Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
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Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Cher Yahia, comme vous savez vous m’avez envoyé un message en mp. J’ai passé un certain temps dimanche dernier à rédiger une très (trop) longue réponse. Il ne restait que quelques corrections et coupes pour simplifier et éditer lundi dernier.
Mais comme j’ai vu sur un autre sujet un débat un peu faussé : vous, mettant en cause l'historicité et la fiabilité des Evangiles et l’autre interlocuteur essayant de se justifier justement par cet Evangile que vous contestez … j'ai reconnu un débat tournant à vide parce que ne mettant pas en jeu les vraies question. J'ai changé d'avis sur le post et j'ai pensé que j’avais l’occasion d’aborder une question de fond que j’ai très longuement abordée sur ce forum (de façon très confuse et illisible sans doute) … :
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t1976-la-parole-de-jesus-christ-a-la-sauce-marguerat
INTRODUCTION
La réponse à vos questions ne se trouvent pas dans les Evangiles, alors cessons - au moins sur ce fil - de parler des Evangiles, si vous voulez bien. Parlons plutôt de votre « manière de chercher », c’est-à-dire de votre méthode et vos postulats dont la plupart sont gardés implicites.
Et parlons de la méthode de la Formgeschichte ou de celle de Marguerat (ou de la vôtre) qui sont toutes apparentées. Cette méthode d’analyse de Marguerat n’est que la méthode d’analyse de Bultmann, revisitée sur des points de détail - et parfois de façon assez astucieuse, il faut le reconnaître.
ECOUTE CROYANTE ET LECTURE RATIONNELLE
La méthode de Bultmann et de Marguerat s’écartent notablement de la « lecture croyante ». Le point le plus évident est que la lecture de ces deux exégètes est exclusivement intellectuelle. L’ « écoute croyante » qui utilise en priorité « l’écoute ouverte, non finalisée, bienveillante » utilise aussi des analyses par de multiples approches. Cette " écoute croyante " est rendue quasi-impossible par l’approche exclusivement intellectuelle et tout à fait impossible si le morcellement systématique du texte, s'il est LE préalable à toute autre opération (Cf. : le postulat des « micro-unités » : voir plus bas).
Mais, soyons clairs, il n’est absolument pas question de « l’écoute croyante » dans ce qui va suivre à aucun moment de mon exposé. Dans ce qui suit, je traite exclusivement de la méthode d’analyse de la Formgeschichte et de Marguerat. Ces méthode d’exégèse totalement étrangère à la foi, ce qui signifie que ce sont des méthodes ni croyante, ni incroyante et régies - en principe - par la neutralité intellectuelle.
Je pense que l’exposé sera clair sur ce point : il ne traite que d’une « lecture rationnelle » et principalement celle faite par Marguerat. J’avoue que je n’ai pas vraiment lu Bultmann (je suis autodidacte), sauf par quelques citations de Marguerat et quelques extraits commentés sur internet.
1. LE " SYSTEME MARGUERAT ", EN BREF
La méthode d’analyse de Marguerat repose sur deux choses : un postulat – c’est-à-dire un " a priori " qui n'est pas démontré, sans autre fondement que la conviction de l’auteur – ET une hypothèse d’école. Aucun de ces deux éléments premiers ne repose sur des « preuves » rigoureusement assises et confirmées par l’ensemble des pairs - au même titre que les sciences « dures ». On est d’emblée dans un domaine de controverse et de débat sur « ce qui paraît vraisemblable » … et on y reste de bout en bout !
A. Le postulat : les Evangiles sont écrits à partir de fragments ou « micro-unités » dont la cohérence a été définitivement perdue. C’est tout à fait ce que pense Bultmann qui reconnaît, lui-même qu’il s’agit d’un « postulat » - donc d’une affirmation non susceptible d’être démontrée. L’existence des micro-unités n’est pas en discussion – c’est la perte de tout lien et de toute cohérence dans leur transmission qui ne peut être démontrée ;
B. L’hypothèse ou l’option d’école est : les Evangiles seraient une « sous-catégorie des biographies gréco romaines » (sic). Il en découle que si les Evangiles sont effectivement des « biographies gréco romaines » tout le contenu historiographique – sans même parler du « merveilleux » (miracles et prédictions) - sont en grande partie, sinon en totalité fictifs. Bultmann optera pour des Evangiles appartenant un style « sui generis » - donc sans comparaison littéraire possible, mais appartenant à une « basse littérature » totalement étrangère – voire opposée - à tout standard d’exactitude historique. On voit que le préjugé rationaliste est plus subtilement introduit par Marguerat que par Bultmann … il y a du « progrès » en quelque sorte - mas qu'une école reposant sur une compétence en critique littéraire varie aussi fortement sur un point aussi fondamental, paraît franchement surprenant !
Une fois les points A et B posés, on passe sans aucun besoin de démonstration aux trois points suivants :
C. Les Evangiles sont : « une narration, mais ne sont pas une histoire ». Cette formule apparemment anodine avec le jeu de mot entre « narration » (récit) et « histoire » recouvre, par exemple dans l’Introduction au Nouveau Testament, une triple affirmation très substantielle :
a. L’auteur n’est pas Jésus ;
b. La chaîne de transmission jusqu’aux rédacteurs (les « évangélistes ») est inconnue et définitivement perdue ;
c. Le « récit » ne repose sur aucun témoin oculaire.
D. La « remémoration est une élaboration théologique » - ce qui en clair signifie qu’il n’y a aucun travail de mémoire (pas d’information issue de souvenirs), mais uniquement une construction théologique à visée exclusivement apologétique (pour le prosélytisme). Il y a un significatif glissement de sens sur ce qui est appelé ici « théologie » : cela ne concerne pas vraiment Dieu, il s’agit juste de forger à partir de Jésus mort et enterré l’image d’un « faux dieu ». La tradition biblique appelle cela de l'idolâtrie ...
E. Les « affirmations sur la divinité de Jésus sont des affirmations postpascales » - ce qui, en clair, ne veut pas seulement dire que les Evangiles ont été écrits après la Mort et la Résurrection de Jésus-Christ (bien évident !), mais que les ajouts sur la divinité de Jésus sont des inventions. Les « évangélistes » quel qu’ils soient sont donc – même s’ils se donnent de « bonnes raisons » - des imposteurs.
Nous soulignons trois choses.
- Les points A et B même séparément seraient déjà suffisants - séparément – pour fragmenter et disqualifier le texte évangélique – à plus forte raison quand ils sont joints. Ces point A + B, isolément, sont , je pense, capables de détruire la cohérence et la fiabilité de n’importe quel texte ancien : comme le Coran, par exemple ;
- Tout l’ensemble (C + D + E) n’est qu’une reformulation de ce qui précède (A + B) ; l'INT n'a besoin d'autre démonstration pour passer de (A + B) à (C + D + E) - c'est juste une reformulation ;
- Ce qui frappe à la lecture de l’ouvrage collectif dirigé par Marguerat « Introduction au Nouveau Testament » (INT), c’est qu’on ne sort jamais de la reformulation des postulats de base. Assez étonnant pour une pensée qui se présente comme « novatrice et libre » en référence à la fameuse liberté de pensée. L’ouvrage – faute de véritable démonstration – souffre de répétitions assez lassantes et d’un certain rabâchage du « dogme critique » de cette école d’exégèse (voir plus bas).
Marguerat va produire une liste d’incertitudes, établies par voie critique, qui vont totalement décrédibiliser les Evangiles. Il serait faux de prétendre que le système Marguerat ne produit absolument rien de « positif ». Ce qui est produit positivement par cette méthode, c’est cette opinion fixée de l’école de Marguerat laquelle est, sans jeu de mot, un véritable « dogme critique » ou une doxa d’école. Par contre l’opinion de cette école exégétique sur la cohérence et la fiabilité du texte des Evangiles est lourdement négative. Ce dogme critique est exposé en neuf points, mais c’est indicatif :
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2493-les-evangiles-pas-historiques#52338
L’utilisation du texte des Evangiles pour appuyer les préjugés [ou postulats] de la méthode est – au regard du système Marguerat et à mon avis – juste un point de détail. Le texte évangélique ne sert finalement que d’« habillage », c’est-à-dire de tentative de justification à la philosophie qui soutient ce « dogme critique ». Bultmann était proche de Heidegger, pour Marguerat, je ne sais pas. En un sens, Marguerat est un interprète du texte évangélique parmi d’autres. Mais c’est une interprétation « à charge » exclusivement, une interprétation qui fait certes table rase – et qui laisse épars les rares fragments du texte évangélique jugés authentiques.
Les points positifs de cette pensée – nous devons le reconnaître – son à mon avis l’idée que les Evangiles ont pu être constitués par strates (ce qui est différent des « micro-unités ») et l’insistance sur l’intention catéchétique du texte évangélique. Il y a peut-être d’autres points, mais ces deux points resteront et nourrissent l’exégèse qui a succédé à Bultmann.
2. OUI, CE SYSTEME DETRUIT LES EVANGILES ET LA FOI – dans l’esprit de ceux qui y « croient »
Conclusion : les approches de la Formgeschichte de Bultmann et celle de Marguerat débouchent sur une fragmentation et une absence de fiabilité des Evangiles, c’est-à-dire une réelle « destruction » du texte des Evangiles – en moins dans l’esprit de celui qui « croit » à l’approche de Marguerat. Quelles conséquences immédiates ? Sans aller trop loin, il y en a deux :
F. L’histoire exacte du « Jésus historique » – y compris l’évènement de la Résurrection - est inaccessible à partir du texte des Evangiles. Etant donnée les méthodes aléatoires de rédaction – supposées (postulat) - on peut " rationnellement " avancer que la Résurrection est une pieuse invention ;
G. Le témoignage de l’Eglise depuis l’origine repose sur une imposture à visée de prosélytisme. Etant données les méthodes aléatoires de rédaction – supposées (postulat) - on peut " rationnellement " avancer que les procédés de l’Eglise n’ont jamais fondamentalement changé ou sont dans l'impossibilité de remettre en cause ce " trucage " sur lequel repose sa raison d'être.
Au fond, il ne peut exister de christianisme sans les Evangiles. La pensée profonde de Marguerat sur Jésus est pour moi assez insaisissable – sauf qu’il ne peut évidemment pas être Dieu. Je me suis demandé s’il pouvait être intimement croyant. C’est possible, mais par une autre voie que les Evangiles, évidemment. S’il se dit « chrétien », c’est sans Jésus, car sans les Evangiles, Jésus peut alors être n’importe qui. Est-il « chrétien » ? S’il répond « oui » c’est un christianisme sans Jésus, sans Son Corps, sans Son histoire. Ce serait une sorte de nouveau docétisme (Jésus sans Son humanité) ou mieux : une sorte de pirouette : « Il faut y croire, parce que cela fait sens – et (implicitement) : même si c’est faux ». C’est une réponse qu’on peut trouver dans le « christianisme libéral » lequel – à la réflexion n’est qu’un jeu intellectuel – cette pirouette est peut-être " amusante ", provocante, mais au fond c'est aussi une imposture spécifiquement quand elle est la position intime de personnes chargée d’enseigner le « christianisme » dans les Eglises.
Bultmann et Marguerat sont prudents et malins : ils ne récusent pas la totalité des versets, la totalité des Evangiles parce que s’ils le faisaient … ils pourraient fermer boutique. Il ne concède l’authenticité que d’une poignée de versets … cela leur permet, bien à l’aise, d’occuper la position de contestataire radical ou du provocateur et de jouer au jeu du « chat et de la souris » - pendant les longues années de leur brillante carrière - avec des chrétiens décidemment trop naïfs.
(A suivre)
Mais comme j’ai vu sur un autre sujet un débat un peu faussé : vous, mettant en cause l'historicité et la fiabilité des Evangiles et l’autre interlocuteur essayant de se justifier justement par cet Evangile que vous contestez … j'ai reconnu un débat tournant à vide parce que ne mettant pas en jeu les vraies question. J'ai changé d'avis sur le post et j'ai pensé que j’avais l’occasion d’aborder une question de fond que j’ai très longuement abordée sur ce forum (de façon très confuse et illisible sans doute) … :
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t1976-la-parole-de-jesus-christ-a-la-sauce-marguerat
INTRODUCTION
La réponse à vos questions ne se trouvent pas dans les Evangiles, alors cessons - au moins sur ce fil - de parler des Evangiles, si vous voulez bien. Parlons plutôt de votre « manière de chercher », c’est-à-dire de votre méthode et vos postulats dont la plupart sont gardés implicites.
Et parlons de la méthode de la Formgeschichte ou de celle de Marguerat (ou de la vôtre) qui sont toutes apparentées. Cette méthode d’analyse de Marguerat n’est que la méthode d’analyse de Bultmann, revisitée sur des points de détail - et parfois de façon assez astucieuse, il faut le reconnaître.
ECOUTE CROYANTE ET LECTURE RATIONNELLE
La méthode de Bultmann et de Marguerat s’écartent notablement de la « lecture croyante ». Le point le plus évident est que la lecture de ces deux exégètes est exclusivement intellectuelle. L’ « écoute croyante » qui utilise en priorité « l’écoute ouverte, non finalisée, bienveillante » utilise aussi des analyses par de multiples approches. Cette " écoute croyante " est rendue quasi-impossible par l’approche exclusivement intellectuelle et tout à fait impossible si le morcellement systématique du texte, s'il est LE préalable à toute autre opération (Cf. : le postulat des « micro-unités » : voir plus bas).
