Débats sur la mise par écrit des Evangiles
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
@Bonhenry, oui la locution "judéo-chrétiens" est à utiliser avec précision. Ce sont effectivement les juifs convertis au christianisme dans les premiers temps de l’Église. Pour moi l'expression est symétrique de "pagano-chrétiens". Dans le propos de Pierre Perrier, ils ont une importance considérable puisque ce sont eux qui ont "traditionné" (je ferai prochainement un petit paragraphe pour expliquer ce terme) les perles témoignages en colliers de récitation orale. Leur points communs sont l'usage de l'araméen, la tradition orale, une théologie et une liturgie directement inspirées de la synagogue, voire du Temple. Cela est progressivement mieux connus depuis un siècle, environ. Un peu avant 70, l'Eglise qui fuit Jérusalem vers Pella est - je pense - pratiquement totalement judéo-chrétienne. Après on les retrouve à Damas, Antioche, Edesse, Rome, etc ... je ne connais pas encore les détails avec précision. Ce qui est de sûr c'est qu'ils restent araméophones. Pierre Perrier pense que ces judéo-chrétiens ont représenté la moitié des chrétiens jusqu'à la moitié du 2ème siècle.
Pierre Perrier soutient que l'ouverture aux Nations a été, pour cette Eglise judéo-chrétienne, très problématique et pénible. Ils n'étaient certes pas des zélotes, mais, dixit Pierre Perrier, ils ont été tentés par le même réflexe "intégriste" (repli sur l'identité juive) qui a entraîné la levée des zélotes aboutissant à la première destruction de Jérusalem et du Temple en 70. Ensuite lors de la révolte de Bar Kochba, Pierre soutient que la totalité de la hiérarchie de cette Eglise judéo-chrétienne a été massacrée. Ils n'ont pas participé au soulèvement, mais en ont été les dommage collatéraux, massacrés par les rebelles intégristes de Bar Kochba ou par les guides religieux du Temple de l'époque (dépendant des pharisiens) - un peu avant l'arrivée d'Hadrien. Je ne connais pas les détails, j'avoue. Pour Pierre Perrier, cette Eglise judéo-chrétienne est l'Eglise Mére. C'est aussi une Eglise martyr, Le déclin de l'Eglise judéo-chrétienne, le recul des araméophones dans l'Eglise (les Eglises) daterait de cette époque. Ensuite c'est le grec qui s'est imposé dans l'Eglise (en parallèle du pouvoir de Rome), d'abord avec Evêques non araméophones dans la région moyen-orientale, puis comme langue de référence des textes du NT.
Pierre Perrier soutient que l'ouverture aux Nations a été, pour cette Eglise judéo-chrétienne, très problématique et pénible. Ils n'étaient certes pas des zélotes, mais, dixit Pierre Perrier, ils ont été tentés par le même réflexe "intégriste" (repli sur l'identité juive) qui a entraîné la levée des zélotes aboutissant à la première destruction de Jérusalem et du Temple en 70. Ensuite lors de la révolte de Bar Kochba, Pierre soutient que la totalité de la hiérarchie de cette Eglise judéo-chrétienne a été massacrée. Ils n'ont pas participé au soulèvement, mais en ont été les dommage collatéraux, massacrés par les rebelles intégristes de Bar Kochba ou par les guides religieux du Temple de l'époque (dépendant des pharisiens) - un peu avant l'arrivée d'Hadrien. Je ne connais pas les détails, j'avoue. Pour Pierre Perrier, cette Eglise judéo-chrétienne est l'Eglise Mére. C'est aussi une Eglise martyr, Le déclin de l'Eglise judéo-chrétienne, le recul des araméophones dans l'Eglise (les Eglises) daterait de cette époque. Ensuite c'est le grec qui s'est imposé dans l'Eglise (en parallèle du pouvoir de Rome), d'abord avec Evêques non araméophones dans la région moyen-orientale, puis comme langue de référence des textes du NT.
Roque- Messages : 5064
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Roque a écrit:@Bonhenry, oui la locution "judéo-chrétiens" est à utiliser avec précision. Ce sont effectivement les juifs convertis au christianisme dans les premiers temps de l’Église. Pour moi l'expression est symétrique de "pagano-chrétiens". Dans le propos de Pierre Perrier, ils ont une importance considérable puisque ce sont eux qui ont "traditionné" (je ferai prochainement un petit paragraphe pour expliquer ce terme) les perles témoignages en colliers de récitation orale. Leur points communs sont l'usage de l'araméen, la tradition orale, une théologie et une liturgie directement inspirées de la synagogue, voire du Temple. Cela est progressivement mieux connus depuis un siècle, environ. Un peu avant 70, l'Eglise qui fuit Jérusalem vers Pella est - je pense - pratiquement totalement judéo-chrétienne. Après on les retrouve à Damas, Antioche, Edesse, Rome, etc ... je ne connais pas encore les détails avec précision. Ce qui est de sûr c'est qu'ils restent araméophones. Pierre Perrier pense que ces judéo-chrétiens ont représenté la moitié des chrétiens jusqu'à la moitié du 2ème siècle.
Pierre Perrier soutient que l'ouverture aux Nations a été, pour cette Eglise judéo-chrétienne, très problématique et pénible. Ils n'étaient certes pas des zélotes, mais, dixit Pierre Perrier, ils ont été tentés par le même réflexe "intégriste" (repli sur l'identité juive) qui a entraîné la levée des zélotes aboutissant à la première destruction de Jérusalem et du Temple en 70. Ensuite lors de la révolte de Bar Kochba, Pierre soutient que la totalité de la hiérarchie de cette Eglise judéo-chrétienne a été massacrée. Ils n'ont pas participé au soulèvement, mais en ont été les dommage collatéraux, massacrés par les rebelles intégristes de Bar Kochba ou par les guides religieux du Temple de l'époque (dépendant des pharisiens) - un peu avant l'arrivée d'Hadrien. Je ne connais pas les détails, j'avoue. Pour Pierre Perrier, cette Eglise judéo-chrétienne est l'Eglise Mére. C'est aussi une Eglise martyr, Le déclin de l'Eglise judéo-chrétienne, le recul des araméophones dans l'Eglise (les Eglises) daterait de cette époque. Ensuite c'est le grec qui s'est imposé dans l'Eglise (en parallèle du pouvoir de Rome), d'abord avec Evêques non araméophones dans la région moyen-orientale, puis comme langue de référence des textes du NT.
Bonjour Roque.
J'ai eu la chance de rencontrer deux prêtres 'arabes' en terre Sainte, à la fois arabophones et "araméenphones". L'un deux tente d'ailleurs de produire la version araméenne de la Bible.
Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Un tel travail semble avoir été déjà fait depuis 2009 par le Père Frédéric Guigain, prêtre maronite à la suite de Pierre Perrier. Ce qui est impressionnant dans ce travail est qu'il ne s'agit pas simplement de la restitution du texte araméen, mais de la restitution également du rythme de récitation orale (comme les répons des moines). Sur plusieurs manuscrits on est parvenu vers 190, je crois, à comprendre la signification de certains signes qui sont simplement des signes de "reprises respiratoires" (petgama en araméen). Il a fallu les travaux de Marcel Jousse (1925-1950) sur les rythmes et la gestuelle des récitations orales pour approcher ce secret. On se rappoche donc tout simplement des proclamations orales en araméen des Apôtres eux-mêmes ! C'est ce qu'on appelle en araméen, toujours, une Karozoutha, c'est à dire la proclamation d'un texte oral (par coeur) enchaîné comme une litanie de texte. Cette proclamation peut être faite à deux voix (ou plus). Il s'agit certainement d'un document de recherche, mais je trouve cela sidérant et assez convainquant (bien que ne lisant pas araméen, j'ai même acheté ce livre) !
1. http://eecho.fr/?p=3900
2. http://eecho.fr/?p=2427
Le site est également intéressant http://eecho.fr/ parce qu'il y a en cours une confrontation des textes oraux araméens avec notre NT en grec. Il y a des nuances de sens, des petites différences qui sont tout simplement époustouflantes (j'en ai deux en tête). Quand j'en saurai plus je ferai un petit paragraphe sur ce sujet.
1. http://eecho.fr/?p=3900
2. http://eecho.fr/?p=2427
Le site est également intéressant http://eecho.fr/ parce qu'il y a en cours une confrontation des textes oraux araméens avec notre NT en grec. Il y a des nuances de sens, des petites différences qui sont tout simplement époustouflantes (j'en ai deux en tête). Quand j'en saurai plus je ferai un petit paragraphe sur ce sujet.
Roque- Messages : 5064
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Merci d'avanceRoque a écrit:Quand j'en saurai plus je ferai un petit paragraphe sur ce sujet.
_________________
...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Ren a écrit:...Un fil incontournable sur un forum tel que celui-ci... Entre les sources chrétiennes, l'étude et la datation des plus anciens manuscrits, les hypothèses des chercheurs, le sujet est vaste/
MERCI, mon cher REN d'avoir ouvert ce sujet ! Et j’ajouterai ce lien pour la datation des évangiles :
http://www.dialogueislam-chretien.com/t43-datation-des-evangiles
Roque a écrit:C’est, sans doute, le mérite de Pierre Perrier d’avoir rassemblé SOIXANTE DIX textes décrivant le processus de passage de la tradition orale à la mise par écrit des Karozoutha, puis des « Evangiles » en grec pour les quatre Evangiles canoniques. Il est étonnant de voir comment ces traditions conservées dans des Eglises indépendante se complètent, sans se contredire, si on en respecte soigneusement les nuances. Nous ne pourrons ici – faute de place - que citez quelques uns des ces textes. Le mieux est de les lire directement dans le livre de Pierre Perrier, cité ci-dessous, en prenant garde aux différentes précisions données par ces textes : mettre en ordre, composer, réciter, laisser un écrit, mettre par écrit, éditer ou publier (Evangiles de l’Oral à l’écrit. Les colliers évangéliques. Pierre Perrier. Ed. Jubilé. 2003. Pages 774-803. ISBN : 2-8667-9358-7). Il semble que ce travail de collecte ne soit pas tout à fait terminé, notamment dans les Eglises orientales.
