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BIBLE DIFFÉRENTES CHEZ LES CHRÉTIENS

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Message  Roque Jeu 26 Avr - 21:06

acinne a écrit:Cher Libremax,
Libremax a dit : « cher acinne, qu'entendez-vous par "texte occidental" et "texte oriental" ? »

RP : désolé de ne pas donner suite à votre question parce que j’ai pas une grande chose et j’ai pas l’intention de faire copier coller.
acinne, je crois que la réponse se trouve dans les premiers paragraphes du lien indiqué par pauline.px plus haut :
:arrow: http://godieu.com/texte_recu/histoire.html#Chapitre1
J'espère y revenir car ce texte dense et même compliqué contient des informations intéressantes sur notre sujet. En attendant cette différenciation entre "texte occidental" et "texte oriental" ne concerne que le Nouveau Testament en grec.

Pour l'intant, je voudrais revenir sur la question de départ :
acinne a écrit:BIBLE DIFFÉRENTES CHEZ LES CHRÉTIENS

Pourquoi chez les chrétiens de tous tendances la Bible n'est-elle pas la même?

Justifiez Vous S.V.P
Merci.

Oui, s’il y a plusieurs canons bibliques chez les chrétiens, on peut se poser plusieurs questions :
- Lequel est la véritable Parole de Dieu, inspirée de l’Esprit Saint ?
- Pourquoi a-t-on choisi tel ou tel canon ?
- Ces différences sont-elles à l'orgine des différentes branches du christianisme ou des sectes ?

La réponse au deux premières questions se trouve à deux niveaux :

- La conception chrétienne de l’inspiration par l’Esprit Saint passe par la collaboration humaine d’un peuple entier, de prophètes, de sages, de prêtres et de rois – il ne s’agit pas d’une parole dictée au mot à mot par Dieu; Même dans la conception ancienne traditionnelle, c’était Moïse qui était censé avoir rédigé la Torah (l’Instruction, l’Enseignement en hébreu) – non Dieu, Lui-même - à l’exception des Dix Paroles au Sinaï ;

- Le choix du canon est un processus historique qui a consisté – pour l’Ancien Testament – à recevoir l’héritage des textes juifs : d’abord la Septante grecque - au temps de Jésus - mais dans les Églises indépendantes, voire séparées (coptes, éthiopiens) ce qui explique que le nombre des livres retenus est différent, par exemple entre les catholiques et les orthodoxes - à partir d'un fonds commun : la Septante grecque.

Nous laissons pour l'instant la troisième question. De façon générale : ce n'est pas le canon biblique qui est à l'origine des différences entre les chrétiens, mais plutôt l'interprétation des mêmes textes. Ce sont plutôt les différences de conception ont été à l'origine du rejet de certains livres du canon biblique.


L'HISTOIRE DES CANONS SUCCESSIFS

Si on place chronologiquement les bibliothèques dûment recensées (par exemple la Septante d'Alexandrie traduite en grec), les livres rassemblés en une seul bibliothèque (comme à Qumran) ou les livres déclarés canoniques – au cours d’une réunion ou d’un synode - pour l’Ancien Testament – on a :
A- Septante traduite à Alexandrie : 52 livres (avant notre ère) ;
B- Bibliothèque de Qumran : près de 170 livres (avant notre ère) ;
C- Canon vétérotestamentaire syriaque : 33 livres (quatrième siècle, mais sources antérieures à notre ère : Targum et Septante) ;
D- Canon vétérotestamentaire catholique : 46 livres (premier siècle) ;
E- Canon hébraïque : 39 livres (premier siècle) ;
F- Canon vétérotestamentaire orthodoxe : 51 livres (Églises indépendantes) ;
G- Canon vétérotestamentaire de Marcion: aucun livre (deuxième siècle) ;
H- Canon vétérotestamentaire copte : 58 livres (quatrième siècle) ;
I- Canon vétérotestamentaire éthiopien: 46 livres (cinquième siècle) ;
J- Canon vétérotestamentaire arménien : 51 livres (?) (7ème siècle) ;
K- Canon vétérotestamentaire protestant : 39 livres (16ème siècle) ;
L- Canon vétérotestamentaire anglican : 39 livres (17ème siècle).

L’illusion pour certaines personnes est de croire, schématiquement, que « la même Parole de Dieu immuable » aurait été passée « comme dans une course de relais » par les juifs aux catholiques, puis Églises orientales d’où sont issus les orthodoxes et enfin aux protestants, etc. Notre petit récapitulatif ci-dessus montr bien que cette vision des choses est un préjugé, autant dire : fausse. Mais cette illusion est en partie induite par une vision fondamentaliste de la Parole de Dieu, chez les chrétiens, mais également chez les musulmans. L’idée que la Parole de Dieu exclut nécessairement toute participation humaine est fausse du point de vue de la Bible. En fait, comme on l’a dit plus haut : les livres de la Bible ont été écrits par divers auteurs et ont été transmis dans les versions présentant des variantes parfois simultanées. Il faut penser que pour les Juifs, il y avait un jeu permanent de relations et d'interprétation entre la Torah écrite et la Torah orale et ce : depuis Moïse. Les manuscrits de Qumran sont des témoins de ce processus très humain interprétatif et et créatif à partir du texte d’inspiration divine attribué à Moïse - par les esséniens et par Jésus, Lui-même. La même vision fondamentaliste, ci-dessus, veut ignorer toute la dimension historique de ce processus.


COMPREHENSION MODERNE DE L’ELABORATION DE LA BIBLE

La découverte des manuscrits de Qumran en 1947 a confirmé une partie de la théorie documentaire qui a émis l’hypothèse que la Bible a été écrite à partir du rassemblement de plusieurs sources antérieures (par exemple : quatre sources pour le seule Torah). Par exemple, les textes de Qumran ont confirmé qu’ils étaient à l’origine de trois versions de l’Ancien Testament : la Septante grecque, le texte massorétique et le Pentateuque samaritain. Ce point est maintenant historiquement établi.
L'étude de ces textes permit entre autre de confirmer la théorie des trois sources de l'Ancien Testament selon laquelle un premier groupe de textes avait servi à l'établissement du texte massorétique, un second avait été utilisé pour la traduction grecque de la Septante et un dernier avait servi de base au Pentateuque samaritain. L'étude de ces textes bibliques très anciens permit également de constater qu'il y avait déjà, à l'époque du Second Temple, un effort d'uniformisation du texte biblique vers ce qui devint plus tard le texte massorétique. :arrow: http://www.interbible.org/interBible/decouverte/comprendre/2003/clb_030627b.htm
La Bible est aussi le résultat très humain de siècles d’écoute de Dieu, d’expérience de Dieu, de prière et de célébration, de remémoration et de ressassement, d’élaboration de l’histoire et d’interprétation, de réflexion humaine, de chutes institutionnelles et de relèvements prophétiques. Cette Bible n’est pas l’ensemble des textes mis par écrits sous l’inspiration de l’Esprit de YHWH, mais seulement ce qu’il en reste. On sait en effet que de nombreux documents sources et d’éditions successives des livres de notre Bible actuelle ont été perdus. L’Ancien Testament cite au moins 14 livres perdus. Probablement définitivement perdus,
Livres disparus mentionnés dans la Bible

Des écrits mentionnés comme faisant autorité dans la Bible n'y figurent pas. Il s'agit des textes suivants : le Livre de l'alliance (Ex 24:7), les Guerres de l'Éternel (No 21:14), le Livre du Juste (Jos 10:13 ; 2 S 1:18), le Livre des actes de Salomon (1 R 11:41), le Livre de Samuel le voyant (1 Ch 29:29), le Livre de Nathan le prophète (1 Ch 29:29 ; 2 Ch 9:29), le Livre de Gad le prophète (1 Ch 29:29) ; la Prophétie d'Achija de Silo (2 Ch 9:29), les Révélations de Jéedo le prophète (2 Ch 9:29), le Livre de Schemaeja le prophète (2 Ch 12:15), le Livre d'Iddo le prophète (2 Ch 12:15 ; 13:22), les Mémoires de Jéhu (2 Ch: 20:34), le Livre de Hozaï (2 Ch 33:19), les prophéties d'Hénoch/Hénoc (Jud v. 14), une épître aux Corinthiens (1 Co 5:9), une épître aux Éphésiens (Ép 3:3,4) et une épître aux Laodicéens (Col 4:16), laquelle est retenue comme canonique par l'église syriaque.
:arrow: http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_livres_de_la_Bible
Autre liste (un peu différentes comprenant des sources historiques, des annales et chroniques) - des livres disparus cités dans la Bible :
:arrow: http://pensees.bibliques.over-blog.org/article-2652941.html

Mais - pour les chrétiens - le Verbe-Logos de Dieu s’est manifesté en totalité en Jésus-Christ – selon une communication qui n’est plus celle d’un texte, mais qui est celle de la Résurrection, de la Rédemption, de la Grâce divine universelles proposées moyennant la foi au Verbe Fils Monogène du Père par l’Esprit Saint. Pour les chrétiens le sens révélè est a rechercher après relecture de la Bible à la lumières des enseignements, des faits et gestes de Jésus-Christ et Seigneur. La clé de lecture c'est le Fils Monogène du Père par l'Esprit Saint - sur le principe il n'y a aucune idolâtrie du texte possible. C'est Jésus Christ qui commande et détermine la compréhension de la Bible - non l'inverse. Mais le texte de la Bible ne peut être entendu comme Parole Vivante et Efficace de Dieu sans la lumière de l'Esprit Saint. Cette collaboration intime de la Parole de Dieu et de l'Esprit de Dieu est un constante dans les textes bibliques sur la Révélation et l'Inspiration dans la Bible, voir :
:arrow: https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t363p45-que-veut-dire-inspire#9451

Spoiler:

Les Mormons ajoutent à la Bible un Livre des Mormons rédigé à partir de plaques métalliques remises par l'Ange Moroni à Joseph Smith au XIXème siècle. Les Mormons ne sont habituellement pas considérés comme chrétiens. Le canon bibliques des Témoins de Jéhovah est la même que celui des protestants. Leur Bible (Traduction du Nouveau Monde : TNM) n'est pas un traduction à partir des textes originaux en hébreu, grec ou araméen, mais une traduction (fréquemment remaniée au cours des dernières années) à partir de l'anglais et les traducteurs sont anonymes. La traduction orientée du texte biblique dans la TNM, sépare nettement les Témoins de Jéhovah du reste des chrétiens : catholiques, protestants et orthodoxes.

Roque

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Message  Roque Mer 2 Mai - 19:28

Avant de répondre à acinne sur la question du Texte Reçu ou du Texte Majoritaire ou des éditions critiques ultérieures – question qui concerne principalement le Nouveau Testament uniquement en grec - il faut encore répondre à une objection de pauline.px.

pauline.px a écrit:
Roque a écrit:L'entente des chrétiens sur les livres du canon -dépend de l'histoire - certains en sont restés au canon juif de l'AT

Je ne partage pas ce point de vue.

À part peut-être l’Église de Jérusalem et les Églises de Syrie, je suis convaincue qu’aucune autre Église n’est "restée" au Canon Juif.

