuelles) et consacrer toute sa rigueur à les mettre parfaitement en oeuvre.

Roque a écrit:
A quel témoignage d’Eusèbe de Césarée fais-tu allusion ? Est-ce celui-ci ?
- « Au temps où Luc et Marc éditaient un Evangile par écrit à cause de leur éloignement de leur communauté, Jean continuait encore sa prédication tout le temps sans mise par écrit. » (Eusèbe, H.E. 3, 24, 8) ;
J'avais en tête le passage où Eusèbe évoque le témoignage de Clément d'Alexandrie selon lequel le quatrième évangile aurait été rédigé pour compléter ou corriger les synoptiques.

Inversement, il y aurait cette phrase sibylline d'Origène :
«L’Evangile selon saint Jean est le premier des Evangiles sinon l’Evangile primitif. » (Origène, PG 4, 5-6).
Hélas, la référence de la Patrologie Grecque ne m'a permis de vérifier l'authenticité de cette citation.

C'est d'ailleurs un travail de titan de vérifier l'océan de citations sur ce sujet.

Roque a écrit:
Plusieurs témoignages parlent de cette récitation par coeur des Apôtres :
À mes yeux, la circulation d'un véritable corpus oral est une évidence.
1 ) Dans toutes les Traditions religieuses, on apprend par coeur des textes bien qu'ils existent sous forme écrite.
2 ) Le passage de l'oral à l'écrit me paraît extrêmement délicat, car il signifie que l'on n'accorde plus sa confiance en un humain inspiré qui récite et qui peut être contredit s'il se trompe mais en un objet.
... des formules témoignent bien de cette difficulté d'authentifier un écrit :
Jean 21, 24 C'est ce disciple-là qui rend témoignage de ces choses, et qui a écrit ces choses, et nous savons que son témoignage est vrai.
Apocalypse 22, 18 Moi, je rends témoignage à quiconque entend les paroles de la prophétie de ce livre, que si quelqu'un ajoute à ces choses, Dieu lui ajoutera les plaies écrites dans ce livre;

3 ) Je vois mal une prédication itinérante à base de lecture de manuscrits. Les "prophètes " et "prophétesses" du Nouveau Testament s'appuyaient très probablement sur une Tradition Orale structurée.


Roque a écrit:A cet égard … signifie – pour moi : « de ce point de vue » ?
Au temps pour moi... Je l'ai employé maltapropos dans le sens de "à ce sujet, en regardant la même chose" pas "de ce point de vue".

Roque a écrit:
Les « faiblesses » des thèses de Pierre Perrier sont à mon sens :
1. Le fait qu’on n’ait jamais découvert de manuscrit des Évangiles en araméen du premier et du deuxième siècle plaide contre l'hypothèse d'une mise par écrit d'un texte araméen avant le texte grec.(...)
2. La nature de la « preuve » de l'authenticité des textes araméens avancée par Pierre Perrier (...) est d'accès impossible et réservées aux super spécialistes. Du point de vue d'une amateur c'est aussi au moins subjectif que l'analyse de la forme littéraire.
Je partage ces réserves.
Et j'attends les progrès des uns et des autres...


Enfin, au risque de la provocation, je deviens très dubitative quant à la place de l'araméen dans la prédication évangélique.
Par exemple, je m'interroge sur les langues pratiquées lors du séjour mouvementé de saint Paul à Jérusalem relaté en Actes 21, 17 +.
Puisque sont mis en valeur le grec (ελληνιστι) et le dialecte hébraïque (τη εβραιδι διαλεκτω), qui surprennent ou attirent l'attention des auditeurs, je crois comprendre que le reste des échanges se déroule en une troisième langue. Dès lors, faut-il vraiment comprendre que c'est en araméen que saint Paul s'adresse au Juifs puis au Sanhédrin ?
Dans le même esprit je m'interroge sur les citations évangéliques "en araméen dans le texte"... Si tout le monde parle araméen, comment et pour quel motif furent isolées ces citations ?

En définitive, sur votre Hors Sujet, je dispose plus de doutes et de questions que de réponses.

très cordialement

votre soeur
pauline

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Evangile de Jean, oralité

Message  Libremax Mar 11 Juin - 11:54

pauline.px a écrit:
Enfin, au risque de la provocation, je deviens très dubitative quant à la place de l'araméen dans la prédication évangélique.
Par exemple, je m'interroge sur les langues pratiquées lors du séjour mouvementé de saint Paul à Jérusalem relaté en Actes 21, 17 +.
Puisque sont mis en valeur le grec (ελληνιστι) et le dialecte hébraïque (τη εβραιδι διαλεκτω), qui surprennent ou attirent l'attention des auditeurs, je crois comprendre que le reste des échanges se déroule en une troisième langue. Dès lors, faut-il vraiment comprendre que c'est en araméen que saint Paul s'adresse au Juifs puis au Sanhédrin ?
Dans le même esprit je m'interroge sur les citations évangéliques "en araméen dans le texte"... Si tout le monde parle araméen, comment et pour quel motif furent isolées ces citations ?

Bonjour chère Pauline,
l'hypothèse de la prédication araméenne de l'Evangile part du principe que l'araméen est la langue vivante des hébreux en Palestine à l'époque de Jésus.
A tel point que l'appellation "dialecte hébraïque" ne signifie pas "en hébreu", mais bien "en araméen", c'est à dire dans la langue parlée par les hébreux. Le grec, qui est la langue véhiculaire de l'Empire, est bien sûr souvent utilisée pour communiquer dans le commerce et la politique avec les colons, c'est pourquoi Paul parle grec au tribun. Mais il n'y a pas de troisième langue dans cet épisode.
Quant aux citations "en araméen dans le texte", il est inexact de dire que tout le monde parlait araméen : la Bonne Nouvelle a vite été adressée à des convertis uniquement hellénophones, et c'est précisément le problème qui est à l'origine de la désignation des diacres au début des Actes. Par ailleurs, il est très significatif de constater que ces citations sont purement et simplement absentes du texte araméen de la Peshytta : les traductions du genre "talitha koum, c'est à dire jeune-fille, lève-toi" sont des gloses ajoutées dans le texte grec. Les citations sont à mon avis des formules qui sont devenues rituelles, et qui ont été conservées telles quelles dans le texte grec à dessein.
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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  -Ren- Mar 11 Juin - 13:30

pauline.px a écrit:Le Christ est ressuscité !

Pour le Hors Sujet....
Il est vraiment ressuscité !

Le HS n'est plus, comme vous pouvez le constater ;)



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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Roque Mar 11 Juin - 17:26

pauline.px a écrit:Le Christ est ressuscité !