Pour cette thèse de Perrier, je vous engage, tous les passionnés du sujet, à lire les analyses du forumeur LIBREMAX , sur :
http://www.dialogueislam-chretien.com/t228-les-colliers-evangeliques
Fraternellement
Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Et merci à toi pour ces liens !mario-franc_lazur a écrit:MERCI, mon cher REN d'avoir ouvert ce sujet !
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
@mario-franc_lazur : merci pour cette réference intéressante et le débat qui s'y développe. Ma stratégie d'exposé (donc de discussion) sur la question de la mise par écrit des Evangiles différente :
1. Donner les arguments ou preuves de l'existence de texte anciens antérieurs à 140 - pas seulement en grec, mais également en latin et araméen. En prime on peut démontrer que ces plus anciens textes dérivent de l'araméen ;
2. Démontrer l'existence, les moyens et méthodes de la tradition juive du premier siècle et que ce "tissage" et cette "rythmique respiratoire" sont inscrits dans le texte d'Evangile araméen et sont conforme à cette tradition orale rabbinique du premeir siècle. En prime : il est impossible d'obtenir ce résultat si on traduit du grec vers l'araméen ;
3. Démontrer que Jésus d'abord à utilisé ces méthodes, puis l'Eglise des juifs convertis au Christ : les judéo-chrétiens jusqu'à la fin du premier siècle pour les textes araméen, c'est à dire avec Jean 3 et pas seulement pour les Evangiles (je ne suis pas assez avancé dans le sujet pour le faire) ;
4. Exposer les 70 sources traditionnelles des Eglises d'occident et d'orient qui datent toute ces mises par écrit des Karozoutha araméennes entre 37 et 60, sauf "Jean 3". En prime, on peut demander pourquoi les tenants de la théorie historico-critique "moderne" mettent la quasi-totalité de ces témoignage au placard ou ne les cite que de façon tronquée (il faudrait que je donne des exemples, mais il faut lire plus ...);
5. Discuauter des dates.
Cette stratégiede discussion impose qu'on mette en débat sérieusement l'hypothèse d'une strate de textes oraux", mais ensuite par écrit : d'abord en araméen (la thèse de Pierre Perrier). Cela évite qu'on ne discute que des textes grecs, qu'on se focalise sur le fatras que l'on connait. Et enfin la théorie historico-critique "moderne" reprend la place qu'elle mérite : c'est une hypothèse parmi d'autres avec des forces et des faiblesses. Ce n'est ni une vérité académique, ni une vérite scientifique !
1. Donner les arguments ou preuves de l'existence de texte anciens antérieurs à 140 - pas seulement en grec, mais également en latin et araméen. En prime on peut démontrer que ces plus anciens textes dérivent de l'araméen ;
2. Démontrer l'existence, les moyens et méthodes de la tradition juive du premier siècle et que ce "tissage" et cette "rythmique respiratoire" sont inscrits dans le texte d'Evangile araméen et sont conforme à cette tradition orale rabbinique du premeir siècle. En prime : il est impossible d'obtenir ce résultat si on traduit du grec vers l'araméen ;
3. Démontrer que Jésus d'abord à utilisé ces méthodes, puis l'Eglise des juifs convertis au Christ : les judéo-chrétiens jusqu'à la fin du premier siècle pour les textes araméen, c'est à dire avec Jean 3 et pas seulement pour les Evangiles (je ne suis pas assez avancé dans le sujet pour le faire) ;
4. Exposer les 70 sources traditionnelles des Eglises d'occident et d'orient qui datent toute ces mises par écrit des Karozoutha araméennes entre 37 et 60, sauf "Jean 3". En prime, on peut demander pourquoi les tenants de la théorie historico-critique "moderne" mettent la quasi-totalité de ces témoignage au placard ou ne les cite que de façon tronquée (il faudrait que je donne des exemples, mais il faut lire plus ...);
5. Discuauter des dates.
Cette stratégiede discussion impose qu'on mette en débat sérieusement l'hypothèse d'une strate de textes oraux", mais ensuite par écrit : d'abord en araméen (la thèse de Pierre Perrier). Cela évite qu'on ne discute que des textes grecs, qu'on se focalise sur le fatras que l'on connait. Et enfin la théorie historico-critique "moderne" reprend la place qu'elle mérite : c'est une hypothèse parmi d'autres avec des forces et des faiblesses. Ce n'est ni une vérité académique, ni une vérite scientifique !
Roque- Messages : 5064
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Introduction
Après les trois premiers paragraphes sur : 1. Les textes araméens antérieurs à 140, 2. Sur les méthodes et moyens de la tradition orale rabbinique du premier siècle et 3. Les soixante dix textes témoignant du processus de tradition orale d’élaboration des Evangiles je tiens à montrer ici que la notion de tradition orale chez Pierre Perrier est un concept documenté, ayant son propre vocabulaire araméen et présentant un bon degré de cohérence. Cette tradition orale rabbinique est à base sociale large, c’est une tradition orale populaire. On ne retrouve pas cette notion dans l’approche historico-critique dite « moderne », laquelle ne s’intéresse, d’une part, qu’au grec et, d’autre part, n’évoque l’araméen et/ou la tradition orale que comme des hypothèses fumeuses infondées, immédiatement disqualifiées.
Pierre Perrier commence ainsi : « Quand il se sert des petits pour faire lever le Royaume, Jésus s’inscrit totalement dans la grande tradition d’Israël. A aucun moment, l’assemblée sainte du peuple d’Israël n’a accordé la moindre prééminence à la démarche savante des sapré soférim, c'est-à-dire les « gens du livre ». A la suite, la préoccupation de Jésus, comme celle de l’Eglise primitive, a toujours été de laisser s’exprimer et de renforcer la foi vivante du petit peuple de Dieu ».
Les mécanismes sociaux à la base de l’oralité populaire
Pour se faire une idée de l’oralité populaire de l’époque, il faut imaginer un monde sans photos de famille, sans vidéo, ni enregistrement sonore, sans TV. Dans ces conditions, la restitution des figures familiales passe par quelques mots justes, quelques anecdotes « bien vues », quelques épisodes marquant de sa vie qui permettent de conserver un souvenir de la personne. Cette évocation s’attache non à l’aspect extérieur, mais plutôt à la personnalité, elle est souvent plus profondément vivante et juste qu’une photo. Cet exercice n’est certes pas aisé dans le monde contemporain où la télévision nous a rendus intellectuellement passif. On « retrouve » encore aujourd’hui, un peu, ce style particulier de « tradition orale » lorsqu’il faut restituer la vie d’un défunt aux obsèques. C’est aussi un peu le style des témoins à la barre du tribunal. Il existe encore quelques phénomènes apparentés lors des naissances avec l’évocation des ascendants et l’analyse des ressemblances ou non avec l’une ou l’autre lignée. Mais nous sommes loin, dans la civilisation qui est la nôtre, de pratiquer un véritable style oral, avec ses procédés complexes de scansion des phrases et de composition symétrique, scandée du discours. Il n’y a plus aujourd’hui d’orateurs pour les produire, ni d’auditoires bien formés pour les recevoir. Dans la civilisation hébraïque du premier siècle, la première application du style oral était relative au choix du prénom que l’on allait donner au nouveau-né. Par la suite le nom, les surnoms et quelques petites anecdotes résumées en deux ou trois phrases animaient un texte oral évoquant un individu.
Ce genre de « code familial » qui consiste à dénommer une personne à partir d’une anecdote remarquable ou d’un mot piquant de la personne – connus de la seule famille - est encore vivante dans les groupes familiaux en Afrique, ainsi que les anecdotes colorées, voire drôles pour évoquer les défunts, y compris au moment du deuil ! Il est facile de comprendre – qu’en l’absence de recours fréquent au livre, il y a un besoin d’emphase donnée aux menus événements de la vie de village, de clan ou de tribu ; ce qui mène ainsi de véritables petites « sagas » orales et un besoin de récitations régulières créant le lien social, tout en conservant la mémoire vivante et l’identité du groupe. Ce qui est moins connu en revanche est que cette composition orale est un phénomène social et collectif, tout autant que la mémorisation et la transmission.