D’abord parce que le Canon Juif (si jamais cette expression a un sens en dehors du Christianisme) n’existe sûrement pas avant l’Incarnation de notre Seigneur. Le Talmud discutera longtemps de la canonicité de nombreux textes en utilisant l'expression "les Livres qui souillent les mains"…

Au mieux, c’est-à-dire si on accepte [color=red]l’hypothèse invérifiable du « concile Yavné »[/color] (Jamnia), le Canon Juif n’aurait été éventuellement fixé qu’après la chute de Jérusalem, c’est-à-dire au moment où l’antagonisme entre Juifs et Chrétiens semble très prégnant.

Il est vrai que si notre longue énumération - ci-dessus - des canons bibliques tend à montrer que tout le monde a puisé dans un fonds commun « biblique » de dimension variable, elle n’explique pas comment va se faire le partage entre les livres vétérotestamentaires reçus par uns (les Juifs et les Protestants) ou les autres (Catholiques et Orthodoxes). Sur quoi repose ce choix ? On peut se poser deux questions :
- Existait-il une liste des textes inspirés hébraïques avent notre ère ?
- Y a-t-il eu une décision sur le canon hébraïque à Jamnia en 80 ou 90 de notre ère ?



EXISTAIT-IL UNE LISTE DES TEXTES INSPIRES HEBRAIQUES AVANT NOTRE ERE ?
Au premier siècle de notre ère, les Juifs possédaient une collection de livres sacrés qu’ils tenaient pour inspirés comme l’atteste le témoignage de Josèphe (Contra Apionem, 1,8), le quatrième livre d’Esdras (14, 37-38) et le Talmud. Ces ouvrages étaient distribués en trois groupes : la Loi, les Prophètes, les Écrits, et la collection incluait tous nos livres protocanoniques. (Source 1, page 109)

Cette division traditionnelle semble devoir être mise en relation avec l’ordre chronologique selon lequel les différentes collections ont été acceptées par les Juifs avant notre ère:
- Premier groupe : le Pentateuque a pris sa forme définitive au cinquième siècle avant notre ère, à partir du temps d’Esdras, soit : 5 livres ;
- La plupart des livres du second groupe : les « Prophètes antérieurs » (de Josué aux Rois) et les « Prophètes postérieurs » (Isaïe, Jérémie, Ézéchiel et les douze petits prophètes ont dû être admis vers la même époque. Mais la collection ne peut être considérée comme complète que vers la fin du quatrième siècle avec la publication du dernier écrit de la série : les chapitres 9 à 14 de Zacharie. L’ecclésiaste atteste que la liste était complète avant 180 avant notre ère, soit très approximativement : 21 livres. On peut affirmer sans craindre de se tromper que la collection des Prophètes était fixée dans la premier moitié du second siècle avant notre ère et qu’elle a pris place à côté de la Loi de Moïse ;
- Le troisième groupe est composite. Il semble s’être constitué autour de la collection des Psaumes avec le Cantique des Cantiques, Ruth, les Lamentations, l’Ecclésiaste et Esther. Ces cinq ouvrages, les « Megilloh » ou « rouleaux » étaient lus pendant les grandes fêtes. Cette liste s’est formée entre la quatrième et le deuxième siècle avant notre ère (Source 1, page 111).

Les dates proposées par Sundberg pour les étapes de réception de la Loi, des Prophètes et des écrits sont similaires (- 400, - 200 et - 90) avec une « canonisation ratifiée au premier siècle par l'usage commun » (Source : 5) ce qui signifie canonisation pratique sans décision formelle.

Arrivé à ce niveau, on voit clairement que si aucune de ces trois listes ne fut établie en vertu d’une décision officielle « canoniques », elles ont été reçues par la pratique, par l’inscription dans la liturgie. Ce n’est pas que les Juifs auraient ignoré ce que signifie une « règle » ou un « canon », mais on ne voit pas à quoi aurait pu servir – une liste limitative et exclusive de textes inspirés - avant notre ère, c’est-à-dire avant la tentative d’appropriation et de réinterprétation par des sectaires dissidents que sont les chrétiens pour les Juifs de l’époque.
Il ne faut donc pas être surpris des différences d’opinion qui se firent jour parmi les Juifs au sujet des textes inspirés de la Première Alliance. La position qui limite le canon aux livres anciens et traditionnels était celle du pharisaïsme. Les sadducéens ne considéraient comme canonique que le Pentateuque. Par contre à Alexandrie et à Qumran on estimait que Dieu n’avait pas encore dit son dernier mot. C’est ainsi que la diaspora accordait une réelle importance aux livres que nous appelons deutérocanoniques. (Source 1, pages 110). Au temps du Christ régnait encore une réelle incertitude au sujet du canon des Écritures et de la canonicité de tel ou tel livre. (Source 1, page 111)

REPONSE : Il n’y aurait donc pas eu de canon hébraïque avant notre ère – au sens de canon découlant d’une décision formelle et au sens de canon limitatif et exclusif -, mais une liste de textes inspirés. Pour certains livres, ils sont bien fixés et mis au même rang que la Loi de Moïse, pour d’autres livres ils ne sont consacrés par l’usage liturgique.


Y A-T-IL EU UNE DECISION SUR LE CANON HEBRAIQUE A JAMNIA ?

Certains prétendent que le processus de canonisation était encore un processus ouvert et d’autres non. Maintenant on arrive à la question de l’existence ou non d’une décision concernant le canon hébraïque à Jamnia (Yavné) et de quelle ampleur. Y a-t-il eu réellement un Concile à Jamnia et organisé par qui, avec quelle autorité ? Dernière question quand même : qui conteste l’existence de cette décision, sur quel point et pourquoi ?

En premier lieu, mes trois premières sources (et un cours récent que j’ai reçu au Collège des Bernardins à Paris) sont affirmatifs sur l’existence d’une prise de décision à Jamnia. Il n’y a ni doute, ni hypothèse à ce sujet – sauf source contraire bien entendu. Les seules choses qui sont précisées, c’est qu’après la destruction de Jérusalem, un grand nombre d’ouvrages ayant été détruits à Jérusalem, même, il a fallu reconstituer à partir de la diaspora les ouvrages fondateurs du judaïsme brulés (Cf : cours). Ensuite sans que la forme de cette décision soit précisée, il n’a été question que d’un « groupe de savants juifs » entérinant la position pharisienne déjà établie avant notre ère.

« C’est seulement après la ruine de Jérusalem, qu’un groupe de savants juifs cherchant à préserver ce qui restait du passé se réunit à Jamnia vers l’année 90 et déclara formellement accepter le canon réduit des pharisiens. Pour diverses raisons – le fait, entre autres, que la Bible grecque avait été adoptée par le chrétiens -, ces lettrés rejetèrent certains livres qu faisaient partie de cette Bible, à savoir nos deutérocanoniques» (Source 1, page 111)
« Sundberg a montré que contrairement à l’idée largement répandue, il n’y a jamais eu de « canon alexandrin » de l’Ancien Testament – correspondant à la collection large des livres de la Septante - que l’Eglise aurait reçu du judaïsme hellénistique. A l’époque des origines chrétiennes, les livres saints en usage ne constituaient pas encore une liste close. Le canon étroit de la Bible hébraïque ne s’est imposé qu’après Jamnia vers la fin du 1er siècle de notre ère. » (Source 2, page 483).

En second lieu, il semble historiquement bien établi qu’une école a été créée à Jamnia (Yavné) sur la côte à 24 Km au sud de Tel Aviv, qu’elle avait l’autorisation de l’occupant romain d’y tenir le Sanhédrin (Sources : 4 et 5), avait une autorité éminente dans le Judaïsme et avait de bonne raisons de se démarquer nettement de ce groupe sectaire dissident : les « chrétiens ».

« Après la destruction du Second Temple en 70 de notre ère, Rabbi Yohanan ben Zakkaï se réimplanta dans la ville de Yavne/Jamnia et y fonda une école de loi juive, qui devint une source majeure de la Mishna ultérieure. Son école est souvent considérée comme une source du judaïsme rabbinique. Le synode de Jamnia ou synode de Yavne se réfère à un synode proto-rabbinique hypothétique sous le leadership de Yohanan qui était responsable de la définition du canon de la Bible hébraïque. » (Source 5)

« En outre, ce sont des minim (sectaires), en cela qu'ils concentrent l'accès à l'alliance sur le baptême. De ce point de vue, ils se désintéressent de l'ensemble du peuple. De facto, ils sont une secte réformatrice et diviseuse comme l'étaient les Esséniens. En outre, ils « font dire » des choses de plus en plus étranges à la Septante.

Les controverses rabbiniques, enregistrées dans le Talmud montrent des discussions qui, sous prétexte d'exégèse imaginative, présentent des opinions sur la pertinence de tel ou tel texte (Traité Meguila, Traité Soferim). On assiste donc à un retour à l'hébreu, à une méfiance envers les textes grecs qui ne s'apaisera qu'au début du IIIe siècle. » (Source 6)

« L’assemblée de Jamnia (sorte d’école juive située justement à Jamnia sur la côte ouest de la Judée, après la destruction de Jérusalem) tenait à démarquer clairement le judaïsme de la communauté chrétienne. » (Source 7)
A y regarder de plus près ce qui est considéré comme l’hypothèse du canon de Jamnia, il semble que la question porte plus sur le nombre de livres effectivement retenus par cette école pharisienne que sur une autre question. En effet Josèphe ne cite que cite 22 livres, alors que la canon hébraïque compte finalement 39 livres.

Qui aurait intérêt à contester l’existence de ce canon hébraïque décidé à Jamnia ? Ce sont les catholiques et les orthodoxes pour contester la décision des protestants. Mais apparemment nos liens montrent qu’actuellement ni les catholiques, ni les orthodoxes ne contestent plus l’existence de cette décision de Jamnia. Alors à quel titre Wikipédia conteste-t-il la réalité du « synode de Jamnia » ? pauline.px : quelle est la nature et la cause de cette contestation ?

REPONSE : La majorité de nos sources affirme qu’il y bien eu une décision formelle sur le canon hébraïque à Jamnia. S’il y a une interrogation ou une l’hypothèse sur le canon hébraïque de Jamnia, elles ne porte ni sur l’existence d’une décision, ni sur la capacité éventuelle à tenir un Sanhédrin à Jamnia, ni sur le mobile de cette décision, ni sur l’autorité de cette école prestigieuse (qui élaborera la Mishna) – mais éventuellement sur le nombre des livres effectivement retenus dès cette époque. La décision au demeurant est d’une ampleur limitée : elle aurait consisté a entériner la position pharisienne déjà fixée avant notre ère.

Sources :

1. Nouvelle Introduction à la Bible. W. Harrington. Ed. Seuil. 1971. ISBN : 2-02-003240-6
2. Introduction au Nouveau Testaments. Son histoire, son écriture, sa théologie. Sous la direction de Marguerat.
Labor et Fides. 2008. ISBN : 978-2-8309-12896-0
3. http://www.mariedenazareth.com/13282.0.html?&L=0%2F
4. http://jasmina31.over-blog.com/categorie-11272213.html
5. http://fr.wikipedia.org/wiki/Synode_de_Jamnia
6. http://fr.wikipedia.org/wiki/Canon_de_la_Bible_h%C3%A9bra%C3%AFque#Canon_de_la_Bible_h.C3.A9bra.C3.AFque
7. http://www.interbible.org/interBible/decouverte/comprendre/2011/clb_110527.html

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Message  -Ren- Mer 2 Mai - 19:34

Merci pour toutes ces précisions :jap:

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Message  Invité Jeu 3 Mai - 17:25

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Roque,
Merci pour cette contribution riche et documentée.