Roque a écrit:Évidemment si croire que le « Jésus de la foi » est une fiction, c’est-à-dire qu’il n’est pas le Jésus historique … ou … si croire que dans les Évangiles nous ne possédons pas la Parole transmise – ni par Jésus, ni par les Apôtres – c’est être « chrétien »
C'est complexe.
J'ai rencontré des chrétiens pratiquants qui confessaient un Jésus purement théologique. Sans soulever de difficultés, le Jésus décrit par le Nouveau Testament pouvait, à leur yeux, être une fiction.
Pour ce christianisme désincarné, seul le "message de foi, d'amour et d'espérance" importe.

Dans la discussion je percevais bien que non seulement ils me trouvaient naïve mais encore ils me considéraient comme une attardée engluée dans une mentalité prélogique. Mon Christianisme à moi leur paraissait corrompu par le merveilleux, la superstition, etc. Bref ! par tout ce qui a été inventé et couché par écrit dans le Nouveau Testament.
Ma foi lamentable n'était que croyance sentimentale en des fables alors que la vraie foi, épurée, a su se dégager de cette gangue un peu ridicule pour pointer vers l'essentiel.

Roque a écrit:
Disons que l’approche n’est pas « rationnelle » et sereine, mais rationaliste et militante.
Je crois que c'est plus simple.
Il y a une forte pression des pairs.
Pour paraître sérieux désormais, l'exégèse et même l'herméneutique doivent obligatoirement poser le principe que la Bible en général et les Évangiles en particulier comportent une bonne part d'exagération et d'invention. Pour faire sérieux, il faut poser que les rédacteurs qui se sont succédé n'ont cessé de remanier le corpus à l'aune de leur préoccupations du moment, des tensions au sein de leur communauté, des relations avec les autres communautés, etc.

Un auteur sérieux se révèlera par la qualité et la pertinence des soupçons dont il nourrit son travail.
Ne pouvant pas tout rejeter du corpus biblique au risque de se retrouver au chômage, l'auteur sérieux doit opérer un tri savant entre l'authentique et le frelaté (Plus l'authentique est rare dans l'océan de frelaté et plus il apparaît comme la perle précieuse...). Pour ce faire, il devra déployer tout son talent à énumérer des règles précises, scientifiques, chirurgicales (et surtout consensuelles) et consacrer toute sa rigueur à les mettre parfaitement en oeuvre.
Chère pauline.px, je crois retrouver ici ce qui m'a - un temps - fait courber la tête devant la pression et le dénigrement de notre monde intellectuel dit " moderne ". Pourquoi est-ce complexe d'affirmer Jésus vraiment ressuscité dans la chair ou simple finalement de suivre la pente du " prêt à penser " de notre monde sécularisé ? Car SI le dogme chrétien (le même pour toi et pour moi, je crois) est un " prêt à penser ", ce " christianisme désincarné, où seul le "message de foi, d'amour et d'espérance" importe " est un autre prêt-à-penser. Tu commences toujours par : " Le Christ est ressuscité ! " ... cela n'a évidemment pas de sens dans le " christianisme désincarné " de ces beaux intellectuels prétenduement " chrétiens " ! Je suppose qu'on est d'accord, alors pourquoi " rougir " de notre foi ?

Pour moi l'affirmation de la foi au Christ Ressuscité est simple et ceux qui n'y parviennent pas utilisent tout un tas de subterfuges pour masquer leur échec et leur rejet pratique du Fils Unique Engendré venu nous relever. Je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi ces gens n'avouent pas qu'ils ont des convictions différentes des chrétiens, par exemple pourquoi ils ne disent pas qu'ils sont ariens ou adeptes de l'Ere du Verseau ? Ont-ils des intérêts qui les empêchent de se détacher ouvertement du christianisme. Si c'est le cas, c'est pitoyable.

Le " christianisme désincarné " n'est plus qu'une vague doctrine où chacun se fait " un menu à la carte " (c'est le croyant qui choisit Dieu et non l'inverse), une philosophie New Age, un docétisme moderne qui rejette non seulement la Chair et la Croix du Christ, mais encore Sa Parole transmise par les Apôtres à la suite Jésus Notre Seigneur et Sauveur. Il faut bien voir que le " christianisme-Marguerat " réduit les Evangiles est en un amas de miettes incohérentes - dont le scribe chrétien et les lecteurs ultérieurs peuvent faire à peu près ce qu'ils veulent en fonction de leurs besoins du moment (Sitz im Leben). Pour moi, ce " christianisme désincarné " est une hérésie. Une hérésie non dénoncée comme telle dans le monde protestant, mais une hérésie quand même. Et je dirais même : le dernier pas avant l'apostasie, l'athéïsme complet ! Il faut demander à ces " pratiquants " s'ils croient sincèrement en Dieu, je suppose que pour la majorité la réponse est non. Et pour un prétendu " chrétien ", à mon sens, c'est rédibitoire. Le " christianisme libéral " c'est bien cela.

C'est là que se situent - selon moi - les ennemis les plus dangereux pour la foi : à l'intérieur de l'Eglise(il y a de ces faux-frères même parmi le clergé !), ennemis de la foi au même niveau que les rigoristes hypocrites qui moralisent et durcissent à l'extrême un pseudo message évangélique pour révolter et désespèrer (scandalier) les hésitants et les faibles ! Les athées militants sont très loin derrière car eux au moins affichent leurs convictions en clair et ont l'entière et juste liberté de se situer hors de la foi, hors de l'Eglise. Eux, au moins, sont honnêtes !

Pour d'autres lecteurs que toi, pauline.px, j'insère ce petit éclaircissement sur le docétisme :
pauline.px a écrit:Le docétisme (du grec dokein, paraître) désigne généralement un ensemble de courants de pensées christologiques du début du christianisme, relevant du courant christologique sarx pour lequel le christ se faisant « chair » ne signifie pas qu'il se fait « homme ». Les théologiens docètes interprètent littéralement le verset de l’évangile selon Jean où il est écrit2 que « la Parole se fit chair ». Au terme d'une étape métaphysique supplémentaire, il en résulte que, selon eux, Jésus n'a pas de corps physique, à l'instar d'un Esprit, et que, de ce fait, la crucifixion est une illusion. En d'autres termes, l'aspect humain du Christ est simple illusion et n'a pas de réalité objective.
:arrow: http://fr.wikipedia.org/wiki/Doc%C3%A9tisme


Si, par un heureux hasard, tu retrouves, un jour, ces sources, peux-tu les rapporter, ici dans ce sujet, car la citation exacte des textes en est toujours très intéressante :
pauline.px a écrit:J'avais en tête le passage où Eusèbe évoque le témoignage de Clément d'Alexandrie selon lequel le quatrième évangile aurait été rédigé pour compléter ou corriger les synoptiques.