Et dans le processus oral, les femmes de la civilisation hébraïque du premier siècle ont une place de choix, même si elle n’est pas institutionnelle. En civilisation orale, la mise en forme des témoignages se fait d’abord grâce des modèles fournis par la tradition comme on le voit dans les textes de l’enfance de Jésus et de Jean Baptiste – avec le Magnificat est un exemple typique. Il est clair que Marie apparait dans ce texte comme une extraordinaire compositrice pratiquant avec art le pesher et le midrash. Le pesher est une méthode de composition orale consistant à reprendre un texte ancien et à le modifier plus ou moins profondément pour exprimer une chose nouvelle ayant une parenté de thème ou de situation pour orienter ce texte vers un sens nouveau. Le midrash vient de l’hébreu : darasz : chercher, interprèter. C’est un terme d’oralité qui désigne un commentaire ou une nouvelle composition obtenus en utilisant des paroles de la tradition. Les citations contenues dans l’Evangile sont en général midrashiques. Elles visent à expliquer le sens traditionnel en vue d’une méditation ou d’un jugement nouveau. Sur le fond, c’est tout le peuple qui est responsable collectivement de l’Alliance et responsable de recevoir, conserver et transmettre la Parole du Dieu Unique qui l’a élu. Les prêtres et les lévites sont responsables de transmettre, après la famille, en particulier par la célébration liturgique. Il y faut l’aide de bons connaisseurs, par cœur de tous les textes pour aider à retrouver, si nécessaire, le passage exact dans les textes de référence. Ainsi ils doivent être bons connaisseurs des décomptes, d’où leur noms : des safré de sofer. Le sfar est le rouleau où se fait le décompte et s’enchainent les textes. Le mot sfar signifie le rouleau et le décompte. C’est l’écrit de référence. Les prêtres et lévites doivent être surtout de bons connaisseurs de fond et de forme des textes, car c’est à eux qu’est dévolue la charge de redonner vie au texte en les récitant correctement. Les femmes excellent dans ce rôle et on les appelle alors les « mères de mémoire ». Elles soufflent les mots exacts et justes à ceux qui hésitent ou se trompent. Si je comprends bien la pensée de Pierre Perrier, les femmes n’ont pas de fonction liturgique, mais ont un rôle d’aide à toutes les étapes : composition collective, conservation des décomptes, mémorisation et rôle de souffleur-aide-mémoire (c'est-à-dire de paraqlita) lors de la récitation par cœur. C’est tout à fait ce rôle qui aurait été tenu par les premières « veuves » chrétiennes, terme inapproprié servant à désigner les femmes ne dépendant pas d’un homme. Pierre Perrier interprète le chapitre 6 des Actes des Apôtres et dédiées à la conservation de la Parole récitée, c'est-à-dire la tradition orale : http://eecho.fr/?p=2633. Source secondaire : La transmission des Evangiles. Pierre Perrier. Ed du Sarment. Pages 99 et 100, 154 et 155, 175. Février 2006. ISBN :2-86679-422-2.
La composition en petgames (les paroles et le rythme)
En littérature orale, la récitation d’un texte fait l’objet d’un balancement qui rythme les phrases que le récitateur ou le chanteur accompagne volontiers d’un léger balancement du corps. Le membre de phrase compris entre deux inspirations porte le nom araméen de petgama, dont le radical pt exprime à la fois le souffle et le son. S’il est attentif, l’auditeur se met au même rythme respiratoire que le récitateur. C’est au sens propre que l’auditeur est tenu « en haleine » et il est important que le rythme soit adapté pour que l’écoute en soit confortable. Le lien qui se crée entre le fil du discours et l’enchaînement régulier des petgames, qui ponctuent la récitation, donne au récit ce qu’on appelle sa texture. Quand la texture est renforcée par des citations connues de tous (exactes ou légèrement ajustée), la mémorisation en est rendue plus facile. Il serait naïf de voir le compositeur oral comme un littérateur assis à son bureau et s’efforçant à une écriture personnelle. Là où l’écrivain moderne cherche à multiplier les expressions recherchées et à mettre une marque personnelle, le compositeur oral s’efface humblement pour participer à la production et à la transmission dont il ne se considère pas l’auteur, mais seulement de « traditionneur ».
Beaucoup d’événement font l’objet d’une mémorisation textuelle quasi immédiate C’est en particulier le cas des miracles. Devant ces événements extraordinaires, il arrive souvent qu’un texte oral instantané jaillisse de la bouche d’un témoin compositeur. S’il est juste et reconnu exact par la communauté, ce texte est ruminé et mille fois redit, jusqu’à être intégré à une collection. Il est important de comprendre que ces textes oraux sont faits pour être répétés ou transmis. Ce sont des « récitatifs » comme la « guérison du lépreux » ou le « discours du Pain de Vie ». En araméen, on les appelle des tash’iatha, mot qui recouvre les paroles et les gestes du mime. Ils font l’objet d’une rumination, c'est-à-dire une récitation à soi-même qui permet de les mémoriser en améliorant progressivement le choix des mots, des gestes et des intonations, et d’en acquérir une une compréhension plus intime. Grâce à cette pratique, l’essentiel se dégage peu à peu. En araméen, cette action de ruminer s’appelle pehaq, c'est-à-dire le « soupèsement ». C’est là le terme qu’emploie l’Evangile quand il dit que Marie « conservait toutes ces paroles dans son cœur ».
Le contenu des témoignages doit être considéré comme parfaitement fiable, inattaquable par les auditeurs. Pour y parvenir les compositeurs-témoins sont poussés à répéter – par exemple les récits de miracles - devant témoins, le plus souvent et le plus fidèlement possible. Ils sont poussés à cristalliser leurs témoignages et à y rester parfaitement fidèles – sous peine d’être accusés d’avoir changé quelque chose à l’histoire. Si dans une civilisation de tradition littéraire ou intellectuelle, on s’efforce d’enrichir le texte en lui apportant des modifications, en milieu oral, au contraire, la simplicité brève et la fidélité exacte au mot près est considéré comme la qualité par excellence. Autre différence, en civilisation orale, la répétition fidèle des mêmes textes n’est pas synonyme de monotonie, mais le garant de la solidité et de l’importance des témoignages donnés.
Après les trois premiers paragraphes sur : 1. Les textes araméens antérieurs à 140, 2. Sur les méthodes et moyens de la tradition orale rabbinique du premier siècle et 3. Les soixante dix textes témoignant du processus de tradition orale d’élaboration des Evangiles je tiens à montrer ici que la notion de tradition orale chez Pierre Perrier est un concept documenté, ayant son propre vocabulaire araméen et présentant un bon degré de cohérence. Cette tradition orale rabbinique est à base sociale large, c’est une tradition orale populaire. On ne retrouve pas cette notion dans l’approche historico-critique dite « moderne », laquelle ne s’intéresse, d’une part, qu’au grec et, d’autre part, n’évoque l’araméen et/ou la tradition orale que comme des hypothèses fumeuses infondées, immédiatement disqualifiées.
Pierre Perrier commence ainsi : « Quand il se sert des petits pour faire lever le Royaume, Jésus s’inscrit totalement dans la grande tradition d’Israël. A aucun moment, l’assemblée sainte du peuple d’Israël n’a accordé la moindre prééminence à la démarche savante des sapré soférim, c'est-à-dire les « gens du livre ». A la suite, la préoccupation de Jésus, comme celle de l’Eglise primitive, a toujours été de laisser s’exprimer et de renforcer la foi vivante du petit peuple de Dieu ».
Les mécanismes sociaux à la base de l’oralité populaire
Pour se faire une idée de l’oralité populaire de l’époque, il faut imaginer un monde sans photos de famille, sans vidéo, ni enregistrement sonore, sans TV. Dans ces conditions, la restitution des figures familiales passe par quelques mots justes, quelques anecdotes « bien vues », quelques épisodes marquant de sa vie qui permettent de conserver un souvenir de la personne. Cette évocation s’attache non à l’aspect extérieur, mais plutôt à la personnalité, elle est souvent plus profondément vivante et juste qu’une photo. Cet exercice n’est certes pas aisé dans le monde contemporain où la télévision nous a rendus intellectuellement passif. On « retrouve » encore aujourd’hui, un peu, ce style particulier de « tradition orale » lorsqu’il faut restituer la vie d’un défunt aux obsèques. C’est aussi un peu le style des témoins à la barre du tribunal. Il existe encore quelques phénomènes apparentés lors des naissances avec l’évocation des ascendants et l’analyse des ressemblances ou non avec l’une ou l’autre lignée. Mais nous sommes loin, dans la civilisation qui est la nôtre, de pratiquer un véritable style oral, avec ses procédés complexes de scansion des phrases et de composition symétrique, scandée du discours. Il n’y a plus aujourd’hui d’orateurs pour les produire, ni d’auditoires bien formés pour les recevoir. Dans la civilisation hébraïque du premier siècle, la première application du style oral était relative au choix du prénom que l’on allait donner au nouveau-né. Par la suite le nom, les surnoms et quelques petites anecdotes résumées en deux ou trois phrases animaient un texte oral évoquant un individu.
Ce genre de « code familial » qui consiste à dénommer une personne à partir d’une anecdote remarquable ou d’un mot piquant de la personne – connus de la seule famille - est encore vivante dans les groupes familiaux en Afrique, ainsi que les anecdotes colorées, voire drôles pour évoquer les défunts, y compris au moment du deuil ! Il est facile de comprendre – qu’en l’absence de recours fréquent au livre, il y a un besoin d’emphase donnée aux menus événements de la vie de village, de clan ou de tribu ; ce qui mène ainsi de véritables petites « sagas » orales et un besoin de récitations régulières créant le lien social, tout en conservant la mémoire vivante et l’identité du groupe. Ce qui est moins connu en revanche est que cette composition orale est un phénomène social et collectif, tout autant que la mémorisation et la transmission.
