« Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Bonjour Jans,
Ben oui, quelles sources ? ce n'est pas une injure.
N'est-ce pas raisonnable de demander des sources précises pour une vérification éventuelle ? pour éviter de spéculer sur du sable...
Ne nous avez-vous pas affirmé "le Jean 2,6 interdit cette spéculation : les jarres destinées aux purifications des Ioudaioi" : tous les juifs se purifiaient, que je sache !" ????
... pour nous permettre de comprendre ces jarres qui attendent les Juifs lors du mariage à Cana, juste histoire de savoir ce que signifie le mot "Juifs" dans ce passage.
Vous affirmez "tous les juifs se purifiaient", or le saint apôtre et évangéliste Matthieu suggère que les disciples du Christ ne se lavent pas les mains. N'étaient-ils pas Juifs ? Et comme je l'ai écrit, leur attitude ne choque pas tout le monde.
Et il semble que la liste des "613 commandements" ne prévoit cette obligation que pour les prêtres, en lien avec :
Exode 30,18 « Tu feras une cuve en bronze avec son support en bronze, pour les ablutions ; tu la placeras entre la tente de la rencontre et l’autel et tu y mettras de l’eau. 19 Aaron et ses fils s’y laveront les mains et les pieds.
certains (note de la TOB 2010) invoquent aussi (???) :
Deutéronome 21, 6 Et tous les anciens de la ville qui se sont approchés de la victime du meurtre se laveront les mains dans le torrent au-dessus de la génisse dont on aura brisé la nuque,
à croire que l'on a cherché toutes les occurrences du lavage de mains.
Néanmoins, si j'en crois le "Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme", une vénérable tradition juive impose le lavement des mains avant chaque repas où du pain sera consommé. Mais les sources sont tardives...
Qumran nous parle de purification quotidienne par immersion, mais y a-t-il des prescriptions pour les mains ?
Si l'on ne parle pas d'une prescription est que cela signifie que tout le monde l'applique ou que personne ne l'applique ?
Sans doute y a-t-il un noyau dur mais pour qui ?
J'ignore si l'on était Juif par la mère, par le père, par le lieu d'habitation, par la langue, par la foi, par la pratique religieuse, par l'ethnie ? j'ignore même si l'on se posait ces questions... etc...
Comme aujourd'hui... que signifie le mot "Juif" ?
Un Juif athée peut-il exister ?
"Juif" a-t-il le même sens pour un goï que pour un Juif ? Est-ce que les Juifs orthodoxes n'ont pas un vocabulaire interne pour distinguer les Juifs pieux des Juifs athées ?
L'odieuse injure "sale Juif" vise la religion ou la lignée ou un autre truc ?
Très cordialement,
votre sœur
pauline
Jans a écrit:Ah oui, mes sources ! et quelles purifications, n'est-ce pas ?
Ben oui, quelles sources ? ce n'est pas une injure.
N'est-ce pas raisonnable de demander des sources précises pour une vérification éventuelle ? pour éviter de spéculer sur du sable...
Ne nous avez-vous pas affirmé "le Jean 2,6 interdit cette spéculation : les jarres destinées aux purifications des Ioudaioi" : tous les juifs se purifiaient, que je sache !" ????
... pour nous permettre de comprendre ces jarres qui attendent les Juifs lors du mariage à Cana, juste histoire de savoir ce que signifie le mot "Juifs" dans ce passage.
Vous affirmez "tous les juifs se purifiaient", or le saint apôtre et évangéliste Matthieu suggère que les disciples du Christ ne se lavent pas les mains. N'étaient-ils pas Juifs ? Et comme je l'ai écrit, leur attitude ne choque pas tout le monde.
Et il semble que la liste des "613 commandements" ne prévoit cette obligation que pour les prêtres, en lien avec :
Exode 30,18 « Tu feras une cuve en bronze avec son support en bronze, pour les ablutions ; tu la placeras entre la tente de la rencontre et l’autel et tu y mettras de l’eau. 19 Aaron et ses fils s’y laveront les mains et les pieds.
certains (note de la TOB 2010) invoquent aussi (???) :
Deutéronome 21, 6 Et tous les anciens de la ville qui se sont approchés de la victime du meurtre se laveront les mains dans le torrent au-dessus de la génisse dont on aura brisé la nuque,
à croire que l'on a cherché toutes les occurrences du lavage de mains.
Néanmoins, si j'en crois le "Dictionnaire encyclopédique du Judaïsme", une vénérable tradition juive impose le lavement des mains avant chaque repas où du pain sera consommé. Mais les sources sont tardives...
Qumran nous parle de purification quotidienne par immersion, mais y a-t-il des prescriptions pour les mains ?
Si l'on ne parle pas d'une prescription est que cela signifie que tout le monde l'applique ou que personne ne l'applique ?
Jans a écrit:Oui, le judaïsme était divers, avec des variantes, on le sait depuis longtemps, reste les constantes, la torah, le chabat, baruch atah Adonai. Shema,.. Adonai ehad!
Sans doute y a-t-il un noyau dur mais pour qui ?
J'ignore si l'on était Juif par la mère, par le père, par le lieu d'habitation, par la langue, par la foi, par la pratique religieuse, par l'ethnie ? j'ignore même si l'on se posait ces questions... etc...
Comme aujourd'hui... que signifie le mot "Juif" ?
Un Juif athée peut-il exister ?
"Juif" a-t-il le même sens pour un goï que pour un Juif ? Est-ce que les Juifs orthodoxes n'ont pas un vocabulaire interne pour distinguer les Juifs pieux des Juifs athées ?
L'odieuse injure "sale Juif" vise la religion ou la lignée ou un autre truc ?
Très cordialement,
votre sœur
pauline
Invité- Invité
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
La distance que les Chrétiens ont pris avec le milieu Juif s’est faite très rapidement. Il suffit de lire les lettres apostoliques du Nouveau Testament pour le constater.Jans a écrit:la distanciation de Jean (rédacteur qui ne peut pas être l'évangéliste) du milieu juif est typique de ces années tardives
« Mais quand je vis qu’ils ne marchaient pas droit selon la vérité de l’Évangile, je dis à Céphas devant tout le monde : « si toi qui es Juif, tu vis comme les païens, et non à la juive, comment peux-tu contraindre les païens à judaïser. » (Gal. 2:14)
Le publicain- Messages : 179
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Je ne pense pas que ce soit aussi simple que ça. Certains juifs le faisaient certainement (je ne parle pas ici des Esséniens) ... et il y a des chances que cette pratique au temps de Jésus ait été beaucoup moins codifiée qu'après la relance du judaïsme rabbinique à la fin du premier siècle ou ultérieurement :pauline.px a écrit:Ne nous avez-vous pas affirmé "le Jean 2,6 interdit cette spéculation : les jarres destinées aux purifications des Ioudaioi" : tous les juifs se purifiaient, que je sache !" ????
https://fr.wikipedia.org/wiki/Mikv%C3%A9
Excellent !pauline.px a écrit:Et il semble que la liste des "613 commandements" ne prévoit cette obligation que pour les prêtres,
Le mot " juifs " dans l’Évangile selon saint Jean :
- Pour les orthodoxes :" Mieux traduire " : https://www.sagesse-orthodoxe.fr/jaimerais-savoir/foi-et-tradition-orthodoxe/histoire-et-organisation-de-leglise/mieux-traduire-le-mot-%C2%AB-juif-%C2%BB-dans-saint-jean
- Pour les calvinistes : " Jean antijuif " :
Dans le fond, le quatrième évangile montre que c’est l’humanité tout entière qui participe aux ténèbres, et que c’est seulement lorsqu’il y a une « naissance d’en haut », grâce à l’œuvre de l’Esprit, que l’on peut « venir à la lumière », c-à-d. venir au Christ (Jn 3,3.19-21 ; 6,44). Le vrai scandale que l’évangile de Jean met en évidence, ce n’est donc pas que les Juifs ont rejeté leur Messie ; c’est que l’unique Fils – lui qui a pu faire l’affirmation extraordinaire « celui qui m’a vu a vu le Père » (14,9) – a été, non pas accueilli mais rejeté par un monde qui, pourtant, est venu à l’existence et vit
grâce à lui (Jn 1,3-5).
http://www.facultejeancalvin.com/wp-content/uploads/2014/11/2.03_Jean-antijuif.pdf
Roque- Messages : 5064
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Bonjour Jans,
Non, on va simplement commencer.