Inversement, il y aurait cette phrase sibylline d'Origène :
«L’Evangile selon saint Jean est le premier des Evangiles sinon l’Evangile primitif. » (Origène, PG 4, 5-6).
Hélas, la référence de la Patrologie Grecque ne m'a permis de vérifier l'authenticité de cette citation.

C'est d'ailleurs un travail de titan de vérifier l'océan de citations sur ce sujet.

Roque

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Débats sur la mise par écrit des Evangiles - Page 6 Empty Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles

Message  Roque Mar 11 Juin - 19:30

Maintenant, j'avais commencé une petit étude de ce livre da Marguerat (à l'instigation de Ahouva) et comme d'hab ... je ne l'ai pas terminé. Mais voici au moins une partie un peu rédigée et qui tente de montrer l'impact des thèses de Pierre Perrier sur les thèses de Marguerat and Co.  

L’INTRODUCTION AU NOUVEAU TESTAMENT (INT), OUVRAGE COLLECTIF DIRIGE PAR DANIEL MARGUERAT repose sur plusieurs thèses :

1. Le postulat des micro-unités littéraires (INT page 15), c'est-à-dire qu’avant la mise par écrit, la tradition était fragmentée en micro-unités, quelle provienne de l’oral ou – essentiellement - de l’écrit tout en reconnaissant que certaines « collections » ont pu être mises à disposition des évangélistes : paroles prophétiques, collection de miracles, de paraboles ou de controverses ;

2. Le postulat de l’écrit (INT page 11), c'est-à-dire que l’évangile n’a été constitué en récit continu que lors de sa mise par écrit – pas avant ;

3. La contribution significative de la culture hellénistique à la conception et à l’élaboration des Evangiles, c’est à dire : à travers la langue, le modèle littéraire (biographie et arétalogie grecques) et les catégories philosophiques (INT page 17). Le début du passage à la traduction en grec est situé dans le judaïsme hellénistique – dans un espace non palestinien (INT page 13) - avec l’envoi de Barnabé à Antioche en 34 (INT page 17) ;

4. Le souvenir de Jésus-Christ (anamnèse) est une « construction théologique» (INT page 21), moins élégamment dit : une construction à visée de propagande qui n’est pas destinée, en priorité, à rappeler les faits et gestes d’un mort. Les faits et gestes du « Jésus terrestre » sont interprétés dans le souvenir du « Jésus élevé » sur les autels. Cette construction « théologique » repose, pour partie, sur le fait qu’il n’y a pas d’identité nécessaire entre les deux « Jésus » : entre le « Jésus terrestre » et le « Jésus élevé ». En clair ce que Marguerat appelle pudiquement « construction théologique » est une imposture. Autres formules trompeuses de Marguerat : dire que la " remémoration est une construction théologique " signifie qu'on a perdu le lien avec la mémoire originale et qu'on est bien obliger d'inventer pour combler cette parte et parler de " christologie narrative " signifie que le scribe chrétien " brode " à loisir un récit " à la manière de Jésus " selon les besoin du moment, selon la situation de vie (Sitz im Leben), autrement dit : c'est un  bobard pieux ;

5. Une tradition orale qui s’est perpétuée pendant des siècles par les apocryphes, « surtout dans les milieux étrangers à la Grande Eglise, où se prépare au deuxième siècle l’orthodoxie chrétienne » (INT page 27). C’est « logique » puisque du point de vue de l’INT, les Evangiles canoniques, eux, dérivent de l’écrit.


IMPACT DES THESES DE PIERRE PERRIER SUR LES CINQ POSTULATS DE L'INT

1. La thèse des chaînes de récitation litaniques à plusieurs voix (colliers évangéliques) selon un procèdé traditionnel d'élaboration des témoignages déborde complètement " le postulat des micro-unités littéraires " et accrédite l'éventualité d'enchâinements plus longs dans le cadre liturgique. Ces enchaînements longs (plusieurs heures éventuellement) sont ce que les araméens appellent les Karozoutha. Définition de Karozoutha : proclamation d'un texte oral enchaîné selon un ordrage [notion d'ordonnancement et de comptage des perles de récitation] bien construit lui donnant une unité. Ce mot déigne ausi bien la litanie des 18 bénédictions des offices du Temple (ou à  la synagogue) qu'une litanie de textes plus importants les uns que les autres ou montés en tresse [ordonnancement entrelacé et polysémique - spécialité de Jean]. Les [] sont de moi, le reste de Pierre Perrier.

[Les similitudes et différences entre les quatre Evangiles peuvent s'expliquer par le fait que chaque Karozoutha résulte en quelque sorte d'une " assimilation personnelle dans la chair " par chaque récitant apostolique de la Parole du Rabbi Jésus. Cette " réalisation personnelle " est d'abord destinée à être imitée dans la pratique et la manducation de la Parole par les disciples à la suite des Apôtres. La " logique de l'oralité " fait qu'il s'agit d'une mise en pratique et d'une " incarnation " de la Torah écrite - celle des Juifs - et non un texte destiné à complèter la Loi de Moïse - contrairement à ceux qui ne comprennent les Evangiles que comme un texte de " logique écrite ".]  

2. La thèse de l'oralité traditionnelle et populaire capable d'élaborer les témoignages - même domestiques comme les nécrologies - en courtes séquences, sortes de pastiches modelées sur les textes bibliques pré-existants parmi les juifs du premier siècle (notamment les femmes) invalide complètement le postulat de " l'écrit, d'abord. " Cette thèse introduit l'idée d'une strate de texte oral récité pouvant avaoir existé avant la mise par écrit - même en araméen. Cet art du " pastiche " c'est le pesher. Définition du pesher : procèdé oral consistant à exprimer une situation présente en empruntant les termes et les formules d'un passage de l'Ancien Testament. L'art du décompte des perles de récitation, d'où la capacité de retrouver les versets sur les rouleaux et donc de la mémoire des textes, c'est l'art du sofer - en majorité les femmes qui sont dites " mères de mémoire ". Je n'ai pas la définition, mais le sfar est le rouleau où se décompte et s'enchaînent les textes. C'est l'écrit de référence.