Roque a écrit:
Existait-il une liste des textes inspirés hébraïques avant notre ère ?

Le thème de notre débat est la diversité des Bibles chez les Chrétiens et il me semble que la question que vous posez sous-entend que cette liste bien que non scripturaire concerne les Chrétiens


Veuillez me pardonner ma franchise, je vous avoue que cette notion de liste référente procède à mes yeux de l’amalgame et de l’anachronisme.

Anachronisme pour deux raisons :
1 ) la notion de "Canon" est fort tardive et semble même réservée au Christianisme post chalcédonien.
Certes, puisque nous disposons de la liste des livres de la Septante (c’est probablement la liste la mieux attestée avant notre ère), il est impossible de prétendre qu’il n’existait aucune liste juive.
Par conséquent, tout porte à croire qu’il a pu exister un nombre inconnu et non nul de listes juives avant l’Incarnation de notre Seigneur.
Parmi ces listes, existait-il des listes purement hébraïques ?
Sans doute, encore faut-il démontrer l’unicité d'une telle liste avant de parler de Canon.

2 ) Si nous avons des quasi certitudes sur une première liste, c’est-à-dire les cinq livres de la Torah, que notre Seigneur désigne par « Moïse » ou par « la Loi », si nous avons quelques idées sur une seconde liste que notre Seigneur désigne par « les Prophètes », nous n’avons guère d’idée précise sur les éventuelles troisième listes dont notre Seigneur ne parle jamais.

Sur cette troisième liste hypothétique, l’Encyclopédie du Judaïsme, dans son entrée "Bible" précise :
Spoiler:

Et se rapporter à une liste dressée par les successeurs des Pharisiens en 90 ne permet sûrement pas d’en savoir davantage sur les multiples courants du Judaïsme AVANT la destruction du Temple pour deux raisons simples :

A ) l’hypothétique synode aurait été réuni précisément pour trancher un désaccord et aboutir à un consensus, ce qui signifie qu’avant 90 il n’y avait pas consensus.

B ) l’hypothétique synode n’a pas réussi à établir ce consensus puisque le statut de plusieurs livres est resté controversé.

Dans son très précieux ouvrage au format de poche « le Talmud » (éd.Payot) parle de la difficulté de retenir comme inspirés un certain nombre de livres : l’Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, les Proverbes, Esther (absent à Qumran) et même Ézéchiel (notons que Flavius Josèphe affirme qu’il y a deux livres d’Ézéchiel !)
Spoiler:

Moralité : Le synode de Jamnia démontre que avant comme après Jamnia le consensus n'existe pas et qu'il faudra attendre probablement la fin du second siècle pour qu'il s'établisse.


Anachronisme d’autant plus pernicieux que l’hypothétique (selon la formule de votre source 5) synode de Jamnia ne précède pas l’Incarnation de notre Seigneur mais que ses décisions succèdent aux polémiques entre les successeurs des Pharisiens et les Chrétiens.
Ces polémiques n’ont-elles joué aucun rôle dans l’établissement de cette liste ?
Ne peut-on craindre que l'antagonisme désormais avéré n'ait pesé sur les décisions des Sages de Jamnia ?

Amalgame pour deux raisons :
1 ) Il ne faut pas confondre "liste" et « Canon des écritures inspirées reconnu par une large communauté ».

Aujourd’hui, les chercheurs mettent en avant qu’en –410 la Torah n’a pas encore de statut normatif pour les Juifs d’Éléphantine et qu’il faut sûrement attendre –350 pour que la Torah impose définitivement son autorité sur l’ensemble de la communauté Juive.
Pour le reste, les grottes de Qumran ne nous ont pas permis d’apprécier le statut des différents livres prophétiques et nous ne savons donc pas avec certitude quels livres jouissaient d’une autorité "quasi-canonique" sur l’ensemble de la communauté Juive.

2 ) Ce que nous pouvons constater du point de vue chrétien c’est que pour dresser leurs listes respectives, les diverses Églises premières se sont abreuvées à deux sources :
des livres rédigés AVANT le ministère public de notre Seigneur
et
des livres rédigés APRÈS.
pour les deux sources, un consensus a mis longtemps à s'établir, il fut éphémère et ne concerne pas toutes les Église premières.

L’amalgame consiste à prétendre que livres rédigés AVANT le ministère public de notre Seigneur ne peuvent être "canoniques" que s’ils correspondent à une liste juive préexistante comme si les premiers chrétiens n’avaient pas le droit de reconnaître par eux-mêmes l'inspiration divine d'un texte juif.

Or,
Pour ce qui concerne les livres rédigés AVANT le ministère public de notre Seigneur, si l’on s’en tient à l’histoire des Églises premières, un lien assez lâche avec une liste juive préexistante apparaît clairement :

1 ) Toutes les Églises première semblent avoir considéré comme inspirés des ouvrages d'origine hébraïque alors qu’ils vont rester longtemps discutés par les Juifs : l’Ecclésiaste, le Cantique des Cantiques, les Proverbes, Esther, Ézéchiel, notamment.
Les Chrétiens ont donc anticipé la réception juive par les Sages du Talmud.
2 ) La plupart des Églises premières ont considéré comme inspirés des ouvrages d’origine hébraïque dont Qumran témoigne de l’importance : Tobit et Ben Sira.
3 ) La plupart des Églises premières (sauf peut-être dans les églises de langue sémitique) ont considéré comme inspirés la plupart des livres (d'origine juive mais en langue grecque) rassemblés sous l'appellation de Septante.
4 ) Quelques Églises premières ont retenu d’autres ouvrages d’origine hébraïque bien attestés par Qumran : tout particulièrement 1-Hénoch, et peut-être la lettre de Jérémie.
5 ) Quelques Églises premières ont retenu d’autres ouvrages non attestés à Qumran.

Le moins que l’on puisse dire c’est que globalement les Églises premières ne témoignent pas d’une fidélité aveugle à une liste établie avant notre ère.

Néanmoins, ce qui saute aux yeux c’est que ces Églises premières ont généralement adopté UNE Septante complétée éventuellement par des ouvrages juifs bien attestés à Qumran et, parfois, d’autres ouvrages d’origine diverses.

Par contre, l’histoire de l’Église primitive de ne révèle pas, du moins à mes yeux, de dépendance à une liste préexistante de textes hébraïques dont l’hypothétique synode de Jamnia serait le témoin tardif.

En conclusion, l’histoire du Christianisme primitive montre qu’il existe bien une liste de textes Juifs avant notre ère et que cette liste est celle de la Septante.
Certes, rien ne permet de dire si cette liste était plus ou moins largement consensuelle.
Tout ce que nous pouvons affirmer c'est que notre Seigneur et Ses apôtres semblent s'y référer naturellement.

Peut-être existe-t-il d’autres listes juives mais rien dans les découvertes de Qumran ne confirme que la liste promulguée a posteriori par les Sages de Jamnia reflète une réalité consensuelle AVANT l’incarnation.

À quelques ouvrages près (puisque l'on hésite sur le nombre de livres, de 21 à 24, et sur l'inspiration de 4 ou 5 livres...) on peut sans doute considérer que la liste attribuée à l'hypothétique synode de Jamnia reflète un certain consensus pharisien à l'époque du ministère public de notre Seigneur Jésus-Christ,
mais de là à parler de Canon...

... et de là à lui accorder une autorité sur les Chrétiens...

est-ce au seul motif qu'elle correspond à des livres écrits en hébreu ?
mais alors... pour quel motif écarter Tobit, Ben Sira et la Lettre de Jérémie ?



Très cordialement

votre soeur
Pauline





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Message  Invité Jeu 3 Mai - 17:47

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Roque,

Roque a écrit:
Alors à quel titre Wikipédia conteste-t-il la réalité du « synode de Jamnia » ?
pauline.px quelle est la nature et la cause de cette contestation ?

1 ) Mon message précédent montre que je n’attache pas une grande importance à ce synode, car il ne concerne pas les Chrétiens.
Comme vous le soulignez , il émane des Pharisiens que notre Seigneur Jésus-Christ ne félicite pas pour leur discernement.

2 ) Comme je l’ai évoqué, la simple allusion à ce synode démontre qu’il n’y avait pas unanimité avant sur un Canon et le Talmud montre qu’il n’y pas unanimité après.
Par conséquent si le synode a eu lieu c’est qu’il n’y avait pas de Canon avant.

3 ) Il me semble que la contestation procède du fait que seul le Talmud nous parle de cet hypothétique synode. Mais je me trompe peut-être.
Une seule source c’est toujours sujet à caution. Est-ce que Flavius Josèphe en parle ?

4 ) Que des gens se rassemblent et décident... est-ce vraiment significatif de quelque chose ?
Que sait-on de la légitimité de ces Sages pour établir un Canon à vocation universelle ?
Peut-on vraiment parler d'un synode ?
Ne faudrait-il pas plus prudemment évoquer seulement un rassemblement de quelques Sages ?


Très cordialement

votre soeur Pauline


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Message  Invité Ven 4 Mai - 7:43

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Roque,

Roque a écrit:
Qui aurait intérêt à contester l’existence de ce canon hébraïque décidé à Jamnia ? Ce sont les catholiques et les orthodoxes pour contester la décision des protestants.

Cette question est intéressante puisqu'elle suggère que ce n'est pas la recherche de la vérité qui motive les contestaires mais un mobile communautariste. Ce ne peuvent être que de sombres arrière-pensées qui alimentent la contestation de l'hypothétique synode de Jamnia...

1 ) Jamnia ou pas, les Protestants sont libres de leur Canon. Et ils ne font que suivre la voie ouverte par saint Jérôme.

2 ) Mais je suis troublée par ce genre de contestation, radicale contestation sinon même un reniement, celle qui consiste à contester tout un vénérable Canon (et non pas tel ou tel ouvrage marginal) au motif d'un raisonnement qui prône un hypothétique retour à "plus authentique".

Un raisonnement analogue a permis, sans guère de bruit, d'abandonner la tradition textuelle majoritaire au profit d'une leçon attestée par quelques manuscrits.
Est-ce bien ? est-ce mal ?
Je l'ignore.
À la limite... peu importe, ce qui est asssourdissant c'est l'absence de bruit...


Cela signifie que nous refusons l'héritage pour des motifs qui n'ont rien à voir ni avec la foi ni avec la spiritualité et que nous contestons l'oeuvre de l'Esprit Saint sur nos aînés.

Pour moi, c'est assez embarrassant au plan logique de dire à nos enfants que l'Esprit Saint peut faire durablement défaut aux aînés.


Très cordialement

votre soeur Pauline


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Message  Libremax Ven 4 Mai - 12:32

Il ne faudrait tout de même pas réduire St Jérôme à un simple pionnier du "retour-à-l'authentisme".
Sa vulgate était une commande de l'évêque de Jérusalem : elle répondait donc à un besoin communautaire de taille.