Et pour enfin commencer, je vous propose un rapide survol que tous pourront critiquer, amodier et compléter.
Le livre des Actes des Apôtres évoque le climat d'avant 65, on y trouve notamment :
Au chapitre IV : Arrestation par les Sadducéens – Saints Pierre et Jean devant le Sanhédrin ;
Chapitre V : Arrestation par les Sadducéens – évasion miraculeuse – nouvelle arrestation ;
Chapitre VI : Arrestation de saint Étienne suivie de sa lapidation ;
Chapitre XII : Exécution de saint Jacques puis arrestation de saint Pierre ;
Chapitre XIII : saint Paul est chassé d’Antioche de Pisidie ;
Chapitre XIV : saints Paul et Barnabas chassés d’Iconium ;
Chapitre XVI : Arrestation de saint Paul à Philippes ;
Chapitre XVII : Des hôtes de saint Paul et Silas sont arrêtés ;
Chapitre XVIII : très mauvais accueil à Corinthe ;
Chapitre XIX : Émeute à Éphèse ;
Chapitre XX : Paul doit renoncer à aller en Syrie en raison de l’hostilité des Juifs ;
Chapitre XXI : Arrestation de Paul à Jérusalem
Chapitre XXIII : Complot Juif pour assassiner Paul.
Est-ce que nous avons affaire à un climat très apaisé avant 65 ?
A-t-on a des témoignages du même ordre après 70 ?
Est-ce que 70 marque un changement profond au niveau de l'atmosphère ?
Les seize écrits regroupés sous le titre "Pères Apostoliques" (en Livre de Poche) sont assez discrets sur cette question.
in LETTRE D’IGNACE D’ANTIOCHE AUX SMYRNIOTES on trouve une seule occurrence du mot "Juif", plutôt favorable aux Juifs :
ISM I, 2. Il a été véritablement cloué pour nous dans sa chair sous Ponce Pilate et Hérode le tétrarque, -- c’est grâce au fruit de sa croix, et à sa passion divinement bienheureuse que nous, nous existons, --pour " lever son étendard " (Is 5, 26 s) dans les siècles par sa résurrection, et pour <rassembler> ses saints et ses fidèles, < venus > soit des JUIFS soit des gentils, dans l’unique corps de son Église.
in LE MARTYRE DE POLYCARPE les Juifs apparaissent rapidement dans deux passages où ils sont accusés d'avoir participé de manière hostile à l'arrestation de saint Polycarpe puis pour que le corps du saint ne soit pas rendu à sa communauté.
la LETTRE DE BARNABÉ est une préfiguration du Dialogue avec le Juif Tryphon de saint Justin Martyr, elle se préoccupe de doctrine et rassemble tous les arguments critiques contre le Judaïsme. Incidemment, je note au chapitre VII, un passage captivant sur les deux boucs du sacrifice…
Au second siècle, la question Juive apparaît donc doctrinale, cela signifie que des gens passent d'une communauté à l'autre et qu'il est nécessaire de les convaincre.
Je note que cette Lettre à Barnabé ne décrit pas un climat de tension très intense.
Enfin, l'épître à Diognète évoque rapidement la question juive, mais il s'agit plutôt du Judaïsme du Temple puisqu'il y a une critique des holocaustes.
Je retiens la dernière occurrence du mot "Juif" :
DGT V, 16. Ne faisant que le bien, ils <les Chrétiens>sont châtiés comme des scélérats. Châtiés, ils sont dans la joie comme s’ils naissaient à la vie. DGT V, 17. Les JUIFS leur font la guerre comme à des étrangers ; ils sont persécutés par les Grecs et ceux qui les détestent ne sauraient dire la cause de leur haine.
Le "comme des étrangers" mériterait une vérification sur le texte source… car cette épître, très probablement post 150, reprend furtivement le thème de l'opposition frontale que l'on trouvait dans le Livre des Actes des Apôtres mais avec cette mention "comme des étrangers", l'air de dire que les Chrétiens ne devraient pas être considérés comme des étrangers par les Juifs.
Cela me fait songer à Suétone qui évoque(rait ?) rapidement le christianisme naissant sans trop faire la différence entre Juifs et Chrétiens (vie de Claude + vie de Néron).
Enfin, il me semble que l'échec historique de Marcion me suggère que les premières communautés chrétiennes ont résisté à la tentation de s'abstraire de l'héritage Juif plutôt encombrant, j'y vois la manifestation d'une frontière floue et poreuse.
Au vu de la place considérable accordée à la Memra (la Parole) par les targumim palestiniens on peut raisonnablement penser que le judaïsme synagogal palestinien pouvait être très sensible à la théologie du Logos. Ce qui fait dire à Daniel Boyarin que la séparation des deux communautés fut lente et complexe.
En outre le passage ci-dessus de l'épître à Diognète ("ils sont persécutés par les Grecs") me rappelle que le "problème Juif" n'est sûrement pas le plus important.
D'abord et avant tout, les premières communautés chrétiennes naissent dans des contrées occupées par les Romains. Les Romains ne sont pas nécessairement des bisounours et, surtout, les sociétés sous un joug impérial sont par nature sous tension et, par conséquent promptes à s'enflammer.
Et je n'oublie pas que face aux premières communautés chrétiennes se développeront très tôt d'autres communautés que Jean Daniélou désignait sous le terme de "Judéo-Christianisme" (depuis ce terme à changé de sens).
Donc si le cœur vous en dit, on peut essayer avec nos petits moyens de détailler les sources qui permettent d'évaluer les climats, atmosphères et autres ambiances qui baignent la lente mise par écrit des récits évangéliques.
Très cordialement
votre sœur
pauline
Jans a écrit:On ne va pas tout recommencer ? que les gens commencent par lire les Actes.
Non, on va simplement commencer.
Et pour enfin commencer, je vous propose un rapide survol que tous pourront critiquer, amodier et compléter.
Le livre des Actes des Apôtres évoque le climat d'avant 65, on y trouve notamment :
Au chapitre IV : Arrestation par les Sadducéens – Saints Pierre et Jean devant le Sanhédrin ;
Chapitre V : Arrestation par les Sadducéens – évasion miraculeuse – nouvelle arrestation ;
Chapitre VI : Arrestation de saint Étienne suivie de sa lapidation ;
Chapitre XII : Exécution de saint Jacques puis arrestation de saint Pierre ;
Chapitre XIII : saint Paul est chassé d’Antioche de Pisidie ;
Chapitre XIV : saints Paul et Barnabas chassés d’Iconium ;
Chapitre XVI : Arrestation de saint Paul à Philippes ;
Chapitre XVII : Des hôtes de saint Paul et Silas sont arrêtés ;
Chapitre XVIII : très mauvais accueil à Corinthe ;
Chapitre XIX : Émeute à Éphèse ;
Chapitre XX : Paul doit renoncer à aller en Syrie en raison de l’hostilité des Juifs ;
Chapitre XXI : Arrestation de Paul à Jérusalem
Chapitre XXIII : Complot Juif pour assassiner Paul.
Est-ce que nous avons affaire à un climat très apaisé avant 65 ?
A-t-on a des témoignages du même ordre après 70 ?
Est-ce que 70 marque un changement profond au niveau de l'atmosphère ?
Les seize écrits regroupés sous le titre "Pères Apostoliques" (en Livre de Poche) sont assez discrets sur cette question.
in LETTRE D’IGNACE D’ANTIOCHE AUX SMYRNIOTES on trouve une seule occurrence du mot "Juif", plutôt favorable aux Juifs :
ISM I, 2. Il a été véritablement cloué pour nous dans sa chair sous Ponce Pilate et Hérode le tétrarque, -- c’est grâce au fruit de sa croix, et à sa passion divinement bienheureuse que nous, nous existons, --pour " lever son étendard " (Is 5, 26 s) dans les siècles par sa résurrection, et pour <rassembler> ses saints et ses fidèles, < venus > soit des JUIFS soit des gentils, dans l’unique corps de son Église.
in LE MARTYRE DE POLYCARPE les Juifs apparaissent rapidement dans deux passages où ils sont accusés d'avoir participé de manière hostile à l'arrestation de saint Polycarpe puis pour que le corps du saint ne soit pas rendu à sa communauté.
la LETTRE DE BARNABÉ est une préfiguration du Dialogue avec le Juif Tryphon de saint Justin Martyr, elle se préoccupe de doctrine et rassemble tous les arguments critiques contre le Judaïsme. Incidemment, je note au chapitre VII, un passage captivant sur les deux boucs du sacrifice…
Au second siècle, la question Juive apparaît donc doctrinale, cela signifie que des gens passent d'une communauté à l'autre et qu'il est nécessaire de les convaincre.