3. La thèse de l'origine de l'élaboration des Evangiles en milieu judéo-chrétien contredit directement le postulat de la conception et de l'élaboration des Evangiles en milieu hellénistique. Cette élaboration en milieu juif selon le procèdé rabbinique traditionnel de l'époque est cohérent avec une éventuelle élaboration dès le début du premier siècle - et même du vivant de Jésus : notamment à l'occasion de l'enseignement des " 72 " (futurs " diacres "). Si on admet que - globalement - la mise par écrit des Evangiles de Matthieu, Marc et Luc en grec se situe dans une période entre +60 et +90, cette thèse rend tout à fait imaginable une strate orale constituée en Karozoutha, puis mise par écrit deux ou trois décennies avant cette période. Lorsque Marguerat prétend que les Evangiles relèvent du style de l’arétalogie, c’est-à-dire du style de récit des hauts faits merveilleux des héros mythiques ou est une sous-catégorie de biographie (INT p. 51), on se demande si cette affirmation est sérieuse ; ;

4. La thèse du trajet de remémoration des Apôtres induit par Jésus, Lui-même, construisant une mémoire pratique structurée par : 1. Par les multiples allers et retours entre la Galilée et Jérusalem chaque année, 2. Par la répétition des mêmes trajets et étapes sur 3 ans ; 3. Par l'articulation des dits et gestes de Jésus - dans la vie - avec les textes fixes et bien connus des juifs de la lirurgie synagoguale ou du Temple. Cette thèse donne une sens complètement différent à la " remémoration des Apôtres " assimilée - par l'équipe de Marguerat - a une perte de la Parole d'origine avec l'introduction d'une intention apologétique, voire idéologique d'affirmer le divinité de Jésus ou pour " raconter la vie du Fils de Dieu plutôt que seulement rapporter ses paroles [pour] l'insèrer dans le tissu de l'histoire humaine. La mise en récit répond à une logique d'incarnation : elle montre comment Dieu s'infiltre au creux des intrigues, des misères et des espoirs humains. L'évangile est l'histoire du Dieu fait homme parmi les humains. L'oubli de l'histoire expose la foi chrétienne aux dérives spiritualistes et confond l'évènement de Jésus avec la concrétion d'un mythe rédempteur ; la littérature copte gnostique de Nag Hammadi en offre l'ample démonstration. " (INT p. 29)

Je pense que là il faut éclater de rire. Je vois très bien Paul, Pierre, Jacques ou Jean et les autres en coach de com choisissant comme stratégie  :!!!:  : " une mise en forme du récit dans la logique de l'incarnation pour éviter la concrétion en mythe rédempteur et les dérives spiritualistes ultérieures ". Enorme invraisemblance de mon point de vue, improbable anticipation de l'avenir d'une Eglise qui n'a jamais su anticiper les obstacles, tout juste a-t-elle su ou cru savoir les affronter un par un. C'est toute l'hstoire des " hérésies. "

Je pense qu'ici Marguerat se fout du monde,. Il n'y a que des intellectuels au cerveau - investi par un solide parti pris - pour avaler ce genre de bobard. Là encore malheureusement, plus c'est gros plus ça passe.  :)  Et cet exemple n'est pas isolé !

5. La tradition orale assumée par l'Eglise judéo-chrétienne, elle-même rend absolument vaine l'opposition artificielle proposée par Marguerat, l'écrit pour l'Eglise-Mère d'origine et l'oral pour les courants latéraux : les apocryphes. La tradition judéo-chrétienne araméenne distingue clairement les Karozoutha (textes reçus) et la Souartha. Définition de la Souartha : ce mot désigne l'ensemble de la Bonne Nouvelle compoée et diffusée oralement comme recueil des dits et des gestes de Jésus. La souartha comportait toutes les traditions orales de tous les témoins dont les ordrages des Evangiles ne recueillent qu'une faible partie, mais la plus signifiante.

On voit donc que les thèses de Pierre Perrier - si elle sont avèrées - sont une sacrée épine dans la pied de Marguerat ! Et je dirais même que Marguerat joue littéralement son gagne-pain dans cette affaire ! Cela pourrait expliquer en partie pourquoi les thèses de Pierre Perrier sont tant ignorées ou dédaignées.


Dernière édition par Roque le Jeu 13 Juin - 11:02, édité 3 fois (Raison : Ajouts sur " la remémoration est une construction théologique " et sur " la christologie narrative ")

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Message  Libremax Mar 11 Juin - 22:54

Roque a écrit:L'art du décompte des perles de récitation, d'où la capacité de retrouver les versets sur les rouleaux et donc de la mémoire des textes, c'est l'art du sofer - en majorité les femmes qui sont dites " mères de mémoire ". Je n'ai pas la définition, mais le sfar est le rouleau où se décompte et s'enchaînent les textes. C'est l'écrit de référence.

Attention, le sofer, -les sapré- c'était un homme, dont la compétence -rémunérée- était de pouvoir retrouver tant dans sa mémoire que sur l'écrit tel ou tel passage des Ecritures pouvant servir à appuyer un propos religieux ou juridique. C'était ces personnes que nos évangiles appellent des "scribes" (alors que leur fonction tenait beaucoup plus de la mémoire que de l'écrit).

Le rôle des "mères de mémoire" est familial, ou tribal. Elle se charge de garder le souvenir des traditions orales du clan.
Cette fonction s'est probablement trouvée élargie avec Marie, la Mère du Seigneur, qui a semble-t-il conservé elle-même beaucoup de souvenirs sur le Christ ; elle est devenue la "mère de mémoire" de l'Eglise naissante.


A propos de Marguerat, il me semble quant à moi qu'il n'est qu'une des nombreuses têtes de l'hydre, si j'ose m'exprimer ainsi. Il ne fait que relayer ce qu'une bonne partie des exégètes modernes pensent depuis longtemps, à savoir qu'il y a un fossé infranchissable entre le Jésus des Evangiles et un quelconque Jésus de Nazareth ayant existé il y a 2000 ans, que l'Evangile est le fruit d'une longue et progressive méditation théologique élaborée par des anonymes, et que l'Eglise est un dérivé politique et fanatique défigurant tout ce que Jésus aurait pu vouloir transmettre.
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Message  Roque Mer 12 Juin - 10:34