Mais, soyons clairs, il n’est absolument pas question de « l’écoute croyante » dans ce qui va suivre à aucun moment de mon exposé. Dans ce qui suit, je traite exclusivement de la méthode d’analyse de la Formgeschichte et de Marguerat. Ces méthode d’exégèse totalement étrangère à la foi, ce qui signifie que ce sont des méthodes ni croyante, ni incroyante et régies - en principe - par la neutralité intellectuelle.
Je pense que l’exposé sera clair sur ce point : il ne traite que d’une « lecture rationnelle » et principalement celle faite par Marguerat. J’avoue que je n’ai pas vraiment lu Bultmann (je suis autodidacte), sauf par quelques citations de Marguerat et quelques extraits commentés sur internet.
1. LE " SYSTEME MARGUERAT ", EN BREF
La méthode d’analyse de Marguerat repose sur deux choses : un postulat – c’est-à-dire un " a priori " qui n'est pas démontré, sans autre fondement que la conviction de l’auteur – ET une hypothèse d’école. Aucun de ces deux éléments premiers ne repose sur des « preuves » rigoureusement assises et confirmées par l’ensemble des pairs - au même titre que les sciences « dures ». On est d’emblée dans un domaine de controverse et de débat sur « ce qui paraît vraisemblable » … et on y reste de bout en bout !
A. Le postulat : les Evangiles sont écrits à partir de fragments ou « micro-unités » dont la cohérence a été définitivement perdue. C’est tout à fait ce que pense Bultmann qui reconnaît, lui-même qu’il s’agit d’un « postulat » - donc d’une affirmation non susceptible d’être démontrée. L’existence des micro-unités n’est pas en discussion – c’est la perte de tout lien et de toute cohérence dans leur transmission qui ne peut être démontrée ;
B. L’hypothèse ou l’option d’école est : les Evangiles seraient une « sous-catégorie des biographies gréco romaines » (sic). Il en découle que si les Evangiles sont effectivement des « biographies gréco romaines » tout le contenu historiographique – sans même parler du « merveilleux » (miracles et prédictions) - sont en grande partie, sinon en totalité fictifs. Bultmann optera pour des Evangiles appartenant un style « sui generis » - donc sans comparaison littéraire possible, mais appartenant à une « basse littérature » totalement étrangère – voire opposée - à tout standard d’exactitude historique. On voit que le préjugé rationaliste est plus subtilement introduit par Marguerat que par Bultmann … il y a du « progrès » en quelque sorte - mas qu'une école reposant sur une compétence en critique littéraire varie aussi fortement sur un point aussi fondamental, paraît franchement surprenant !
Une fois les points A et B posés, on passe sans aucun besoin de démonstration aux trois points suivants :
C. Les Evangiles sont : « une narration, mais ne sont pas une histoire ». Cette formule apparemment anodine avec le jeu de mot entre « narration » (récit) et « histoire » recouvre, par exemple dans l’Introduction au Nouveau Testament, une triple affirmation très substantielle :
a. L’auteur n’est pas Jésus ;
b. La chaîne de transmission jusqu’aux rédacteurs (les « évangélistes ») est inconnue et définitivement perdue ;
c. Le « récit » ne repose sur aucun témoin oculaire.
D. La « remémoration est une élaboration théologique » - ce qui en clair signifie qu’il n’y a aucun travail de mémoire (pas d’information issue de souvenirs), mais uniquement une construction théologique à visée exclusivement apologétique (pour le prosélytisme). Il y a un significatif glissement de sens sur ce qui est appelé ici « théologie » : cela ne concerne pas vraiment Dieu, il s’agit juste de forger à partir de Jésus mort et enterré l’image d’un « faux dieu ». La tradition biblique appelle cela de l'idolâtrie ...
E. Les « affirmations sur la divinité de Jésus sont des affirmations postpascales » - ce qui, en clair, ne veut pas seulement dire que les Evangiles ont été écrits après la Mort et la Résurrection de Jésus-Christ (bien évident !), mais que les ajouts sur la divinité de Jésus sont des inventions. Les « évangélistes » quel qu’ils soient sont donc – même s’ils se donnent de « bonnes raisons » - des imposteurs.
Nous soulignons trois choses.
- Les points A et B même séparément seraient déjà suffisants - séparément – pour fragmenter et disqualifier le texte évangélique – à plus forte raison quand ils sont joints. Ces point A + B, isolément, sont , je pense, capables de détruire la cohérence et la fiabilité de n’importe quel texte ancien : comme le Coran, par exemple ;
- Tout l’ensemble (C + D + E) n’est qu’une reformulation de ce qui précède (A + B) ; l'INT n'a besoin d'autre démonstration pour passer de (A + B) à (C + D + E) - c'est juste une reformulation ;
- Ce qui frappe à la lecture de l’ouvrage collectif dirigé par Marguerat « Introduction au Nouveau Testament » (INT), c’est qu’on ne sort jamais de la reformulation des postulats de base. Assez étonnant pour une pensée qui se présente comme « novatrice et libre » en référence à la fameuse liberté de pensée. L’ouvrage – faute de véritable démonstration – souffre de répétitions assez lassantes et d’un certain rabâchage du « dogme critique » de cette école d’exégèse (voir plus bas).
Marguerat va produire une liste d’incertitudes, établies par voie critique, qui vont totalement décrédibiliser les Evangiles. Il serait faux de prétendre que le système Marguerat ne produit absolument rien de « positif ». Ce qui est produit positivement par cette méthode, c’est cette opinion fixée de l’école de Marguerat laquelle est, sans jeu de mot, un véritable « dogme critique » ou une doxa d’école. Par contre l’opinion de cette école exégétique sur la cohérence et la fiabilité du texte des Evangiles est lourdement négative. Ce dogme critique est exposé en neuf points, mais c’est indicatif :
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2493-les-evangiles-pas-historiques#52338
L’utilisation du texte des Evangiles pour appuyer les préjugés [ou postulats] de la méthode est – au regard du système Marguerat et à mon avis – juste un point de détail. Le texte évangélique ne sert finalement que d’« habillage », c’est-à-dire de tentative de justification à la philosophie qui soutient ce « dogme critique ». Bultmann était proche de Heidegger, pour Marguerat, je ne sais pas. En un sens, Marguerat est un interprète du texte évangélique parmi d’autres. Mais c’est une interprétation « à charge » exclusivement, une interprétation qui fait certes table rase – et qui laisse épars les rares fragments du texte évangélique jugés authentiques.
Les points positifs de cette pensée – nous devons le reconnaître – son à mon avis l’idée que les Evangiles ont pu être constitués par strates (ce qui est différent des « micro-unités ») et l’insistance sur l’intention catéchétique du texte évangélique. Il y a peut-être d’autres points, mais ces deux points resteront et nourrissent l’exégèse qui a succédé à Bultmann.
2. OUI, CE SYSTEME DETRUIT LES EVANGILES ET LA FOI – dans l’esprit de ceux qui y « croient »
Conclusion : les approches de la Formgeschichte de Bultmann et celle de Marguerat débouchent sur une fragmentation et une absence de fiabilité des Evangiles, c’est-à-dire une réelle « destruction » du texte des Evangiles – en moins dans l’esprit de celui qui « croit » à l’approche de Marguerat. Quelles conséquences immédiates ? Sans aller trop loin, il y en a deux :
F. L’histoire exacte du « Jésus historique » – y compris l’évènement de la Résurrection - est inaccessible à partir du texte des Evangiles. Etant donnée les méthodes aléatoires de rédaction – supposées (postulat) - on peut " rationnellement " avancer que la Résurrection est une pieuse invention ;
G. Le témoignage de l’Eglise depuis l’origine repose sur une imposture à visée de prosélytisme. Etant données les méthodes aléatoires de rédaction – supposées (postulat) - on peut " rationnellement " avancer que les procédés de l’Eglise n’ont jamais fondamentalement changé ou sont dans l'impossibilité de remettre en cause ce " trucage " sur lequel repose sa raison d'être.
Au fond, il ne peut exister de christianisme sans les Evangiles. La pensée profonde de Marguerat sur Jésus est pour moi assez insaisissable – sauf qu’il ne peut évidemment pas être Dieu. Je me suis demandé s’il pouvait être intimement croyant. C’est possible, mais par une autre voie que les Evangiles, évidemment. S’il se dit « chrétien », c’est sans Jésus, car sans les Evangiles, Jésus peut alors être n’importe qui. Est-il « chrétien » ? S’il répond « oui » c’est un christianisme sans Jésus, sans Son Corps, sans Son histoire. Ce serait une sorte de nouveau docétisme (Jésus sans Son humanité) ou mieux : une sorte de pirouette : « Il faut y croire, parce que cela fait sens – et (implicitement) : même si c’est faux ». C’est une réponse qu’on peut trouver dans le « christianisme libéral » lequel – à la réflexion n’est qu’un jeu intellectuel – cette pirouette est peut-être " amusante ", provocante, mais au fond c'est aussi une imposture spécifiquement quand elle est la position intime de personnes chargée d’enseigner le « christianisme » dans les Eglises.
Bultmann et Marguerat sont prudents et malins : ils ne récusent pas la totalité des versets, la totalité des Evangiles parce que s’ils le faisaient … ils pourraient fermer boutique. Il ne concède l’authenticité que d’une poignée de versets … cela leur permet, bien à l’aise, d’occuper la position de contestataire radical ou du provocateur et de jouer au jeu du « chat et de la souris » - pendant les longues années de leur brillante carrière - avec des chrétiens décidemment trop naïfs.
(A suivre)
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Bonsoir Roque :,
Voici ma réponse:
A: Non, pas prouvé
B: Non, ils rigolent là ? ( notez , on essaye le même coup avec le Coran)
C: Exagéré
D: Oui, certainement, mais le terme « forgé" est de trop .L’éllaboration est sincère et peut être peut être soit erronée , soit véridique.Cette véracité éventuelle ne relevant d'ailleurs pas de la lecture d'une critique historique, elle est d'un tout autre ordre. Ne pas voir que c'est d'un autre ordre , c'est ignorer ce que la foi ne se démontre pas mathématiquement.
E: vraisemblablement, mais pas sûr. Mon jugement est en suspens. L’injure d’une imposture n’entre certainement pas dans ma pensée
F: -Non, , ce n'est pas inaccessible.
-Pour la Résurrection ce n'est pas une "invention", donc pas un mensonge. Cela peut être une vérité ou une erreur. Mais celui qui dit que c'est une invention ou une erreur ne peut plus s'appeller chrétien: c'est là le point de rupture à mon sens.
G: C’est du délire
Cela fait 40 ans que j'ai rencontré-au séminaire(!) ce type de pensée critique historique -mais pas à ce point- et en ai examiné les conséquences néfastes pour un démarche de foi.Cette démarche telle que vous la décrivez n'aboutit à rien, même pour moi.
Conclusion: vous n'arriverez pas à me mettre l'étiquette de Marguerat sur le front, et vous ne me donnez pas trop l'envie de lire la suite....
Voici ma réponse:
A: Non, pas prouvé
B: Non, ils rigolent là ? ( notez , on essaye le même coup avec le Coran)
C: Exagéré
D: Oui, certainement, mais le terme « forgé" est de trop .L’éllaboration est sincère et peut être peut être soit erronée , soit véridique.Cette véracité éventuelle ne relevant d'ailleurs pas de la lecture d'une critique historique, elle est d'un tout autre ordre. Ne pas voir que c'est d'un autre ordre , c'est ignorer ce que la foi ne se démontre pas mathématiquement.
E: vraisemblablement, mais pas sûr. Mon jugement est en suspens. L’injure d’une imposture n’entre certainement pas dans ma pensée
F: -Non, , ce n'est pas inaccessible.
-Pour la Résurrection ce n'est pas une "invention", donc pas un mensonge. Cela peut être une vérité ou une erreur. Mais celui qui dit que c'est une invention ou une erreur ne peut plus s'appeller chrétien: c'est là le point de rupture à mon sens.
G: C’est du délire
Cela fait 40 ans que j'ai rencontré-au séminaire(!) ce type de pensée critique historique -mais pas à ce point- et en ai examiné les conséquences néfastes pour un démarche de foi.Cette démarche telle que vous la décrivez n'aboutit à rien, même pour moi.
Conclusion: vous n'arriverez pas à me mettre l'étiquette de Marguerat sur le front, et vous ne me donnez pas trop l'envie de lire la suite....
Dernière édition par Yahia le Mer 3 Déc - 17:48, édité 3 fois (Raison : précision sur F)
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Sachant que vous avez tous deux votre côté "brut de décoffrage" et dans le même temps cette richesse intérieure qui fait qu'on vous apprécie tant ici, j'ose espérer que vous parviendrez quand même à avancer à deux dans cette discussionYahia a écrit:Conclusion: vous n'arriverez pas à me mettre l'étiquette de Marguerat sur le front, et vous ne me donnez pas trop l'envie de lire la suite....
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...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Je suis de nouveau extrêmement embarrassé et désolé de vous avoir blessé. C'est ma première réaction à chaud en lisant ce matin votre réponse. Je vous présente mes excuses, à nouveau, et je crois bien que je suis en mesure de vous expliquer clairement ce que je pense, mais il me faut juste revenir sur quelques récents échanges avec vous. Ma pensée est sans " double fond ", je vous l'assure.Yahia a écrit:Conclusion: vous n'arriverez pas à me mettre l'étiquette de Marguerat sur le front, et vous ne me donnez pas trop l'envie de lire la suite....