Je note que cette Lettre à Barnabé ne décrit pas un climat de tension très intense.
Enfin, l'épître à Diognète évoque rapidement la question juive, mais il s'agit plutôt du Judaïsme du Temple puisqu'il y a une critique des holocaustes.
Je retiens la dernière occurrence du mot "Juif" :
DGT V, 16. Ne faisant que le bien, ils <les Chrétiens>sont châtiés comme des scélérats. Châtiés, ils sont dans la joie comme s’ils naissaient à la vie. DGT V, 17. Les JUIFS leur font la guerre comme à des étrangers ; ils sont persécutés par les Grecs et ceux qui les détestent ne sauraient dire la cause de leur haine.
Le "comme des étrangers" mériterait une vérification sur le texte source… car cette épître, très probablement post 150, reprend furtivement le thème de l'opposition frontale que l'on trouvait dans le Livre des Actes des Apôtres mais avec cette mention "comme des étrangers", l'air de dire que les Chrétiens ne devraient pas être considérés comme des étrangers par les Juifs.
Cela me fait songer à Suétone qui évoque(rait ?) rapidement le christianisme naissant sans trop faire la différence entre Juifs et Chrétiens (vie de Claude + vie de Néron).
Enfin, il me semble que l'échec historique de Marcion me suggère que les premières communautés chrétiennes ont résisté à la tentation de s'abstraire de l'héritage Juif plutôt encombrant, j'y vois la manifestation d'une frontière floue et poreuse.
Au vu de la place considérable accordée à la Memra (la Parole) par les targumim palestiniens on peut raisonnablement penser que le judaïsme synagogal palestinien pouvait être très sensible à la théologie du Logos. Ce qui fait dire à Daniel Boyarin que la séparation des deux communautés fut lente et complexe.
En outre le passage ci-dessus de l'épître à Diognète ("ils sont persécutés par les Grecs") me rappelle que le "problème Juif" n'est sûrement pas le plus important.
D'abord et avant tout, les premières communautés chrétiennes naissent dans des contrées occupées par les Romains. Les Romains ne sont pas nécessairement des bisounours et, surtout, les sociétés sous un joug impérial sont par nature sous tension et, par conséquent promptes à s'enflammer.
Et je n'oublie pas que face aux premières communautés chrétiennes se développeront très tôt d'autres communautés que Jean Daniélou désignait sous le terme de "Judéo-Christianisme" (depuis ce terme à changé de sens).
Donc si le cœur vous en dit, on peut essayer avec nos petits moyens de détailler les sources qui permettent d'évaluer les climats, atmosphères et autres ambiances qui baignent la lente mise par écrit des récits évangéliques.
Très cordialement
votre sœur
pauline
Invité- Invité
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Je n'ai jamais dit que l'inimitié, l'hostilité voire la haine entre juifs et chrétiens commençait en 65-70, j'ai fait remarquer, comme bien d'autres avant moi et mieux que moi, qu'on voyait bien dans les évangiles une nette contradiction entre d'une part les discours prêtés à Jésus évoquant les persécutions, les haines des juifs envers les chrétiens, les blessures physiques, le rejet des synagogues, et d'autre part la situation réelle de ces années 30, où Jésus est reçu dans toutes les synagogues, où il s'entretient avec tous, et où, à bien y regarder, des pharisiens ne lui sont pas hostiles. Cette contradiction, tant d'exégètes l'ont dit, s'explique très bien si l'on y voit l'intention des auteurs des années de rédaction des évangiles de remonter le moral, de marquer l'union de Jésus-Christ avec ses disciples persécutés des années 80, donc de prêter à Jésus des discours qu'il ne pouvait pas tenir en l'an 30. Dans ce même ordre d'esprit, on note que la péricope de Thomas l'incrédule est construite dans le seul but d'affermir la foi de ceux qui n'ont pas connu Jésus, de dissiper les doutes sur la résurrection : "bienheureux ceux qui croiront sans avoir vu". Un récit marqué par l'absence de vérité factuelle peut très bien être d'une grande vérité théologique.
Jans- Messages : 3577
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Bonjour à toutes et à tous,
Où en est la recherche ?
Simon-Claude Mimouni a été directeur d'études sur la chaire « Origines du christianisme » à la section des sciences religieuses de l'École pratique des hautes études (EPHE) de 1995 à 2017. Il est actuellement directeur d'études émérite à l'EPHE et professeur associé à l'Université Laval de Québec.
Dans un recueil paru récemment (Le Judaïsme ancien et les origines du Christianisme, chez Bayard, 2017) il nous propose un article de 2010 intitulé "le Judaïsme à l'époque de la naissance du Christianisme, quelques remarques et réflexions sur les recherches actuelles".
Dans son chapitre III, il tourne la page des perspectives anciennes (c'est à dire jusqu'à la fin du XXème siècle !!) sur le Judaïsme des premiers siècles de notre ère en les répartissant en "christiano-centriques" et "judaïcocentriques", épithètes qui semble les disqualifier à ses yeux.
Son chapitre IV évoque les nouvelles perspectives qui s'enracinent dans l'oeuvre d'Ed Parish Sanders s'étalant de 1977 à 1992.
Je vous livre ci-dessous le scann (sans les notes) de sa conclusion :
V. CONCLUSION
On le constate, de toute part l’édifice historiographique de ces dernières décennies est mis à mal par des recherches de plus en plus déconstructrices mais qui montrent, s’il le fallait encore, que le judaïsme d’hier est loin d’être monolithique, comme d’ailleurs celui d’aujourd’hui.
Sans compter qu’un nombre de plus en plus important de chercheurs a tendance à estimer que pendant les quatre premiers siècles au moins, le judaïsme et le christianisme se sont développés en étroite interaction : dialoguant et polémiquant l’un avec l’autre dans une « conversation » qui aurait duré plusieurs siècles - une expression qui est empruntée à Daniel Boyarin.
Ainsi, selon Alan F. Segal en 1986, un pionnier en ce domaine comme dans tant d’autres, Marc G. Hirshman en 1996, Daniel Boyarin en 1999 et 2004 et Israël J. Yuval en 2006, ce qu’il est convenu d’appeler la « séparation » s’est déroulé sur une longue période temporelle. Beaucoup parmi ces chercheurs considèrent que la métaphore familiale appropriée en ce qui concerne les deux traditions religieuses n’est pas celle de la relation « mère-fille », mais plutôt celle de « deux sœurs », et peut-être même de « sœurs jumelles ». Ils poussent même la métaphore plus loin encore pour soutenir qu’il s’est agi de jumelles « homozygotes » : c’est-à-dire, un unique embryon qui s’est ensuite séparé en deux.
Quoi qu’il en soit, selon cette perspective, la plus ancienne n’a pas engendré la plus récente et la plus récente n’a pas capté l’héritage de la plus ancienne, mais toutes deux se sont bien plutôt développées côte à côte après la destruction du temple de Jérusalem et jusqu’à la christianisation de l’Empire romain.
Bref, actuellement, les chercheurs s’accordent à reconnaître, d’une manière ou d’une autre, que les frontières entre le judaïsme et le christianisme sont des plus floues et que leurs identités ne sont pas claires, sans doute jusqu’au IVe siècle, malgré les efforts des « Sages » pharisiens et des « Pères » chrétiens pour définir l’orthodoxie par opposition à ce qu’ils considèrent l’hérésie - faut-il d’ailleurs parler pour cette époque d’identité ou utiliser plutôt le concept de conscience qui est bien plus souple ?
Ces orientations récentes de la recherche scientifique vont nécessairement obliger, de manière progressive mais certaine, à des révisions déchirantes de l’histoire du judaïsme et du christianisme dans l’Antiquité : elles conduiront sans doute à montrer que les sœurs jumelles ne sont devenues des « ennemies » que pour pouvoir s’imposer à leurs fidèles respectifs et surtout à leurs prosélytes issus de tout bord - d’autant que dans l’Antiquité tardive, le « marché des religions », selon une expression empruntée à Peter Brown, est des plus florissants.