Libremax a écrit:Il faut rappeler ce que la conservation des manuscrits de Qumran ou même de Nag Hammadi a d'exceptionnel dans les pays sud-méditerranéens. Le climat y est tout bêtement particulièrement hostile. Il existe en outre des témoignages d'une volonté déterminée de brûler tout manuscrit chrétien lors des persécutions juives, même si ceux-ci contenaient le nom de Dieu, ce qui témoigne d'un acharnement particulier, là aussi.
Il est très significatif que l'argument du tissage du texte araméen soit inaccessible aux non-initiés : c'est un argument dont le principe de base est purement linguistique, et les biblistes araméophones en occident sont rares. Tout le monde se base sur le grec et le latin, et un peu l'hébreu. Quand on voit l'écart gigantesque entre ces deux premières et l'araméen sur l'arbre généalogique des dialectes, on comprend qu'il y a un monde entre nos textes et celui des chaldéens. De fait, Pierre Perrier n'est pas du tout seul à parler de cet argument. Il a travaillé avec des évêques chaldéens, et l' "élève" dont il est question prend totalement la relève dans ses travaux. Il s'appelle Frédéric Guigain, et malgré qu'il soit d'origine française, il est prêtre maronite.
Oui j'ai une petite idée de cette action des autorités juives sous l'impulsion des pharisiens pour rechercher et détruire les documents chrétiens dès le premier siècle - avant que les autorités romaines, elles aussi, ne s'y mettent aussi un peu plus tard. Je n'ai pas d'information très développée sur le massacre de quasiment toute la hiérarchie judéo-chrétienne juste avant la révolte de +135 à Jérusalem. Ce pourrait-il qu'il y ait eu destruction de (des) bibliothèque(s) des judéo-chrétiens à l'époque. Ce que j'ai est dans les annexes du livre de Pierre Perrier sur les Colliers Evangéliques, rine de plus. As-tu quelque choe de plus développé ? Le travail de Frédéric Guigain est au moins la preuve que les " concepts " exhumés par Pierre Perrier sont opératoires sur le texte araméen. Une " preuve " par l'efficacité du postulat de départ en quelque sorte - sans négliger que les méthodes rabbiniques de tissages du texte araméen sont attestées par ailleurs historiquement d'un coté dans le judaïsme et de l'autre dans les Eglises parlant l'araméen, puis le syriaque et ayant conservé toutes ces traditions.
Libremax a écrit:Attention, le sofer, -les sapré- c'était un homme, dont la compétence -rémunérée- était de pouvoir retrouver tant dans sa mémoire que sur l'écrit tel ou tel passage des Ecritures pouvant servir à appuyer un propos religieux ou juridique. C'était ces personnes que nos évangiles appellent des "scribes" (alors que leur fonction tenait beaucoup plus de la mémoire que de l'écrit).
Merci, j'ai fait une confusion. Je trouve en effet sapré : savants, sachant retrouver dans leur mémoire et dans les rouleaux la citation à l'appui d'un jugement ou d'une controverse (souvent traduite ne français par "scribes") . Je n'avais pas du tout compris que les " scribes[/] " étaient des saprés. Merci, cela change complètement l'idée que j'en avais.

Libremax a écrit:Le rôle des "mères de mémoire" est familial, ou tribal. Elle se charge de garder le souvenir des traditions orales du clan.
Cette fonction s'est probablement trouvée élargie avec Marie, la Mère du Seigneur, qui a semble-t-il conservé elle-même beaucoup de souvenirs sur le Christ ; elle est devenue la "mère de mémoire" de l'Eglise naissante.

A propos de Marguerat, il me semble quant à moi qu'il n'est qu'une des nombreuses têtes de l'hydre, si j'ose m'exprimer ainsi. Il ne fait que relayer ce qu'une bonne partie des exégètes modernes pensent depuis longtemps, à savoir qu'il y a un fossé infranchissable entre le Jésus des Evangiles et un quelconque Jésus de Nazareth ayant existé il y a 2000 ans, que l'Evangile est le fruit d'une longue et progressive méditation théologique élaborée par des anonymes, et que l'Eglise est un dérivé politique et fanatique défigurant tout ce que Jésus aurait pu vouloir transmettre.
Il faudrait que je revois le rôle des femmes et en particulier pour Marie la notion de " [i]mère de mémoire
" ... il faut dire que cela est un peu éparpillé dans différents livres :) J'ai découvert Marguerat après un long séjour hors d'Europe et j'avoue que le livre m'est tombé des mains. C'est seulement parce que je voulais donner une réponse (ce que je n'ai pas fait) à Ahouva que je me suius forcé à le lire.

Maintenant si je maintiens des réserves à l'égard des thèses de Pierre Perrier, il faudrait voir l'autre face : l'approche historico-critique sauce Marguerat - faute d'abord lu d'autres ouvrages du même genre - vis à vis de laquelle mes objections sont nettement plus importantes .... indépendamment du fait que je dénie à ce christianisme libéral auto-proclamé, l'appellation christianisme. Je veux dire que mon désaccord porte bien sur la méthode (Source Q + approche stylistique et préalables sociologiques de la dite : Formgescichte + outrepassement des limites rationnelles de la méthode) et non sur les conclusions.

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Message  Libremax Mer 12 Juin - 12:19

Roque a écrit:Oui j'ai une petite idée de cette action des autorités juives sous l'impulsion des pharisiens pour rechercher et détruire les documents chrétiens dès le premier siècle - avant que les autorités romaines, elles aussi, ne s'y mettent aussi un peu plus tard. Je n'ai pas d'information très développée sur le massacre de quasiment toute la hiérarchie judéo-chrétienne juste avant la révolte de +135 à Jérusalem. Ce pourrait-il qu'il y ait eu destruction de (des) bibliothèque(s) des judéo-chrétiens à l'époque. Ce que j'ai est dans les annexes du livre de Pierre Perrier sur les Colliers Evangéliques, rine de plus. As-tu quelque choe de plus développé ? Le travail de Frédéric Guigain est au moins la preuve que les " concepts " exhumés par Pierre Perrier sont opératoires sur le texte araméen. Une " preuve " par l'efficacité du postulat de départ en quelque sorte - sans négliger que les méthodes rabbiniques de tissages du texte araméen sont attestées par ailleurs historiquement d'un coté dans le judaïsme et de l'autre dans les Eglises parlant l'araméen, puis le syriaque et ayant conservé toutes ces traditions.







Bonjour Roque,

je n'ai sans doute guère plus d'information que vous sur la persécution de la hiérarchie judéo-chrétienne. Je peux juste rajouter que ces persécutions, jointes au fait que l'élite judéo-chrétienne était dispersée dans le monde pour la Mission, n'ont pas permis à l'Eglise de Palestine de renouveler rapidement sa hiérarchie.
Perrier fait aussi, à mon avis, une conclusion à partir d'un constat sur les documents patristiques qui parlent des évêques de Palestine à partir du IIe siècle : ils sont d'origine et de culture grecque. Or, ce n'est pas imaginable en dehors d'une disparition subite des élites autochtones. Les manuscrits comme la Bible Cureton sont en outre la trace de textes syriaques qu'il a fallu re-traduire du grec, signe que la hiérarchie d'origine grecque avait importé ses propres textes et avaient dû se débrouiller pour célébrer sur place.
Il semblerait qu'après la révolte de 135, l'empereur ait fait interdire l'usage de l'araméen en public : dès lors, l'Eglise ne peut s'intégrer à l'empire romain que si elle est hellénophone, ce qui achève de rendre nécessaire une hiérarchie qui célèbre exclusivement en grec.
C'est d'ailleurs logique que le diatessaron de Tatien, édité en grec et en araméen pour l'orient, ait eu un succès si foudroyant chez les araméophones : on n'y possédait quasiment plus d'évangiles araméens écrits (à tel point q'il a dû être refoulé par Raboula, évêque d'Edesse).