En attendant ... et sans dévoiler ce dont nous avons parlé en mp, je me rappelle deux choses :
1.- Vous avez dit en substance ou approximativement (je vous laisse le choix) que ces démarches " déconstructives " (le mot est de vous) ont une logique qui mène à " nier la Révélation " et que vous aviez été jusqu'au bout de cette logique. En un sens vous avez été jusqu'au bout : oui et en un autre sens : non. Vous avez renoncé à la foi et ça c'est effectivement un aboutissement de cette logique " déconstructive ". C'est même cohérent quand la foi coïncide trop étroitement avec certaines démarches exclusivement rationnelles (je l'ai vu souvent). Nous sommes donc bien d'accord. Mais vous n'avez certainement pas bâti ou même adopté ce système de pensée très organisé - de mon point de vue - qui court depuis un peu plus d'un siècle depuis Bultmann jusqu'à Marguerat. C'est un travail colossal qui a mobilisé de nombreux cerveaux à plein temps pendant une dizaine de décennies. Ca dépasse les capacité d'une personne seule. Je ne vois même pas comment mon texte vous accuserais de porter cette étiquette. Je ne crois pas du tout que vous développiez ce que j'appelle cet esprit de système, cet " unilatéralisme systématique " que je crois trouver dans Marguerat (ce fil a en partie pour objectif d'expliquer ce que j'entends par là et que je distingue nettement du " Doute méthodique ", lequel est pour moi parfaitement légitime et fait partie de la " liberté de penser ".).
Mais cela deviendra plus clair - et certainement plus acceptable pour vous - si j'explique ce que je considère comme une " pensée apparentée " qui ne consiste parfois qu'à utiliser éventuellement inconsciemment certaines méthodes ou arguments dérivés de ce " cœur de dogme " négationniste (en me relisant je m'aperçois de ce que cet argument peut être apparenté au procès d'intention, mais j'assume ... pour l'instant. On verra où cela me mènera, quitte à faire marche arrière si les conséquences sont trop catastrophques ! Le procès d'intention est très courant dans les discours de " gôche ", voir : homophobie.) Vous savez aussi que je ne reproche pas à Marguerat d'être protestant comme vous l'avez suggéré en faisant quelque part une allusion à un " méchant protestant ". Je reproche plutôt à Marguerat de ne pas déclarer publiquement qu'il n'est pas ou plus protestant - car je ne vois pas du tout comment il pourrait être protestant ou même être " chrétien " avec un Evangile - selon lui - en charpie et complètement disqualifié. Comme vous le dites très bien, si telle est sa doctrine, un seuil minimal a été franchi et on se trouve hors du christianisme et c'est vrai qu'à l'égard de ce genre de système ma pensée est très négative. Je peux m'en expliquer aussi clairement.
2.- Votre premier mp, dérivait d'un de mes posts où je parlais " d'euphémismes " et vous aviez compris que je vous accusais, entre autres, d'intentions voilées ou cachées (je qui est effectivement très désagréable et même vicieux comme argument). Mais j'ai pu vous expliquer que ces " euphémismes ", ces formulations voilées sont celles de Marguerat et non les vôtres. Je pensais à " Les Evangiles sont une narration mais pas une histoire ", par exemple. Puis-je vous rappeler aussi que je vous ai dit déjà à deux reprises que je savais et que je croyais que vous ne nous accusiez pas d'imposture. Ceci dit, il faudra quand même expliquer - comment un " évangéliste " lambda ayant glissé une formule totalement inventée comme : " C'est ainsi que le Fils de l'homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. " (et toutes les formules où Jésus commence par " Je suis venu pour " " Le fils de l'homme est venu pour ... " d'après Marguerat) pourrait être autre chose qu'un imposteur - même avec les règles littéraires de l'époque. Je parle précisément de ce que l'approche déconstructive radicale et systématique dit - pas de vous, encore une fois. Ca va être assez subtile, je suppose ...
Je vais essayer de retrouver les passages de nos échanges pour vous re-situer mieux - et d'après moi (toujours ) - les circonstances de ce fil et mes intentions. A + !
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Bonjour, cher ami Roque,
Je vous ai déjà dit en MP, et le redis volontiers en public que je vous apprécie mais que, décidément notre dialogue est difficile, au vu de nos positions radicalement différentes.
Cela ne me dérange aucunement que vous fassiez votre croisade anti-Marguerat et développiez longuement vos arguments à ce sujet, et cela pourrait même m'intéresser si j'étais sûr que vous restiez objectif à son propos que votre fougue ne vous emporte pas à présenter les dangers logiques de sa démarche, plutôt que le fonds exact de sa pensée, c'est à dire que vous ne lui fassiez pas un procès à charge à outrance. Mais je n'en sais strictement rien, je ne le connais absolument pas, et il est possible que vous voyez juste. Je constate simplement que ce que vous m'en dites me présente une démarche intellectuelle fort peu équilibrée, très éloignée de ma position.
Vous aurez compris que ce qui m'irrite ce n'est pas qu'on me dise que je me trompe, ni même que mon esprit ou mon coeur soit fermé à certaines vérités.Je ne m'irrite pas non plus si vous me faites remarquer que mes propos sont contradictoires, ambigus ou confus. Non ce qui m'irrite, ce sont les passages où vous semblez m'associer à des démarches et des pensées qui ne sont pas miennes. Et s'il y a des points de rencontre réels , cela ne signifie en rien une similitude de la démarche.Vous avez certes clairement, à plusieurs reprises, dans votre réponse, dissocié , sur des points précis, nos deux démarches.
Mais l'ensemble du texte se présente quand même bel et bien comme une réponse à ma position et l'apparentant à la sienne: je vous cite:
Aussi, je vous demande, avant de poursuivre, de bien relire mes réponses,très claires, qui expriment assez mes profondes divergences avec la sienne (déjà les deux premiers points A et B que vous présentez comme fondamentaux et être à la base du reste, ensuite les deux phrases finales de ma réponse en D), et d'en prendre acte. Car en vous focalisant sur lui , vous ne semblez pas du tout m'avoir lu, ni compris ce que j'exprimais de plus essentiel dans nos échanges et qui n'apparaît nulle part ici. Je me répète donc, et j'insiste: voulez-vous bien relire attentivement mes réponses et en prendre acte ?
En conséquence, parlez de Marguerat tant que vous voulez, mais ne m'y associez pas.
Et, si vous voulez également, faites un deuxième fil indépendant pour parler de ma position, hors Marguerat, et me contredire tant que cela vous chante, car nous ne serons pas d'accord, mais sur mes propos ou mes contradictions réelles et non supposées, ni attribuées.
Dernier doute à lever: vous acceptez quand même une critique historique honnête des textes sacrés, suivie de la remise en place des résultats obtenus à la lumière de la foi ? Ou pas du tout ? Cela pourrait faire l'objet d'un autre fil.
J'espère que notre "engueulade" fraternelle s'apaisera par plus de clarté.
Je vous ai déjà dit en MP, et le redis volontiers en public que je vous apprécie mais que, décidément notre dialogue est difficile, au vu de nos positions radicalement différentes.
Cela ne me dérange aucunement que vous fassiez votre croisade anti-Marguerat et développiez longuement vos arguments à ce sujet, et cela pourrait même m'intéresser si j'étais sûr que vous restiez objectif à son propos que votre fougue ne vous emporte pas à présenter les dangers logiques de sa démarche, plutôt que le fonds exact de sa pensée, c'est à dire que vous ne lui fassiez pas un procès à charge à outrance. Mais je n'en sais strictement rien, je ne le connais absolument pas, et il est possible que vous voyez juste. Je constate simplement que ce que vous m'en dites me présente une démarche intellectuelle fort peu équilibrée, très éloignée de ma position.
Vous aurez compris que ce qui m'irrite ce n'est pas qu'on me dise que je me trompe, ni même que mon esprit ou mon coeur soit fermé à certaines vérités.Je ne m'irrite pas non plus si vous me faites remarquer que mes propos sont contradictoires, ambigus ou confus. Non ce qui m'irrite, ce sont les passages où vous semblez m'associer à des démarches et des pensées qui ne sont pas miennes. Et s'il y a des points de rencontre réels , cela ne signifie en rien une similitude de la démarche.Vous avez certes clairement, à plusieurs reprises, dans votre réponse, dissocié , sur des points précis, nos deux démarches.
Mais l'ensemble du texte se présente quand même bel et bien comme une réponse à ma position et l'apparentant à la sienne: je vous cite:
Roque a écrit: Et parlons de la méthode de la Formgeschichte ou de celle de Marguerat (ou de la vôtre) qui sont toutes apparentées.
Aussi, je vous demande, avant de poursuivre, de bien relire mes réponses,très claires, qui expriment assez mes profondes divergences avec la sienne (déjà les deux premiers points A et B que vous présentez comme fondamentaux et être à la base du reste, ensuite les deux phrases finales de ma réponse en D), et d'en prendre acte. Car en vous focalisant sur lui , vous ne semblez pas du tout m'avoir lu, ni compris ce que j'exprimais de plus essentiel dans nos échanges et qui n'apparaît nulle part ici. Je me répète donc, et j'insiste: voulez-vous bien relire attentivement mes réponses et en prendre acte ?
En conséquence, parlez de Marguerat tant que vous voulez, mais ne m'y associez pas.
Et, si vous voulez également, faites un deuxième fil indépendant pour parler de ma position, hors Marguerat, et me contredire tant que cela vous chante, car nous ne serons pas d'accord, mais sur mes propos ou mes contradictions réelles et non supposées, ni attribuées.
Dernier doute à lever: vous acceptez quand même une critique historique honnête des textes sacrés, suivie de la remise en place des résultats obtenus à la lumière de la foi ? Ou pas du tout ? Cela pourrait faire l'objet d'un autre fil.
J'espère que notre "engueulade" fraternelle s'apaisera par plus de clarté.
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
et un tammig/chouïa/un poco les points communs de vos caractères ?Yahia a écrit:décidément notre dialogue est difficile, au vu de nos positions radicalement différentes
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...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
-Ren- a écrit:
et un tammig/chouïa/un poco les points communs de vos caractères ?
j'avais déjà remarqué, ce qui me permet aussi de l'écouter.
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Yahia je vais essayer de tenir compte de votre désir que je reconnaisse les positions qui te sont propres :
A [Micro-unités indépendantes] : Non, pas prouvé.
C’est explicitement un postulat de la Formgeschichte et de Marguerat. Interprétation personnelle : 0%.
Conclusion rationnelle : l'existence des " micro unités " est patente. Leur indépendance complète - ce qui signifie " absence de tradition + absence de chaîne de transmission " - n'est pas prouvée. C'est l'incertitude sur les conditions et le processus de rédaction des Evangiles qui est le problème de fond. Il est rationnellement impossible de ne pas tenir compte de deux hypothèses simultanément : soit rédaction des Evangiles avant la destruction de Jérusalem (rencontre des apôtres + évangélistes : oui possible) et soit après 70 (rencontre des apôtres + évangélistes : non impossible).
B [Sous catégorie des biographie gréco-romaines] : Non, ils rigolent là ? (notez, on essaye le même coup avec le Coran).
Affirmation répétée – au moins - pour Mt, Mc et Lc dans l'ouvrage collectif de Marguerat. Interprétation personnelle : 0%.
Conclusion rationnelle : incertitude - avec des arguments pour la judéité prédominante de Mt et Jn (tendance moderne).
Le fait que Marguerat contredise Bultmann (écoles très proches … en principe) sur un point aussi capital montre qu’en matière de comparaison des styles, on frise le « caprice » ou la « posture d’école ». Cette contradiction sur un point clé de ce genre de question jette un doute sur l’objectivité et la capacité de « discrimination entre les styles » de ces approches critiques littéraires (Formgeschichte, etc …).
Rétrospectivement, il faut souligner que cette école qui revendique le statut d’approche historico-critique (donc : de critique du contexte historique et du style littéraire) n’a rien produit de probant sur le plan historique.
C [une narration, mais pas une histoire] : Exagéré
A ma grande honte, je dois avouer que la formule est de moi ! Interprétation personnelle : 100%.
Mais l’idée que le « récit évangélique » n’a aucune visée « historique » ou aucune visée de conter des faits réels est de Marguerat et des ses collègues. Ils la répètent inlassablement. Interprétation personnelle : 0%.
Conclusion rationnelle : les Evangiles sont certainement des récits à visée catéchétique ou apologétique. Mais cette visée est-elle exclusive de toute mémoire ? Comment être sûr - sans préjugé - qu'ils n'ont aucun lien avec des faits réels ? Il parait très exagéré effectivement de nier tout lien avec une quelconque réalité vécue - éventuellement même " historique ". Comme tenu des études sur le " Jésus historique " (nous en sommes à la " troisième quête " ...) la marge d'incertitude me semble encore très grande, ce qui n'empêche pas chacun d'abord ses préférences.
La question de fond est préciser au mieux - par des méthodes complémentaires, non exclusivement littéraires (qui ont des limites objectives) le lien et le degré de proximité entre les Evangiles et la réalité vécue / historique. La question est aussi de savoir quand et comment ont été établis les " témoignages " qui seraient à la base de certains " récits " évangéliques.
Je vais y ajouter ma propre estimation de chaque point, l'auto-évaluation de mon degré d'objectivité et la conclusion qui est actuellement « rationnelle » - pour moi (nous ne sommes pas dans le discours de " foi ", bien entendu !Yahia a écrit:… au vu de nos positions radicalement différentes.
… et cela pourrait même m'intéresser si j'étais sûr que vous restiez objectif à son propos …
Aussi, je vous demande, avant de poursuivre, de bien relire mes réponses, très claires, qui expriment assez mes profondes divergences avec la sienne […] et d'en prendre acte.
A [Micro-unités indépendantes] : Non, pas prouvé.