De fait, avant la Vulgate, les seuls textes latins de la Bible, c'était les vetus latina, dont les origines étaient multiples, et les versions nombreuses et trop variées : l'Eglise latine avait besoin d'établir un texte de référence ! Pour en établir un, il était obligatoire de travailler sur des textes antérieurs, les plus fiables "possibles". Tel était donc la raison du souci de Jérôme de chercher les textes les plus anciens.
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Message  Invité Ven 4 Mai - 14:08

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Libremax,

Libremax a écrit:l'Eglise latine avait besoin d'établir un texte de référence ! Pour en établir un, il était obligatoire de travailler sur des textes antérieurs, les plus fiables "possibles".

Est-ce que toutes les autres Églises ont pratiqué de même ?
Je ne le crois pas.
C'est donc une option originale.

Il ne m'appartient pas de juger de la validité de cette option.
L'Esprit Saint souffle où Il veut.

Car, c'est bien l'Esprit Saint qui nous enseigne... n'est-ce pas...

Et au plan de la foi et de la spritualité qu'entendez-vous par "les plus fiables possibles" ?

Fiable...
Voulez-vous dire que pour être fiable il vaut mieux être en hébreu ?
Pourquoi ?


Très cordialement,

votre soeur Pauline

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Message  Libremax Ven 4 Mai - 15:50

Bonjour Pauline ,

En occident, il appartient sans doute à Jérôme d'être le premier à avoir travaillé à partir de textes plus anciens que ceux dont on disposait déjà, à savoir les grands textes grecs, pourtant très stables.
Je remarquerai tout de même que l'Eglise syriaque, que vous évoquiez vous-même, qui s'étendait jusqu'à une certaine époque sur tout l'orient, de la mésopotamie à la chine, n'a, si je ne me trompe, jamais voulu adopter la Septante ou toute autre traduction grecque, puisque la langue liturgique était l'araméen, et qu'ils ont conservé la Peshitta.

Par ailleurs, la question de l'inspiration et de l'enseignement de l'Esprit-Saint ne dispense pas les hommes de poser des bases raisonnées de leur travail : la tâche de Jérôme revenait finalement à sortir l'Eglise latine d'une impasse : celle à laquelle conduisait l'usage de textes multiples, aux formulations divergentes, et aux origines incertaines. Il aurait pu, c'est vrai, utiliser un des textes grecs déjà en usage par ailleurs. Mais toute traduction prend le risque de faire dévier le sens du texte, surtout lorsqu'il s'agit de traductions successives.

Pour établir un texte de référence, peut-on reprocher à son auteur de vouloir rester proche d'une source considérée comme originale ?
Car il ne s'agissait pas de préférer l'hébreu au grec, mais bien la source à la version.
D'ailleurs, en ce qui concerne l'évangile, Jérôme n'a pas eu le choix : considérant les textes grecs comme sûrs, et n'ayant finalement pas eu de contact avec la communauté judéo-chrétienne araméophone, il a conservé les versions grecques comme source de sa traduction.

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Message  Invité Ven 4 Mai - 22:56

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Libremax

Libremax a écrit:Pour établir un texte de référence, peut-on reprocher à son auteur de vouloir rester proche d'une source considérée comme originale ?
Qu'entendez-vous par "Source originale" ?

Voulez-vous dire que pour chaque livre il y aurait eu un auteur et que l'ambition raisonnable, rationnelle, quasi-scientifique, l'ambition pure et idéale serait de retrouver le texte original rédigé par la main même de cet auteur ?
Et, sous-entendu, que la communauté des croyants dans son aveuglement aurait peu à peu perverti et que le magistère aurait travesti pour d'obscures raisons...

Aaaah.... dégager le diamant de sa gangue grossière dont les misérables croyants l'ont souillé.
Retrouver l'authentique...
Ça fait rêver, non...


Très cordialement


votre soeur pauline

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Message  Giorgos Sam 5 Mai - 17:17

Bonjour,

Il me semble qu'il y a malentendu. La Bible grecque des Septante est bien une traduction à partir de l'hébreu, donc une version. Le texte hébreu actuel, même s'il n'est pas exactement le texte hébreu qui servit de source à la Septante (d'où les différences avec le texte massorétique), est en ce sens "source originale", pas dans le sens d'autographe.

Giorgos

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Message  Libremax Sam 5 Mai - 19:29

Bonsoir Pauline !

Non, je ne pense évidemment pas qu'il y ait eu un seul auteur, même pour chaque livre de la Bible.
Le problème posé lorsqu'on a voulu établir un texte de référence dans l'Eglise latine n'était pas, je pense, la quête d'un auteur, ni le désir de s'éloigner à tout prix d'une tradition. Je pense que le problème posé était celui de la langue, posé par l'action de traduire.

L'Eglise latine se débattait avec des traductions multiples : laquelle choisir pour unifier les liturgies et les catéchèses? Selon quel critère? Le choix a été fait d'entreprendre un nouveau travail de traduction.

L'idée n'était pas tant de dépoussiérer le texte grec ou se dégager d'interprétations ultérieures, que de veiller à ne pas subir l'écart inévitable qui s'opère entre un premier texte et des traductions successives dans des langues différentes : il ne s'agit pas de problème de tradition, ni de foi, mais de sémantique et de vocabulaire.

Jérôme a, si je ne me trompe, travaillé d'ailleurs en connaissant bien les traductions grecques de son temps. Lui-même a peut-être exprimé le désir personnel de se détacher de la culture grecque : je n'en sais rien. Mais son parti pris linguistique ne me semble pas si contestable.
On pouvait le comprendre : face à tant de vetus latina, et de traductions divergentes (en grec comme en latin, d'ailleurs), comment établir un choix? Quel mal, dès lors, à choisir un texte antérieur à toutes ces traductions ?

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Message  Invité Sam 5 Mai - 22:55

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Libremax.

À vous lire, saint Jérôme serait intervenu pour tirer l'Église Latine d'une situation particulièrement difficile.
Il ne s'agirait que d'une question pratique sans aucune résonance théologique.

Saint Jérôme aurait simplement choisi et mise en oeuvre une solution raisonnable.
Et, au risque de travestir vos propos, c'est justement parce que cette option n'est dictée par le pragmatisme et la raison qu'elle ne doit pas être interprétée ni du point de vue de la foi et ni du point de vue de la spiritualité.

Si cette traduction répondait à un réel besoin et qu'elle ne soulevait aucune réticence pourquoi le Magistère a-t-il attendu le Concile de Trente < probablement en sa IVe session (8 avril 1546)> pour adopter officiellement cette traduction ?

Il semble en effet que la traduction de saint Jérôme n'ait pas suscité l'accueil mérité et même que des critiques éminentes se soit élevées pour des raisons pratiques (saint Augustin craint précisément qu'une nouvelle traduction ne contribue qu'à la confusion) mais aussi théologiques (Ruffin notamment).

Si le temps à fait son oeuvre il faut néanmoins remarquer qu'elle ait mis longtemps à s'imposer.

Voici ce qu'en dit Wikipedia :

Spoiler:

Pour moi, je ne mets pas en cause ni la bonne volonté, ni le dévouement, ni la qualité du travail de saint Jérôme.
Qui suis-je pour critiquer saint Jérôme ?

Je veux simplement souligner que c'est, à mes yeux, le bon exemple d'une démarche rationnelle, quasi scientifique, une démarche experte qui semble ne trouver sa justification que dans son pragmatisme et sa rigueur méthodologique.

J'y vois là un exemple de l'irruption des experts au détriment de l’œuvre patiente de l'Esprit Saint.

Pour moi la Bible est un arbre qui met des siècles à pousser,
C'est l'anti-tour de Babel qui s'élève vers le ciel et s'édifie pierre à pierre.

Si ce peut être un prophète qui accouche d'un message, c'est toujours une communauté religieuse inspirée (et non un prophète) qui nourrit ce message, le fait grandir et l'élève à sa forme adulte.

Si du jour au lendemain on nous impose un hypothétique retour à un état prétendument antérieur du texte cela ne peut que nous interpeller.

Et, dans ces démarches expertes, je ne peux m'empêcher de discerner un soupçon à l'encontre de l’œuvre complexe de la Transmission de la Parole de D.ieu, béni soit-Il.
Dans ces élaboration rétrogrades, il y a clairement l'idée que les successives amodiations du texte sont par définition intempestives et qu'une tâche s'impose : les annuler.

Si nos aînés avaient été animés par la même préoccupation et s'ils avaient adopté la même stratégie, aurait-on à notre disposition des copies conformes de la Torah telle qu'elle fut écrite par Moïse ?

Je suis convaincue que nous n'aurions à peu près rien du tout si les textes (quels textes d'ailleurs ?) nous avaient été transmis sans la moindre maturation sous le feu de l'Esprit.


Très cordialement

votre sœur Pauline

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Message  Giorgos Dim 6 Mai - 13:36

Bonjour pauline.px,

J'y vois là un exemple de l'irruption des experts au détriment de l’œuvre patiente de l'Esprit Saint.
Mon diplôme de théologien trésaille, non d'allégresse mais d'incompréhension! Le travail des "experts" de tout temps et de tout domaine (même les imprimeurs, par exemple!) est indispensable à ce que vous ayez quelque chose à lire entre vos mains. Il n'y a pas de raison de mépriser les "experts" et ce n'est pas au détriment de l'oeuvre du Saint Esprit qu'ils travaillent.

...la Torah telle qu'elle fut écrite par Moïse ?
C'est un autre sujet mais, à part d'un point de vue traditionnel (respectable mais sur un autre plan que celui de l'histoire), plus personne ne soutient actuellement la mosaïcité du Pentateuque, qui est le fruit d'une pluralité de rédacteurs en des époques successives. Il me semble que vous entretenez une vision quelque peu fantasmée de ce qu'aurait pu être l'oeuvre patiente du Saint Esprit.





Giorgos

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Message  Libremax Dim 6 Mai - 16:54

Bonjour chère Pauline,

Je ne dirais pas que le genre de travail qu'a effectué St Jérôme n'a aucune "résonance théologique". Une traduction de la Bible a forcément des conséquences dans la manière de la comprendre! Plus qu'une simple question pratique, il s'agissait d'un problème pastoral : l'unité des textes est essentielle à une communauté, dans sa liturgie, et dans sa catéchèse.

Le travail de Jérôme a mis bien du temps à s'imposer pour de multiples raisons. D'abord parce que l'Eglise toute entière, même latine, n'était sans doute pas aussi "papa-centrée" qu'elle l'est aujourd'hui et que les réseaux de diffusion et de contrôle n'avaient rien de comparable à ce qu'ils ont été par la suite. Mais bien sûr, le vrai gros obstacle à sa généralisation a été plutôt l'opposition virulente qui lui a été faite en raison de ses choix. Saint Jérôme est allé à l'encontre d'un usage qui faisait la quasi-unanimité chez les Pères chrétiens, à savoir la référence à la Septante.

Maintenant, je ne suis pas certain que la méfiance de ces Pères vénérables envers les choix de Jérôme avait les mêmes fondements que la vôtre. Je pense que l'occident chrétien s'est totalement coupé du monde juif au point de vouloir le rejeter, dans une idéologie qui a contribué à fonder ce qu'on appelle aujourd'hui l'antisémitisme chrétien. Revenir aux sources hébraïques de l'Ancien Testament était globalement mal vu à l'époque de Jérôme, pour des raisons idéologiques complexes qui, à mon sens, dépassait le seul respect de la Tradition vivante.