Une voix dissonante tout de même qu’il convient de signaler, c’est celle de Daniel Stökl Ben Ezra, qui tout en souscrivant aux acquis de la nouvelle perspective, estime, qu’en Egypte, au IIe siècle, il ne fait pas sens de parler du christianisme comme d’un groupe judéen ou comme d’une forme du judaïsme et que les chrétiens ont développé une identité différente et indépendante : pour ce faire, il se fonde sur une enquête dans les papyrus chrétiens égyptiens - dont la datation n’est pas antérieure au IIe siècle - qu’il compare aux manuscrits retrouvés dans les grottes proches du Khirbet Qumrân qui, eux, ne peuvent pas être, comme on le sait, postérieurs à 68 de notre ère.
L’étude sur la circoncision dans le monde judéen aux époques grecque et romaine du IIe siècle avant notre ère au IIe siècle de notre ère permet de comprendre que les distinctions classiques entre judaïsme et christianisme pour l’époque envisagée ne sont pas réalistes et que leur neutralisation débouche sur des résultats qui montrent que les discussions ont perduré sur le long terme.
En résumé, les perspectives nouvelles, qui viennent d’être à peine esquissées de manière dispersée, peuvent paraître décapantes pour l’esprit, car elles bouleversent sans aucun doute les idées reçues : elles pourraient bien expliquer, en tout cas, le caractère hybride des diverses formes de judaïsme et de christianisme antiques qui ont préféré, à partir d’une certaine époque, se décliner au singulier au travers du concept, créé de toutes pièces, de l’orthodoxie et de l’hétérodoxie et permettant la mise en oeuvre d’armes, relativement efficaces, comme la déviance et l’hérésie.
Très cordialement,
votre sœur
pauline
Où en est la recherche ?
Simon-Claude Mimouni a été directeur d'études sur la chaire « Origines du christianisme » à la section des sciences religieuses de l'École pratique des hautes études (EPHE) de 1995 à 2017. Il est actuellement directeur d'études émérite à l'EPHE et professeur associé à l'Université Laval de Québec.
Dans un recueil paru récemment (Le Judaïsme ancien et les origines du Christianisme, chez Bayard, 2017) il nous propose un article de 2010 intitulé "le Judaïsme à l'époque de la naissance du Christianisme, quelques remarques et réflexions sur les recherches actuelles".
Dans son chapitre III, il tourne la page des perspectives anciennes (c'est à dire jusqu'à la fin du XXème siècle !!) sur le Judaïsme des premiers siècles de notre ère en les répartissant en "christiano-centriques" et "judaïcocentriques", épithètes qui semble les disqualifier à ses yeux.
Son chapitre IV évoque les nouvelles perspectives qui s'enracinent dans l'oeuvre d'Ed Parish Sanders s'étalant de 1977 à 1992.
Je vous livre ci-dessous le scann (sans les notes) de sa conclusion :
V. CONCLUSION
On le constate, de toute part l’édifice historiographique de ces dernières décennies est mis à mal par des recherches de plus en plus déconstructrices mais qui montrent, s’il le fallait encore, que le judaïsme d’hier est loin d’être monolithique, comme d’ailleurs celui d’aujourd’hui.
Sans compter qu’un nombre de plus en plus important de chercheurs a tendance à estimer que pendant les quatre premiers siècles au moins, le judaïsme et le christianisme se sont développés en étroite interaction : dialoguant et polémiquant l’un avec l’autre dans une « conversation » qui aurait duré plusieurs siècles - une expression qui est empruntée à Daniel Boyarin.
Ainsi, selon Alan F. Segal en 1986, un pionnier en ce domaine comme dans tant d’autres, Marc G. Hirshman en 1996, Daniel Boyarin en 1999 et 2004 et Israël J. Yuval en 2006, ce qu’il est convenu d’appeler la « séparation » s’est déroulé sur une longue période temporelle. Beaucoup parmi ces chercheurs considèrent que la métaphore familiale appropriée en ce qui concerne les deux traditions religieuses n’est pas celle de la relation « mère-fille », mais plutôt celle de « deux sœurs », et peut-être même de « sœurs jumelles ». Ils poussent même la métaphore plus loin encore pour soutenir qu’il s’est agi de jumelles « homozygotes » : c’est-à-dire, un unique embryon qui s’est ensuite séparé en deux.
Quoi qu’il en soit, selon cette perspective, la plus ancienne n’a pas engendré la plus récente et la plus récente n’a pas capté l’héritage de la plus ancienne, mais toutes deux se sont bien plutôt développées côte à côte après la destruction du temple de Jérusalem et jusqu’à la christianisation de l’Empire romain.
Bref, actuellement, les chercheurs s’accordent à reconnaître, d’une manière ou d’une autre, que les frontières entre le judaïsme et le christianisme sont des plus floues et que leurs identités ne sont pas claires, sans doute jusqu’au IVe siècle, malgré les efforts des « Sages » pharisiens et des « Pères » chrétiens pour définir l’orthodoxie par opposition à ce qu’ils considèrent l’hérésie - faut-il d’ailleurs parler pour cette époque d’identité ou utiliser plutôt le concept de conscience qui est bien plus souple ?
Ces orientations récentes de la recherche scientifique vont nécessairement obliger, de manière progressive mais certaine, à des révisions déchirantes de l’histoire du judaïsme et du christianisme dans l’Antiquité : elles conduiront sans doute à montrer que les sœurs jumelles ne sont devenues des « ennemies » que pour pouvoir s’imposer à leurs fidèles respectifs et surtout à leurs prosélytes issus de tout bord - d’autant que dans l’Antiquité tardive, le « marché des religions », selon une expression empruntée à Peter Brown, est des plus florissants.
Une voix dissonante tout de même qu’il convient de signaler, c’est celle de Daniel Stökl Ben Ezra, qui tout en souscrivant aux acquis de la nouvelle perspective, estime, qu’en Egypte, au IIe siècle, il ne fait pas sens de parler du christianisme comme d’un groupe judéen ou comme d’une forme du judaïsme et que les chrétiens ont développé une identité différente et indépendante : pour ce faire, il se fonde sur une enquête dans les papyrus chrétiens égyptiens - dont la datation n’est pas antérieure au IIe siècle - qu’il compare aux manuscrits retrouvés dans les grottes proches du Khirbet Qumrân qui, eux, ne peuvent pas être, comme on le sait, postérieurs à 68 de notre ère.
L’étude sur la circoncision dans le monde judéen aux époques grecque et romaine du IIe siècle avant notre ère au IIe siècle de notre ère permet de comprendre que les distinctions classiques entre judaïsme et christianisme pour l’époque envisagée ne sont pas réalistes et que leur neutralisation débouche sur des résultats qui montrent que les discussions ont perduré sur le long terme.
En résumé, les perspectives nouvelles, qui viennent d’être à peine esquissées de manière dispersée, peuvent paraître décapantes pour l’esprit, car elles bouleversent sans aucun doute les idées reçues : elles pourraient bien expliquer, en tout cas, le caractère hybride des diverses formes de judaïsme et de christianisme antiques qui ont préféré, à partir d’une certaine époque, se décliner au singulier au travers du concept, créé de toutes pièces, de l’orthodoxie et de l’hétérodoxie et permettant la mise en oeuvre d’armes, relativement efficaces, comme la déviance et l’hérésie.
Très cordialement,
votre sœur
pauline
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Il n'empêche que Matthieu et Jean sont clairement antijudaïques dans leur évangile, il suffit de lire. Jean écrit "les Juifs", alors qu'il en est un ! mais en 95, manifestement, les chrétiens et les juifs, ce n'est pas la même chose !!
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Vous avez quand même tendance à nous citer des références n'allant pas plus loin que le début des années 1970... Pour ma part, n'étant même pas né à l'époque, mes lectures datent plutôt du XXIe siècle, Mimouni en premier ; y avez-vous jeté un œil ?
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
je n'ai pas lu Mimouni. Il est vrai que je suis plus âgé que vous, et j'ai commencé tôt mes recherches. Et pourquoi vous assommer avec des livres lus en allemand ? le "Jesus im XXI. Jahrhundert" de Körtner, chez Neukirchener est passionnant, mais je ne vais pas jouer à ça, aucun intérêt.