C’est explicitement un postulat de la Formgeschichte et de Marguerat. Interprétation personnelle : 0%.
- Spoiler:
Etat des arguments : l’existence des « micro-unités » est patente. Le découpage bien plus ancien du texte en versets retrouve souvent les articulations entre ces « micro-unités ». No comment.
Mais l’indépendance complète des « micro-unités », entre elles et à " l'origine ", doit être démontrée. Cette démonstration ne peut pas être tirée, juste de l’existence des « micro-unités ». Inversement, c’est insuffisant de dire que Marguerat ne repose que sur un postulat, il faut répondre à la question : « Comment s’est faite la composition des micro-unités et comment s’est fait le lien entre elles – aux différentes étapes de la rédaction ? ».
Je vois deux voies de réponse possibles. Dans l’approche par le texte araméen, Pierre Perrier donne une réponse lumineuse sur cette question de la rédaction, si elle est confirmée par les pairs … Cette théorie de Pierre Perrier permet de distinguer très délicatement le processus de témoignage des procédés rédactionnels - qui sont exclusivement ceux des rabbins du premiers siècle.
La réponse par l’approche par le texte grec ne m’est pas connue … mais il faudrait, au préalable, démontrer que les Evangiles ont pu être rédigés et édités avant 70 pour s’assurer qu’il y ait un lien possible et éventuel entre quelques témoins directs (Pierre et Paul meurent en 67-68). Des arguments existent contre « ce qui bloque rationnellement la datation cette édition des Evangiles « à après 70 ». Ce blocage rationnel dépend de plusieurs arguments faux :
- fausse impression de « prédiction » par Jésus de la destruction de Jérusalem +
- fausse traduction d’un texte clé d’Irénée sur la « mort » des Apôtres +
- fausse cohérence du modèle des deux sources (c'est au minimum un modèle à 4 sources et une source Q qui est un mélange de plusieurs " sous-sources " même pour Marguerat ...) +
- la théorie des deux sources établis le " dogme " que Marc a été écrit en premier et repousse mécaniquement les autres Evangiles à " après 70 ", en fait plusieurs arguments de critique interne fragilisent ce " dogme critique " : les 700 " accords mineurs " entre Mt et Lc et le fait que la source Q ne serait pas une source unique ... Marguerat, lui-même dit que la source Q nous serait parvenue sous " plusieurs versions " !
Pour moi, tous ces arguments (que je peux développer) sont très recevables – aussi recevables que les arguments de la thèse opposée. Enfin, à ma connaissance, la réponse rationnelle par l’approche par le texte grec (la quasi-totalité des exégètes) n’existe pas.
Conclusion rationnelle : l'existence des " micro unités " est patente. Leur indépendance complète - ce qui signifie " absence de tradition + absence de chaîne de transmission " - n'est pas prouvée. C'est l'incertitude sur les conditions et le processus de rédaction des Evangiles qui est le problème de fond. Il est rationnellement impossible de ne pas tenir compte de deux hypothèses simultanément : soit rédaction des Evangiles avant la destruction de Jérusalem (rencontre des apôtres + évangélistes : oui possible) et soit après 70 (rencontre des apôtres + évangélistes : non impossible).
B [Sous catégorie des biographie gréco-romaines] : Non, ils rigolent là ? (notez, on essaye le même coup avec le Coran).
Affirmation répétée – au moins - pour Mt, Mc et Lc dans l'ouvrage collectif de Marguerat. Interprétation personnelle : 0%.
- Spoiler:
Il existe un chapitre propre dans l’Introduction au Nouveau Testament (INT) ouvrage collectif dirigé par Marguerat qui envisage et compare de multiples possibilités de « style », mais en définitive à la fin de ce même chapitre, comme dans tous les autres commentaires aucune autre possibilité n’est reprise. Les autres possibilités – hors « culture hellénistique » - sont, de fait écartées, soit : style « sui generis » selon Bultmann (hypothèse non reprise), soit : élaboration rabbinique orale (clairement écartée).
Les « micro unités » écrites sont considéré comme l’unique produit de la « tradition orale » entendue par Marguerat comme un processus aléatoire du même genre que le « bouche à oreille ». Cette cristallisation de la parole parlée en parole écrite sans aucun processus antérieur identifiable est bien commode sur le plan de la théorie de Marguerat, mais s'apparente plus à une mythologie qu'à aucun processus humain connu. Interprétation personnelle : 0%.
Etat des arguments …. J’avoue que je ne vois pas l’intérêt de développer. Je ne sais pas si cette position est encore très défendue. A mon avis, on revient plutôt à chercher du côté d’un Jésus juif et de racines juives du christianisme : par exemple avec le troisième quête du « Jésus historique » ou dans l’Eglise catholique et chez les Juifs, même.
Conclusion rationnelle : incertitude - avec des arguments pour la judéité prédominante de Mt et Jn (tendance moderne).
Le fait que Marguerat contredise Bultmann (écoles très proches … en principe) sur un point aussi capital montre qu’en matière de comparaison des styles, on frise le « caprice » ou la « posture d’école ». Cette contradiction sur un point clé de ce genre de question jette un doute sur l’objectivité et la capacité de « discrimination entre les styles » de ces approches critiques littéraires (Formgeschichte, etc …).
Rétrospectivement, il faut souligner que cette école qui revendique le statut d’approche historico-critique (donc : de critique du contexte historique et du style littéraire) n’a rien produit de probant sur le plan historique.
C [une narration, mais pas une histoire] : Exagéré
A ma grande honte, je dois avouer que la formule est de moi ! Interprétation personnelle : 100%.
Mais l’idée que le « récit évangélique » n’a aucune visée « historique » ou aucune visée de conter des faits réels est de Marguerat et des ses collègues. Ils la répètent inlassablement. Interprétation personnelle : 0%.
- Spoiler:
Je dois reconnaître que la formule - comportant un jeu de mots (narration/histoire) - est de moi ! Interprétation personnelle : 100%. Je l’ai forgée sur le modèle de la formule de Marguerat : « la remémoration est une élaboration théologique » laquelle signifie que le travail (l’élaboration) est celui de l'intelligence et non celui de la mémoire. A ce premier glissement de sens s’ajoute un autre glissement de sens : l’élaboration « théologique » n’est pas un discours sur Dieu - comme on pourrait croire ! - mais il s’agit de la construction de l’image d’un faux dieu à partir d’un homme mort et enterré : Jésus.
Faut-il comprendre qu'en général la " théologie " serait en règle habituelle une fantaisie intellectuelle de ce genre ? Marguerat ne le précise pas. Mais on peut se poser la question ... J'avoue qu'il m’a fallu 3 ou 4 lectures pour finir par comprendre le sens déviant de cette formule sournoise. J’en veux - un peu - à Marguerat d’avoir eu tant de mal à comprendre que cette formule n’était finalement qu’un leurre !
Mais cette formule a une justification, et en substance c’est le point de vue de Marguerat. D’abord, la Formgeschichte ne traite les Evangiles que comme un « texte » ou un « récit ». Interprétation personnelle : 0%. C’est d’ailleurs un problème de fond de la méthode de la Formgeschichte : la question est de savoir comment l’analyse du choix d’opportunité du sujet d’un texte (l’ « intentio », en rhétorique) ou l'analyse de la stratégie de présentation d’un texte (la « dispositio », en rhétorique) pourraient prouver ou garantir la réalité d’un « fait historique ». C’est un point sur lequel nous reviendrons plus bas.
Ensuite, l’absence d’intention « historienne » des évangélistes est littéralement rabâchée par les trois des commentateurs (Mt, Mc, Lc) des Evangiles dans l’INT (le commentaire de Jean est un peu à part). C’est d’ailleurs, pour une part vrai. Bultmann a souligné, avec raison, l’intention catéchétique du texte évangélique. Les évangélistes « ne sont pas des journalistes », « ne sont pas des chroniste », ont resitué les récits dans « un cadre fictif », n’ont pas de souci « d’exactitude », etc … Les évangiles ne sont pas le reflet d’un Jésus mort dans la passé, mais seulement le reflet des préoccupations et la réponse aux questions actuelles des communautés de troisième génération ….
Mais de là à croire que les Evangiles ne sont que cette rien d'autre que cette intention catéchétique, il y a un pas que Bultmann - sans le dire explicitement - semble franchir ...
En effet, cette répétition sur le caractère " non historique " des Evangiles n'est contrebalancée par aucune considération pouvant équilibrer le propos : aucune considération sur le recueil éventuel de « témoignages » qui auraient pour être conservés (pas un mot, rien n’est pris en compte avant la mise par écrit des « micro-unités ») ou sur le travail de « remémoration » par exemple c’est-à-dire de restitution d’événements ou de paroles saisis par la mémoire (puisque tous les témoins oculaires sont morts …). Le plus saisissant est peut-être quand un des commentateurs de l'INT dit que les « évangélistes » n’auraient pas pour but de livrer une « information » et n’auraient eu qu’un but apologétique ! « Intention apologétique », je veux bien, mais que signifie par exemple qu’on parle ou qu’on prêche « pour ne pas informer » … ? Un peu surréaliste, non ?
Etat des arguments : la plupart des exégètes pensent également qu’une faible partie des Evangiles pourrait refléter des faits réels ou refléter des faits historiques. La différence fondamentale de chronologie entre les synoptiques (une année) et Jean (trois ans) oblige de toute façon à choisir un schéma chronologique ou l’autre.
Conclusion rationnelle : les Evangiles sont certainement des récits à visée catéchétique ou apologétique. Mais cette visée est-elle exclusive de toute mémoire ? Comment être sûr - sans préjugé - qu'ils n'ont aucun lien avec des faits réels ? Il parait très exagéré effectivement de nier tout lien avec une quelconque réalité vécue - éventuellement même " historique ". Comme tenu des études sur le " Jésus historique " (nous en sommes à la " troisième quête " ...) la marge d'incertitude me semble encore très grande, ce qui n'empêche pas chacun d'abord ses préférences.
La question de fond est préciser au mieux - par des méthodes complémentaires, non exclusivement littéraires (qui ont des limites objectives) le lien et le degré de proximité entre les Evangiles et la réalité vécue / historique. La question est aussi de savoir quand et comment ont été établis les " témoignages " qui seraient à la base de certains " récits " évangéliques.
Dernière édition par Roque le Lun 8 Déc - 20:18, édité 1 fois
Roque- Messages : 5064
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Et donc aussi clairement que votre interprétation personnelle sur Marguerat est de 0 %;ma divergence avec lui frôle les 100 %.Sommes-nous bien d'accord là ?
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Oui, sur les points A et B vous êtes en opposition frontale avec Marguerat. Je confirme sans réserve. Mais vous pouvez constater que sur certains points mon opinion - sur un mode que je souhaite " rationnel " - est plus nuancée que la vôtre.Yahia a écrit:Et donc aussi clairement que votre interprétation personnelle sur Marguerat est de 0 %;ma divergence avec lui frôle les 100 %.Sommes-nous bien d'accord là ?
Je peux considérer que votre opposition est d'un niveau très élevé pour le point C. Mais pour comprendre mon propos, il faudra que je finisse avec les autres points : D à G. C'est là qu'on trouve des subtilités importantes et le plus d'interprétation personnelle de ma part ... (à suivre).
Roque- Messages : 5064
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
D [remémoration / élaboration théologique] : Oui, certainement, mais le terme « forgé » est de trop. L’élaboration est sincère et peut être peut être soit erronée, soit véridique. Cette véracité éventuelle ne relevant d'ailleurs pas de la lecture d'une critique historique, elle est d'un tout autre ordre. Ne pas voir que c'est d'un autre ordre, c'est ignorer ce que la foi ne se démontre pas mathématiquement.
En relisant Marguerat, je m’aperçois que je n’avais pas compris. Il dit en substance que « l’anamnèse christologique » de la liturgie est le rappel de l’événement de Jésus, dans le passé, une actualisation de cet évènement et de sa grâce de libération, dans le présent. Cette « anamnèse chrétienne » fonctionnerait donc tout comme « l’anamnèse pascale » de la liturgie juive de la Pâque.
Il ne s’agit pas de restituer la mémoire des faits et gestes de la vie de Jésus, mais plutôt de « faire mémoire » de Jésus. Interprétation personnelle : 100% (erreur).
QU’EST-CE QU’UNE APPROCHE « APPARENTEE » A LA FORMGESCICHTE ?
Malgré ma regrettable erreur de compréhension, c’est l’occasion de poser la question clé : l’authenticité ou non du texte des Evangiles. La question de l’authenticité ou de la « vérité » des Evangiles ne concerne pas le " fond " ou le contenu de sens, mais seulement son contexte, son cadre géographique et temporel : « historique ou non », comme sa narration : « geste et paroles de Jésus, Lui-même ou non de Jésus, mais " à propos de Jésus " ou " à la mode de Jésus " inventés à la manière d'un roman».
C’est – je pense – cette école de la Formgeschichte, au début du 20ème siècle, qui a lancé cette approche qui consiste à fragmenter et à discriminer les versets un par un. Le but et la mission que se donne cette approche (voir l'encadré ci-dessous) est de juger de l’authenticité présumée de chaque verset pour conclure en éliminant les versets jugés inauthentiques. Cette approche est rendue possible par le cumul et la convergence des postulats et du questionnement méthodique de cette école :
1. Postulat des « micro-unités » indépendantes pouvant être librement dissociées les unes des autres dans la louable intention de leur rendre leur indépendance d'origine ;
2. Doute sur le cadrage temporal et géographique. Le cadre extérieur des évangiles peut être considéré comme un arrangement rédactionnel, une création tardive des évangélistes (voir l'encadré ci-dessous) ;
3. Postulat de la rédaction à la « gréco-romaine », « l’évangéliste » étant une sorte de sophiste chrétien, c’est-à-dire un « philosophe d’agrément » élaborant des récits au gré des « besoins » et des questionnements de son auditoire ;
4. Doute sur la fiabilité de la rédaction à distance des évènements – à la troisième génération sur l’écrit exclusivement - sans aucun témoin, sans aucun support de remémoration – au sens d’un effort de mémoire pour raconter des événements réels. Rationnellement on peut donc supposer un fort pourcentage d’élaboration romanesque, c’est-à-dire de fiction.