L'usage de la Vulgate a pourtant fini par s'imposer, progressivement (et encore : après avoir été complétée, retouchée, et restituée)
Il n'a été "officiellement" validé par le Concile de Trente que pour tenir tête à la Réforme protestante qui en contestait l'usage, précisément d'ailleurs pour des raisons identiques à l'idéologie décrite ci-dessus.

Il y a, c'est vrai, une démarche d'ordre rationnel dans le choix de base de la Vulgate. C'est, après tout, un antécédent à toutes les quêtes du "texte original", vous avez raison. Mais qu'ont fait tous les traducteurs du message araméen du Christ et des apôtres ? N'ont-ils pas à l'évidence cherché à restituer au iota près la proximité parfaite avec les paroles reçues ?
Je rejoins Georgios qui s'étonne de voir l'Esprit-Saint systématiquement écarté de toute démarche rigoureuse, pragmatique et méthodologique, pour reprendre vos mots. Est-il nécessaire d'être un béotien pour participer à l'élaboration des Ecritures?
Je m'attriste tout autant que vous de la suprêmatie des experts sur la méditation des textes aujourd'hui. Mais ce n'est pas tant leur compétence que je déplore, que leur mobile.

Quel était le but de Jérôme? Voilà la vraie question.
Aller à la rencontre des mots reçus par le Peuple Elu, est-ce condamnable ?

L'Eglise et ses évêques ont été heureusement autrement plus souples qu'un calife Uthman qui brûla tous les Corans de son temps qui ne correspondaient pas tout à fait au sien. L'établissement de la Vulgate n'a pas fait disparaître la Septante ni les Vetus Latina : aujourd'hui encore, on peut bénéficier de la richesse de ce lent travail de l'Esprit-Saint à travers toutes les richesses des traductions multiples, portées par des communautés et des Pères de l'Eglise (voir le Codex de Bèze d'Irénée !).

Au milieu de tous ces apports de la lente maturation de l'Esprit sur l'Ecriture que sont les nombreuses traductions grecques et latines de la Bible, je vois, en ce qui me concerne, un signe tout aussi éclatant de Sa part dans cette relecture de Son oeuvre qu'a effectué Saint Jérôme pour l'Eglise.
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Message  Invité Dim 6 Mai - 17:30

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Giorgos,

Giorgos a écrit:
Mon diplôme de théologien trésaille.

Toutes mes félicitations !
Ai-je donc affaire à un expert ?

Giorgos a écrit:
Il n'y a pas de raison de mépriser les "experts"...
Je ne méprise pas les experts.
Mon propos consiste à regretter que l'on se saisisse de l'alibi de l'expertise pour contester l'oeuvre de l'Esprit Saint.

Giorgos a écrit:
et ce n'est pas au détriment de l'oeuvre du Saint Esprit qu'ils travaillent.

Voilà une belle affirmation qui mérite d'être argumentée.


Que saint Jérôme soit un expert et qu'il ait mené un travail sérieux et approfondi ne doit pas nous dispenser d'une réflexion théologique et spirituelle sur ce qu'il a édifié.

À part les efforts et l'expertise de saint Jérôme, qu'est-ce qui est BIEN dans la rupture avec la ou les Traditions ?

À part le fait que c'est bien pratique d'avoir une version homogène, qu'est-ce qui justifie au plan théologique et spirituel ce recours (et non pas retour) à un texte hébreu éventuellement postérieur à l'Incarnation de notre Seigneur Jésus-Christ ?

Giorgos a écrit:
Il me semble que vous entretenez une vision quelque peu fantasmée de ce qu'aurait pu être l'oeuvre patiente du Saint Esprit.

Pouvez-vous développer ? À quelle vision fantasmée faites-vous allusion ?

Est-ce un fantasme de voir dans l'évolution du texte majoritaire l’œuvre de l'Esprit Saint ?

Dans leur introduction Nestlé et Aland reconnaissent qu'ils ont édifié un texte qu'aucun chrétien n'a jamais pu lire avant eux.
Leur édition ne correspond donc de leur propre aveu à aucune réalité...
alors dites-moi, voulez-vous, pourquoi le privilège que beaucoup accordent à cette édition ne relève-t-il pas du fantasme ?

Dans cet abandon (au seul motif de l'expertise) des Traditions je vois clairement le fantasme du texte plus authentique.

Un texte composite qui ne correspond à aucune lecture communautaire en Église dans la Présence de D.ieu, béni soit-Il... De leur point de vue ce n'est pas un gros défaut, et d'ailleurs je ne leur reproche rien.

Mais du point de vue de la Religion cela doit au moins nous interpeller.
Qu'est-ce qu'il y a de mieux à lire du Nestlé Aland que de lire une vénérable édition liturgique ?
Quel est le fantasme sous-jacent à cette préférence ?

Les principes, les a-priori et la méthode de Nestlé et Aland seraient-ils infaillibles, au sens de l'infaillibilité pontificale.

Ont-ils mis en œuvre un détecteur à Esprit Saint : ici la variante est bien dû à l'inspiration de l'Esprit Saint, mais là c'est une interpolation à visée apologétique...






Giorgos a écrit:
... Pentateuque, qui est le fruit d'une pluralité de rédacteurs en des époques successives.
dans cette lente élaboration, croyez-vous que l'Esprit Saint est absent ?
si nous découvrons un vénérable manuscrit du cinquième siècle avant Jésus-Christ, les différences avec les textes que nous connaissons actuellement seront-elles à mettre au compte de l'Esprit Saint ou faudra-t-il abandonner les versions actuelles pour revenir à une version plus authentique ?

Très cordialement

votre soeur Pauline

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Message  Invité Dim 6 Mai - 18:49

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Libremax

Libremax a écrit:
C'est, après tout, un antécédent à toutes les quêtes du "texte original", vous avez raison.
Qu'entendez-vous par texte original ?

L'origine des textes de la Révélation Chrétienne est la Parole de D.ieu, béni soit-Il.
Un texte original est donc un texte fidèle à la Parole de D.ieu, béni soit-Il.
Si, malgré le flou artistique, on accepte ce concept de "texte original", pourquoi serait-ce une question d'antériorité ?


Libremax a écrit:
Mais qu'ont fait tous les traducteurs du message araméen du Christ et des apôtres ? N'ont-ils pas à l'évidence cherché à restituer au iota près la proximité parfaite avec les paroles reçues ?

Pardonnez-moi mais vous parlez d'évidence et, moi, je ne vois pas bien où les principes, les hypothèses, les a-priori et la méthode de saint Jérôme ont été mis en œuvre par les "traducteurs du message araméen du Christ et des apôtres".

Par exemple, ont-ils couramment recouru au texte hébreu pour les citations primotestamentaires ?
Et contre-exemple : pourquoi des différences entre les quatre évangiles ?
où discernez-vous cette préoccupation du "iota près" ?

Ne projetteriez-vous un littéralisme anachronique ?


Libremax a écrit:
Je rejoins Georgios qui s'étonne de voir l'Esprit-Saint systématiquement écarté de toute démarche rigoureuse, pragmatique et méthodologique, pour reprendre vos mots. Est-il nécessaire d'être un béotien pour participer à l'élaboration des Ecritures?
Bin...
je crois que votre syllogisme est à l'envers.

Saint Paul, les Pères apostoliques, les Pères de l'Église ont souvent développé des démarches rigoureuses, je ne leur conteste pas l'inspiration divine.
Mais il reste qu'une "démarche rigoureuse, pragmatique et méthodologique" n'est nullement un gage d'inspiration divine.

Il n'est pas nécessaire d'être béotien, il n'est pas nécessaire d'être expert...
mais surtout il ne suffit pas d'être expert pour participer à l'élaboration des Écritures.

Peut-être même que l'expertise ne sert à rien :
Matthieu 11:25 en ce temps-là, Jésus prit la parole, et dit: je te loue, père, seigneur du ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux intelligents, et de ce que tu les as révélées aux enfants.

En toute rigueur, je ne vois pas bien le lien entre l'expertise et l'inspiration.

Mais éclairez-moi ! voulez-vous ?

Dans l'attente de vos lumières, j'en reste avec l'idée qu'en ce domaine, le seul expert est le Verbe de D.ieu, dont le Corps est l'Église.


Je ne dénie pas à l'Esprit Saint le pouvoir de souffler où il veut.
Peut-être tel ou tel expert est-il l'instrument de l'Esprit Saint.
Peut-être saint Jérôme a-t-il joui du privilège d'être la main vouée de toute éternité à rectifier les Très Saintes Écritures après des siècles d'erreurs...

Ma question est simple : qu'est-ce qui vous fait dire ça ?


Libremax a écrit:
Quel était le but de Jérôme?

Pardonnez-moi si je ne participe pas à cette personnalisation.
J'accorde très volontiers à saint Jérôme toutes les plus estimables vertus et la plus virginale des motivations.

Ici, ce n'est nullement la psychologie de saint Jérôme qui m'intéresse, ce qui me préoccupe c'est tout simplement :
Quel est le but de l'Église ?

Très cordialement

votre sœur
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Message  Libremax Lun 7 Mai - 11:32

Chère Pauline,

Il y a plusieurs acceptions pour moi, pour l'expression de "texte original" : Il y a la chimère poursuivie par certains (experts ou non) qui correspond à l'idée qu'un texte aurait été un jour rédigé avant toute altération dûe à de prétendues imprécisions ou divergences d'interprétation.
Il y a aussi l'idée qu'un texte ou un ensemble de textes relativement peu éloignés les uns des autres, natifs d'une culture et d'une langue, ait été antérieur à un ensemble plus large de traductions, ce qui peut créer parfois un pas important.

Ces acceptions n'empêchent pas une troisième, que vous défendez me semble-t-il, à savoir le texte tel qu'il est fixé aujourd'hui et pour nous, et qu'il convient de citer avec respect.

Pardonnez-moi mais vous parlez d'évidence et, moi, je ne vois pas bien où les principes, les hypothèses, les a-priori et la méthode de saint Jérôme ont été mis en œuvre par les "traducteurs du message araméen du Christ et des apôtres".

Disons que ce n'est pas une évidence, alors, mais une hypothèse : je suis , pour ma part, convaincu que les personnes qui ont mis par écrit les Evangiles en grec ont cherché à être le plus fidèle possible à une prédication initialement délivrée en araméen. Il ne s'agit pas ici de le démontrer. Mais si j'en juge par la nouveauté de l'Evangile, mais aussi par son exigence de foi dans le dieu de Moïse tout autant que dans l'enseignement du Christ, je ne peux pas imaginer que ces traducteurs n'aient pas cherché à retranscrire au mot près chaque enseignement des Apôtres.

Le point commun que je vois ici avec le choix de la Vulgate est d'effectuer le même travail qu'ont dû faire ces traducteurs ainsi que les rédacteurs de la Septante dans le même souci de fidélité.

Les citations primotestamentaires des évangiles ne viennent sans doute pas de l'hébreu : elles correspondent en général aux targoums araméens.
Les différences entre les évangiles sont dûes aux différences de prédication des Apôtres, c'est à dire de la première génération de témoins. Les témoignages oraux de personnalités qui se connaissent -et c'était le cas pour les apôtres, soutenir le contraire est un non-sens- étaient conçus de manière à ne pas se répéter, mais à se compléter.