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Les livres en allemand ne risquent pas de "m'assommer" (même si je reconnais que mon allemand est un peu rouillé) ; le problème n'est pas là. Tout comme les questions d'âges : peu importe quand nous commençons nos recherches (il y a une vingtaine d'années pour moi, et alors ?), ce qui compte, c'est de continuer à se tenir au courant. Il se trouve que la recherche sur LES judaïsmes du Ier au IIIe siècle ont énormément avancé ces dernières décennies, et l'un des soucis dans les discussions que nous avons avec vous, ce ne sont pas nos fois respectives, mais le fait que vous parlez en vous fondant sur des recherches d'une époque dépassée comme si elles représentaient l'alpha et l'oméga de toute discussion... Prenez le temps de lire Mimouni, c'est un excellent point de départ pour vous mettre à jour (une mise à jour n'étant en rien un renoncement à votre point de vue)Jans a écrit:je n'ai pas lu Mimouni. Il est vrai que je suis plus âgé que vous, et j'ai commencé tôt mes recherches. Et pourquoi vous assommer avec des livres lus en allemand ?
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Dans le même sens d'un renouvellement complet de la vision de cette séparation entre juifs et chrétiens :
L'histoire de cette rédaction initiale est à ce point embrouillée que l'un des auteurs possibles de cette Birkat ha-minim - Samuel ha-qatan - aurait lui-même omis de réciter la 12ème bénédiction - relative aux minim - faisant de lui de facto un " hétérodoxe " ... mais qu'on n'en aurait pas tenu compte - justement parce qu'il était l'inventeur de cette Birkat ha-minim !
Il n'apparaît pas non plus de façon très évidente que les min (" espèce ", c'est à dire déviants ; mais pas nécessairement chrétiens) se seraient sentis visés par Birkat ha-minim. Le rôle leader des tanaïm préjugé déterminant est maintenant contesté : ils auraient eu très peu d'influence à leur époque contrairement à ce qu'on a supposé. Enfin la mention des notzrim (les judéo-chrétiens) dans cette Birkat ha-minim ne serait pas d’origine, mais aurait été insérée beaucoup plus tardivement.
La lecture orientée des exégètes allemands
Je ne peux pas reprendre l'analyse très fouillée, très complexe de Dan Jaffé - l'auteur du paragraphe ci-dessus - sur l'origine, la date de composition de cette Birkat ha-minim - mais il n'y a, en fin d'analyse et selon Dan Jaffé, aucun témoin écrit tout à fait probant (recherche dans les sources rabbiniques, d'abord, bien évidemment : Talmud, Mishna, Tosefta, etc...). Trois personnages - dont Gamaliel II de Yabneh bien entendu - peuvent avoir joué un rôle dans cette rédaction initiale.Dan Jaffé a écrit:Etat de la recherche
« Bien que le nombre de publications sur la Birkat ha-minim se soit accru ces dernières années, à ce jour, un grand nombre de questions n’ont pas encore été résolues de façon satisfaisante. Tel est notamment le cas concernant le contexte historique où cette prière a vu le jour, sa fonction ou encore la version définitive de ce texte. Le locus classicus sur ce dossier, soutenu par de nombreux chercheurs, estime que la Birkat ha-minim a été formulée sous l’ethnarchie de Gamaliel II à Yabneh à la fin du 1er siècle de notre ère. L’objectif étant d’expulser les judéo-chrétiens du culte de la synagogue, voire de la communauté rabbinique alors en quête de normativité. Selon cette approche, la Birkat ha-minim constitue une malédiction liturgique fonctionnant sur le modèle de l’auto-exclusion. Elle vise les judéo-chrétiens et exprime la volonté des tanaïm de les expulser de la synagogue. Cette démarche d’exclusion se rattacherait ainsi aux circonstances historiques postérieures à la destruction du Temple et correspondrait au souci de normalisation socio-religieuse mise progressivement en place par les tanaïm. Cela dans le but de reconstituer la société juive selon leur propre halakha. Dans cet état d’esprit, la Birkat ha-minim serait un élément essentiel de la rupture progressive qui s’élabore entre juifs et chrétiens.
Ce paradigme semble à présent devoir être repensé à nouveaux frais, en effet, bien que partiellement partagé par l’auteur de ces lignes, on ne peut ignorer de nombreux travaux auxquels on ne peut rester indifférent. Il y a donc lieu de prendre position face à une démarche historiographique de plus en plus représentée qui malmène ce paradigme et le remet totalement en question. Selon les thèses de cette école, on ne peut soutenir qu’il y eut séparation entre juifs et chrétiens à une date aussi reculée que l’époque de Gamaliel II de Yabneh. Si l’on peut toutefois parler en termes de séparation (Parting of the Ways), cela ne peut avoir eu lieu avant le IVème siècle. Entre ces deux époques (IIème au IVème siècle), les lignes de démarcation (borderlines) entre juifs et chrétiens étant des plus fluides alors que des relations diverses existaient parmi les membres de ces traditions religieuses. »
Les identités en formation. Rabbis, hérésies, premiers chrétiens. Chapitre : L'exclusion des judéo-chrétiens de la synagogue. Dan Jaffé. pages 169-170. Mai 2018. Ed Cerf. ISBN : 978-2-204-11171-3
L'histoire de cette rédaction initiale est à ce point embrouillée que l'un des auteurs possibles de cette Birkat ha-minim - Samuel ha-qatan - aurait lui-même omis de réciter la 12ème bénédiction - relative aux minim - faisant de lui de facto un " hétérodoxe " ... mais qu'on n'en aurait pas tenu compte - justement parce qu'il était l'inventeur de cette Birkat ha-minim !
Il n'apparaît pas non plus de façon très évidente que les min (" espèce ", c'est à dire déviants ; mais pas nécessairement chrétiens) se seraient sentis visés par Birkat ha-minim. Le rôle leader des tanaïm préjugé déterminant est maintenant contesté : ils auraient eu très peu d'influence à leur époque contrairement à ce qu'on a supposé. Enfin la mention des notzrim (les judéo-chrétiens) dans cette Birkat ha-minim ne serait pas d’origine, mais aurait été insérée beaucoup plus tardivement.
La lecture orientée des exégètes allemands
Dan Jaffé a écrit:« La première vague historiographique voit globalement le jour à la fin du XIXème siècle et au début du XXème siècle. Ce sont en grande partie des exégètes d’origine allemande qui s’attachent à ces questions et les considèrent principalement sous l’angle de la théologie. On entrevoit Jésus en dehors de l’histoire et du milieu juif qui est le sien. Dans cet état d’esprit, on aborde le judaïsme et le christianisme comme deux entités distinctes à partir de Jésus voire Paul de Tarse. Le judaïsme d’après l’effondrement de Jérusalem est perçu comme un rituel rigoriste et atrophié, il perd sa raison d’être au travers de l’histoire théologisée et devient dénué de tout fondement universaliste. On parle en termes de vrai et de faux, de vérité et d’erreur, d’ancien et de neuf et on reprend souvent plus ou moins explicitement les concepts théologiques de Verus Israël et de Vetus Israël. L’approche consiste donc à lire les événements comme une preuve de la vérité du message christique. Le christianisme est triomphant alors que le judaïsme est suranné. Cette approche se fondait sur une lecture orientée du Nouveau testament et présentait une méconnaissance évidente des sources juives qui en sont contemporaines ou plus tardives. La rupture aurait été amorcée avec Jésus de Nazareth pour s’accomplir dans le message paulinien et l’élaboration des communautés créées par l’apôtre. La prédication de Paul de Tarse aurait donc fait de nombreux adeptes en Diaspora qui très tôt auraient rompu tout lien avec le judaïsme. De la sorte, les seules Écritures qui comptèrent pour l’Eglise naissante furent la Bible, qualifiée d’Ancien Testament, lue et interprétée à la lumière du kérygme.
Ces jugements de valeur souvent teintés d’un profond antisémitisme perdurèrent jusqu’à la Seconde guerre mondiales, c’est l’extermination des juifs d’Europe qui modifia les consciences et avec elle les grilles de lecture. »
Les identités en formation. Rabbis, hérésies, premiers chrétiens. Chapitre : La séparation entre juifs et chrétiens. Dan Jaffé. pages 418-419. Mai 2018. Ed Cerf. ISBN : 978-2-204-11171-3
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Voilà ce que j'ai réellement écrit : signifie d'abord.lhirondelle a écrit:
Le terme que nos bibles traduisent "juifs" signifie d'abord "judéens".
D'abord ne veut pas dire "uniquement.
Ce serait gentil de ne pas me faire dire ce que je n'ai pas dit.Libremax a écrit: Mais alors : pourquoi Jean parlerait-il de Judéens?