Et dans le processus oral, les femmes de la civilisation hébraïque du premier siècle ont une place de choix, même si elle n’est pas institutionnelle. En civilisation orale, la mise en forme des témoignages se fait d’abord grâce des modèles fournis par la tradition comme on le voit dans les textes de l’enfance de Jésus et de Jean Baptiste – avec le Magnificat est un exemple typique. Il est clair que Marie apparait dans ce texte comme une extraordinaire compositrice pratiquant avec art le pesher et le midrash. Le pesher est une méthode de composition orale consistant à reprendre un texte ancien et à le modifier plus ou moins profondément pour exprimer une chose nouvelle ayant une parenté de thème ou de situation pour orienter ce texte vers un sens nouveau. Le midrash vient de l’hébreu : darasz : chercher, interprèter. C’est un terme d’oralité qui désigne un commentaire ou une nouvelle composition obtenus en utilisant des paroles de la tradition. Les citations contenues dans l’Evangile sont en général midrashiques. Elles visent à expliquer le sens traditionnel en vue d’une méditation ou d’un jugement nouveau. Sur le fond, c’est tout le peuple qui est responsable collectivement de l’Alliance et responsable de recevoir, conserver et transmettre la Parole du Dieu Unique qui l’a élu. Les prêtres et les lévites sont responsables de transmettre, après la famille, en particulier par la célébration liturgique. Il y faut l’aide de bons connaisseurs, par cœur de tous les textes pour aider à retrouver, si nécessaire, le passage exact dans les textes de référence. Ainsi ils doivent être bons connaisseurs des décomptes, d’où leur noms : des safré de sofer. Le sfar est le rouleau où se fait le décompte et s’enchainent les textes. Le mot sfar signifie le rouleau et le décompte. C’est l’écrit de référence. Les prêtres et lévites doivent être surtout de bons connaisseurs de fond et de forme des textes, car c’est à eux qu’est dévolue la charge de redonner vie au texte en les récitant correctement. Les femmes excellent dans ce rôle et on les appelle alors les « mères de mémoire ». Elles soufflent les mots exacts et justes à ceux qui hésitent ou se trompent. Si je comprends bien la pensée de Pierre Perrier, les femmes n’ont pas de fonction liturgique, mais ont un rôle d’aide à toutes les étapes : composition collective, conservation des décomptes, mémorisation et rôle de souffleur-aide-mémoire (c'est-à-dire de paraqlita) lors de la récitation par cœur. C’est tout à fait ce rôle qui aurait été tenu par les premières « veuves » chrétiennes, terme inapproprié servant à désigner les femmes ne dépendant pas d’un homme. Pierre Perrier interprète le chapitre 6 des Actes des Apôtres et dédiées à la conservation de la Parole récitée, c'est-à-dire la tradition orale : http://eecho.fr/?p=2633. Source secondaire : La transmission des Evangiles. Pierre Perrier. Ed du Sarment. Pages 99 et 100, 154 et 155, 175. Février 2006. ISBN :2-86679-422-2.
La composition en petgames (les paroles et le rythme)
En littérature orale, la récitation d’un texte fait l’objet d’un balancement qui rythme les phrases que le récitateur ou le chanteur accompagne volontiers d’un léger balancement du corps. Le membre de phrase compris entre deux inspirations porte le nom araméen de petgama, dont le radical pt exprime à la fois le souffle et le son. S’il est attentif, l’auditeur se met au même rythme respiratoire que le récitateur. C’est au sens propre que l’auditeur est tenu « en haleine » et il est important que le rythme soit adapté pour que l’écoute en soit confortable. Le lien qui se crée entre le fil du discours et l’enchaînement régulier des petgames, qui ponctuent la récitation, donne au récit ce qu’on appelle sa texture. Quand la texture est renforcée par des citations connues de tous (exactes ou légèrement ajustée), la mémorisation en est rendue plus facile. Il serait naïf de voir le compositeur oral comme un littérateur assis à son bureau et s’efforçant à une écriture personnelle. Là où l’écrivain moderne cherche à multiplier les expressions recherchées et à mettre une marque personnelle, le compositeur oral s’efface humblement pour participer à la production et à la transmission dont il ne se considère pas l’auteur, mais seulement de « traditionneur ».
Beaucoup d’événement font l’objet d’une mémorisation textuelle quasi immédiate C’est en particulier le cas des miracles. Devant ces événements extraordinaires, il arrive souvent qu’un texte oral instantané jaillisse de la bouche d’un témoin compositeur. S’il est juste et reconnu exact par la communauté, ce texte est ruminé et mille fois redit, jusqu’à être intégré à une collection. Il est important de comprendre que ces textes oraux sont faits pour être répétés ou transmis. Ce sont des « récitatifs » comme la « guérison du lépreux » ou le « discours du Pain de Vie ». En araméen, on les appelle des tash’iatha, mot qui recouvre les paroles et les gestes du mime. Ils font l’objet d’une rumination, c'est-à-dire une récitation à soi-même qui permet de les mémoriser en améliorant progressivement le choix des mots, des gestes et des intonations, et d’en acquérir une une compréhension plus intime. Grâce à cette pratique, l’essentiel se dégage peu à peu. En araméen, cette action de ruminer s’appelle pehaq, c'est-à-dire le « soupèsement ». C’est là le terme qu’emploie l’Evangile quand il dit que Marie « conservait toutes ces paroles dans son cœur ».
Le contenu des témoignages doit être considéré comme parfaitement fiable, inattaquable par les auditeurs. Pour y parvenir les compositeurs-témoins sont poussés à répéter – par exemple les récits de miracles - devant témoins, le plus souvent et le plus fidèlement possible. Ils sont poussés à cristalliser leurs témoignages et à y rester parfaitement fidèles – sous peine d’être accusés d’avoir changé quelque chose à l’histoire. Si dans une civilisation de tradition littéraire ou intellectuelle, on s’efforce d’enrichir le texte en lui apportant des modifications, en milieu oral, au contraire, la simplicité brève et la fidélité exacte au mot près est considéré comme la qualité par excellence. Autre différence, en civilisation orale, la répétition fidèle des mêmes textes n’est pas synonyme de monotonie, mais le garant de la solidité et de l’importance des témoignages donnés.
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Le collier, l’enchaînement oral (les enchaînements)
Il faut donc soupeser et comparer les récitatifs et les ajuster le plus exactement les uns aux autres dans une même collection. Cette action d’enchaîner les tash’iatha est essentielle à la tradition orale. Pour restituer un événement ou raconter la vie d’une personne, le compositeur oral est naturellement amené à utiliser des récitatifs qui évoquent plusieurs moments d’une histoire ou ont été recueillis par des témoins différents. Il doit alors veiller à la fois à ce que le sens du récitatif, qui constitue chacun une unité narrative autosuffisante, ne soit pas altéré par la présence des récitatifs voisins et à ce que l’enchaînement produise un sens global cohérent. Cet enchaînement des récitatifs s’appelle des « colliers » et leur composition suppose l’utilisation d’éléments de transition qui permettent de nouer les éléments les uns avec les autres. L’opération du nouage et de dénouage – qui de dit shra en araméen – revêt une importance considérable. C’est à cause de cette analogie entre le nouage et la mémorisation que les juifs pieux ont pris l’habitude d’orner de nœuds les franges de leurs habits. Le nombre de ces nœuds aide-mémoire a souvent un sens précis. Les récitatifs seront mis bout à bout et noués entre eux par des « agrafes », c’est à dire des éléments de liaison qui donneront un enchaînement mnémotechnique. Le collier fonctionnera souvent sur le principe du jeu enfantin : « marabout - bout de ficelle – selle de cheval, etc. » ; la fin d’un récitatif donnant mécaniquement le début du récitatif suivant. Ce mode de récitation permettra de rappeler l’enchainement des récitatifs à la mémoire du récitateur qui, de cette façon ne pourra en oublier aucun. Il faut d’ailleurs comprendre que la comptine d’enchainement des débuts ou des mots clés des texte constitue le " collier-compteur " du collier de récitation.
Un exemple approximatif, de ce type de moyen mnémotechnique. En anatomie humaine, les 12 nerfs crâniens sont les suivants : 1. Olfactifs, 2. Optiques, 3. Moteur oculaire commun, 4. Pathétiques, 5. Trijumeau, 6. Moteur oculaire externe, 7. Faciaux, 8. Auditifs, 9. Glosso-pharyngiens, 10. Pneumogastriques, 11. Spinaux, 12. Grand hypoglosse. Cette liste un peu complexe peut être reconstituée avec la phrase aide-mémoire suivante : « O, Oscar Ma Petite Théière Me Fait A Grand Peine Six Grogs ».
Un autre élément important dans ce mode de récitation tient au nombre d’éléments enchaînés, lequel produit des effets de symétrie qui faciliter la mémorisation du texte. Cette symétrie est organisée sur base 5 ou 7. Ou un multiple de 5 comme le Décalogue ou le Symbole des Apôtres. Ou un multiple de 7 ; ce chiffre offre deux possibilités de rythme : « 3, 1, 3 » ou « 3, 3, 1 ». Le chiffre 7 est en outre un élément important d’organisation du temps dans la culture hébraïque. Il y a aussi une analogie très forte entre le tissage des textes oraux et la structuration de la mémoire (travaux de Marcel Jousse sur les mécanismes de mémorisation et de récitation : 1925 à 1950). Le sens de la trame est l’axe du temps, ce qui renvoie à la vision synchronique du monde, c'est-à-dire à la succession de tout ce qui se passe à un temps donné. Le sens de la navette représente le sens diachronique du temps, c’est cet axe qui fait apparaître le dessin, le motif sur l’étoffe. Ainsi le récit amène l’auditeur à un point (sens de la trame) où l’action va commencer, puis « s’immobilise » pour la laisser s’accomplir (sens de la navette). La récitation mêle les deux axes du tissage, comme la Parole créatrice de Dieu est à la croisée de ces deux axes d’exposé.
Des récits – par exemple le miracle – de longueur identique ne différent apparemment que par un ou deux détails. Ces petites variations entre les récits sont très importantes. L’hypothèse totalement étrangère au milieu oral consiste à croire qu’il s’agit de deux récits portant sur le même miracle alors que c’est justement par ce procédé même que le compositeur oral prend bien soin de signifier qu’il s’agit de deux faits différents. Il le fait selon une pratique courante en oralité, en rattachant à chacun des récits des chiffres particuliers dont il est essentiel de comprendre le sens : le chiffre 12 correspond à un qoubala des tribus d’Israël, qui est le repas de deuil ; le chiffre 7 à un qoubala plus sacré, c'est-à-dire à une cérémonie liturgique d’initiation ; deux scènes bien distinctes où Jésus a agi avec puissance dans la cas des deux multiplication des pains. Les qoubalas encore en usage chez les judéo-chrétiens du premier siècle (peut-être mentionnées chez Clément de Rome en 90) sont a distinguer des qourbana comprenant un liturgie de consécration, c'est-à-dire comprenant le Repas du Seigneur, alors que les qoubala sont plus axées sur le " Festin de la Parole " de Dieu avec seulement une bénédiction.