Ce qui est « doute méthodique » (légitime) au niveau du questionnement devient un système de fait – explicité ou non – à partir du moment où le cumul et la convergence des postulats et questions semblent suffisants pour autoriser à pratiquer l'opération suivante qui est la fragmentation et la disqualification d’une partie plus ou moins importante des Evangiles.
C'est là précisément que se fait la transition entre " doute méthodique " et " système " - explicité ou non. L'unilatéralisme - qui est encore une autre chose (très pratiqué par Marguerat) aide fortement à entrer dans l'esprit de système, bien évidemment. Cette approche apparenté à la Formgeschichte est une tendance très prévalente dans la recherche « moderne » sur les Evangiles.
A titre d’information, les exégètes participant au « Jésus Seminar » (troisième quête) ont voté (!) sur l’authenticité de versets des Evangiles. En moyenne, le groupe a jugé que 15% des versets étaient authentiques (et les variations individuelles n’ont pas été indiquées, il est possible que pour certains ce soit 25% et pour d’autres 5%).
De notre point de vue, les approches qui s’inspirent des postulats et doutes - ci-dessus - pour passer à l'étape suivante qui consiste à éliminer - ou disqualifier au nom de la non-fiabilité - des versets et parties étendues des Evangiles, jugées inauthentiques, sont apparentées à l’approche de la Formgeschichte – même sans adhésion formelle à cette école ou à la pensée de Bultmann ou de Marguerat.
IMPOSTURE OU PAS IMPOSTURE
Un exemple parmi d'autres ...
Marguerat, juge que ce qu’il appelle les paroles relatives au Christ sont une « forme littéraire » en soi. Soit, passons ! Il juge que ce sont des
Donc toutes les affirmations introduites par « je suis venu » ou par « le Fils de l’homme est venu » sont suspectes d’être – souvent - des ajouts de la communauté et de n‘être – souvent - pas des paroles authentiques de Jésus, comme :
- « je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs. » (Mc 2, 17) ; et/ou
- « Car le Fils de l'homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. " (Mc 10, 45) ; et/ou
- " N'allez pas croire que je sois venu abroger la Loi ou les Prophètes: je ne suis pas venu abroger, mais accomplir. " (Mt 5, 17).
Cette accusation d’imposture est effectivement une interprétation personnelle 100%
Conclusion rationnelle : Je me suis trompé sur ce que dit Marguerat.
Mais le critère crucial est posé : quand le « doute méthodique » - parfaitement légitime – se convertit en système (explicité ou de fait) tendant à fragmenter les Evangiles et à en disqualifier une partie plus ou mois importante alors considérée comme " inauthentiques ", on entre dans une approche apparentée à la Formgeschichte. Toute approche qui retient un principe général de suspicion sur les Evangiles - (ou un autre ouvrage) - s'appuyant sur deux idées conjointes :
- d'abord l'idée que le cadre spatio-temporel des Evangiles est pour l'essentiel rédactionnel (il y a des cas où c'est inévitable : par exemple les collections de paraboles) ;
- ensuite : l'autre idée que les gestes et paroles rapportés dans les Evangiles sont pour la plupart des inventions romancées - sans rapport avec les faits réels
appartiennent également à cette approche apparentée à la Formgeschichte.
La Formgeschichte est une forme du rationalisme appliqué aux Evangiles. Etat donné que depuis un siècle, on n'a pas trouvé mieux la rationaliste aura tendance à puiser dans cette réserve d'idées pour beaucoup très percutantes (avec la nouvel éclairage de Bultmann, Ernest Renan paraît très littéraire, mais complètement dépassé).
Cette approche " apparentée " à la Formgeschichte est d'ailleurs très facile à repérer parce qu'elle tend à porter le débat non surtout sur l'interprétation du texte - comme c'est traditionnel -, mais plutôt sur son exactitude des faits et gestes et sur sa fiabilité et général. Cette argumentation qui jette très efficacement le soupçon sur le contenu des Evangiles oblige à interrompre le débat exégétique proprement dit pour y répondre. Il faut revenir à des questions de méthode. Cela oblige à revenir aux préalables de l'interprétation ... et c'est ce que je tente de faire avec ce sujet !
E [divinité de Jésus : retouches postpascales] : Vraisemblablement, mais pas sûr. Mon jugement est en suspens. L’injure d’une imposture n’entre certainement pas dans ma pensée.
J’ai cité un des passages du livre de Marguerat sur ce point. Interprétation personnelle : 0%.
Etat des arguments : Le doute méthodique (légitime) –souvent déjà converti en système – explicite ou de fait – est largement prédominant dans la recherche sur Jésus, aujourd’hui.
La conclusion rationnelle : Il est rationnellement impossible de ne pas tenir compte de deux hypothèses simultanément : ces affirmations de Jésus sur Lui-même sont anté-pascale ou ces affirmations de Jésus sur Lui-même sont post-pascales.
F [Jésus historique inaccessible à partir du texte des Evangiles] : -Non, ce n'est pas inaccessible.
C’est pourtant bien ce que soutient la Formgeschichte. C’est d’ailleurs un peu un paradoxe : la Formgeschichte qui prétend retrouver le texte d'origine, doit finalement avouer qu'il n'a que du texte (voir ma remarque sur l'intentio et la dispositio plus haut) et que Jésus est finalement inaccessible par cette approche ... (voir spoiler). Je trouve cela finalement assez marrant
G [le témoignage de l’Eglise repose sur une imposture] : C’est du délire.
On revient ici au point E (retouches post-pascales).
C'est l'approche dominante sur ce sujet aujourd'hui. Il n'y a rien de péjoratif à cela dans mon esprit.
En relisant Marguerat, je m’aperçois que je n’avais pas compris. Il dit en substance que « l’anamnèse christologique » de la liturgie est le rappel de l’événement de Jésus, dans le passé, une actualisation de cet évènement et de sa grâce de libération, dans le présent. Cette « anamnèse chrétienne » fonctionnerait donc tout comme « l’anamnèse pascale » de la liturgie juive de la Pâque.
Il ne s’agit pas de restituer la mémoire des faits et gestes de la vie de Jésus, mais plutôt de « faire mémoire » de Jésus. Interprétation personnelle : 100% (erreur).
- Spoiler:
Il reste que l’ouvrage collectif dirigé par Marguerat, ne dit absolument rien d’un éventuel travail de « remémoration », c’est-à-dire de rappel par la mémoire des faits et gestes de Jésus pour documenter la rédaction des Evangiles. La question de la « réalité » ou non de la Résurrection est très soigneusement contournée, il faut le noter (Cf. : l’extrait ci-dessous).
Par contre, deux idées très proches sont sans cesse répétées : 1. Les Évangiles sont le reflet - non d'un auteur - mais des préoccupations des communautés et 2. Les « évangélistes » ont visé uniquement le prosélytisme des premières communautés. Ces deux idées font que – d’après Marguerat - les Evangiles pourraient avoir été rédigés exclusivement à partir de fameuses « micro-unités », c’est-à-dire à partir d’écrits - sans aucune assistance de la mémoire de fait réels – directement transmis par des témoins ou indirectement transmis par la collecte de « témoignages » fixés et transmis oralement ou déjà mis par écrit. Le contexte supposé de la rédaction des Evangiles est celui de la troisième génération, « l’évangéliste » travaillant seul – à la matière des écrivains modernes.
Extrait de l’ouvrage de Marguerat (page 21-22)
«Marguerat a écrit: Les premiers chrétiens n‘ont pas cherché à archiver les paroles et les faits et gestes du Nazaréen à la manière d’un chroniste, fixant le souvenir d’un passé révolu. La raison en est simple : à leurs yeux, Jésus n’était pas qu’un illustre défunt. La foi de Pâques les conduisant à croire que Celui qui avait un jour arpenté les chemins de Galilée était aussi le Seigneur présent au milieu de la communauté.
[…]
Dans la foi d’Israël, l’anamnèse pascale revêt cette même double fonction : d’une part la liturgie pascale rappelle les évènements anciens de l’exode, d’autre part elle en actualise les effets au point de rendre les fidèles participants de l’évènement de libération. Pareillement, l’anamnèse christologique vise à remémorer le passé tout en le dotant d’un statut de vérité dans le présent. Dans ce processus, les prophètes chrétiens ont joué un rôle décisif de gardiens de la tradition de Jésus et de garant de son actualisation ».
QU’EST-CE QU’UNE APPROCHE « APPARENTEE » A LA FORMGESCICHTE ?
Malgré ma regrettable erreur de compréhension, c’est l’occasion de poser la question clé : l’authenticité ou non du texte des Evangiles. La question de l’authenticité ou de la « vérité » des Evangiles ne concerne pas le " fond " ou le contenu de sens, mais seulement son contexte, son cadre géographique et temporel : « historique ou non », comme sa narration : « geste et paroles de Jésus, Lui-même ou non de Jésus, mais " à propos de Jésus " ou " à la mode de Jésus " inventés à la manière d'un roman».
C’est – je pense – cette école de la Formgeschichte, au début du 20ème siècle, qui a lancé cette approche qui consiste à fragmenter et à discriminer les versets un par un. Le but et la mission que se donne cette approche (voir l'encadré ci-dessous) est de juger de l’authenticité présumée de chaque verset pour conclure en éliminant les versets jugés inauthentiques. Cette approche est rendue possible par le cumul et la convergence des postulats et du questionnement méthodique de cette école :
1. Postulat des « micro-unités » indépendantes pouvant être librement dissociées les unes des autres dans la louable intention de leur rendre leur indépendance d'origine ;
2. Doute sur le cadrage temporal et géographique. Le cadre extérieur des évangiles peut être considéré comme un arrangement rédactionnel, une création tardive des évangélistes (voir l'encadré ci-dessous) ;
3. Postulat de la rédaction à la « gréco-romaine », « l’évangéliste » étant une sorte de sophiste chrétien, c’est-à-dire un « philosophe d’agrément » élaborant des récits au gré des « besoins » et des questionnements de son auditoire ;
4. Doute sur la fiabilité de la rédaction à distance des évènements – à la troisième génération sur l’écrit exclusivement - sans aucun témoin, sans aucun support de remémoration – au sens d’un effort de mémoire pour raconter des événements réels. Rationnellement on peut donc supposer un fort pourcentage d’élaboration romanesque, c’est-à-dire de fiction.
Ce qui est « doute méthodique » (légitime) au niveau du questionnement devient un système de fait – explicité ou non – à partir du moment où le cumul et la convergence des postulats et questions semblent suffisants pour autoriser à pratiquer l'opération suivante qui est la fragmentation et la disqualification d’une partie plus ou moins importante des Evangiles.
C'est là précisément que se fait la transition entre " doute méthodique " et " système " - explicité ou non. L'unilatéralisme - qui est encore une autre chose (très pratiqué par Marguerat) aide fortement à entrer dans l'esprit de système, bien évidemment. Cette approche apparenté à la Formgeschichte est une tendance très prévalente dans la recherche « moderne » sur les Evangiles.
A titre d’information, les exégètes participant au « Jésus Seminar » (troisième quête) ont voté (!) sur l’authenticité de versets des Evangiles. En moyenne, le groupe a jugé que 15% des versets étaient authentiques (et les variations individuelles n’ont pas été indiquées, il est possible que pour certains ce soit 25% et pour d’autres 5%).
De notre point de vue, les approches qui s’inspirent des postulats et doutes - ci-dessus - pour passer à l'étape suivante qui consiste à éliminer - ou disqualifier au nom de la non-fiabilité - des versets et parties étendues des Evangiles, jugées inauthentiques, sont apparentées à l’approche de la Formgeschichte – même sans adhésion formelle à cette école ou à la pensée de Bultmann ou de Marguerat.
IMPOSTURE OU PAS IMPOSTURE
Un exemple parmi d'autres ...
Marguerat, juge que ce qu’il appelle les paroles relatives au Christ sont une « forme littéraire » en soi. Soit, passons ! Il juge que ce sont des
(je ne discute même pas son idée, qui suppose « bien évidemment » que Jésus n‘a pas pu avoir Lui-même cette conscience …. Passons !).Marguerat a écrit:" formulations [qui] remontent souvent à la communauté chrétienne, car elles présupposent un examen rétrospectif de l'œuvre achevée de Jésus. " (INT page 24)
Donc toutes les affirmations introduites par « je suis venu » ou par « le Fils de l’homme est venu » sont suspectes d’être – souvent - des ajouts de la communauté et de n‘être – souvent - pas des paroles authentiques de Jésus, comme :
- « je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs. » (Mc 2, 17) ; et/ou
- « Car le Fils de l'homme est venu non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour la multitude. " (Mc 10, 45) ; et/ou
- " N'allez pas croire que je sois venu abroger la Loi ou les Prophètes: je ne suis pas venu abroger, mais accomplir. " (Mt 5, 17).