Le terme signifie-t-il déjà à l'époque l'appartenance à la religion juive ? L'hirondelle affirme le contraire.
Evidemment que le terme signifie aussi, mais c'est le sens second, de religion juive.
Ensuite je dois revenir sur cette vision dépassée du gentil Jésus face aux méchants pharisiens qui ne sont que des vilains pas beaux.
Et pour ça, je vais passer par un document tout ce qui a de plus catholique :
http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/chrstuni/relations-jews-docs/rc_pc_chrstuni_doc_19820306_jews-judaism_fr.html
Je souligne ce passage :
5. Ses rapports avec les Pharisiens ne furent pas totalement ni toujours polémiques. Et de cela il y a de nombreux exemples:
– ce sont des Pharisiens qui préviennent Jésus du danger qu’il court (Lc 13, 31);
– des Pharisiens sont loués, comme la «scribe» de Mc 12, 34;
– Jésus mange avec des Pharisiens (Lc 7, 36; 14, 1).
6. Jésus partage, avec la majorité des juifs palestiniens d’alors, des doctrines pharisi ennes: la résurrection des corps; les formes de piété: aumône, prière, jeûne (cf. Mt 6, 1-18) et l’habitude liturgique de s’adresser à Dieu comme Père; la priorité du commandement de l’amour de Dieu et du prochain (cf. Mc 12, 28-34). Ce qui est aussi le cas de Paul (cf. vgr. Act 23, 8), lequel a toujours considéré comme un titre d’honneur son appartenance au groupe pharisien (cf. ib. 23, 6; 26, 5; Phil 3,5).
7. Paul aussi, comme d’ailleurs Jésus lui-même, a utilisé des méthodes de lecture et d’interprétation de l’Ecriture et d’enseignement aux disciples, communs aux Pharisiens de leur temps. C’est le cas pour l’usage des paraboles dans le ministère de Jésus, comme aussi pour la méthode de Jésus et de Paul d’appuyer une conclusion avec une citation de l’Ecriture.
8. Il faut encore noter que les Pharisiens ne sont pas mentionnés dans les récits de la Passion. Gamaliel (cf. Act 5, 34-39) prend la défense des apôtres dans une réunion du Sanhédrin. Une présentation exclusivement négative des Pharisien risque d’être inexacte et injuste (cf. Orientations, Note 1; cf. AAS, l.c., p. 76). Et s’il y a dans les Evangiles et ailleurs dans le NT toute sorte de références défavorables aux Pharisiens, il faut les voir contre la toile de fond d’un mouvement complexe et diversifié. Les critiques contre différents types de Pharisiens ne manquent d’ailleurs pas dans les sources rabbiniques (cf. Talmud de Babylone, Traité Sotah 22 b etc.). Le «pharisaïsme», au sens péjoratif, peut sévir dans toute religion. On peut aussi souligner le fait que, si Jésus se montre sévère envers les Pharisiens, c’est qu’il y a entre eux et lui une plus grande proximité qu’avec les autres groupes juifs contemporains (cf. supra n. 17).
Je pense que ce n'est pas un luxe de le rappeler de temps en temps
lhirondelle- Messages : 317
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
En effetlhirondelle a écrit:Je pense que ce n'est pas un luxe de le rappeler de temps en temps
...merci !
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Pardon lhirondelle pour ce raccourci qui voulait uniquement rebondir sur la question du sens de "Juifs" comme "judéens".
A propos des pharisiens, le problème posé pour tout lecteur de l'évangile est tout de même les propos très virulents que Jésus aurait prononcés à leur adresse, alors que, justement et comme vous l'observez très bien, ses rapports avec eux ne se limitent pas à cet aspect des choses.
Une idée me traverse ces temps ci, qui demanderait à être confrontée attentivement aux textes.
Jésus est-il opposé aux pharisiens dans leur idéologie?
Est-il en désaccord avec leur interprétation de la Loi?
Il est, semble-t-il, en désaccord avec leur manière de l'appliquer, mais est-ce réellement sur leur hallakah, je veux dire par là sur leur principes? Dans les textes, Jésus les traîte presque toujours d'hypocrite. Se pourrait-il que Jésus se met en colère contre des pharisiens qui sont souvent, peut-être majoritairement hypocrites, c'est à dire qu'ils ne respectent pas leur propre sagesse, avec laquelle, justement Jésus serait plutôt d'accord sur le fond?
Du coup, y a-t-il réellement, au temps de Jésus, un pharisaïsme contre lequel Jésus s'oppose?
N'ya-t-il pas plutôt des "pharisiens qui ne respectent pas leur pharisaïsme" ? D'où les propos violents d'un Jésus qui les qualifie d'hypocrites, de menteurs, d'aveugles?
A propos des pharisiens, le problème posé pour tout lecteur de l'évangile est tout de même les propos très virulents que Jésus aurait prononcés à leur adresse, alors que, justement et comme vous l'observez très bien, ses rapports avec eux ne se limitent pas à cet aspect des choses.
Une idée me traverse ces temps ci, qui demanderait à être confrontée attentivement aux textes.
Jésus est-il opposé aux pharisiens dans leur idéologie?
Est-il en désaccord avec leur interprétation de la Loi?
Il est, semble-t-il, en désaccord avec leur manière de l'appliquer, mais est-ce réellement sur leur hallakah, je veux dire par là sur leur principes? Dans les textes, Jésus les traîte presque toujours d'hypocrite. Se pourrait-il que Jésus se met en colère contre des pharisiens qui sont souvent, peut-être majoritairement hypocrites, c'est à dire qu'ils ne respectent pas leur propre sagesse, avec laquelle, justement Jésus serait plutôt d'accord sur le fond?
Du coup, y a-t-il réellement, au temps de Jésus, un pharisaïsme contre lequel Jésus s'oppose?
N'ya-t-il pas plutôt des "pharisiens qui ne respectent pas leur pharisaïsme" ? D'où les propos violents d'un Jésus qui les qualifie d'hypocrites, de menteurs, d'aveugles?
Libremax- Messages : 1367
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Les pharisiens se traitaient entre eux de toute sorte de noms d'oiseaux et en des termes bien pire que ceux que Jésus emploie.
Etonnement, ces frictions indiquent seulement que Jésus était proche d'eux.
"Pharisiens hypocrites" s'adresse aux hypocrites parmi les pharisiens, ça ne veut pas dire qu'ils le sont tous.
Il y avait plusieurs écoles chez les pharisiens qui s'invectivaient joyeusement les unes les autres.
Jésus a un point commun avec eux : deux toroth : l'écrite et l'orale.
La torah orale sert à interpréter la torah écrite car, contrairement à ce que j'entends trop souvent, les pharisiens n'appliquaient pas la torah à la lettre ( ce sont les sadducéens qui faisaient ça). Les pharisiens avaient un enseignement oral qui rendait la torah applicable.
Mais là où, selon moi, Jésus s'éloigne du pharisaïsme, c'est le fait d'appliquer la torah ne donne pas des droits sur Dieu.
Etonnement, ces frictions indiquent seulement que Jésus était proche d'eux.
"Pharisiens hypocrites" s'adresse aux hypocrites parmi les pharisiens, ça ne veut pas dire qu'ils le sont tous.
Il y avait plusieurs écoles chez les pharisiens qui s'invectivaient joyeusement les unes les autres.
Jésus a un point commun avec eux : deux toroth : l'écrite et l'orale.
La torah orale sert à interpréter la torah écrite car, contrairement à ce que j'entends trop souvent, les pharisiens n'appliquaient pas la torah à la lettre ( ce sont les sadducéens qui faisaient ça). Les pharisiens avaient un enseignement oral qui rendait la torah applicable.
Mais là où, selon moi, Jésus s'éloigne du pharisaïsme, c'est le fait d'appliquer la torah ne donne pas des droits sur Dieu.
lhirondelle- Messages : 317
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Vous résumez bien l'idée qui me venait en tête.
Est-ce une supposition? Avons nous aujourd'hui des traces de ces invectives?lhirondelle a écrit:
Les pharisiens se traitaient entre eux de toute sorte de noms d'oiseaux et en des termes bien pire que ceux que Jésus emploie.