Je ne pense pas que ce que vous appelez le "littéralisme" soit ici anachronique. Je m'intéresse de près aux études sur l'oralité et celle des évangiles en particulier : Il semble que le souci de fidélité, davantage que de littéralité, était de mise dans la culture d'Israël et de la diaspora.

Saint Paul, les Pères apostoliques, les Pères de l'Église ont souvent développé des démarches rigoureuses, je ne leur conteste pas l'inspiration divine.
Mais il reste qu'une "démarche rigoureuse, pragmatique et méthodologique" n'est nullement un gage d'inspiration divine.

Nous sommes bien d'accord.
L'expertise n'est pas la question : c'est ce que j'ai voulu dire en m'interrogeant plutôt sur le mobile de toute personne qui transmet les Ecritures : qu'est-ce qui meut la personne ? Est-ce le souci d'annoncer la Parole de Dieu? Est-elle inspirée? Sa tâche porte-t-elle des fruits pour la communauté? Autant de question auxquelles on ne peut répondre tout de suite, si tant est qu'il est possible d'y répondre à la place de Dieu !

On peut être expert et se faire tout petit. Par ailleurs, l'évangélisation a parfois besoin d'experts, et c'est ce que vous voyez dans les démarches rigoureuses des Pères de l'Eglise. L'expert peut mettre toute sa compétence au service de l'Evangile : là est le lien entre expertise et inspiration.
Je ne dis pas que seuls le savoir et la méthode sont les voies de l'Esprit.

Je ne dénie pas à l'Esprit Saint le pouvoir de souffler où il veut.
Peut-être tel ou tel expert est-il l'instrument de l'Esprit Saint.
Peut-être saint Jérôme a-t-il joui du privilège d'être la main vouée de toute éternité à rectifier les Très Saintes Écritures après des siècles d'erreurs...

Ma question est simple : qu'est-ce qui vous fait dire ça ?

Mais, vous vous trompez sur mon propos : je ne pense pas du tout que la Vulgate corrigeait des siècles d'erreurs. Qu'il y ait eu, sur la somme des copies et à travers les grandes familles de texte, de menues erreurs ou de rares divergences de contenu, c'est certain, mais il ne s'agissait pas de "rectifier les Ecritures".
Il s'agissait d'unifier la liturgie et la catéchèse de l'Eglise latine à travers un texte unique de référence.

Par ailleurs, le travail d' "expert", ou de "retour aux sources" de Jérôme sur l'Ancien Testament avait ceci de positif, me semble-t-il :
Rétablir un lien, même ténu, avec le monde juif,
Etablir une traduction fidèle aux Ecritures, dans leur langue d'origine, pour une langue et une culture latine, et non grecque.


Ici, ce n'est nullement la psychologie de saint Jérôme qui m'intéresse, ce qui me préoccupe c'est tout simplement :
Quel est le but de l'Église ?

Ce but a été exprimé par la demande de Damase à Jérôme d'une part, et par la réception et l'usage qui a été fait de ce texte d'autre part, ainsi que les multiples autres traductions qui ont voulu prendre en compte les textes les plus ancien s à la suite de Jérôme:
Unifier la liturgie et la catéchèse, et prendre conscience de la richesse des Ecritures, non seulement à travers un "texte original" quel qu'il soit, mais aussi à travers toutes ses traductions.

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Message  Roque Lun 7 Mai - 13:20

Chère pauline.px, j'ai manqué pas mal d'épisodes ... je suis désolé de revenir d'abord en arrière.

Spoiler:

Maintenant il me faut revenir au niveau de le discussion actuelle, je résume ma perception des questions posées par ce sujet (en dehors ds questions de l'inspiration et le l'Esprit Saint déjà sur d'autres fils dans ce forum). Les questions de brutus et d'acinne au départ posent en effet trois questions :

1. Comment (pourquoi) est survenue cette multiplication de Bibles différentes, c’est à dire de ces différents canons et différents textes ?

2. Est-ce que malgré les différences de canon et de texte il s’agit toujours de la même « vraie » Parole de Dieu ?

3. Est-ce que c’est un texte différent qui engendre les déviations doctrinales ? Ou bien l’inverse est-ce ce sont les sectes, avec leurs interprétations différentes, qui choisissent le texte qui leur convient ?

Avec le débat en cours entre pauline.px, Libremax et Giorgos nous abordons approximativement la question 2. C'est aussi cette seconde question qui est approchée avec la question d'acinne :
acinne a écrit:Exemple de verset supprimé
Vous pouvez voir par vous-même entre Texte Oriental et Texte Occidental ce que concerne : Actes 8, 37 et Actes 28, 29 et d’autre

ils ne sont pas en accord désolé
En effet si la moindre variante (à la virgule près) dans le texte permet de prouver qu'il est " faux " et " hérétique " on se trouve contraint - de dire que LE texte - qu'on approuve - est LA ou UNE copie exacte de l'ORIGINAL portée par une tradition sans faille dont la génèse historique est parfaitement maîtrisée. A ce titre pauline.px a cité un texte assez " particulier " d'un certain Jean Leduc de 2004 sur son lien : http://godieu.com/texte_recu/histoire.html#Chapitre1
Cet auteur explique - à peu près - qu'en dehors du texte en grec collationné par Erasme - tous les autres textes d'Evangiles sont faux et hérétiques. Du TOUT ou RIEN, quoi ! 100% exact du premier coup (sorte de dogme de l'infaillibilité d'Erasme ! J'aimerais avoir votre avis sur un petit passage de ce texte :
« L’Esprit de Christ habite dans les lettres qui forment des mots, dans des mots qui forment des concepts et dans des concepts qui forment des doctrines. La Bible est le Temple de Dieu, un temple construit de mots en lequel habite l’Esprit de sa Sainte-Présence. » […] « Le texte Critique est le point de départ de toutes les déviations de la foi. » (page 6)
Cet auteur enferme littéralement l'Esprit du Christ dans la lettre du texte, qu'en pensez-vous ? Pour moi, " catholique " ça sonne pas très juste, mais je ne sais pas très bien dire pourquoi. Ce littéralisme sacré peut il prendre en compte la diversité (des langues notamment : hébreu, araméen, grec, ...), de la multiplicité des traditions (Alexandrie, Constantinople, etc ...) et la longue transmission des copies de copies du Nouveau Testament.

Au final les avancées de l'oecuménisme (texte standard oecuménique du NT en 1996, Bible TOB 2010 et d'autres nouveautés, par ex : hypothèse de plusieurs sources anté-recensionnelles - avant + 140 - en plusieurs langues en latin, araméen et grec proches du texte du codex Bezae ou D05...) n'ont elles pas prouvé qu'aucune notion théologique clivante entre chrétiens n'est impliquée par la lettre du texte grec du NT, n'ont-elles pas refermé ce débat daté par la querelle entre catholiques et protestants du 16ème siècle, n'ont-elles pas relègué ces discussions entre " texte occidental " et " texte oriental " au rang des vieilles lunes, des questions obsolètes ? Tout cela me semble poussièreux et très triste. Désolé !

Merci de faire des réponses pas trop spécialisées, mais plutôt " grand public ", c'est à dire compréhensibles pour tous les lecteurs de ce forum.

Roque

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Message  Giorgos Lun 7 Mai - 16:14

Bonjour pauline.px,

Ma réaction était d'ordre général, sans volonté d'entrer dans la discussion que vous menez avec Libremax sur Jérôme.

Pour contester l'oeuvre de l'Esprit Saint encore faut-il clairement et précisément déterminer ce en quoi elle consiste (je dis plus loin que cela est matériellement impossible). Ensuite, que les "experts" (exégètes, théologiens, etc.) ne travaillent pas au détriment du Saint Esprit, je fonde cela sur le principe que la raison n'entre pas en conflit avec la foi parce qu'elles se situent toutes les deux sur des plans différents. C'est donc par principe que je dis qu'un expert qui accomplit honnêtement son travail (sans intentions malignes, bien entendu, sinon il ne serait plus expert) ne le fait pas au détriment de l'Esprit.

Quant à la vision fantasmée - pardonnez-moi pour cette expression un peu dure - elle m'a été inspirée par cette idée que la Torah aurait été écrite par Moïse puis transmise par les copistes, scénario à la fois simpliste et erroné sur le plan historique. Cela dit, pour répondre à une de vos questions, l'oeuvre de l'Esprit n'est pas absent même lorsque l'on se rend compte des rédactions successives des textes, de leur compilation, adjonctions, tensions, contradictions, etc. Les Écritures ne sont pas censées refléter la perfection ni une cohérence sans failles. C'est que je ne conçois pas l'oeuvre de l'Esprit Saint comme matériellement décelable; d'après moi, c'est une question de perception de la foi: je confesse que la Bible est inspirée de Dieu, sans pouvoir entourer ou souligner au crayon les traces palpables de cette inspiration-intervention de l'Esprit.

Quant au Nestle-Aland, si ce texte grec est meilleur grâce à un long travail scientifiquement fondé, c'est à la raison d'en juger. Les sciences humaines et exactes évoluent et nous profitons de ces évolutions, somme toute très récentes par rapport aux 2000 ans de christianisme (histoire, archéologie, anthropologie, ethnologie, etc.). À mon avis, la tradition est une réalité mouvante, non statique, et cela comprend évidemment aussi tout ce qui concerne les études bibliques qui font également partie des acquis de la tradition chrétienne (à mon sens) et qui ont, fort heureusement, la vertu de nous interroger et de nous faire garder les pieds sur terre, et constituent pour cela un des remèdes les plus efficaces contre les visions fantasmées, apanage de tous les fondamentalismes.

Quant à moi, que très modestement "expert", d'un grade inférieur à celui de docteur (c'est-à-dire master). Mon domaine d'expertise se situe plutôt dans l'exégèse de l'Ancien Testament (hébreu). Il y a tellement de spécialisations de nos jours!

Bien à vous,
Georges

Giorgos

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Message  Roque Lun 7 Mai - 20:56

Pourriez-vous préciser très clairement quelle est, s'il y en a une, la différence entre le Texte Reçu et le Texte Majoritaire ?

Cette réponse d'un certain Didier Fougeras est elle exacte ?
Sur :arrow: http://groups.google.com/group/theolib/browse_thread/thread/9f56cd3ca2fccdeb

Bonjour,

Il s'agit dans les deux cas du texte grec du Nouveau Testament. Le texte dit "majoritaire" est celui que reflètent les manuscrits en minuscules de l'époque byzantine (au moyen âge); parce qu'ils ont été produits dans une Eglise grecque établie, protégée et financée par le pouvoir politique, la qualité de leur copie et leur état de conservation sont bons, et leur nombre important. En revanche leur intérêt pour la critique textuelle est mineur, parce qu'ils reflètent une version standardisée tardivement par l'Eglise.

Le texte reçu est une édition critique (donc, en principe, hétéroclite) établie par Erasme, puis modifiée par d'autres (notamment Stephanus). Il est fondé sur un nombre relativement restreint de manuscrits, essentiellement byzantins (donc reflétant presque toujours le "texte majoritaire"), seuls accessibles aux auteurs. Il a servi de base aux principales traductions de la Réforme, comme la Bible de Luther, d'Olivétan ou plus tard à la King James Version.

La découverte de manuscrits beaucoup plus anciens au XIXe siècle a conduit à produire de nouvelles éditions critiques (Tischendorf, Westcott & Hort, Nestle & Aland) qui s'efforcent de remonter à un état plus ancien du texte.