Cette accusation d’imposture est effectivement une interprétation personnelle 100%
Cependant, Yahia, malgré vos tentatives d’explication, je ne comprends pas. Je pense que dire « ce n‘est pas vraiment une invention, ils y ont peut-être cru de bonne foi » n‘est une explication ni claire, ni recevable. Il faudrait m’expliquer comment ces ajouts des « évangélistes » - éventuellement très nombreux et extensifs - pourraient être autre chose que la volonté de « faire passer Jésus pour quelqu’un qu’Il n’est pas ». Il y a - si je puis dire - une " objectivité " de l'imposture, non du point de vue de la subjectivité du trompeur, mais du point de vue de celui qui est trompé !Yahia a écrit:L’élaboration est sincère et peut être peut être soit erronée, soit véridique.
- Spoiler:
Il faudrait m’expliquer comment la supposition de Marguerat (pas la vôtre) – qui touche très largement au contenu de foi central des Evangiles – n‘est pas une accusation de « faire passer Jésus pour quelqu’un qu’Il n’est pas » – c’est-à-dire une accusation d’imposture.
Je pense aussi qu’à cette époque dire qu’un homme s’était relevé des morts ou qu'il a marché sur l'eau, alors que ce n’était pas vrai était bien perçu pour ce que c’est : une imposture. Cela n'entraînait qu'incrédulité et raillerie comme on peut le voir avec Celse. Je n‘ai pas de raison de croire que les anciens voyaient les choses autrement que nous. Un mensonge enveloppé dans une élégante figure de style restait un mensonge … et c'est encore le cas aujourd'hui, sauf pour plus malin que moi sans doute. L'Evangile de Matthieu témoigne, à mo avis, de cette compréhension des choses sur l'imposture :
« Donne donc l'ordre que l'on s'assure du sépulcre jusqu'au troisième jour, de peur que ses disciples ne viennent le dérober et ne disent au peuple: " Il est ressuscité des morts. " Et cette dernière imposture serait pire que la première. » (Mt 27, 64)Selon les auteurs de la Formgeschichte, il faut avant tout se défaire de l’idée que les évangiles sont des œuvres littéraires, empreintes d’une unité organique, émanent de témoins oculaires ou d’auteurs directement informés par ces témoins : il faut les considérer comme des écrits populaires. Ce genre d’écrit se caractérise, en premier lieu, par la dépendance étroite du compilateur à l’égard de la tradition dont il reçoit toute sa matière. Une seconde différence entre ces écrits infra-littéraires et l’œuvre littéraire proprement dite est le caractère anonyme de la présentation et la négligence complète de topographie et de chronologie : les indications de temps et de lieu en effet commandées par les besoins du récit en sont, par conséquent, arbitraires. Cette seconde note n’est d’ailleurs qu’une conséquence de la dépendance servile du compilateur à l’égard de la tradition, écrite ou orale. En effet, cette tradition, du moins dans son état primitif, ne charrie pas d’agglomérats : elle se compose de petites unités isolée ou « péricopes ». Ces péricopes valent chacune pour elle-même, ont circulé de bouche en bouche avant de se grouper en cycles plus ou moins considérables, et avant d’être enchâssés par les évangélistes dans la trame d’un texte suivi. Le cadre extérieur des évangiles doit donc être considéré come un arrangement rédactionnelle, une création tardive des évangélistes. Il faut le démonter pour restituer leur autonomie primitive aux différents morceaux, à présent réunis et cimentés dans la mosaïque des évangiles.
Une fois brisé ce cadre artificiel, ce sera une des taches de la Formgeschichte de ranger en catégories les petites unités littéraires. Cette classification en catégories est imposée d’une certaine manière par le donné évangélique, comme par exemple, la division fondamentale en paroles et faits. Elle s’inspire en outre des analogies des analogies littéraires juive et grecque : la nomenclature même des formes est empruntée au vocabulaire philologique.
(Source Le résurrection de Jésus dans l’apologétique des 50 dernières années. P. De Haes. 1953. Page 166)
Conclusion rationnelle : Je me suis trompé sur ce que dit Marguerat.
Mais le critère crucial est posé : quand le « doute méthodique » - parfaitement légitime – se convertit en système (explicité ou de fait) tendant à fragmenter les Evangiles et à en disqualifier une partie plus ou mois importante alors considérée comme " inauthentiques ", on entre dans une approche apparentée à la Formgeschichte. Toute approche qui retient un principe général de suspicion sur les Evangiles - (ou un autre ouvrage) - s'appuyant sur deux idées conjointes :
- d'abord l'idée que le cadre spatio-temporel des Evangiles est pour l'essentiel rédactionnel (il y a des cas où c'est inévitable : par exemple les collections de paraboles) ;
- ensuite : l'autre idée que les gestes et paroles rapportés dans les Evangiles sont pour la plupart des inventions romancées - sans rapport avec les faits réels
appartiennent également à cette approche apparentée à la Formgeschichte.
La Formgeschichte est une forme du rationalisme appliqué aux Evangiles. Etat donné que depuis un siècle, on n'a pas trouvé mieux la rationaliste aura tendance à puiser dans cette réserve d'idées pour beaucoup très percutantes (avec la nouvel éclairage de Bultmann, Ernest Renan paraît très littéraire, mais complètement dépassé).
Cette approche " apparentée " à la Formgeschichte est d'ailleurs très facile à repérer parce qu'elle tend à porter le débat non surtout sur l'interprétation du texte - comme c'est traditionnel -, mais plutôt sur son exactitude des faits et gestes et sur sa fiabilité et général. Cette argumentation qui jette très efficacement le soupçon sur le contenu des Evangiles oblige à interrompre le débat exégétique proprement dit pour y répondre. Il faut revenir à des questions de méthode. Cela oblige à revenir aux préalables de l'interprétation ... et c'est ce que je tente de faire avec ce sujet !
- Spoiler:
Pour moi, les arguments qui président à cette opération de fragmentation et de disqualification des Evangiles présente trois grands traits :
- Elle repose sur de nombreux postulats – par définition – non démontrés ;
- Elle bâtit des dilemmes à partir d’éléments d’appréciation souvent ténus, voire très subjectifs ;
- Elle est globale : tous les versets des Evangiles – pratiquement sas exception – sont questionnables (processus sans fin qui tend à éteindre tout débat, en fait …).
En un mot, cette approche tranche entre alternatives qui « rationnellement » sont, en fait, indécidables.
E [divinité de Jésus : retouches postpascales] : Vraisemblablement, mais pas sûr. Mon jugement est en suspens. L’injure d’une imposture n’entre certainement pas dans ma pensée.
J’ai cité un des passages du livre de Marguerat sur ce point. Interprétation personnelle : 0%.
Etat des arguments : Le doute méthodique (légitime) –souvent déjà converti en système – explicite ou de fait – est largement prédominant dans la recherche sur Jésus, aujourd’hui.
La conclusion rationnelle : Il est rationnellement impossible de ne pas tenir compte de deux hypothèses simultanément : ces affirmations de Jésus sur Lui-même sont anté-pascale ou ces affirmations de Jésus sur Lui-même sont post-pascales.
F [Jésus historique inaccessible à partir du texte des Evangiles] : -Non, ce n'est pas inaccessible.
C’est pourtant bien ce que soutient la Formgeschichte. C’est d’ailleurs un peu un paradoxe : la Formgeschichte qui prétend retrouver le texte d'origine, doit finalement avouer qu'il n'a que du texte (voir ma remarque sur l'intentio et la dispositio plus haut) et que Jésus est finalement inaccessible par cette approche ... (voir spoiler). Je trouve cela finalement assez marrant
- LA FORMGESCHICHTE, UN JEU INTELLECTUEL SANS AUTRE OBJECTIF QUE LUI-MEME ?:
Finalement cette Formgeschichte me fait l'impression d'un décryptage qui se perd dans les subtilités de son décryptage, un jeu de masques, une mise " en abyme " sans fin, sans fond, un jeu de dupes - le décrypteur état son propre dupe ... ! C'est l'histoire du décryptage d'une imposture par un imposteur qui s'ignore comme tel !
- Spoiler:
- Parmi ces tendances les auteurs de la Formgeschichte n’énumère point la préoccupation historique. Au contraire, ils l’excluent résolument : à leur avis les différents facteurs qui ont modifié, voire engendré la tradition, ne sont pas seulement indifférents à l’égard de l’histoire : ils lui sont nettement opposés. Ainsi donc la communauté forme l’écran qui nous sépare de Jésus. Et si elle nous présente quand même une image du Christ, ce n’est pas comme un miroir fidèle, mais comme un prisme qui réfracte et décompose la lumière de la réalité objective en des couleurs variées ; ces couleurs sont les différents aspects sous lesquels les premiers chrétiens ont exprimé et interprété la figure de leur Maître. D’après la Formgeschichte Schule, le Jésus Historique se dérobe à nos investigations : nous n’atteignons de la communauté chrétienne.
La résurrection de Jésus dans l'apologétique des 50 dernières années Page 171
Vous voudrez bien m'expliquer " ce n'est pas une invention " ... franchement je ne comprends pas du tout. Si cela n'a pas eu lieu, c'est nécessairement une invention, non ?Yahia a écrit:Pour la Résurrection ce n'est pas une "invention", donc pas un mensonge. Cela peut être une vérité ou une erreur.
Là c'est très bien vu. Mais Marguerat en détruisant le texte même des Evangiles fait bien plus grave. Et il le fait de l'intérieur de l'Eglise et c'est pourquoi je le traitais de " faux frère ". Un " faux frère " qui diffuse le poison le plus toxique que je connaisse contre la foi chrétienne. Ce Marguerat a beaucoup de notoriété internationale en tant qu'enseignant " chrétien ". Je lui reproche de n'avoir pas l'honnêteté de dire ouvertement qu'il n'est plus du tout " chrétien " depuis longtemps. Je ne lui reproche pas d'être protestant (comme vous l'avez suggéré), car pour moi les Eglises protestantes sont chrétiennes authentiquement, mais lui ... il est parti beaucoup trop loin dans un no man's land de la pensée qui n'appartient qu'à lui.Yahia a écrit:Mais celui qui dit que c'est une invention ou une erreur ne peut plus s'appeler chrétien: c'est là le point de rupture à mon sens
G [le témoignage de l’Eglise repose sur une imposture] : C’est du délire.
On revient ici au point E (retouches post-pascales).
Je ne vous ai pas accusé de ça. Mais vous avez seulement une approche apparentée à la Formgeschichte dans le sens défini ci-dessus (voir le spoiler). Quant à Marguerat, il n'est qu'une forme systématique hyper-rationnelle de cette approche, mais reposant sur de nombreux postulats. Particulièrement " hard " !Yahia a écrit:Conclusion: vous n'arriverez pas à me mettre l'étiquette de Marguerat sur le front,
C'est l'approche dominante sur ce sujet aujourd'hui. Il n'y a rien de péjoratif à cela dans mon esprit.
- TIRE DES EVANGILES PAS HISTORIQUES ?:
- Yahia a écrit:Je pense ensuite que les positions extrêmes reflètent des partis-pris et non une réflexion sereine sur la question.
Qu'une très grande partie des évangiles soient des "interprétations" an-historiques des croyants ultérieurs ( et non des "inventions") me paraît indubitable.
Que cela empêcherait toute possibilité de s'approcher des fait historiques me semble très abusif et un parti-pris idéologique peu intelligent. Ce texte peut parfaitement convenir, avec l'éclairage de ce que nous connaissons par ailleurs de cette époque ,à une approche prudente de certains faits historique.
Mais je pense également que l'historicité de la plupart de paroles mises dans la bouche de Jésus est loin d'être attestée, souvent très douteuse.
Roque- Messages : 5064
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Roque a écrit:Yahia a écrit:L’élaboration est sincère et peut être peut être soit erronée, soit véridique.
Cependant, Yahia, malgré vos tentatives d’explication, je ne comprends pas. Je pense que dire « ce n‘est pas vraiment une invention, ils y ont peut-être cru de bonne foi » n‘est une explication ni claire, ni recevable. Il faudrait m’expliquer comment ces ajouts des « évangélistes » - éventuellement très nombreux et extensifs - pourraient être autre chose que la volonté de « faire passer Jésus pour quelqu’un qu’Il n’est pas ». Il y a - si je puis dire - une " objectivité " de l'imposture, non du point de vue de la subjectivité du trompeur, mais du point de vue de celui qui est trompé !
C'est très visiblement un de nos points d'achoppements, qui résulte peut-être de l'adoption de votre part d'une lecture inadéquate, très moderne et réductrice, de textes, écrits dans un autre temps et un autre contexte. Il n'y a a pas de trompés, ni de trompeurs. Il y a croyants, témoignant, en sincérité, selon leurs modalités, et auditeurs recevant le message selon les mêmes modalités et acceptant ou refusant le témoignage . Une lecture actuelle analysant le texte selon les critères d'un discours super-rationnaliste contemporain est complètement anachronique, et aberrante, et historiquement, et pour le sens.
Je m'en expliquerai plus loin
Par ailleurs, on peut émettre des doutes sur "l'historicité" d'une citation et d'un fait précis, sans avoir l'objectif de "discréditer" historiquement l'ensemble du témoignage, ainsi que vous le présentez. Ce sont vos expressions qui prêtent à Margerat « des insinuations ,ou des sous-entendus, toutes sortes d’intentions cachées et pernicieuses qui m’agacent. En tout cas, ce n’est pas comparable à ma démarche.J’ajoute que le fonds de ma pensée est que, même si une citation n'est pas « historique", cela ne signifie nullement qu’elle n’est qu’elle n'est pas « vraie".