Les textes oraux sont habituellement appuyés sur un rythme binaire – avec un léger balancement latéral, nous l’avons dit plus haut. Mais il peut arriver que ce rythme soit compliqué par un troisième élément qui vient rompre ce rythme binaire, régulier facile à mémoriser mais un peu monotone. Ce rythme à trois temps crée alors un nouvel axe rythmique qui se décroche perpendiculairement et que le récitant accompagne d’un mouvement qui cette fois se fait d’arrière en avant. Cette rupture de rythme peut souligner certains mots et certaines petites phrases chargés de sens. Le bon compositeur oral sait fort bien s’en servir pour faire progresser le discours. Il y a un usage assez systématique de ce procédé chez Saint Jean, ce qui donne une progression sensible des significations (polysémie) et un effet méditation accentué (Voir ci-dessous le commentaires sur l'Annexe 2). Une petgame ne correspond pas à notre conception de la métrique poétique (en syllabes). La reprise entre deux respirations peut comporter un nombre inégal de syllabes. Si le petgame est très chargé en suyllabes, il faudra le prononcer rapidement et le texte aura quelque s=chose d’agressif, de déclamatoier ; si au contraire, les mots émis entre deux reprises de respiraton sont peu nombreux, le texte sera plus léger, plus flexible, plus propice à l’évocation. Comme le rythme, le contenu des petgames donne au texte une résonance singulière, une tonalité et un souffle d’esprit
Marcel Jousse – avant Pierre Perrier – a en quelque sorte décrit l’anthropologie de la tradition orale. Il a décrit la tendance irrépressible de l’auditeur attentif à devenir un récepteur-mimeur de ce qui l’entoure et à son tour de « récepteur » il devient un « exprimeur » qui rejoue à l’extérieur tout de qu’il a reçu par toutes les fibres de son corps. Ce fonctionnement a été dénommé « mimisme » par Marcel Jousse. La mémorisation suppose donc une attitude de mimisme. La capacité de respirer en même temps que celui qui parle est le ressort indispensable à l’oralité. En mettant l’auditeur au diapason de l’orateur, elle permet en effet d’adhérer à son rythme intérieur et donc de mieux s’immiscer dans sa pensée.
La prise de notes en araméen au temps de Jésus
Il ne faut pas croire que les notes écrites n’existaient pas au temps de Jésus. D’abord parce qu’il y en a des preuves archéologiques et ensuite parce qu’en Palestine une assez bonne proportion de la population était non seulement capable d’écrire, mais aussi de prendre des notes à la volée. Il y avait ainsi une quantité de « secrétaires à la demande » éventuellement disponibles. Ce travail était facilité par l’usage de l’araméen écrit : une langue compacte écrite par ses seules consonnes comme l’arabe. La prise de note au fil de la parole était ainsi possible techniquement, cette prise de note produisant un aide-mémoire parfaitement lisible pour celui qui a pris ces notes.
Source principale : Evangile de l’oral à l’écrit. Pierre Perrier. Ed. Sarment. Octobre 2007. Chapitre II. ISBN : 2-86679-296-3. Cet ouvrage modeste : 260 pages de texte comportent deux annexes que je trouve franchement stupéfiantes , à elles seules elles justifient l'achat de ce livre ! :
- L'annexe 1 : l'ordrage et le fonctionnement du texte définitif de Jean (Deux versions avant Jean 3 vers 95-100) qui démontre une structuration du Jean 3 sur le canevas du Cantique des Cantiques. L'Evangile de Jean est un pesher du Cantique des Cantiques !!! (pages 271 à 279) ;
- L'analyse du Magnificat qui est une compilation, un midrash de 52 citations bibliques (page 286)
Il faut donc soupeser et comparer les récitatifs et les ajuster le plus exactement les uns aux autres dans une même collection. Cette action d’enchaîner les tash’iatha est essentielle à la tradition orale. Pour restituer un événement ou raconter la vie d’une personne, le compositeur oral est naturellement amené à utiliser des récitatifs qui évoquent plusieurs moments d’une histoire ou ont été recueillis par des témoins différents. Il doit alors veiller à la fois à ce que le sens du récitatif, qui constitue chacun une unité narrative autosuffisante, ne soit pas altéré par la présence des récitatifs voisins et à ce que l’enchaînement produise un sens global cohérent. Cet enchaînement des récitatifs s’appelle des « colliers » et leur composition suppose l’utilisation d’éléments de transition qui permettent de nouer les éléments les uns avec les autres. L’opération du nouage et de dénouage – qui de dit shra en araméen – revêt une importance considérable. C’est à cause de cette analogie entre le nouage et la mémorisation que les juifs pieux ont pris l’habitude d’orner de nœuds les franges de leurs habits. Le nombre de ces nœuds aide-mémoire a souvent un sens précis. Les récitatifs seront mis bout à bout et noués entre eux par des « agrafes », c’est à dire des éléments de liaison qui donneront un enchaînement mnémotechnique. Le collier fonctionnera souvent sur le principe du jeu enfantin : « marabout - bout de ficelle – selle de cheval, etc. » ; la fin d’un récitatif donnant mécaniquement le début du récitatif suivant. Ce mode de récitation permettra de rappeler l’enchainement des récitatifs à la mémoire du récitateur qui, de cette façon ne pourra en oublier aucun. Il faut d’ailleurs comprendre que la comptine d’enchainement des débuts ou des mots clés des texte constitue le " collier-compteur " du collier de récitation.
Un exemple approximatif, de ce type de moyen mnémotechnique. En anatomie humaine, les 12 nerfs crâniens sont les suivants : 1. Olfactifs, 2. Optiques, 3. Moteur oculaire commun, 4. Pathétiques, 5. Trijumeau, 6. Moteur oculaire externe, 7. Faciaux, 8. Auditifs, 9. Glosso-pharyngiens, 10. Pneumogastriques, 11. Spinaux, 12. Grand hypoglosse. Cette liste un peu complexe peut être reconstituée avec la phrase aide-mémoire suivante : « O, Oscar Ma Petite Théière Me Fait A Grand Peine Six Grogs ».
Un autre élément important dans ce mode de récitation tient au nombre d’éléments enchaînés, lequel produit des effets de symétrie qui faciliter la mémorisation du texte. Cette symétrie est organisée sur base 5 ou 7. Ou un multiple de 5 comme le Décalogue ou le Symbole des Apôtres. Ou un multiple de 7 ; ce chiffre offre deux possibilités de rythme : « 3, 1, 3 » ou « 3, 3, 1 ». Le chiffre 7 est en outre un élément important d’organisation du temps dans la culture hébraïque. Il y a aussi une analogie très forte entre le tissage des textes oraux et la structuration de la mémoire (travaux de Marcel Jousse sur les mécanismes de mémorisation et de récitation : 1925 à 1950). Le sens de la trame est l’axe du temps, ce qui renvoie à la vision synchronique du monde, c'est-à-dire à la succession de tout ce qui se passe à un temps donné. Le sens de la navette représente le sens diachronique du temps, c’est cet axe qui fait apparaître le dessin, le motif sur l’étoffe. Ainsi le récit amène l’auditeur à un point (sens de la trame) où l’action va commencer, puis « s’immobilise » pour la laisser s’accomplir (sens de la navette). La récitation mêle les deux axes du tissage, comme la Parole créatrice de Dieu est à la croisée de ces deux axes d’exposé.
Des récits – par exemple le miracle – de longueur identique ne différent apparemment que par un ou deux détails. Ces petites variations entre les récits sont très importantes. L’hypothèse totalement étrangère au milieu oral consiste à croire qu’il s’agit de deux récits portant sur le même miracle alors que c’est justement par ce procédé même que le compositeur oral prend bien soin de signifier qu’il s’agit de deux faits différents. Il le fait selon une pratique courante en oralité, en rattachant à chacun des récits des chiffres particuliers dont il est essentiel de comprendre le sens : le chiffre 12 correspond à un qoubala des tribus d’Israël, qui est le repas de deuil ; le chiffre 7 à un qoubala plus sacré, c'est-à-dire à une cérémonie liturgique d’initiation ; deux scènes bien distinctes où Jésus a agi avec puissance dans la cas des deux multiplication des pains. Les qoubalas encore en usage chez les judéo-chrétiens du premier siècle (peut-être mentionnées chez Clément de Rome en 90) sont a distinguer des qourbana comprenant un liturgie de consécration, c'est-à-dire comprenant le Repas du Seigneur, alors que les qoubala sont plus axées sur le " Festin de la Parole " de Dieu avec seulement une bénédiction.