Libremax- Messages : 1367
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Merci pour ce lien, j'en avais entendu parler mais je ne le retrouvais pas !lhirondelle a écrit:Et pour ça, je vais passer par un document tout ce qui a de plus catholique :
http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/chrstuni/relations-jews-docs/rc_pc_chrstuni_doc_19820306_jews-judaism_fr.html
Bien sûr si vous pouvez indiquer comment on connaît ces invectives : par le Talmud ?lhirondelle a écrit:Les pharisiens se traitaient entre eux de toute sorte de noms d'oiseaux et en des termes bien pire que ceux que Jésus emploie.
Étonnement, ces frictions indiquent seulement que Jésus était proche d'eux.
"Pharisiens hypocrites" s'adresse aux hypocrites parmi les pharisiens, ça ne veut pas dire qu'ils le sont tous.
Il y avait plusieurs écoles chez les pharisiens qui s'invectivaient joyeusement les unes les autres.
Jésus a un point commun avec eux : deux toroth : l'écrite et l'orale.
La torah orale sert à interpréter la torah écrite car, contrairement à ce que j'entends trop souvent, les pharisiens n'appliquaient pas la torah à la lettre ( ce sont les sadducéens qui faisaient ça). Les pharisiens avaient un enseignement oral qui rendait la torah applicable.
Mais là où, selon moi, Jésus s'éloigne du pharisaïsme, c'est le fait d'appliquer la torah ne donne pas des droits sur Dieu.
Mais dans l'ensemble je suis bien d'accord avec vous, surtout la dernière phrase : " rien ne donne de droits sur Dieu ".
- LES HYPOCRITES DANS LES ÉVANGILES:
Si on regarde les versets sur les " hypocrites " dans les Évangiles, ça va plus profond que l'écart « entre la conduite et la pensées du cœur » ou entre les prescriptions de la Loi et l’observance extérieure effective. Ce que Jésus vise et voit comme devant être purifié (Mt 23, 13) c’est le cœur (Mc 7, 6), l’attitude intérieure, le « regard » (Mt 6, 1.5.16), c’est à dire l’attention ou l’intention (Mt 22 15.18). C'est carrément la purification du désir qui est visée par Jésus ... et là on tombe sur une grosse question non résolue. La " religion " paraît un peu impuissante pour opérer rapidement et facilement cette purification ultime selon moi. Et c'est pourquoi nombreux - même parmi les religieux - pensent que c'est impossible, que c'est une illusion. Ils y renoncent parfois complètement.
Il y a certes des " nés de nouveau " qui bénéficient de changements intérieurs remarquables après leur conversion. Il ne faut pas le nier. Mais ensuite, une fois le premier pas franchi, pour d'autres " travers " ou " failles " intimes cela peut être l'affaire d'une vie : mendier la grâce de Dieu dans une longue patience au prix de souffrances et de l'humiliation bien souvent.
La seconde conversion - celle qui est décisive - se produit quand on s'aperçoit que les " œuvres de la loi " ou la pratique religieuse sont impuissantes à nous rendre juste, à purifier le désir lui-même. Alors la seule voie pour cette purification est celle de la confiance, de la patience, c'est à dire la voie de la pauvreté spirituelle, ceci signifiant qu'au bout c'est la grâce de Dieu seule qui opérera effectivement cette guérison sincère de notre désir. Je pense que c'est le premier reproche que Jésus fait aux " religieux " de tous poils. Pour moi en effet c'est toute la pratique religieuse de tous les temps qui est ici visée - bien au delà des scribes et des pharisiens de son temps. Il faut penser à ce qui se passe encore aujourd'hui. Beaucoup ne l'ont pas compris, ne la pratiquent et ne l'enseignent pas d'où : " Vous fermez devant les hommes l'entrée du Royaume des cieux " (Mt 23, 13) et " vous les rendez dignes de la géhenne, deux fois plus que vous " (Mt 23, 15).
C'est particulièrement grave quand ils ont un rôle d'exemple et d'enseignement : " Malheureux êtes-vous guides aveugles ..." (Mt 23, 16), " Guides aveugles, qui arrêtez au filtre le moucheron et avalez le chameau. " (Mt 23, 23). Constatant leur stérilité et leur échec, certains peuvent - par dépit - devenir même des guides toxiques et pervers sur le plan spirituel tendant à désespérer ceux qu'ils affectent aider : " lls lient des fardeaux pesants, et les mettent sur les épaules des hommes, mais ils ne veulent pas les remuer du doigt. " (Mt 23, 4) ...
Ensuite Jésus accuse certains de ces religieux de rapacité : " Vous dévorez les biens des veuves " (Mt 23, 14), de malhonnête intellectuelle : " Si on jure par le sanctuaire, cela en compte pas ... " (Mt 23, 16), de petits arrangements douteux avec la Loi et d'une tradition du scrupule qui néglige le plus important : " alors que vous négligez ce qu'il y a de plus grave dans la Loi: la justice, la miséricorde et la fidélité; " (Mt 23, 23) et les biens déclarés korbane (Mc 7, 11-13), etc ...
Enfin, il y a cette curieuse et très violente accusation de Jésus - qui couvre le passé et le futur - : " Serpents, engeance de vipères, comment pourriez-vous échapper au châtiment de la géhenne ? C'est pourquoi, voici que moi, j'envoie vers vous des prophètes, des sages et des scribes. Vous en tuerez et mettrez en croix, vous en flagellerez dans vos synagogues et vous les pourchasserez de ville en ville, pour que retombe sur vous tout le sang des justes répandu sur la terre, depuis le sang d'Abel le juste jusqu'au sang de Zacharie, fils de Barachie, que vous avez assassiné entre le sanctuaire et l'autel. En vérité, je vous le déclare, tout cela va retomber sur cette génération. " (Mt 23, 33-36) Je répète, je pense que Jésus a parlé a bon escient et qu'Il sait bien de quoi il parle. Il est totalement déplacé de parler à son sujet de manque de bienséance ou d'impolitesse, c'est une vision étriquée et à courte vue. Ici, Jésus endosse la voix prophétique du Père : " Voici que moi, j'envoie vers vous des prophètes, des sages et des scribes " et décrit ce mal, cette traîtrise et cette violence qui continuera à habiter l'Eglise après Sa venue, en quelque sorte quelque chose du mystère d'iniquité (2 Th 2, 7) qui minera l'Eglise et l'histoire humaine jusqu'à la Fin des Temps.
Je pense que quand Jésus parle du " sang des justes répandu sur la terre, depuis le sang d'Abel le juste jusqu'au sang de Zacharie ", il signifie que cette génération (nous les hommes) sommes finalement les fils de Caïn ... et nous avons quelque part en nous un goût pour le meurtre de l'innocent. Les hypocrites sont voués au lieu où sont « les pleurs et les grincements de dents. » (Mt 24, 51).
Roque- Messages : 5064
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Oui, ce ne sont pas des paroles en l'airLibremax a écrit:Est-ce une supposition? Avons nous aujourd'hui des traces de ces invectives?lhirondelle a écrit:
Les pharisiens se traitaient entre eux de toute sorte de noms d'oiseaux et en des termes bien pire que ceux que Jésus emploie.
Il y a des écrits où ce genre de gentillesses sont consignées
lhirondelle- Messages : 317
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
lhirondelle a écrit:
Oui, ce ne sont pas des paroles en l'air
Il y a des écrits où ce genre de gentillesses sont consignées
Ne prenez surtout pas mes propos comme une mise en doute, mais perso, et puis pour notre débat à tous aussi, je pense, ça m'intéresserait beaucoup d'en savoir plus.
Pourriez-vous nous indiquer de quels écrits il s'agit ?
Libremax- Messages : 1367
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Je pense qu'il s'agit du Talmud.
Ce sont les souvenirs d'une conférence que j'ai suivie il y a 18 ans, ... ça date un peu
Ce sont les souvenirs d'une conférence que j'ai suivie il y a 18 ans, ... ça date un peu
lhirondelle- Messages : 317
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Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Vu sur un forum juif :
"Avec quels pharisiens Yéshoua se dispute-t-il ?"
"A dater de ce jour beth Hillel et beth Shammai devinrent 2 courants pharisiens complètement OPPOSÉS , voir même ennemis (sanhédrin 88b) , - 358 disputes ont été recensées entre les deux courants.
Shammai est le tenant de la rigueur de la loi, c'est-à-dire la lettre de la loi.
Hillel penche TOUJOURS pour une interprétation plus souple de la loi, c'est-à-dire l'Esprit de la loi. Le talmud enseigne soyez doux comme Hillel, en non vif comme Shammai"
"Tous les pharisiens ne sont pas les mêmes, tous ne sont pas des « légalistes » ou des « hypocrites ».