Enfin, très clairement, je mets effectivement en doute très souvent l'autorité d'une citation de Jésus, précise et isolée dans le texte lorsqu'elle sort comme argument »convainquant ».Je ne suis jamais certain que tel ou tel propos isolé attribué à Jésus, aie été prononcé par lui, de fait. Mais je ne nie aucunement que l’on puisse , de l’essentiel des textes, se faire une idée du Jésus historique. Je ne crois effectivement pas à sa nature divine, c’est également très clair. Mais cela n'empêche que je ne mets pas en doute l'authenticité du témoignage lui-même, ni d'essayer de rece-voir la vérité de l'ensemble.Le sens et la véracité du témoignage ne dépendent ni de "l'historicité" contestable de chacune des parties du discours, ni ....de moi-même. La démarche de vouloir retrouver quel ou quelle parole isolée serait "historique", en remontant aux micro-unités me paraît totalement absurde.. ce qu’il faut considérer, ce ne sont pas les petits morceaux isolés, mais la manière dont ils ont été reçus pensés, médités , et transmis oralement- je ne vois aucune prise en compte sérieuse de la transmission orale dans cette analyse caricaturale .Et je ne dirais pas, comme d’aucuns, par je ne sais quelle paresse ou a-priori intellectuel- que la tradition communautaire chrétienne ferait « obstacle » entre nous et le Jésus historique.Au contraire elle est là comme un témoignage vivant, à prendre en compte même si nous - rationellement— devons la recevoir « cum grand salis ». Donc contrairement à ces gens, j'estime que le témoignage chrétien des évangile est une de nos principales sources qui permet de retrouver le Jésus historique.
Roque a écrit:
QU’EST-CE QU’UNE APPROCHE « APPARENTEE » A LA FORMGESCICHTE ?
C’est – je pense – cette école de la Formgeschichte, au début du 20ème siècle, qui a lancé cette approche qui consiste à fragmenter et à discriminer les versets un par un. Le but et la mission que se donne cette approche (voir l'encadré ci-dessous) est de juger de l’authenticité présumée de chaque verset pour conclure en éliminant les versets jugés inauthentiques.
Démarche que je trouve particulièrement absurde et que je ne partage donc pas du tout. Bien sûr, lorsque vous mêle citez un verset particulier pour me convaincre de l'une de vos thèse théologiques, je répliquerai que je ne suis pas sûr que ce verset aie bien été prononcé par Jésus. Et, globalement, vous ne pourrez ni me prouver qu'il est vrai ni moi qu'il est faux. Mais ce petit jeu-là est vain. Cela ne m'empêche pas de penser que les évangiles sont à considérer comme un témoignage global, à interpréter aussi bien sur la plan historique que spirituel dans sa globalité.Et découper en petits osselets isolés, même au niveau historique, même au niveau d'un analyse textuelle, (et combien plus au niveau théologique) me paraît particulièrement aberrant.
c'est moiRoque a écrit:
Ce qui est « doute méthodique » (légitime) au niveau du questionnement
c'est pas moiRoque a écrit:
devient un système de fait – explicité ou non – à partir du moment où le cumul et la convergence des postulats
Un vote ! Cela en dit long sur leur sérieuxRoque a écrit:
A titre d’information, les exégètes participant au « Jésus Seminar » (troisième quête) ont voté (!) sur l’authenticité de versets des Evangiles. .
Roque a écrit:
Cette approche " apparentée " à la Formgeschichte est d'ailleurs très facile à repérer parce qu'elle tend à porter le débat non surtout sur l'interprétation du texte - comme c'est traditionnel -, mais plutôt sur son exactitude des faits et gestes et sur sa fiabilité et général. Cette argumentation qui jette très efficacement le soupçon sur le contenu des Evangiles oblige à interrompre le débat exégétique proprement dit pour y répondre.
Ben tiens: Accusé , levez-vous ! Nous y voilà:
Roque a écrit:
Je ne vous ai pas accusé de ça. Mais vous avez une approche apparentée à la Formgeschichte. voir le spoiler
- TIRE DES EVANGILES PAS HISTORIQUES ?:
Yahia a écrit:Je pense ensuite que les positions extrêmes reflètent des partis-pris et non une réflexion sereine sur la question.
Qu'une très grande partie des évangiles soient des "interprétations" an-historiques des croyants ultérieurs ( et non des "inventions") me paraît indubitable.
Que cela empêcherait toute possibilité de s'approcher des fait historiques me semble très abusif et un parti-pris idéologique peu intelligent. Ce texte peut parfaitement convenir, avec l'éclairage de ce que nous connaissons par ailleurs de cette époque ,à une approche prudente de certains faits historique.
Mais je pense également que l'historicité de la plupart de paroles mises dans la bouche de Jésus est loin d'être attestée, souvent très douteuse.
Sauf que là , c'est VOUS qui mettez en ROUGE, comme important ce sur quoi que je n'ai pas insisté. Si J'avais surligné moi-même en couleur, pour mettre en évidence ce que MOI j'estimais important, j'aurais mis en rouge les autres phrases que vous avez laissé en noir:"peut parfaitement convenir, avec l'éclairage de ce que nous connaissons par ailleurs de cette époque ,à une approche prudente de certains faits historiques". Quelle inversion !
Lecture déformée pour cause d'obsession anti-Marguerat ?
Et soyons logiques: si j'admettais d'emblée l'historicité de tout dans les évangiles, ne serais-je pas chrétien? Les non-chrétiens, doutant de cette historicité seraient-ils donc tous des adeptes de cette Ggrrmmmbblgescichte qui s'ignorent ? Ne travestissez pas la pensée des autres, c'est tout ce que je demande :il y d'autres pistes de réflexion que celle que vous dénoncez.
Revenons dès lors au noeud du débat, lequel n'est pas l'historicité de telle ou telle parole ou fait, mais bien plus fondamentalement, celle de sa résurrection.
Roque a écrit:Vous voudrez bien m'expliquer " ce n'est pas une invention " ... franchement je ne comprends pas du tout. Si cela n'a pas eu lieu, c'est nécessairement une invention, non ?Yahia a écrit:Pour la Résurrection ce n'est pas une "invention", donc pas un mensonge. Cela peut être une vérité ou une erreur.
Donc, fondamentalement, la vraie question est : Jésus est-il ressuscité ou pas ? Le reste n'est que peccadille .Toute la lecture que vous ferez du témoignage est radicalement différente selon la réponse que vous donnerez à cette question.
Pour ma part, je pense que non, et vous pensez que oui. Et cette réponse ne dépend pas de l'"historicité" d'une parole isolée, ni pour vous ni pour moi. Je n'ai pas besoin, pour ma part, de "déconstruire" l'Evangile pour nier Dieu. Mais je n'ai pas besoin non plus de m'accrocher à cette négation, ni n'ai besoin de refuser de lire le témoignage interpellant de l'évangile, qui me dit le contraire de ce que je pense. Je n'exclus en moi aucune lecture nouvelle.
Mais si donc, par hypothèse, il n'y a pas eu résurrection tout serait mensonge, selon vous ? Que non ! Les témoins du Christ on tout simplement médité et réfléchi sur ces événement dramatiques et nous en ont transmis avec honnêteté ce qu'ils en ont compris comme étant essentiel.La question juste n'est pas : est-ce historique ? La question juste est : ont-ils bien compris le sens des événements ? Si oui, c'est moi qui me trompe, si non, c'est eux-et vous.
Mais donc s'ils ont tort, insistez-vous, ils auraient selon "inventé" et miracle et résurrection, et donc menti ? Mais non , non, non. Ils auraient dans ce cas-là interprété de façon, erronée les signes qu'ils sont lu dans ces événements. Ce qui était important à transmettre c'était la signification de tout cela, à savoir la mission du Christ et de sa venue parmi eux. Mais me répliquez-vous, je considère donc que ce seraient des fables d'esprits égarés, et qu'il n'est pas possible de revenir aux faits ? Pas du tout. Ni l'un , ni l'autre. Je considère que les signes qu'ils nous ont transmis sont des éléments historiquement analysables pour une part d'entre eux, et interprétables autrement. Par ailleurs, il restent les honêtes et respectables transmetteurs du message de Jésus.Ce n'est pas parce que je n'en reçois pas le sens global, que j'en rejette la validité de tout.
Et la Résurrection, donc : qu'ont-ils vu, quels sont les signes ? Je n'en sais rien, franchement: je ne suis pas de ceux qui bâtissent des hypothèses invérifiables et cela restera du domaine de la foi, pas de l'histoire.
Et les miracles ? historiques ? La question n'est pas là. Si Dieu existe, rien d'impossible, alors pourquoi pas? S'il n'existe pas, alors les miracles non plus, et je m'en fout complètement, le débat ne m'intéresse pas. C'est le sens du message transmis dans sa globalité qui reste intéressant et qu'il faut regarder.
J'en viens à l'autre hypothèse: si je me trompe et que la résurrection a bien eu lieu ? C'est là ou je place mon hypothèse des paroles et les gestes qui ne seraient PAS historiques, mais qui seraient VRAIS. ( au hasard, par ex: la résurrection de Lazare) En ce cas, la vérité inclue dans le message transmis, et que je n'aurais pas su lire, serait la seule valeur, l'historicité un détail accessoire.
Dès lors, je rationalise ou je délire peut-être, mais pas à la mode de votre ennemi préféré.
La je suis fier de moi, j'ai réussi à être plus long que vous !
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Dernière édition par Yahia le Jeu 11 Déc - 15:09, édité 1 fois (Raison : les Signes qu'ils ont lu (pas les Lignes))
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Yahia a écrit:Mais si donc, par hypothèse, il n'y a pas eu résurrection tout serait mensonge, selon vous ? Que non ! Les témoins du Christ on tout simplement médité et réfléchi sur ces événement dramatiques et nous en ont transmis avec honnêteté ce qu'ils en ont compris comme étant essentiel.La question juste n'est pas : est-ce historique ? La question juste est : ont-ils bien compris le sens des événements ? Si oui, c'est moi qui me trompe, si non, c'est eux-et vous.
La réponse est dans le témoignage qu'ils ont donné des évènements qu'ils ont vécu et je parle bien des évènement et pas de l'explication qu'ils en ont donné. Voyons l'un de ces témoignage, rapporté par les disciples d'Emmaüs :
13 Or, ce même jour, deux d'entre eux se rendaient à un bourg, nommé Emmaüs, distant de Jérusalem de soixante stades, 14 et ils causaient entre eux de tous ces événements. 15 Tandis qu'ils causaient et discutaient, Jésus lui-même, s'étant approché, se mit à faire route avec eux; 16 mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. 17 Il leur dit: " De quoi vous entretenez-vous ainsi en marchant? " Et ils s'arrêtèrent tout tristes. 18 L'un d'eux, nommé Cléophas, lui dit: " Tu es bien le seul qui, de passage à Jérusalem, ne sache pas ce qui s'y est passé ces jours-ci! " 19 Il leur dit: " Quoi? " Ils lui dirent: " Ce qui concerne Jésus de Nazareth, qui fut un prophète puissant en oeuvres et en parole devant Dieu et tout le peuple; 20 et comment nos grands prêtres et nos chefs l'ont livré pour être condamné à mort et l'ont crucifié. 21 Quant à nous, nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël; mais, en plus de tout cela, on est au troisième jour depuis que cela s'est passé. 22 Aussi bien, quelques femmes, des nôtres, nous ont jetés dans la stupeur: étant allées de grand matin au sépulcre, 23 et n'ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire même qu'elles avaient vu une apparition d'anges qui disaient qu'il est vivant. 24 Quelques-uns de nos compagnons s'en sont allés au sépulcre et ont bien trouvé (toutes choses) comme les femmes avaient dit: mais lui, ils ne l'ont point vu. (Luc (CP) 24)
Ces 2 disciples sont perdus, ils ne savent plus quoi penser, ils ne comprennent plus rien. Quand tu dis : "ont-ils bien compris ces évènements" ? Moi je te réponds qu'avant que Jésus leur apparaisse et leur explique ces évènements, les éclaires sur ces évènements, c'est pas qu'il avaient bien ou mal compris, ils n'avaient rien compris, il ne comprenait pas ce qui était entrain de se passer : "la crucifixion de Jésus, la disparition du corps du tombeau, l'annonce aux femmes qu'il était ressuscité.
C'est grâce à Jésus qu'ils vont comprendre. Leur croyance en la résurrection de Jésus et son sens, n'est pas le fruit d'une réflexion, d'une méditation, mais le fruit d'une révélation. C'est Jésus lui-même qui s'est révélé à eux ressuscité et qui leur a expliquer, à partir des Ecritures et notamment des prophètes, pourquoi il était mort et ressuscité :
[color=#003399]25 Et lui leur dit: " O (hommes) sans intelligence et lents de coeur pour croire à tout ce qu'ont dit les prophètes! 26 Ne faillait-il pas que le Christ souffrit cela pour entrer dans sa gloire? " 27 Et commençant par Moïse et (continuant) par tous les prophètes, il leur expliqua, dans toutes les Ecritures, ce qui le concernait. (Luc (CP) 24)[/color]
Donc tu te trompes en pensant que les Apôtres ont médités sur ces évènements ; ils ont d'abord été perdus et c'est Jésus Lui-même qui s'étant montré à eux ressuscité alors qu'ils l'avaient vu mort, leur a tout expliqué.
A moins que Jésus se soit trompé dans ses explications, on ne peux pas dire dans ce cas que les Apôtres aient mal compris les évènements en disant que Jésus était ressuscité ; car ils ont vu Jésus ressuscité ; Jésus a voulu qu'ils le voient ressuscité et leur expliquer. Donc, puisque les Apôtres n'ont pas pu se tromper, puisque c'est une révélation qui leur a été donnée ; résurrection dont ils ont été les témoins, alors tu te trompes.