Les textes oraux sont habituellement appuyés sur un rythme binaire – avec un léger balancement latéral, nous l’avons dit plus haut. Mais il peut arriver que ce rythme soit compliqué par un troisième élément qui vient rompre ce rythme binaire, régulier facile à mémoriser mais un peu monotone. Ce rythme à trois temps crée alors un nouvel axe rythmique qui se décroche perpendiculairement et que le récitant accompagne d’un mouvement qui cette fois se fait d’arrière en avant. Cette rupture de rythme peut souligner certains mots et certaines petites phrases chargés de sens. Le bon compositeur oral sait fort bien s’en servir pour faire progresser le discours. Il y a un usage assez systématique de ce procédé chez Saint Jean, ce qui donne une progression sensible des significations (polysémie) et un effet méditation accentué (Voir ci-dessous le commentaires sur l'Annexe 2). Une petgame ne correspond pas à notre conception de la métrique poétique (en syllabes). La reprise entre deux respirations peut comporter un nombre inégal de syllabes. Si le petgame est très chargé en suyllabes, il faudra le prononcer rapidement et le texte aura quelque s=chose d’agressif, de déclamatoier ; si au contraire, les mots émis entre deux reprises de respiraton sont peu nombreux, le texte sera plus léger, plus flexible, plus propice à l’évocation. Comme le rythme, le contenu des petgames donne au texte une résonance singulière, une tonalité et un souffle d’esprit
Marcel Jousse – avant Pierre Perrier – a en quelque sorte décrit l’anthropologie de la tradition orale. Il a décrit la tendance irrépressible de l’auditeur attentif à devenir un récepteur-mimeur de ce qui l’entoure et à son tour de « récepteur » il devient un « exprimeur » qui rejoue à l’extérieur tout de qu’il a reçu par toutes les fibres de son corps. Ce fonctionnement a été dénommé « mimisme » par Marcel Jousse. La mémorisation suppose donc une attitude de mimisme. La capacité de respirer en même temps que celui qui parle est le ressort indispensable à l’oralité. En mettant l’auditeur au diapason de l’orateur, elle permet en effet d’adhérer à son rythme intérieur et donc de mieux s’immiscer dans sa pensée.
La prise de notes en araméen au temps de Jésus
Il ne faut pas croire que les notes écrites n’existaient pas au temps de Jésus. D’abord parce qu’il y en a des preuves archéologiques et ensuite parce qu’en Palestine une assez bonne proportion de la population était non seulement capable d’écrire, mais aussi de prendre des notes à la volée. Il y avait ainsi une quantité de « secrétaires à la demande » éventuellement disponibles. Ce travail était facilité par l’usage de l’araméen écrit : une langue compacte écrite par ses seules consonnes comme l’arabe. La prise de note au fil de la parole était ainsi possible techniquement, cette prise de note produisant un aide-mémoire parfaitement lisible pour celui qui a pris ces notes.
Source principale : Evangile de l’oral à l’écrit. Pierre Perrier. Ed. Sarment. Octobre 2007. Chapitre II. ISBN : 2-86679-296-3. Cet ouvrage modeste : 260 pages de texte comportent deux annexes que je trouve franchement stupéfiantes , à elles seules elles justifient l'achat de ce livre ! :
- L'annexe 1 : l'ordrage et le fonctionnement du texte définitif de Jean (Deux versions avant Jean 3 vers 95-100) qui démontre une structuration du Jean 3 sur le canevas du Cantique des Cantiques. L'Evangile de Jean est un pesher du Cantique des Cantiques !!! (pages 271 à 279) ;
- L'analyse du Magnificat qui est une compilation, un midrash de 52 citations bibliques (page 286)
Roque- Messages : 5064
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
(quand j'étais lycéen, c'était "Pour Mon Ami Tarzan" qui me permettait de me souvenir de l'ordre "Prophase-Métaphase-Anaphase-Télophase" )Roque a écrit:Un exemple approximatif, de ce type de moyen mnémotechnique. En anatomie humaine, les 12 nerfs crâniens sont les suivants : 1. Olfactifs, 2. Optiques, 3. Moteur oculaire commun, 4. Pathétiques, 5. Trijumeau, 6. Moteur oculaire externe, 7. Faciaux, 8. Auditifs, 9. Glosso-pharyngiens, 10. Pneumogastriques, 11. Spinaux, 12. Grand hypoglosse. Cette liste un peu complexe peut être reconstituée avec la phrase aide-mémoire suivante : « O, Oscar Ma Petite Théière Me Fait A Grand Peine Six Grogs »
...Encore merci pour tes contributions
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...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
-Ren- a écrit:Et merci à toi pour ces liens !mario-franc_lazur a écrit:MERCI, mon cher REN d'avoir ouvert ce sujet !
Je t'en prie , mon cher REN ...
Re : Débats sur la mise par écrit des Evangiles.
Yahia a écrit:
Cette hypothèse-ci semble beaucoup mieux prendre en compte le milieu dont sont sortis ces textes. Effectivement , faire l'histoire de l'établissement des textes écrits en passant outre le passage par l'oralité me semble aberrant.
Ce qui me frappe, c'est que la même erreur est reproduite par les critiques occidentaux vis-à-vis de l'établissement du Coran, dans leur mépris-ignorance de la tradition orale.
Je mets du temps à répondre car je prépare le "bouquet final".
Oui la présence de la tradition orale est mal appréciée, mais je crois que c'est également la cas pour le Coran de la part des musulmans eux-mêmes. J'en veux pour preuve une mauvaise comprehension de ce qu'est la "falsification" visée par le Coran. C'est probablement - dans certains versets - une falsification de la récitation orale - et non d'abord de l'écrit. Cela ma parait frappant pour une néophyte comme moi, lisant le Coran avec un oeil "non éduqué" par l'Islam. Exemples :
- 2.75 : « Eh bien, espérez-vous [Musulmans], que des pareils gens (les Juifs) vous partageront la foi alors qu'un groupe d'entre eux, après avoir entendu et compris la parole d'Allah, la falsifièrent sciemment ».
- 3.78 : « Et il y a parmi eux certains qui roulent leur langues en lisant le Livre pour vous faire croire que cela provient du Livre, alors qu'il n'est point du Livre; et ils disent: ‹Ceci vient d'Allah›, alors qu'il ne vient pas d'Allah. Ils disent sciemment des mensonges contre Allah ».
- 4.46 : « Il en est parmi les Juifs qui détournent les mots de leur sens, et disent : ‹Nous avions entendu, mais nous avons désobéi›, ‹Ecoute sans qu'il te soit donné d'entendre›, et favorise nous ‹Raina›, tordant la langue et attaquant la religion. Si au contraire ils disaient: ‹Nous avons entendu et nous avons obéi›, ‹Ecoute›, et ‹Regarde-nous›, ce serait meilleur pour eux, et plus droit. Mais Allah les a maudits à cause de leur mécréance; leur foi est donc bien médiocre ».
- 5.13 : « Et puis, à cause de leur violation de l'engagement, Nous les avons maudits et endurci leurs cœurs : ils détournent les paroles de leur sens et oublient une partie de ce qui leur a été rappelé. Tu ne cesseras de découvrir leur trahison, sauf d'un petit nombre d'entre eux. Pardonne-leur donc et oublie [leurs fautes]. Car Allah aime, certes, les bienfaisants ».
- 5.15 : « Gens du Livre! Notre Messager (Muhammad) vous est certes venu, vous exposant beaucoup de ce que vous cachiez du Livre, et passant sur bien d'autres choses! Une lumière et un Livre explicite vous sont certes venus d'Allah".
- 7.162 : « Puis, les injustes parmi eux changèrent en une autre, la parole qui leur était dite. Alors Nous envoyâmes du ciel un châtiment sur eux, pour le méfait qu'ils avaient commis".
Si on réfléchit bien, il est difficile d’expliquer la réaction de Muhammad dans le verset qui suit – sans accepter que l’acte de la récitation exacte est considéré comme capital, c’est à dire « sacré », voir « puissant spirituellement » - ou au moins l'autorité première de l'oral et sans commune mesure avec l’importance de l’écrit :
(53.19-23) : « Que vous en semble [des divinités] Lat et Uzza, ainsi que Manat, cette troisième autre ? Sera-ce à vous le garçon et à Lui la fille ? Que voilà donc un partage injuste ! Ce ne sont que des noms que vous avez inventés, vous et vos ancêtres. Allah n'a fait descendre aucune preuve à leur sujet. Ils ne suivent que la conjecture et les passions de [leurs] âmes, alors que la guidée leur est venue de leur Seigneur ».
De ce point de vue, où c’est la récitation orale ou l'autorité de l'oral qui prime complètement sur l’écrit, il n’est pas forcément nécessaire que certaines doctrines - totalement hétéroxes - prétendument « juives » ou « chrétiennes » figurent réellement dans les Ecritures : Bible ou Evangile, il suffit que quelqu’un ait proféré ce genre de propos déviant pour que le groupe entier soit condamné par Muhammad. Deux exemples :
9.30 : « Les Juifs disent : ‹Uzayr est fils d'Allah› et les Chrétiens disent: ‹Le Christ est fils d'Allah›. Telle est leur parole provenant de leurs bouches. Ils imitent le dire des mécréants avant eux. Qu'Allah les anéantisse! Comment s'écartent-ils (de la vérité) ».
5.116 : « (Rappelle-leur) le moment où Allah dira: ‹ش Jésus, fils de Marie, est-ce toi qui as dit aux gens: ‹Prenez-moi, ainsi que ma mère, pour deux divinités en dehors d'Allah?› Il dira: ‹Gloire et pureté à Toi! Il ne m'appartient pas de déclarer ce que je n'ai pas le droit de dire! Si je l'avais dit, Tu l'aurais su, certes. Tu sais ce qu'il y a en moi, et je ne sais pas ce qu'il y a en Toi. Tu es, en vérité, le grand connaisseur de tout ce qui est inconnu ».
Sur cette base de tradition de récitation orale de statut sacré ou d'autorité première de l'oral – sans même prendre en compte l’écrit – une solide révision de la doctrine de la "falsification" des Ecritures – selon la conception du Coran est éventuellement possible.
Pour finir, (je ne suis pas compétent, car je n'envisage ce problème qu'en écrivant ici), mais il y a peut être aussi dans la Coran un problématique de la puissance de l’évocation des noms : nom des dieux, Nom de Dieu (problématique qui existe également dans la Bible).