C'est cette démarche critique modernes que contestent les partisans (ultra-minoritaires, même parmi les fondamentalistes) du "texte reçu" ET du "texte majoritaire" (qui mélangent souvent les deux, mais en
pratique ça revient souvent au même). Le fond de leur argument se résume à une croyance en la providence divine, qui n'a pas pu manquer de fournir le "bon" texte aux fondateurs du protestantisme... Une revendication d'infaillibilité pour la Réforme du XVIe siècle et pour ses bibles, en quelque sorte.

Si c'est exact, il s'agit bien du dogme d'infaillibilité - appliqué au choix d'un texte de la Bible.

Si c'est exact, encore quelle est l'importance, l'enjeu de ces chicaneries du 16ème siècle pour nous au XXIème siècle après :
- La découvertes de textes témoins antérieurs à ceux qui ont servi à l'élaboration du Texte Reçu et du Texte Majoritaire ? ... (avec sans doute quelques lumières supplémentaires après lesdécouvertes de Qumran) ;
- Les traductions communes du NT entres catholiques et protestants auxquels se sont adjoints maintenant les orthodoxes (dans la TOB 2010, même les introductions et notes sont communes) qui semble bien démontrer qu'à travers ces textes un peu différents c'est une foi commune qui a été transmise ;
- Sans même parler de l'hypothèse de sources éventuelles antérieures à +140 (cf plus haut) en plusieurs langues (araméen, latin et grec) - homologues du Codex Bezae ou D05 qui - de fait - remet un peu en question la texte standard du NT (1996) en grec obtenu après un grand effort de critique textuelle et dans la collaboration entre catholiques et protestants.

Ces différentes versions sont-elles vraiment responsables de divergences théologiques significatives, c'est à dire qu'il faut savoir faire la part des choses entre :
- les traductions tendancieuses - donc pas parfaitement justifiées - des uns et des autres ;
- les commentaires divergents qui émanent en fait - non du texte à strictement parler - mais de " sensibilités " et de traditions théologiques (ces commentaires divergents ont été conservés et mis cote à cote dans la TOB 2010) ;
- les textes servant d'appui à [u]des divergences doctrinales de fond[u] entre catholiques, orthodoxes et protestants ?

Il faut naturellement être " très expert " pour répondre à ce genre de question (expert par les connaissances linguistiques et aussi en raison de la masse énorme de textes à trier ... aucune personne à titre individuel ne peut y prétendre, à mon avis). Voila un avis sur internet qui ma semble assez équilibré (d'origine protestantee je suppose). Pour rappel : le texte majoritaire ou byzantin est le Texte Reçu d'Erasme celui qui a été utilisé par les Réformateurs jusqu'au début du XXème siècle, alors que le texte minoritaire ou alexandrin est le texte des Bibles modernes qu'elles soient catholiques ou protestantes (orthodoxes ?), par exemple : Bible Segond (la première : 1910), Bible du Semeur, Nouvelle Édition de Genève, Bible à la Colombe, Bible Darby, Bible en Français Courant, Bible TOB, Bible de Jérusalem, Bible Crampon, etc.
Les différences entre les textes grecs du Nouveau Testament sont relativement mineures et il n'y a pas de doctrine fondamentale qui dépende exclusivement de l'un ou l'autre texte. Dans la plupart des cas, il s'agit de textes "redondants" (présents à l'identique dans plusieurs évangiles synoptiques). Le texte byzantin comporte plus de redondances. Les spécialistes de l'analyse textuelle pensent que la version originale est la plus sobre et donc coupent les redondances en favorisant le texte alexandrin.

Néanmoins, dans plusieurs domaines, le texte majoritaire comporte des leçons ou précisions importantes, parfois absentes du texte alexandrin. Il ne faut pas oublier que ce texte byzantin est le texte de l'immense majorité des manuscrits et que c'est donc celui qui a le plus été utilisé dans l'église primitive et la réforme. C'est le texte byzantin qui a été transmis par le monde de langue grecque.

L'église d'Alexandrie était par ailleurs en proie à des courants quelque peu mystiques ou gnostiques et le manque de rigueur face à ces influences se ressent dans les écrits d'Origène, Clément d'Alexandrie ou Cyrille d'Alexandrie. Le texte byzantin a donc un rôle central et nous pensons que son abandon dans les versions modernes est regrettable.

Les Bibles modernes sont basées sur le texte minoritaire alexandrin, à l'exception de quelques Bibles (surnommées "authentiques") qui suivent le Texte Massorétique Hébreu pour l'Ancien Testament, ainsi que le Texte Reçu Grec pour le Nouveau Testament, dit aussi le Texte Majoritaire. La lecture d'une version basée sur le texte byzantin est donc importante pour pouvoir bénéficier de détails importants qui ne se trouvent pas dans le texte alexandrin. :arrow: http://www.info-bible.org/bible/texte-recu.htm

Roque

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Message  Invité Mar 8 Mai - 11:56

Le Christ est ressuscité !

Bonjour à toutes et à tous,

Il m’est difficile de répondre point par point à toutes les contributions.

Aussi veuillez me pardonner si je ne fais que picorer ici ou là pour tenter de clarifier mes propos.

Libremax a écrit:Il y a plusieurs acceptions pour moi, pour l'expression de "texte original" : Il y a la chimère poursuivie par certains (experts ou non) qui correspond à l'idée qu'un texte aurait été un jour rédigé avant toute altération dûe à de prétendues imprécisions ou divergences d'interprétation.
Il y a aussi l'idée qu'un texte ou un ensemble de textes relativement peu éloignés les uns des autres, natifs d'une culture et d'une langue, ait été antérieur à un ensemble plus large de traductions, ce qui peut créer parfois un pas important.
Ces acceptions n'empêchent pas une troisième, que vous défendez me semble-t-il, à savoir le texte tel qu'il est fixé aujourd'hui et pour nous, et qu'il convient de citer avec respect.

Si je vous comprends bien, il n'y a aucune définition univoque de ce fameux "texte original".

La quête du "texte original" n'est donc pas un argument pour expliquer pourquoi une Église change que ce soit la liste de son Canon, que ce soit le contenu de ses ouvrages canoniques, que ce soit sa traduction liturgique… que ce soit tout autre héritage du passé...

Alors je vais donc vous proposer la mienne pour que vous puissiez m'expliquer mon erreur :

le "texte original" est l’aboutissement du processus divino-humain de rédaction.
Il ne se situe pas en amont de l’œuvre séculaire de l’Assemblée mais en aval.
Le "texte original" se découvre quand, dans l’Assemblée, le texte transmis de génération en génération se fige peu à peu sous l’effet conjoint de la fidélité et de l’inspiration divine.


Bref : le "texte original" n'a de sens que pour une Assemblée, et il est le Canon d'aujourd'hui.

D’ailleurs, je ne pense pas que l’on trouve l'explicitation d'un canon avant le second siècle même si rétroactivement on peut se permettre toutes les spéculations.

Et c’est précisément pourquoi le mot "canon" est anachronique tant que le texte original n’est pas établi.

Libremax a écrit:je suis , pour ma part, convaincu que les personnes qui ont mis par écrit les Evangiles en grec ont cherché à être le plus fidèle possible à une prédication initialement délivrée en araméen



Et je veux souligner ici qu’il n’y a aucune raison de projeter un sens particulier sur la notion de "fidélité".

Nous n’avons aucune raison de penser que la "fidélité maximale" dont a témoigné assurément l’Assemblée (Juive ou Chrétienne) ressemblât à une préoccupation du type « copie conforme ».

Je n’en vois aucune trace avant le quatrième siècle, mais je ne connais pas tout.
Les manuscrits de Qumran notamment nous montrent à quel point il serait vain d’anticiper la préoccupation des massorètes.

La fidélité littérale n’a de sens qu’après l’achèvement, elle ne s’applique qu’au Canon, elle ne s’applique que sur le "texte original" quand il a fini d’être rédigé par l’Assemblée après très probablement plusieurs siècles de maturation.


En fait, au plan du principe cela ne me dérange pas qu’une Église fasse évoluer ses textes puisque c'est dans la nature même du processus divino-humain de rédaction, mais je suis plus embarrassée quand elle fait évoluer son Canon qui se distingue du reste en ce qu’il est correspond justement à un aboutissement.

Ce qui me turlupine c’est quand une Assemblée au prétexte de la fidélité se montre dubitative sur le legs hérité des générations précédente.





Si j’interviens ici c’est pour que vous m’aidiez à répondre à mes sœurs et mes frères qui sont à côté de moi en Église, qui sont mes contemporains en Église, avec lesquels je ne suis qu’UN, bien qu’ils soient apparemment éloignés par les kilomètres ou par les siècles.

Quand ils me demandent pourquoi j’ai renoncé à l’héritage.
Quand ils s’étonnent que l’on puisse penser qu’il faut reprendre le travail de ceux qui ont œuvré pour aboutir au "texte original".

Je peine surtout à leur expliquer pourquoi une de nos justifications serait un hypothétique état antérieur "meilleur" que celui qui nous a été laissé et en lequel ils mettaient, eux, leur confiance.
Cette aspiration à une sorte de paradis perdu sonne comme un désaveu.

C'est bizarre de prétexter la fidélité pour justifier notre infidélité.
Ne pas être fidèle pour des motifs de fidélité revient à jeter le discrédit sur ce dont on s'émancipe.


Et parfois ce n’est pas seulement l’idée d’un retour hypothétique, cela s’accompagne d’un véritable jugement de valeur. P
ar exemple, une de nos justifications pour abandonner la Septante serait qu’elle ne serait pas assez juive.
Ce ne seraient pas des Juifs pieux qui nous auraient légué la Septante.
Leur travail serait "moins bon" que celui des successeurs des pharisiens, les rédacteurs de la Septante ne seraient pas inspirés et seraient des Juifs "moins vrais".
Leur "fidélité" serait de mauvais aloi au point que leur faire confiance reviendrait à nous couper de l’héritage Juif...
Dès lors, pour renouer avec l'héritage juif il nous faudrait trancher ce lien douteux car le label "Juif" de la Septante n'aurait pas de réelle légitimité, il serait moins authentique.

J’aimerais bien pouvoir expliquer clairement à mes soeurs et frères si proches et si lointains pourquoi au-delà des apparences (c’est-à-dire au-delà de la défiance dont nous leur témoignons) nous sommes toujours UN.

Très cordialement

Votre sœur Pauline

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Message  Libremax Mer 9 Mai - 0:06

Bonsoir Pauline,

En ce qui me concerne, il y a juste un petit problème de vocabulaire : en effet, je ne dirais pas que l'Eglise cherche un texte qui soit original.

Je ne dirais pas que votre définition est une erreur. Il se trouve que ce n'est pas ce que j'aurais appelé un "texte original" ; en revanche, je crois qu'elle décrit sans doute assez fidèlement ce que l'Eglise transmet dans un texte canonique, ou ce que j'appelais un texte de référence.

Cela dit, pour revenir sur la Vulgate, qui, comme vous le remarquiez fort bien, a dû être éprouvée par le temps et le jugement de la communauté, c'est au nom de l'assemblée qu'elle a été demandée à un seul homme, qui sans vouloir rompre avec le passé, a voulu oeuvrer pour son temps.