Yahia a écrit:Mais donc s'ils ont tort, insistez-vous, ils auraient selon "inventé" et miracle et résurrection, et donc menti ? Mais non , non, non. Ils auraient dans ce cas-là interprété de façon, erronée les lignes qu'ils sont lu dans ces événements. Ce qui était important à transmettre c'était la signification de tout cela, à savoir la mission du Christ et de sa venue parmi eux.
Et c'est justement la résurrection de Jésus dont ont été témoins les Apôtres et les explications qu'il leur a donné, qui leur a permis de comprendre sa mission. Sans la résurrection, la mission de Jésus n'a aucun sens et la foi des Apôtres non plus. C'est bien parce qu'ils ont vu Jésus vivant et que Jésus les a envoyés témoigner, leur promettant son aide, l'aide de son Esprit, que ses Apôtres ont trouvés la force d'annoncer sa résurrection et surtout sa Bonne Nouvelle et de baptiser et d'enseigner tout ce qu'il avait prescrit.
Yahia a écrit:Mais me répliquez-vous, je considère donc que ce seraient des fables d'esprits égarés, et qu'il n'est pas possible de revenir aux faits ? Pas du tout. Ni l'un , ni l'autre. Je considère que les signes qu'ils nous ont transmis sont des éléments historiquement analysables pour une part d'entre eux, et interprétables autrement. Par ailleurs, il restent les honêtes et respectables transmetteurs du message de Jésus. Ce n'est pas parce que je n'en reçois pas le sens global, que j'en rejette la validité de tout.
Sauf qu'avant de transmettre le message de Jésus, la première annonce qu'ils ont faite, revoyez le discours de Pierre le jour de la Pentecôte, c'est l'annonce de la résurrection de Jésus et du don qu'il a fait de son Esprit ; Esprit que tout homme peut recevoir s'il se fait baptiser, s'il devient disciple de Jésus, s'il met sa foi en Jésus.
Yahia a écrit:Et la Résurrection, donc : qu'ont-ils vu, quels sont les signes ? Je n'en sais rien, franchement: je ne suis pas de ceux qui bâtissent des hypothèses invérifiables et cela restera du domaine de la foi, pas de l'histoire.
Désolé, mais les apparitions de Jésus ressuscité à ses Apôtres fait bien partie de leur histoire ; résurrection à laquelle il ne s'attendait pas du tout, bien que Jésus l'avait annoncé, mais il ne la voyait pas se produire de cette manière. Leur histoire n'est pas vérifiable, car Jésus ne s'est montré qu'à eux qui croyaient en Lui et pas à d'autres qui ne croyaient pas en lui. Où l'on croit leur témoignage, et "heureux sommes-nous dira Jésus à Thomas" où on le croit pas et malheureux sommes-nous, car si nous ne croyons pas à la résurrection de Jésus, nous ne demanderons pas le baptême pour recevoir son Esprit.
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Il faut savoir lire ce qui est dit : par hypothèse ou non, et répondre en fonction de ces prémisses. Sinon, je sais également asséner des réponses plus...radicales.
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Cher Yahia, j'ai manqué plusieurs épisodes et je vais essayer de ma rattraper sur quelques points. Je vous rappelle que je ne suis pas dans ce sujet dans le discours croyant. Je ne suis que rationnel. Je répète que je n'essaie de convertir personne, j'essaie seulement de mettre en lumière les postulats sur lesquels - vous et moi - faisons reposer nos convictions.
Sans oublier que le postulat rationaliste qu'est qu'un postulat parmi d'autres possibles, un support indémontrable parmi d'autres - aux " certitudes des uns et des autres ". Merci ne pas vous mettre, vous-mêmes, dans aucune " case " si cela e vous convient pas. Vous prenez trop les choses pour vous !
Encore une fois je prends acte du fait que telle n'est pas votre démarche.
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2493-les-evangiles-pas-historiques#52159
Il me semble que vous vous méprenez sur un point important : ici ma démarche est uniquement rationnelle et n'essaie pas de démontrer quoi que ce soit. En effet vous dite :
Moi je vous parle du glissement du " doute méthodique " en système de certitude qui devient - de facto - plus vraiment rationnel - et que pratiquent allègrement tous un tas de gens ayant un idéologie fixée concernant les Evangiles, dont les athées et agnostiques (pas seulement):
Mais c'est redoutablement efficace dans les deux sens, voyez-vous ! Et c'est totalement fair play !
Comme je l'ai dit plus haut - si on reste totalement rationnel et totalement neutre ... on ne peut rationnellement pas conclure grand chose de solide de tout ce fatras exégétique (celui de Marguerat et de beaucoup d'autres cette fois)
Sauf preuve du contraire.
Cela reste bien confus. Si c'est faux, de deux choses l'une : soit c'est l'observation de l'événement qui est erronée, soit c'est le récit qui en est fait qui est erroné. Que voulez-vous dire finalement ???Yahia a écrit: Il n'y a pas de trompés, ni de trompeurs. Il y a des croyants, témoignant, en sincérité, selon leurs modalités, et auditeurs recevant le message selon les mêmes modalités et acceptant ou refusant le témoignage. Une lecture actuelle analysant le texte selon les critères d'un discours super-rationnaliste contemporain est complètement anachronique, et aberrante, et historiquement, et pour le sens.
Sans oublier que le postulat rationaliste qu'est qu'un postulat parmi d'autres possibles, un support indémontrable parmi d'autres - aux " certitudes des uns et des autres ". Merci ne pas vous mettre, vous-mêmes, dans aucune " case " si cela e vous convient pas. Vous prenez trop les choses pour vous !
Non, je ne présente pas les choses de cette façon. Vous n'avez pas bien compris ma distinction entre " doute méthodique " et " esprit de système ". Et je m'en explique plus bas.Yahia a écrit:Par ailleurs, on peut émettre des doutes sur "l'historicité" d'une citation et d'un fait précis, sans avoir l'objectif de "discréditer" historiquement l'ensemble du témoignage, ainsi que vous le présentez.
Je n'ai à aucun moment parlé " d'insinuation, de sous-entendu ou d'intentions cachées ". Vous avez le droit d'être agacé, mais où avez vous été chercher tout cela. En fait j'ai parlé de ce que j'ai ressenti comme des euphémismes, c'est à dire comme un style consistant à atténuer l'expression d'idées pour en adoucir le contenu éventuellement désagréable. Il est - de fait - que j'ai eu beaucoup de mal à saisir le fond de la pensée de Marguerat sur, par exemple : " les Evangiles sont un récit, une narration et pas une histoire " ou l'absence de rapport entre ce qu'il appelle la " remémoration christologique " et l'éventuel travail de la mémoire qui aurait pu présider à la rédaction de certains textes des Evangiles. Je peux dire que ce long échec de mes tentatives de compréhension m'a mis en rogne, et plus du reste !Yahia a écrit:Ce sont vos expressions qui prêtent à Marguerat « des insinuations ,ou des sous-entendus, toutes sortes d’intentions cachées et pernicieuses qui m’agacent. En tout cas, ce n’est pas comparable à ma démarche. J’ajoute que le fonds de ma pensée est que, même si une citation n'est pas « historique", cela ne signifie nullement qu’elle n’est qu’elle n'est pas « vraie".
Encore une fois je prends acte du fait que telle n'est pas votre démarche.
Je retiens ce petit morceau de votre long exposé car effectivement le " doute méthodique " géré honnêtement - dans cette matière qu'est la Bible - sans forcer aucune conclusion aboutit à développer un très grand nombre d'incertitudes et ... très peu de conclusions positives, sinon aucune.Yahia a écrit:Je ne crois effectivement pas à sa nature divine, c’est également très clair. Mais cela n'empêche que je ne mets pas en doute l'authenticité du témoignage lui-même, ni d'essayer de recevoir la vérité de l'ensemble. Le sens et la véracité du témoignage ne dépendent ni de "l'historicité" contestable de chacune des parties du discours, ni ....de moi-même ...
Yahia je suis tout à fait prêt à m'excuser chaque fois que nécessaire. Oui, j'ai surligné deux paragraphes en rouge pour vous montrer ce qu'est une pensée apparentée à la Formgeschichte. Mais, je me suis dit qu'en copiant votre texte j'avais du faire " sauter " votre surlignage. Mais je viens de vérifier, vous n'avez pas fait de surlignage en couleur - deux mots en noir gras seulement - effectivement dans un paragraphe dont je n'ai pas tenu compte :Yahia a écrit:Sauf que là , c'est VOUS qui mettez en ROUGE, comme important ce sur quoi que je n'ai pas insisté. Si J'avais surligné moi-même en couleur, pour mettre en évidence ce que MOI j'estimais important, j'aurais mis en rouge les autres phrases que vous avez laissé en noir : " peut parfaitement convenir, avec l'éclairage de ce que nous connaissons par ailleurs de cette époque ,à une approche prudente de certains faits historiques". Quelle inversion !
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2493-les-evangiles-pas-historiques#52159
Il me semble que vous vous méprenez sur un point important : ici ma démarche est uniquement rationnelle et n'essaie pas de démontrer quoi que ce soit. En effet vous dite :
Alors non : mon propos n'est pas ici de dire que " La vraie question serait : Jésus est-il ressuscité ou pas ? ". Cette question n'a pas sa place dans le présent sujet.Yahia a écrit:Donc, fondamentalement, la vraie question est : Jésus est-il ressuscité ou pas ? Le reste n'est que peccadille .Toute la lecture que vous ferez du témoignage est radicalement différente selon la réponse que vous donnerez à cette question. Pour ma part, je pense que non, et vous pensez que oui.
Moi je vous parle du glissement du " doute méthodique " en système de certitude qui devient - de facto - plus vraiment rationnel - et que pratiquent allègrement tous un tas de gens ayant un idéologie fixée concernant les Evangiles, dont les athées et agnostiques (pas seulement):
Comme vous pouvez le noter, cette argumentation n'a rien a voir avec la foi. Rationnellement, moi aussi, j'exerce mon scepticisme à l'égard des postulats qui soutiennent vos convictions. C'est sans doute une position qui vous paraîtra inhabituelle de la part d'un croyant.Roque a écrit:Mais le critère crucial est posé : quand le « doute méthodique » - parfaitement légitime – se convertit en système (explicité ou de fait) tendant à fragmenter les Evangiles et à en disqualifier une partie plus ou mois importante alors considérée comme " inauthentiques ", on entre dans une approche apparentée à la Formgeschichte. Toute approche qui retient un principe général de suspicion sur les Evangiles - (ou un autre ouvrage) - s'appuyant sur deux idées conjointes :
- d'abord l'idée que le cadre spatio-temporel des Evangiles est pour l'essentiel rédactionnel (il y a des cas où c'est inévitable : par exemple les collections de paraboles) ;
- ensuite : l'autre idée que les gestes et paroles rapportés dans les Evangiles sont pour la plupart des inventions romancées - sans rapport avec les faits réels
appartiennent également à cette approche apparentée à la Formgeschichte.
Mais c'est redoutablement efficace dans les deux sens, voyez-vous ! Et c'est totalement fair play !
Comme je l'ai dit plus haut - si on reste totalement rationnel et totalement neutre ... on ne peut rationnellement pas conclure grand chose de solide de tout ce fatras exégétique (celui de Marguerat et de beaucoup d'autres cette fois)
Sauf preuve du contraire.
Roque- Messages : 5064
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Date d'inscription : 15/02/2011
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Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Bonsoir Roque.
Comme vous l'avez sans doute remarqué, alors que nous avons en commun le rejet des principales thèse de Marguerat, et débat autour de ses thèses m'ennuie assez. Mon attitude générale est celle du désintérêt pour des voies sans issue, mais de votre côté, je comprends l'insistance à dénoncer les dangers de son attitude pour certains croyants.
Je serais plus intéressé par un post ouvrant des perspectives sur la tradition orale, avec des gens comme Marcel Jousse, que l'on semble redécouvrir de nos jours. Cela me semble plus prometteur . Qu'en pensez-vous ?
Comme vous l'avez sans doute remarqué, alors que nous avons en commun le rejet des principales thèse de Marguerat, et débat autour de ses thèses m'ennuie assez. Mon attitude générale est celle du désintérêt pour des voies sans issue, mais de votre côté, je comprends l'insistance à dénoncer les dangers de son attitude pour certains croyants.
Je serais plus intéressé par un post ouvrant des perspectives sur la tradition orale, avec des gens comme Marcel Jousse, que l'on semble redécouvrir de nos jours. Cela me semble plus prometteur . Qu'en pensez-vous ?
Re: Doute méthodique ou unilatéralisme systématique ?
Salam
Je met ici cette vidéo qui aurait pu servir d'illustration à plusieurs discussions déjà ouvertes...
Je vous la recommande vivement ...beaucoup de choses sont dites avec clarté et pertinence me semble-t-il en peut de mots .
Attention : peut-être ne restera-t-elle pas en ligne longtemps vu la politique de droit à l'image d'Arte
Je met ici cette vidéo qui aurait pu servir d'illustration à plusieurs discussions déjà ouvertes...
Je vous la recommande vivement ...beaucoup de choses sont dites avec clarté et pertinence me semble-t-il en peut de mots .
Attention : peut-être ne restera-t-elle pas en ligne longtemps vu la politique de droit à l'image d'Arte
Idriss- Messages : 7124
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Date d'inscription : 25/05/2012
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