Je ne pense pas qu'on puisse parler de "destruction de bibliothèques des judéo-chrétiens". C'est une vision très occidentale que celle d'une Bible nichée au beau milieu d'une bibliothèque. A l'époque, et dans cette culture, ce n'est pas du tout la place de tels manuscrits : ce sont des objets sacrés, qui servent à la liturgie uniquement. Ils sont donc plutôt dans les maisons-églises, ou bien sont des objets conservés par l'apôtre itinérant, comme Paul qui en parle d'ailleurs dans une de ses lettres. Ce sont donc des objets rares.
J'insiste sur le fait que la première raison que Perrier donne à l'absence de manuscrits araméens aussi vieux que les grecs est celle du climat : il est humide en Mésopotamie, et se prête peu à la conservation. Il semblerait que ce ne soit pas uniquement les cas des évangiles.

Les concepts "exhumés" par Pierre Perrier ne l'étaient pas tant que ça ! Il ne faisait d'ailleurs que reprendre les travaux très poussés de Marcel Jousse, dont les travaux universitaires sur les colliers évangéliques (le terme est de lui) ont été reconnus.... Mais jamais exploités : pourquoi ?
En outre, Pierre Perrier disposait de la culture très vivante de l'église assyro-chaldéenne, et lui-même connaît l'araméen. Frédéric Guigain a surtout pu démontrer de surcroît la validité de ces travaux par la présence de signes jamais expliqués jusqu'alors sur d'anciens manuscrits araméens de la Peshitta.
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Message  Libremax Mer 12 Juin - 17:02

Bon ; sinon, sur la question de la primauté de l'araméen, c'est quand même passionnant d'écouter ça :


(le père Guigain a un talent d'oralteur qui manque cruellement à Pierre Perrier)
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Message  Invité Mer 12 Juin - 17:36

Bonjour à toutes et à tous,

Sur l'Histoire Ecclésiastique d'Eusèbe de Césarée, nous disposons du formidable travail de Philippe Remacle, et de ses amis.

Voici par exemple deux passages du Livre III et du Livre VI, où il est question de la chronologie évangélique selon Clément d'Alexandrie :

http://remacle.org/bloodwolf/historiens/eusebe/histoire3.htm
(voir le chapitre XXIV)

http://remacle.org/bloodwolf/historiens/eusebe/histoire6.htm#XIV



et plus largement
http://remacle.org/bloodwolf/historiens/eusebe/index.htm#HIS

par contre, pour Origène... je n'ai rien trouvé de facilement exploitable.

J'ai trouvé une patrologie bilingue (latin/grecque)... j'avoue mes difficultés...

Très cordialement

pauline

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Message  -Ren- Mer 12 Juin - 18:05

pauline.px a écrit:Sur l'Histoire Ecclésiastique d'Eusèbe de Césarée, nous disposons du formidable travail de Philippe Remacle, et de ses amis.
Notre site préféré ! ^^

pauline.px a écrit:par contre, pour Origène... je n'ai rien trouvé de facilement exploitable.

J'ai trouvé une patrologie bilingue (latin/grecque)... j'avoue mes difficultés...
Même frustration... Et comme je compte plutôt m'atteler à des traductions du Πανάριον d'Epiphane, je suis désolé de ne pouvoir vous proposer de faire de même avec Origène dans les semaines à venir.

_________________
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Message  Invité Mer 12 Juin - 19:22

Grand merci LibreMax pour cette vidéo passionnante.

Même si au début, je n'ai guère été convaincue par les "arguments externes", la suite et la fin de la conférence incitent à acheter le livre :
La- Torah de la Nouvelle Alliance selon la récitation orale des Apôtres.
du P. Frédéric Guigain


C'est assez cher pour moi, (même si le web me propose des prix extrêmement dispersés)

est-ce que quelqu'un l'a lu ?
je crains d'être déçue...

j'y vais, ou pas ?


très cordialement

votre sœur
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Message  Libremax Mer 12 Juin - 20:15

Attention! 
C'est le texte araméen de la Peshytta, séquencé selon les colliers évangéliques. Il y a juste des titres français qui indiquent les péricopes, et puis quelques annotations.

En revanche il a publié "exégèse d'oralité", qui est un ouvrage de présentation gélérale de l'oralité et de certains colliers emblématiques, pas aussi long que ceux de Pierre Perrier, mais assez denses tout de même, en tout cas passionnants en terme d'implication spirituelle.
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Message  Libremax Mer 12 Juin - 21:16

Pour se faire une idée du contenu de ce livre, en voici un extrait :

http://eecho.fr/wp-content/uploads/2010/11/COLLIER-DE-JEAN.pdf

C'est réellement destiné aux araméophones / araméophiles ?
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Message  Roque Mer 12 Juin - 21:24

pauline.px a écrit:La- Torah de la Nouvelle Alliance selon la récitation orale des Apôtres.
du P. Frédéric Guigain


Il faut voir le contenu d'abord, y a-t-il la traduction en français (au départ Frédéric Guigain a travaillé sur le reconstitution des rythmes des textes syriaques Peshitto et Peshitta).

Personnellement j'ai acheté : " La récitation orale de la Nouvelle Alliance Selon Marc " 2012. ISBN : 978-2-87601-350-6 : il n'y a que le texte français disposé en colliers et perles. Je crois que la Torah de la Nouvelle Alliance " est la restitution de cette récitation alternée mais en araméen seulement (sauf erreur).

Je sais que cette " Récitation orale de la Nouvelle Alliance " existe maintenant pour Matthieu et Luc. Seul Jean manque encore ainsi que les Actes des Apôtres. Mais comme il s'agit d'un texte français qui - au fond - ne se différencie pas beaucoup du texte français habituel (TOB), j'ai choisi d'acheter récemment  : "Exégèse d'oralité " 2012 ISBN : 978-2-87601-353-7. Pour comprendre la méthode de cette école - avant de juger des résultats - c'est l'ouvrage indiqué. Frédéric parle et écrit beaucoup plus clairement que Pierre Perrier, il est d'une méticulosité dans ses descriptions à la limite de la redondance - mais si on est patient, c'est parfaitement clair. Séduisant même !

C'est malheureux car Frédéric Guigain donne son enseignement chaque semaine à 2 Km de chez moi le lundi à 20h00 ... j'ai des contraintes qui m'empêche d'y participer - habituellement - à cette heure. Peut-être l'année prochaine ....