Nous n’avons aucune raison de penser que la "fidélité maximale" dont a témoigné assurément l’Assemblée (Juive ou Chrétienne) ressemblât à une préoccupation du type « copie conforme ».

Il paraît que nous en avons bel et bien. Mais les traces de ce genre de préoccupation ne sont pas tant à voir dans les témoignages écrits que dans l'oralité de certains textes araméens, probablement bien plus précoces que le IVe siècle, et le vaste champ de ses implications.
Le manuscrit d'Isaïe de Qumran est-il si différent du texte massorétique?

La fidélité littérale n’a de sens qu’après l’achèvement, elle ne s’applique qu’au Canon, elle ne s’applique que sur le "texte original" quand il a fini d’être rédigé par l’Assemblée après très probablement plusieurs siècles de maturation.

Pardonnez-moi, mais de quelle Assemblée parlez-vous ici ? Qu'est-ce qui vous permet d'établir la probabilité que cet achèvement ne soit arrivé qu'après plusieurs siècles? Qu'est-ce qui vous fait dire que c'est l'Assemblée qui rédige, ou du moins, qu'entendez-vous par là ?
Les fidèles ont-ils donc, des siècles durant, modifié les textes, chacun quand l'envie lui prenait, juste après la lecture? jusqu'à ce que quelqu'un dise "maintenant on s'arrête", (et pour quelle raison)?

En fait, au plan du principe cela ne me dérange pas qu’une Église fasse évoluer ses textes puisque c'est dans la nature même du processus divino-humain de rédaction, mais je suis plus embarrassée quand elle fait évoluer son Canon qui se distingue du reste en ce qu’il est correspond justement à un aboutissement.

Il y a là un point à préciser : un aboutissement de quoi, au juste? Quelles sont les évolutions données aux Ecritures qui vous semblent naturelles? Quels types de modifications peuvent y être apportées?

Est-ce en vertu de ce principe que vous vous méfiez de la Vulgate? Pourquoi tenez-vous ici à défendre les traducteurs de la Septante ? Roque, ou Georgios, ont-ils dit que leur traduction n'était pas fiable?
Quelle est la raison pour laquelle il fallait choisir leur texte plutôt que le texte hébraïque?

Le texte des Juifs massorétiques avait d'ailleurs toutes les raison d'avoir évolué, lui aussi, depuis l'époque de la Septante et surtout depuis l'époque du Christ. Il n'avait rien d'un texte "antérieur".
Jérôme connaissait la Septante, en disposait assurément, et a pu s'éclairer de sa formulation. Pourquoi estimer que son but était a priori de s'en retrancher?

Dès lors, pour renouer avec l'héritage juif il nous faudrait trancher ce lien douteux car le label "Juif" de la Septante n'aurait pas de réelle légitimité, il serait moins authentique.

Cela n'a pas de sens, c'est vrai. Et pourtant les juifs hébreux ont fini par se méfier de la Septante, au point que même les écrivains laïques craignaient de traduire en grec leur texte araméen.
Vous voyez, les traducteurs de la Septante ont eux-même dû rompre avec la tradition séculaire de leur peuple. En ce temps-là, s'agissait-il pour autant de renier le texte hébreu?
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Message  Invité Mer 9 Mai - 12:47

Le Christ est ressuscité !

Bonjour à toutes et à tous,

Un mot sur ces deux notions qui ne relèvent pas exactement du même domaine :

1 ) le Texte Majoritaire (ou tradition majoritaire) désigne une observation opérée par des érudits face à la collection des manuscrits anciens. À peu de chose près 80 % des manuscrits du premier millénaire sont extrêmement voisins. C’est sur la base de ce pourcentage écrasant et de la grande homogénéité de cette « collection », on parle de texte majoritaire.

2 ) le Texte Reçu (ou textus receptus) désigne une élaboration réalisée par des érudits pour unifier la diversité des traditions textuelles. Il y a dans cette démarche une composante d’édition critique puisque le texte reçu ne coïncide pas avec un texte existant mais qu’il est censé compiler les « meilleures » leçons. Cette démarche critique ne s’est pas abstraite d’une démarche théologique qui a parfois abouti à retenir des leçons un peu plus rares comme le fameux : 1 Jean 5,7-8
7 Car il y en a trois dans le Ciel qui rendent témoignage, le Père, la Parole, et le Saint-Esprit ; et ces trois-là ne sont qu’un.
8 Il y en a aussi trois qui rendent témoignage sur la terre, savoir l’Esprit, l’eau, et le Sang ; et ces trois-là se rapportent à un.


En toute rigueur, en dépit des apparences, le texte majoritaire et le texte reçu ne sont pas identiques ni au plan du principe ni au plan littéraire.

Très cordialement

votre soeur
Pauline

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Message  Invité Mer 9 Mai - 13:11

Le Christ est ressuscité !

Bonjour Libremax

Libremax a écrit:En ce qui me concerne, il y a juste un petit problème de vocabulaire : en effet, je ne dirais pas que l'Église cherche un texte qui soit original.

Je ne dirais pas que votre définition est une erreur. Il se trouve que ce n'est pas ce que j'aurais appelé un "texte original" ; en revanche, je crois qu'elle décrit sans doute assez fidèlement ce que l'Église transmet dans un texte canonique, ou ce que j'appelais un texte de référence.

Très bien !
Éliminons définitivement toute idée, fût-elle vague, de texte original.
Personne ne peut arguer d'une quête du texte original.


Libremax a écrit:
Cela dit, pour revenir sur la Vulgate, qui, comme vous le remarquiez fort bien, a dû être éprouvée par le temps et le jugement de la communauté,
OK pas de problème...
C'est le magistère tridentin qui a fini par contredire le magistère précédent.
Et ma question est de savoir pourquoi le magistère a-t-il fait ça,
et pourquoi nous sommes toujours UN avec ceux qui ont lu un autre Canon ?

Libremax a écrit:
c'est au nom de l'assemblée qu'elle a été demandée à un seul homme, qui sans vouloir rompre avec le passé, a voulu œuvrer pour son temps.
Voulez-vous dire que l'évêque de Jérusalem jouissait déjà de l'infaillibilité pontificale ?
Qu'un évêque demande quelque chose à quelqu'un... est-ce que c'est nécessairement une décision œcuménique ? une décision de l'Assemblée toute entière ?

Libremax a écrit:
Il paraît que nous en avons bel et bien. Mais les traces de ce genre de préoccupation ne sont pas tant à voir dans les témoignages écrits que dans l'oralité de certains textes araméens, probablement bien plus précoces que le IVe siècle, et le vaste champ de ses implications.
Le manuscrit d'Isaïe de Qumran est-il si différent du texte massorétique?
À ma connaissance, il y a deux rouleaux assez complets d'Isaïe à Qumran, l'un est fidèle et l'autre bourré de fautes.

Là encore, le syllogisme est douteux.
Que d'innombrables variantes se ressemblent beaucoup ne signifient pas qu'elles témoignent d'une véritable préoccupation de copie conforme. Au mieux, elles témoignent du fait que le texte s'était figé.

Si cette préoccupation de la "copie conforme" était vraiment de premier plan avant l'Incarnation de notre Seigneur alors comment expliquez-vous les considérables différences entre la Septante et le texte massorétique dans Job, dans Jérémie, Daniel, Esther... dans les Psaumes...
laquelle des deux traditions était-elle déjà préoccupée avant l'ère chrétienne ?

Très cordialement

votre sœur
Pauline

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Message  Libremax Mer 9 Mai - 17:42

pauline.px a écrit:
C'est le magistère tridentin qui a fini par contredire le magistère précédent.
Et ma question est de savoir pourquoi le magistère a-t-il fait ça,
et pourquoi nous sommes toujours UN avec ceux qui ont lu un autre Canon ?

En toute rigueur, pour les catholiques, et si nous croyons que l'Esprit est à l'oeuvre en son Eglise, le Magistère reste le Magistère, qu'ils soit tridentin, chalcédonien ou du Vatican.
En ce qui concerne le concile de Trente, l'officialisation de la Vulgate n'a fait que confirmer un usage déjà répandu : elle n'a pas innové. Cette officialisation était en fait une prise de position contre la Réforme protestante.
Il convient de garder à l'esprit que la Vulgate répondait à un problème linguistique. Traduire la Septante en latin posait aussi un problème : une traduction s'éloigne inévitablement du texte traduit. Le problème était encore plus grand de l'hébreu au latin, mais il s'agissait finalement de restituer un équivalent du travail fourni par les auteurs de la Septante, mais en latin : Pour Jérôme et pour Damase, il a paru opportun de partir de la même source.


Libremax a écrit:
c'est au nom de l'assemblée qu'elle a été demandée à un seul homme, qui sans vouloir rompre avec le passé, a voulu œuvrer pour son temps.
Voulez-vous dire que l'évêque de Jérusalem jouissait déjà de l'infaillibilité pontificale ?
Qu'un évêque demande quelque chose à quelqu'un... est-ce que c'est nécessairement une décision œcuménique ? une décision de l'Assemblée toute entière ?

Selon le dogme, oui bien sûr, le pape jouissait de cette infaillibilité, et ceci depuis toujours. Mais elle ne concerne pas ce genre d'initiative, et n'a donc rien à voir avec la question. L'évêque de Jérusalem n'a fait que trouver une solution à un problème pastoral, posé par la multiplicité des textes. Quand un évêque parle, il engage toute son Eglise, non ?

Là encore, le syllogisme est douteux.
Que d'innombrables variantes se ressemblent beaucoup ne signifient pas qu'elles témoignent d'une véritable préoccupation de copie conforme. Au mieux, elles témoignent du fait que le texte s'était figé.

Si cette préoccupation de la "copie conforme" était vraiment de premier plan avant l'Incarnation de notre Seigneur alors comment expliquez-vous les considérables différences entre la Septante et le texte massorétique dans Job, dans Jérémie, Daniel, Esther... dans les Psaumes...
laquelle des deux traditions était-elle déjà préoccupée avant l'ère chrétienne ?

Ma connaissance des manuscrits anciens est hélas trop petite pour vous répondre avec certitude : je ne sais pas de quelles considérables différences vous parlez.
Par ailleurs, c'est en fait surtout des textes du Nouveau Testament que je parlais quand j'évoquais le souci de coller au plus près d'un texte traduit.

Ce que je sais, c'est que le champ sémantique des langues sémitiques comme l'Hébreu et l'araméen est beaucoup plus large que celui des langues comme le grec ou le latin. La traduction en grec implique donc, en général, soit une réduction du sens, soit l'usage de gloses explicatives, ce qui ouvre le champ à l'interprétation ou à la culture du traducteur. Le choix de coller (ou non) à la rythmique orale du texte traduit, en plus de son sens, modifiera aussi le résultat.

Au delà de cela, je n'imagine pas en quoi des gens aussi scrupuleux et respectueux de leurs Ecritures que les Juifs se sentiraient permis de modifier quoi que ce soit à des textes utilisés en liturgie.
Mais peut-être la fixation des textes correspond-elle justement au moment où , du statut de simples textes pieux populaires, les textes passent à celui de textes religieux. Seulement les études sur l'oralité des textes bibliques tendent à montrer que la fixation des textes arrive bien avant, et que ce n'est que lorsqu'ils sont agrégés à d'autres, ou bien traduits dans une autre langue, qu'ils peuvent être modifiés, et c'est tout.
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