Roque- Messages : 5064
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
La révision est d'autant plus possible que l'avis actuel (falsification de l'écrit) n'a pas été partagé par l'ensemble des musulmans. Mais c'est en soi un autre sujet que celui-ci...Roque a écrit:Sur cette base de tradition de récitation orale de statut sacré ou d'autorité première de l'oral – sans même prendre en compte l’écrit – une solide révision de la doctrine de la "falsification" des Ecritures – selon la conception du Coran est éventuellement possible
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Re : La mise par écrit des Evangiles
Roque a écrit:
Il y a aussi une analogie très forte entre le tissage des textes oraux et la structuration de la mémoire (travaux de Marcel Jousse sur les mécanismes de mémorisation et de récitation : 1925 à 1950). Le sens de la trame est l’axe du temps, ce qui renvoie à la vision synchronique du monde, c'est-à-dire à la succession de tout ce qui se passe à un temps donné. Le sens de la navette représente le sens diachronique du temps, c’est cet axe qui fait apparaître le dessin, le motif sur l’étoffe. Ainsi le récit amène l’auditeur à un point (sens de la trame) où l’action va commencer, puis « s’immobilise » pour la laisser s’accomplir (sens de la navette). La récitation mêle les deux axes du tissage, comme la Parole créatrice de Dieu est à la croisée de ces deux axes d’exposé.
Je ne résiste pas à l'envie de vous partager ce texte que je trouve somptueux (point de vue de chrétien). "Langage analogique" avec sa ploysémie est beaucoup plus évocateur que plusieurs tomes téhologiques en "langage conceptuel". Je comprends, à mon avis, très bien ce type de langage analogique, très long à démêler quand il faut le traduire en concepts logiques.
Pierre Perrier n'avait sans doute pas pensé à l'analogie entre la chair du Christ et le fil de trame ou entre le métier à tisser et la Croix du Christ
" Le Verbe de Dieu qui était sans chair s'est revêtu de la sainte chair, prise de la Vierge sainte, comme une jeune marié (se revêt de son) manteau qu'il a lui-même achevé de tisser dans la souffrance de la croix. Ainsi en mélangeant notre corps mortel à la puissance, en mêlant le corruptible à l'incorruptible et le faible au fort, il sauve l'homme en perdition.
Tel est le métier à tisser du Seigneur, cest la Passion qu'il a endurée sur la croix. Sur elle, le fil de chaîne c'est comme la orce du Saint Esprit. Le fil de trame c'est comme la saine chair (du Christ) tissée dans l'Esprit. Le fil du fuseau, c'est la grâce qui par l'amour du Christ, enserra et noua les deux fils en un seul. La navette, c'est le Verbe. Les ouvriers; ce sont les patriarches et les prophètes qui tissent la belle tunique parfaite, tmobant jusqu'aux pieds du Christ. ar eux le Verbe, à la manière du passage de la navette, achève le tissage selon la volonté exacte du Père.
Attribué traditionnellement à Saint Hippolyte, prêtre à Rome, mort en martyr à Lampedouza (+ 235)
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Non il n'est pas mort à Lampedousa, ni même à Tripoli ... mais en Sardaigne !
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
"Ah, ces jeunes !"Roque a écrit:Poisson d'avril !
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
-Ren- a écrit:Roque a écrit:Poisson d'avril !
"Ah, ces jeunes !"
Et ce sont les 33 ans de notre REN qui osent dire ça !!!
Re: La mise par écrit des Evangiles
Tiens je n'avais pas remarqué, je fais "Ren" x 2 , puisque "Ren = 33" et "Roque = 66".
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Bien sûr, c'est tout de suite plus drôlemario-franc_lazur a écrit:Et ce sont les 33 ans de notre REN qui osent dire ça !!!
...Mais le demi-Roque que je suis vous invite à reprendre le fil du sujet
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Re : La mise par écrit des Evangiles
-Ren- a écrit:Pourrais-tu nous dire lesquels ?Roque a écrit:Cette « texture » ou ce « tissage » du texte sont spécifique de la tradition orale rabbinique. Elle se retrouve dans les premiers chapitres des Actes des Apôtres, mais est pratiquement totalement absente des apocryphes (sauf 2)
Ren, j'avais bien retenu ton intéressante question, mais je n'ai pas encore une réponse très complète. Voici ce que j'ai déjà trouvé (car ce n'est pas un sujet regroupé en tant que tel dans les livres de Pierre Perrier) :
Des textes où il y a le tissage et la rythmique de la tradition rabbinique orale - bien sûr dans les textes en araméen - cela ne peut exister dans les textes en grec :
1. Les Karozouthas (récitation orale gestuée araméenne) des quatre Evangile - sur la totalité de ces textes araméens ;
2. Les 10 ou 12 premiers chapitres des Actes des Apôtres (je n'ai pas retrouvé le passage où j'ai lu ça) ;
3. Une partie du Transitus Mariae (source 1, p. 59), sans autre précision ;
4. Une partie - sans plus de précision - du Protévangile de Jacques (source 1, p. 59), sans autre précision
5. Une partie de l'Evangile de Thomas (source 1, p. ? ) ;
6. Sans doute une partie des Actes de Pierre (source 2, p. 779).
Pas du tout exhaustif. Je continue mes recherches ...
Tout cela sous caution +++ Avec trois remarques :
- L'évangile de Thomas est constitué de 114 chapitres qui provient de la segmentation en 114 segments de la Karozoutha de Matthieu, laquelle correspond - d'après Pierre Perrier aux différentes célébrations du culte synagogal annuel - je n'ai pas retrouvé où j'ai lu ça. Cela rappelle bien entendu les 114 récitations (sourates) du Coran ;
- Une partie du Diatessaron (source 1, pages 239-241) de Tatien. Le terme Diatessaron signifie la quarte, c'est à dire l'accord musical de quatre note. C'est un regroupement des petgames des quatre évangiles - en un seul texte fait à Rome au milieu du 2ème siècle. Pierre Perrier écrit : " Tatien en effet connait bien les problèmes relatifs à la composition orale et il sait fort bien qu'il faut additionner les témoignages en se gardant de consdérer leurs écrats comme des contradictions. De ce fait, il n'est jamais tenté de corriger les mots des textes originaux pour les fondre en un tout homogène ". Autant que je sache les affirmations de Pierre Perrier sont à nuancer car on ne possède son texte complet qu'en grec et latin. Il n'en reste que des traces dans les liturgies syriaques du Vendredi Saint (vérifier tout ce qui est en itallique). Le Diatessaron a été totalement disqualiofié par l'Eglise gréco-latine, c'est à dire "occidentale" et Tatien a été accusé d'hérésie (source 1, p. 241).
- Tout ce qui est écrit apocryphe purement sapentiel (monologue ou dialogue de style grec ne reposant sur aucun témoignage) n'est - a priori - pas "tissé et rythmé" comme la récitation orale. C'est bien aussi entendu à vérifier.
Sources :
1. Evangile de l'oral à l'écrit. Ed Sarment. Pierre perrier. 2007. ISBN : 2-86679-296-3
2. Les Colliers Evangékiques. Ed Sarment. Pierre Perrier. 2003 ISBN : 2-8667-9358-7
Roque- Messages : 5064
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Te connaissant, je n'en doutais pasRoque a écrit:Ren, j'avais bien retenu ton intéressante question
...Merci por ces premiers éléments de réponse
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Je découvre à propos de l'Evangile de Marc qui colle - sans doute (il faudrait le lire) - avec ce que disait Pierre Perrier de l'Evangile de Matthieu qui est découpé en 114 récitations - pour coller au ctcle liturgique annuel juif (on retrouve ce découpage en 114 récitations dans l'Evangile de Thomas et le Coran) :
L’ÉVANGILE DANS LE CALENDRIER : MARC RÉVÉLÉ PAR LA LITURGIE JUIVE Par DENIS GRENIER
http://www.pictogrameditions.qc.ca/pages/evancal7.html
"Qu’est-ce qu’un évangile ?
Quel rôle devait-il jouer dans la première Église ?
La plupart des experts vous diront que les évangiles sont le fait de communautés chrétiennes hellénistiques situées à Antioche, à Éphèse ou à Rome, et que leur rôle premier était d’affermir les chrétiens dans leur foi au Christ Sauveur.
L’auteur a dû revoir en profondeur cette position lorsqu’il s’est rendu compte que l’Évangile de Marc avait été conçu pour être appris (c’est-à-dire mémorisé) sur un cycle liturgique d’un an, suivant le calendrier et les fêtes d’Israël, de même que chacune des péricopes de la Torah et des Prophètes qu’on lisait chaque sabbat à la synagogue. À l’évidence, tout le texte de l’évangile avait été distribué sur le calendrier à raison de deux énoncés par jour, à l’exception des sabbats, où une pause était observée. Il était donc possible d’inscrire le cycle de Marc avec grande précision dans son calendrier de façon à reconstituer tout le programme d’apprentissage.
L’auteur retrace chacune des étapes de la recherche qui l’a mené à revoir en profondeur sa lecture d’un évangile. Dans un style vif, clair et accessible, il jette un nouvel éclairage sur l’origine de cette tradition et son enracinement dans la foi et la culture des Juifs"
C'est un argument très solide pour un enracinement primaire dans l'Eglise judéo-chrétienne (juifs convertis comme les Apôtres) et contre l'enracinement primaire des Evangiles dans le milieu, la forme et les styles littéraires de culture grécque - c'est à dire dans l'Eglise pagano-chrétienne. C'est pourtant l'idée maîtresse de la formgeschichte (Bultman, Dibelius dans les années 1919-1921) encore toute puissante aujourd'hui et tendant à démontrer que les Evangiles - notamment celui de Marc - sont postérieurs à la chute de Jérusalem et à la mort de la totalité des Apôtres (sauf Jean, bien entendu).