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Message  Invité Mer 12 Juin - 22:06

Bonjour Libremax

Libremax a écrit:l'hypothèse de la prédication araméenne de l'Evangile part du principe que l'araméen est la langue vivante des hébreux en Palestine à l'époque de Jésus.

Mais si on disait qu'au XIXème siècle que le français est la langue vivante des Français, rendrait-on compte de la langue parlée dans les villages ? de la langue parlée par les femmes ? par les enfants ?

Libremax a écrit:
A tel point que l'appellation "dialecte hébraïque" ne signifie pas "en hébreu", mais bien "en araméen", c'est à dire dans la langue parlée par les hébreux. Le grec, qui est la langue véhiculaire de l'Empire, est bien sûr souvent utilisée pour communiquer dans le commerce et la politique avec les colons, c'est pourquoi Paul parle grec au tribun. Mais il n'y a pas de troisième langue dans cet épisode.


Alors veuillez m'éclairer :
37  Au moment d’être introduit dans la forteresse, Paul dit au tribun: M’est-il permis de te dire quelque chose ? Le tribun répondit : Tu sais le grec ?
qui signifie à mes yeux que le tribun n'imagine pas que Paul parle grec, il s'attendait à une autre langue, le copte peut-être, ou l'araméen ou tout autre idiome.

2  Lorsqu’ils entendirent qu’il leur parlait en langue hébraïque, ils redoublèrent de silence.

La foule va adopter une attitude de respect en entendant la langue dans laquelle Paul s'exprime.
Je ne vois ppas bien pourquoi la foule (qui connaît sans doute mieux Paul que le tribun) se serait attendue à ce que Paul s'adresse à eux en grec ou en copte.
Pourquoi des Juifs pieux de Jérusalem redoubleraient de silence (μαλλον παρεσχον ησυχιαν) si saint Paul s'exprime dans la langue qui sert à tout le monde, à tous les goïms ?
En quoi l'usage de l'araméen va-t-il imposer le silence à ces défenseurs de la vraie foi ?

Libremax a écrit:
Quant aux citations "en araméen dans le texte", il est inexact de dire que tout le monde parlait araméen : la Bonne Nouvelle a vite été adressée à des convertis uniquement hellénophones, et c'est précisément le problème qui est à l'origine de la désignation des diacres au début des Actes. Par ailleurs, il est très significatif de constater que ces citations sont purement et simplement absentes du texte araméen de la Peshytta

Que la Peshitta ne dise qu'une seule fois "Talitha koumi" ne m'étonne pas, c'est le contraire qui m'eût étonnée.
Sur le site
http://www.peshitta.org/
nous pouvons consulter la peshitta, ou plus exactement une version interlinéaire dont je ne peux déchiffrer que l'anglais.
L'anglais me suggère que Jésus dit "Jeune fille, lève-toi"...
J'ignore si le texte araméen confirme le "Talitha koumi" mais j'aurais été très surprise que la Peshitta répétât deux fois cette formule séparées du commentaire "ce qui signifie".

Libremax a écrit:
les traductions du genre "talitha koum, c'est à dire jeune-fille, lève-toi" sont des gloses ajoutées dans le texte grec

Voulez-vous dire qu'initialement le texte grec ne disait que "ταλιθα κουμι" ou bien qu'il ne disait que "το κορασιον σοι λεγω εγειρε" ?

Ce qui me turlupine c'est que si Jésus s'adresse à tous en araméen alors sur quelle base les évangélistes ont-il retenu quelques isolats "en araméen dans le texte".

Libremax a écrit:
Les citations sont à mon avis des formules qui sont devenues rituelles, et qui ont été conservées telles quelles dans le texte grec à dessein.


Même "Eli, Eli, lama sabachthani ?"  ?

Mon sentiment est que la bascule assez exceptionnelle du grec évangélique à l'araméen vernaculaire témoigne du fait que parfois les témoins remarquaient l'usage de l'araméen dans la bouche de Jésus.
Y a des circonstances où cela attirait l'attention, où cela prenait un sens... et puis d'autres où cela passait comme une lettre à la poste

Jésus parlait-Il toujours araméen ?
l'araméen n'est-elle pas seulement la langue des hommes ? voire celles des hommes urbains ?

Il pouvait par exemple s'adapter à Son interlocuteur ou (au contraire) aux spectateurs en employant tel ou tel patois, jargon, idiome etc.
Par exemple, je Le vois mal discuter avec les scribes et les docteurs dans une autre langue que l'hébreu, la langue du sanctuaire comme le rappellent les targums palestiniens.

Et je Le vois mal S'adresser à solennellement à Son Père en araméen... Ignorait-Il l'hébreu du Psaume 22 ?


très cordialement
votre sœur
pauline

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Message  Libremax Mer 12 Juin - 23:17

Pauline.px a écrit:Mais si on disait qu'au XIXème siècle que le français est la langue vivante des Français, rendrait-on compte de la langue parlée dans les villages ? de la langue parlée par les femmes ? par les enfants ?
Bonsoir Pauline,

pas tout à fait, si l'on tient compte des patois, qui sont très disparates en France. Au moins ne serait-on pas induit en erreur en ne prétendant pas qu'on y parlait le latin. De même, l'araméen avait ses variantes dialectales (quoique, de loin moins hétérogènes que le français et les divers patois), mais l'écart entre l'usage de l'araméen et celui de l'hébreu était à peu près le même qu'entre le français et le latin, langue uniquement liturgique et ecclésiastique.

Alors veuillez m'éclairer :
37  Au moment d’être introduit dans la forteresse, Paul dit au tribun: M’est-il permis de te dire quelque chose ? Le tribun répondit : Tu sais le grec ?
qui signifie à mes yeux que le tribun n'imagine pas que Paul parle grec, il s'attendait à une autre langue, le copte peut-être, ou l'araméen ou tout autre idiome.
Bien sûr : il s'attendait à ce que Paul parlât uniquement araméen. 

2  Lorsqu’ils entendirent qu’il leur parlait en langue hébraïque, ils redoublèrent de silence.

La foule va adopter une attitude de respect en entendant la langue dans laquelle Paul s'exprime.
Je ne vois ppas bien pourquoi la foule (qui connaît sans doute mieux Paul que le tribun) se serait attendue à ce que Paul s'adresse à eux en grec ou en copte.
Pourquoi des Juifs pieux de Jérusalem redoubleraient de silence (μαλλον παρεσχον ησυχιαν) si saint Paul s'exprime dans la langue qui sert à tout le monde, à tous les goïms ?
En quoi l'usage de l'araméen va-t-il imposer le silence à ces défenseurs de la vraie foi ?
Il semblerait que la foule ne connaît pas si bien Paul que cela : la rumeur court que Paul veut pousser les juifs à abandonner le culte de Moïse, et on l'accuse de profaner le Temple en y amenant des grecs. Ses excursions dans l'empire romain sont éventuellement connues : il parle la langue maternelle des juifs, et non le grec profane : c'est donc en tant que juif qu'il expose sa défense. Nous ne sommes plus en présence exclusive des juifs pieux de Jérusalem, mais de toute une foule, dans laquelle règne un grand tumulte.