Le talmud explique qu'au premier siècle il y avait 7 types (sortes) de pharisiens, mais que un seul type était bon (sotah 22b). QUI étaient-ils ? Jésus était d'accord à 90 % avec HILLEL qui est aussi de descendance Davidique, POURQUOI ? Était-il pharisien ?"
"Lorsque Yéshoua commence son ministère, il est obligé de trancher entre les deux."
http://messianique.forumpro.fr/t3487-avec-quels-pharisiens-yshoua-se-dispute-t-il
Autre site :
"Les discussions entre Hillélistes et Schammaïstes étaient souvent d'une violence dont rien n'approche. Elles avaient remplacé les antiques querelles des Pharisiens et des Saducéens. Nous en citerons quelques exemples, dans le chapitre suivant, en parlant des écoles et de l'esprit qui y régnait."
http://www.regard.eu.org/Livres.6/Palestine.au.temps.de.JC/29.html
"Avec quels pharisiens Yéshoua se dispute-t-il ?"
"A dater de ce jour beth Hillel et beth Shammai devinrent 2 courants pharisiens complètement OPPOSÉS , voir même ennemis (sanhédrin 88b) , - 358 disputes ont été recensées entre les deux courants.
Shammai est le tenant de la rigueur de la loi, c'est-à-dire la lettre de la loi.
Hillel penche TOUJOURS pour une interprétation plus souple de la loi, c'est-à-dire l'Esprit de la loi. Le talmud enseigne soyez doux comme Hillel, en non vif comme Shammai"
"Tous les pharisiens ne sont pas les mêmes, tous ne sont pas des « légalistes » ou des « hypocrites ».
Le talmud explique qu'au premier siècle il y avait 7 types (sortes) de pharisiens, mais que un seul type était bon (sotah 22b). QUI étaient-ils ? Jésus était d'accord à 90 % avec HILLEL qui est aussi de descendance Davidique, POURQUOI ? Était-il pharisien ?"
"Lorsque Yéshoua commence son ministère, il est obligé de trancher entre les deux."
http://messianique.forumpro.fr/t3487-avec-quels-pharisiens-yshoua-se-dispute-t-il
Autre site :
"Les discussions entre Hillélistes et Schammaïstes étaient souvent d'une violence dont rien n'approche. Elles avaient remplacé les antiques querelles des Pharisiens et des Saducéens. Nous en citerons quelques exemples, dans le chapitre suivant, en parlant des écoles et de l'esprit qui y régnait."
http://www.regard.eu.org/Livres.6/Palestine.au.temps.de.JC/29.html
DenisLouis- Messages : 1072
Réputation : 10
Date d'inscription : 15/06/2013
Age : 73
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
bonjour Ren, je rentre de voyage et lis :
Mais, certes, le catholicisme ni l'orthodoxie n'ayant d'exégètes indépendants, il faut lire autre chose en français que Guitton ou Daniel-Rops.
Il n'y a rien de dépassé dans l'hypothèse très solide et parfaitement fondée consistant à éclairer les bizarreries, contradictions, gauchissement de la vérité historique (Pillate, quel brave type !) et autres paroles très improbables de Jésus : "leurs synagogues.." par le désir conscient ou demi-conscient de faire refléter dans l'époque de Jésus et ses disciples une atmosphère, voire une haine et une séparation progressive mais nette entre les communautés juive et judéo-chrétienne qui date en fait de bien plus tard. Et la dénomination par Jean "les Juifs" (le seul des 4 évangiles) en est un argument de plus. sans parler d'interpolations et rajouts ultérieurs (la fin de Jean, celle de Marc, tout comme la mention de Jésus au chapitre 18 des Antiquités judaïques : Et pour cause : c'était des moines qui copiaient !)le fait que vous parlez en vous fondant sur des recherches d'une époque dépassée
Mais, certes, le catholicisme ni l'orthodoxie n'ayant d'exégètes indépendants, il faut lire autre chose en français que Guitton ou Daniel-Rops.
Jans- Messages : 3577
Réputation : 0
Date d'inscription : 21/03/2018
Age : 68
Localisation : IdF
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Bonjour Jans,
Pour éclairer l'événement A par un événement B il importe de démonter l'historicité de cet événement explicatif B.
En l'état de notre discussion, les documents dont nous disposons suggèrent une très vive tension entre 30 et 65, si vive qu'au moins trois personnes vont en mourir.
En revanche, les documents dont nous disposons attestent une opposition doctrinale bien moins violente.
Voilà pourquoi nous vous demandons d'apporter des éléments prouvant que les tensions étaient plus intenses en 90/110 qu'en 30/40.
Très cordialement
votre sœur
pauline
Jans a écrit:... Il n'y a rien de dépassé dans l'hypothèse très solide et parfaitement fondée consistant à éclairer les bizarreries, contradictions, gauchissement de la vérité historique (Pillate, quel brave type !) et autres paroles très improbables de Jésus : "leurs synagogues.." par le désir conscient ou demi-conscient de faire refléter dans l'époque de Jésus et ses disciples une atmosphère, voire une haine et une séparation progressive mais nette entre les communautés juive et judéo-chrétienne qui date en fait de bien plus tard.
Pour éclairer l'événement A par un événement B il importe de démonter l'historicité de cet événement explicatif B.
En l'état de notre discussion, les documents dont nous disposons suggèrent une très vive tension entre 30 et 65, si vive qu'au moins trois personnes vont en mourir.
En revanche, les documents dont nous disposons attestent une opposition doctrinale bien moins violente.
Voilà pourquoi nous vous demandons d'apporter des éléments prouvant que les tensions étaient plus intenses en 90/110 qu'en 30/40.
Très cordialement
votre sœur
pauline
Invité- Invité
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Les tensions que nous connaissons vous et moi ne surviennent, à l'évidence, que lorsque les disciples se mettent à proclamer Jésus-Christ ressuscité puis Messie et Fils de Dieu, ce qui d'ailleurs, à écouter Pierre dans le discours de la Pentecôte au début des Actes, n'intervient pas tout de suite ; et pour cause : il faut pour cela une élaboration théologique. Donc de 29 à 30, au temps de la prédication juive de Jésus le Juif, ces tensions n'existent pas ou peu, et vous savez sans doute que la violence verbale de Jésus envers les pharisiens a éveillé rapidement les exégètes de tous horizons : Car les divergences étaient autrement manifestes avec les Sadducéens ; mais ceux-ci disparaissent après 70 et les adversaires frontaux des judéo-chrétiens sont désormais les pharisiens... c'est donc une relecture possiblement dramatisée en 70 ou 80, dates de rédaction des évangiles, des souvenirs de conflits vraisemblablement plus banals des années 30.
J'avoue ne pas comprendre comment il est possible que ces travaux exégétiques ne soient pas connus d'une personne aussi cultivée que vous.
J'avoue ne pas comprendre comment il est possible que ces travaux exégétiques ne soient pas connus d'une personne aussi cultivée que vous.
Jans- Messages : 3577
Réputation : 0
Date d'inscription : 21/03/2018
Age : 68
Localisation : IdF
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
Cher Jans, vous avez répété cela plus de vingt fois.Jans a écrit:c'est donc une relecture possiblement dramatisée en 70 ou 80, dates de rédaction des évangiles, des souvenirs de conflits vraisemblablement plus banals des années 30.
Mais vous ne répondez pas à cette question qui vous a été posée une bonne demie douzaine de fois.pauline.px a écrit:Voilà pourquoi nous vous demandons d'apporter des éléments prouvant que les tensions étaient plus intenses en 90/110 qu'en 30/40.
Vous semblez " bloqué ", je veux dire sans autre argument que vous affirmation ci-dessus... ?
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Re: « Vos synagogues », « leur synagogue », « leurs synagogues »
D'autant qu'à partir de ce qu'on peut savoir des rapports entre pharisiens de diverses école (merci Denis Louis pour sa participation!), on se rend compte que, plus on était proches entre écoles de pensée juives, plus on pouvait aussi trouver à se disputer violemment.
A en lire les rapports entre "Shammaïstes" et Hillelistes", qu'y avait-il d'étonnant à voir Jésus tenir des propos particulièrement rudes envers les pharisiens?
Libremax- Messages : 1367
Réputation : 16
Date d'inscription : 18/10/2011
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