L’ÉVANGILE DANS LE CALENDRIER : MARC RÉVÉLÉ PAR LA LITURGIE JUIVE Par DENIS GRENIER
http://www.pictogrameditions.qc.ca/pages/evancal7.html
"Qu’est-ce qu’un évangile ?
Quel rôle devait-il jouer dans la première Église ?
La plupart des experts vous diront que les évangiles sont le fait de communautés chrétiennes hellénistiques situées à Antioche, à Éphèse ou à Rome, et que leur rôle premier était d’affermir les chrétiens dans leur foi au Christ Sauveur.
L’auteur a dû revoir en profondeur cette position lorsqu’il s’est rendu compte que l’Évangile de Marc avait été conçu pour être appris (c’est-à-dire mémorisé) sur un cycle liturgique d’un an, suivant le calendrier et les fêtes d’Israël, de même que chacune des péricopes de la Torah et des Prophètes qu’on lisait chaque sabbat à la synagogue. À l’évidence, tout le texte de l’évangile avait été distribué sur le calendrier à raison de deux énoncés par jour, à l’exception des sabbats, où une pause était observée. Il était donc possible d’inscrire le cycle de Marc avec grande précision dans son calendrier de façon à reconstituer tout le programme d’apprentissage.
L’auteur retrace chacune des étapes de la recherche qui l’a mené à revoir en profondeur sa lecture d’un évangile. Dans un style vif, clair et accessible, il jette un nouvel éclairage sur l’origine de cette tradition et son enracinement dans la foi et la culture des Juifs"
C'est un argument très solide pour un enracinement primaire dans l'Eglise judéo-chrétienne (juifs convertis comme les Apôtres) et contre l'enracinement primaire des Evangiles dans le milieu, la forme et les styles littéraires de culture grécque - c'est à dire dans l'Eglise pagano-chrétienne. C'est pourtant l'idée maîtresse de la formgeschichte (Bultman, Dibelius dans les années 1919-1921) encore toute puissante aujourd'hui et tendant à démontrer que les Evangiles - notamment celui de Marc - sont postérieurs à la chute de Jérusalem et à la mort de la totalité des Apôtres (sauf Jean, bien entendu).
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Roque a écrit:.............................
C'est un argument très solide pour un enracinement primaire dans l'Eglise judéo-chrétienne (juifs convertis comme les Apôtres) et contre l'enracinement primaire des Evangiles dans le milieu, la forme et les styles littéraires de culture grécque - c'est à dire dans l'Eglise pagano-chrétienne. C'est pourtant l'idée maîtresse de la formgeschichte (Bultman, Dibelius dans les années 1919-1921) encore toute puissante aujourd'hui et tendant à démontrer que les Evangiles - notamment celui de Marc - sont postérieurs à la chute de Jérusalem et à la mort de la totalité des Apôtres (sauf Jean, bien entendu).
MERCI, cher Roque pour cette analyse qui va dans le sens de ce que j'ai toujours pensé !!!
Et pourquoi, dis-moi, "sauf Jean, bien entendu" ?
Fraternellement
Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Ce que je veux dire c'est que les rationalistes de la formgeschichte ou au moins leurs représentants vivants (je fais allusion par exemple au livre que je lis : "Introduction au Nouveau testament" d'un groupe autour de Marguerat sensé représenter une école protestante) sont un peu décontenancés par l'Evangile de Jean :
- il ne ressemble pas du tout aux autres Evangile, il ne "rentre" pas dans leur analyse, fondée essentiellemnt sur la théorie de la source Q qui ne s'applique qu'aux apocryphes ;
- il est supposé "tardif" par rapport aux autres Evangiles et devrait - d'après leur théorie qui suppose que tous les Evangiles sont construits sur des styles et des formes littéraires grecques (étonnant mais vrai !) - étre très marqué par le mode de pensée du monde héllénistique - en fait il n'en est rien (malgré l'utilisation du mot Logos), c'est un Evangilé résolument juif - au moins autant que Matthieu, le plus juif d'entre les Evangiles ;
- il ne peut raisonnablement pas avoir été terminé avant 70, là je crois qu'ils sont bloqués par le fait que l'exil de Jean à Patmos qui se situe longtemps après 70 et que manifestement Jean était encore vivant à ce moment !
L'Evangile de Jean : un cas un peu desspérant pour les adeptes de la formgeschichte.
Donc les moyens usuels pour mettre en doute la paternité apostolique de l'Evangile par Jean ne fonctionnent pas (les autres seraient mort avant la mise par écrit en grec, située plus ou moins nettement après 70). La solution est de dire que c'est un autre ou plusieurs autres qui ont mis la dernière main à l'Evangile de Jean et certainement pas Jean qui a vu Jésus et entendu les paroles de la bouche de Jésus. Le but est quand même globalement de disqualifier les Evangiles ... et ce travail est parfois fait par des gens qui se considèrent comme "chrétiens". A chacun ses illusions.
Quelque chose d'intéressant à mon avis le 14 mai 2011 à Paris : http://eecho.fr/?p=4570
Je vais y demander à Pierre Perrier de m'indiquer quels sont les autres textes apocryphes ou non qui sont tissés à la manière et au rythme de l'oralité (question posée par Ren).
- il ne ressemble pas du tout aux autres Evangile, il ne "rentre" pas dans leur analyse, fondée essentiellemnt sur la théorie de la source Q qui ne s'applique qu'aux apocryphes ;
- il est supposé "tardif" par rapport aux autres Evangiles et devrait - d'après leur théorie qui suppose que tous les Evangiles sont construits sur des styles et des formes littéraires grecques (étonnant mais vrai !) - étre très marqué par le mode de pensée du monde héllénistique - en fait il n'en est rien (malgré l'utilisation du mot Logos), c'est un Evangilé résolument juif - au moins autant que Matthieu, le plus juif d'entre les Evangiles ;
- il ne peut raisonnablement pas avoir été terminé avant 70, là je crois qu'ils sont bloqués par le fait que l'exil de Jean à Patmos qui se situe longtemps après 70 et que manifestement Jean était encore vivant à ce moment !
L'Evangile de Jean : un cas un peu desspérant pour les adeptes de la formgeschichte.
Donc les moyens usuels pour mettre en doute la paternité apostolique de l'Evangile par Jean ne fonctionnent pas (les autres seraient mort avant la mise par écrit en grec, située plus ou moins nettement après 70). La solution est de dire que c'est un autre ou plusieurs autres qui ont mis la dernière main à l'Evangile de Jean et certainement pas Jean qui a vu Jésus et entendu les paroles de la bouche de Jésus. Le but est quand même globalement de disqualifier les Evangiles ... et ce travail est parfois fait par des gens qui se considèrent comme "chrétiens". A chacun ses illusions.
Quelque chose d'intéressant à mon avis le 14 mai 2011 à Paris : http://eecho.fr/?p=4570
Je vais y demander à Pierre Perrier de m'indiquer quels sont les autres textes apocryphes ou non qui sont tissés à la manière et au rythme de l'oralité (question posée par Ren).
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
Je cherchais a hier : l'ile de Patmos était utilisée par les Romains comme lieu de déportation. L'Empereur Domitien y exile l'évangéliste Jean en + 95 pour atténuer son influence. Jean avait sans doute entre 80 et 85 ans à l'époque ! Manque de chance : Jean y rédige l'Apocalypse et ne meurt que sous Trajan. Trop coriaces, ces vieux mystiques !
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Re: Débats sur la mise par écrit des Evangiles
En accord avec toi, cher Roque, et qui abonde dans notre sens et même au-delà cet artcle d'Etinne Nodet :
"Etienne Nodet, dominicain, professeur de judaïsme ancien à l’Ecole biblique et archéologique de Jérusalem, renouvelle profondément la lecture des Evangiles dans ses ouvrages publiés aux Editions du Cerf(voir par ailleurs). Son projet est de mettre un terme à ce qu’il appelle la « frilosité » des catholiques en matière d’exégèse, de sortir de l’influence protestante pour « re-catholiciser » Jésus.
D’abord il renverse la chronologie admise depuis des siècles pour l’écriture du Nouveau Testament : Marc, puis Matthieu et Luc, et enfin Jean. Pour lui, l’Evangile selon saint Jean, qui vient en premier, est le plus proche de la réalité historique. Il en résulte une autre vision du fils de Dieu, à la fois juive et romaine. Surtout, il apparaît mieux chez Jean que Jésus met fin à la séparation du peuple juif, pour engendrer une « nouvelle création ». Il s’en explique ci-dessous :"
http://www.observatoiredesreligions.fr/spip.php?article122&artsuite=3
Fraternellement
"Etienne Nodet, dominicain, professeur de judaïsme ancien à l’Ecole biblique et archéologique de Jérusalem, renouvelle profondément la lecture des Evangiles dans ses ouvrages publiés aux Editions du Cerf(voir par ailleurs). Son projet est de mettre un terme à ce qu’il appelle la « frilosité » des catholiques en matière d’exégèse, de sortir de l’influence protestante pour « re-catholiciser » Jésus.
D’abord il renverse la chronologie admise depuis des siècles pour l’écriture du Nouveau Testament : Marc, puis Matthieu et Luc, et enfin Jean. Pour lui, l’Evangile selon saint Jean, qui vient en premier, est le plus proche de la réalité historique. Il en résulte une autre vision du fils de Dieu, à la fois juive et romaine. Surtout, il apparaît mieux chez Jean que Jésus met fin à la séparation du peuple juif, pour engendrer une « nouvelle création ». Il s’en explique ci-dessous :"
http://www.observatoiredesreligions.fr/spip.php?article122&artsuite=3
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