Voulez-vous dire qu'initialement le texte grec ne disait que "ταλιθα κουμι" ou bien qu'il ne disait que "το κορασιον σοι λεγω εγειρε" ?

Ce qui me turlupine c'est que si Jésus s'adresse à tous en araméen alors sur quelle base les évangélistes ont-il retenu quelques isolats "en araméen dans le texte".
Ce n'est pas ce que je voulais dire, mais ici, ce serait à un spécialiste de s'exprimer. J'entendais que le texte grec a cru bon de conserver une phrase en araméen et de la traduire juste après : c'est donc pour une raison bien précise. 
Or, personne ne conteste l'usage général de l'araméen dans les campagnes de Palestine à cette époque. Il était donc normal que Jésus s'exprime dans cette langue. si le texte grec choisit de restituer la phrase en araméen, et précisément dans le cadre d'un miracle, je pense que c'est parce qu'elle a un statut spécial.

Même "Eli, Eli, lama sabachthani ?"  ?

Mon sentiment est que la bascule assez exceptionnelle du grec évangélique à l'araméen vernaculaire témoigne du fait que parfois les témoins remarquaient l'usage de l'araméen dans la bouche de Jésus.
Y a des circonstances où cela attirait l'attention, où cela prenait un sens... et puis d'autres où cela passait comme une lettre à la poste
Le cas du ""Eli, Eli,..." est différent : il s'agit de reproduire un texte qui renvoie à la fois au début du psaume 22 récité en araméen, et à la fois à un malentendu chez les pharisiens, ( qui d'ailleurs, parlent selon toute probabilité un autre dialecte araméen que celui qu'utilise Jésus à cet instant. )

Jésus parlait-Il toujours araméen ?
l'araméen n'est-elle pas seulement la langue des hommes ? voire celles des hommes urbains ?
Non, c'est la langue du peuple.
Il y a bien un "araméen d'empire", celui qui sert de langue véhiculaire dans l'empire perse/parthe, et un dialecte araméen de Judée, mais on parle bel et bien araméen en Samarie et en Galilée. 
L'hébreu est la langue des religieux et des intellectuels ; le grec est la langue du commerce et de la politique avec le monde romain (pas avec le monde perse).

Il pouvait par exemple s'adapter à Son interlocuteur ou (au contraire) aux spectateurs en employant tel ou tel patois, jargon, idiome etc.
Par exemple, je Le vois mal discuter avec les scribes et les docteurs dans une autre langue que l'hébreu, la langue du sanctuaire comme le rappellent les targums palestiniens.
Tout à fait. C'est juste que les patois en question sont des variantes dialectales d'un même idiome. Jésus s'est de toute évidence lancé dans de grandes controverses avec les docteurs de la loi en hébreu. Mais ceux-ci avaient aussi intérêt à être compris du public lorsqu'ils venaient l'apostropher.

Et je Le vois mal S'adresser à solennellement à Son Père en araméen... Ignorait-Il l'hébreu du Psaume 22 ?
Certainement pas. 
Mais Jésus s'adressait-Il toujours au Père de manière solennelle, au point de n'utiliser que la langue des prêtres ? La dévotion juive était tout autant populaire, familiale, et pour tout dire, maternelle, que sacrale. Sur la croix, Jésus pouvait tout à fait réciter ce verset à l'adresse des proches qui restaient encore, et qui venaient de Galilée.

"Abba" est un mot araméen...
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Message  Roque Jeu 13 Juin - 11:26

pauline.px a écrit:Grand merci LibreMax pour cette vidéo passionnante.

Même si au début, je n'ai guère été convaincue par les "arguments externes",




Oui les arguments externes sont faibles, Frédéric Guigain le dit d'ailleurs lui-même (48 mn). Au début de la vidéo, Frédéric Guigain souligne bien l'énorme paradoxe d'un " texte oral " rédigé en araméen - pratiquement immédiatement traduit en grec. C'est une autre objection possible à cette thèse, donc. Mais tu sais bien entendu que j'y reste quand même favorable au sens où elle concurrence très solidement et efficacement des thèses comme celle de Marguerat and C°.

Cependant, voici une autre vidéo (si tu as le temps), passionnante également. On y trouve une explication sur les astérisques et points qui indiquent respectivement les " reprises de souffle " (petgame) et le balancement latéral pendant la récitation de l'Evangile. Aussi étonnant que ce soit pour nous, cela est porté sur les manuscrits (à partir de 25 mn sur la vidéo ci-dessous). Ce sont des preuves internes aussi :
:arrow: la vidéo : https://www.dailymotion.com/video/xhrl9g_la-torah-de-la-nouvelle-alliance_school
 
:arrow: déjà sur ce forum : https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t47p75-debats-sur-la-mise-par-ecrit-des-evangiles#8895

Roque

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Message  Libremax Jeu 13 Juin - 12:22

Roque a écrit:Oui les arguments externes sont faibles. Au début de la vidéo, Frédéric Guigain souligne bien l'énorme paradoxe d'un " texte oral " rédigé en araméen - pratiquement immédiatement traduit en grec. C'est une autre objection possible à cette thèse, donc.

Bonjour cher Roque,

pour moi, ce serait une objection si elle n'avait une explication tout à fait rationnelle dans la thèse de l'oralité araméenne : 
Beaucoup de juifs venus de la diaspora à Jérusalem, lieu de la première évangélisation, ne parlent pas araméen. Les apôtres mettent en forme une catéchèse structurée qu'il faut donc traduire pour ce public (c'est ce que suggère l'épisode de la nomination des Sept dans les Actes des Apôtres). L'évangélisation se répandant, une version grecque, c'est à dire ouverte aux juifs hellénistes doit être supervisée par les apôtres.

Papias dit d'ailleurs que la première proclamation s'est faite en langue hébraïque, et que "chacun traduisait comme il pouvait" : il semblerait que les apôtres n'aient pas eu le temps de traduire eux-mêmes tout de suite : il y a eu vraisemblablement des traductions spontanées, ce qui pourrait expliquer la profusion de versions grecques avant la crise marcionite.
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