Vigilance Halal
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Maimon2
Coeur de Loi
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Re: Vigilance Halal
A titre personnel, je ne t'embêterais certainement pas si je n'avais pas eu une transfusion il y a longtemps (déjà qu'avec ça c'est passé près...).Coeur de Loi a écrit:Une transfusion, ça va plus loin que manger, c'est pas rien.
Cela dit, ce n'est plus vraiment le sujet...
à+
Re: Vigilance Halal
Spin Une question que je me pose : toutes les prescriptions de la Torah ne sont plus appliquées, il s'en faut de beaucoup (si on en doute, on peut voir la fameuse réponse d'un certain Jim à Laura Schlesinger, voir par exemple ici). Les samaritains en sont d'ailleurs plus proches que les juifs les plus intégristes, mais même eux n'appliquent pas tout. Pourquoi s'accroche-t-on tant à d'autres qui compliquent la vie ?
à+
La question est pertinante.
En effet nombre de mitzvoth ne peuvent être appliquées et c’est essentiellement les mitzvoth qui étaient pertinente pour le culte du Temple de Jérusalem comme les sacrifices ou les offrandes en farine. De même des mitzvoth agricoles n’étaient plus appliquées.
Cependant la non possibilité momentanée d’appliquer ces mitzoth ne les annulent aucunement. Par exemple pendant plus de 2000 ans les juifs n’ont pu appliquer la mitzvà de pe’a ou du maasser ou de la shemità car ils n’étaient plus des paysans sur la terre d’Israël. Nonobstant cela ils ont continué à les appliquer en diaspora pour ne pas les oublier et maintenant que les juifs sont a nouveau en Israël nous avons recommencé à les appliquer pleinement.
De même pour les sacrifices qui ne sont plus appliquées, les règles d’abattage reprennent les règles du Temple et les parties interdites de l’animal sont les mêmes que celles interdites au Temple. Les horaires des prières quotidiennes (celle du matin et celle de l’après-midi) sont celle des horaires des sacrifices et le nom de la prière de l’après-midi est celui du sacrifice : Minhà. Ainsi aucune mitzvà n’est abandonnée. Les règles de la pureté des Cohanim ou pour les femmes restent valable. Il s’agit de garder non seulement le souvenir de la mitzvà mais aussi savoir l’appliquer et agir en fonction de celle –ci.
La Torah et les mitzvoth ne sont pas la pour compliquer la vie mais c’est une aide pour l’homme, une pédagogie et un enseignement quotidien et permanent qui font que notre vie est uniquement dans la dimension du sacré. Tous nos actes répondent à un commandement divin, toute notre vie y répond. Il n’y a pas de profane. Manger est un acte, s’il est fait sans cadre des commandements – comme la kasherout -, simplement animal et renvoi l’homme à l’animalité, mais si nous mangeons kasher, nous ne mangeons plus comme un animal mais comme un homme respectant les commandements divins et cela en fait un acte sacree. Nous faisons des bénédictions pour remercier à chaque moment de notre vie et ainsi nous gardons en permanence cette dimension du sacré.
Les samaritains ne sont pas des juifs malgré le fait qu’ils aient une Torah, de fait nous ne pouvons nous marier avec eux s’ils ne font pas de conversions. Ils ont des rites proche des nôtres mais par exemple ont une kasherouth moins rigoureuse ce qui fait qu’ils mangent notre kasherouth (comme d’ailleurs les musulmans) mais nous ne pouvons manger la leur. En particulier ils sont moins rigoureux dans la séparation entre les produits lactés et les produits carnés.
Je profite pour répondre au post de cœur de loi typiquement superficiel. L’interdit de la consommation du sang ne regarde que le monde animal. Que je sache personne ne mange du sang humain. De plus une transfusion n’a rien à voir avec une consommation. La consommation des aliments implique une jouissance ainsi dans l’absolu un malade juif nourrit en sonde gastrique peut sans problème être nourrit même avec du porc, cela ne passe pas par la bouche et il n’y a pas de jouissance.
De plus un principe dans le judaïsme est absolu : sauver la vie humaine. Cela s’appelle Pikou’h Nefesh. Pour sauver la vie la loi est suspendu, ainsi le shabbath peut être transgressé pour sauver une vie ou les autres règles sauf 3 : l’interdit de l’inceste, l’assassinat (qui n’est pas légitime défense), et l’idolâtrie. Si pour sauver ma vie ou celle d’un autre je dois accomplir un de ces 3 actes alors je dois me laisser tuer ou ne pas sauver. En dehors de cela tout doit être fait pour sauver la vie et donc aussi les transfusions sanguines. Interpréter comme les TJ ce point est absurde et prouve une incompétence totale dans l’exégèse du texte original en hébreu de la Torah.
Maimon2
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La question est pertinante.
En effet nombre de mitzvoth ne peuvent être appliquées et c’est essentiellement les mitzvoth qui étaient pertinente pour le culte du Temple de Jérusalem comme les sacrifices ou les offrandes en farine. De même des mitzvoth agricoles n’étaient plus appliquées.
Cependant la non possibilité momentanée d’appliquer ces mitzoth ne les annulent aucunement. Par exemple pendant plus de 2000 ans les juifs n’ont pu appliquer la mitzvà de pe’a ou du maasser ou de la shemità car ils n’étaient plus des paysans sur la terre d’Israël. Nonobstant cela ils ont continué à les appliquer en diaspora pour ne pas les oublier et maintenant que les juifs sont a nouveau en Israël nous avons recommencé à les appliquer pleinement.
De même pour les sacrifices qui ne sont plus appliquées, les règles d’abattage reprennent les règles du Temple et les parties interdites de l’animal sont les mêmes que celles interdites au Temple. Les horaires des prières quotidiennes (celle du matin et celle de l’après-midi) sont celle des horaires des sacrifices et le nom de la prière de l’après-midi est celui du sacrifice : Minhà. Ainsi aucune mitzvà n’est abandonnée. Les règles de la pureté des Cohanim ou pour les femmes restent valable. Il s’agit de garder non seulement le souvenir de la mitzvà mais aussi savoir l’appliquer et agir en fonction de celle –ci.
La Torah et les mitzvoth ne sont pas la pour compliquer la vie mais c’est une aide pour l’homme, une pédagogie et un enseignement quotidien et permanent qui font que notre vie est uniquement dans la dimension du sacré. Tous nos actes répondent à un commandement divin, toute notre vie y répond. Il n’y a pas de profane. Manger est un acte, s’il est fait sans cadre des commandements – comme la kasherout -, simplement animal et renvoi l’homme à l’animalité, mais si nous mangeons kasher, nous ne mangeons plus comme un animal mais comme un homme respectant les commandements divins et cela en fait un acte sacree. Nous faisons des bénédictions pour remercier à chaque moment de notre vie et ainsi nous gardons en permanence cette dimension du sacré.
Les samaritains ne sont pas des juifs malgré le fait qu’ils aient une Torah, de fait nous ne pouvons nous marier avec eux s’ils ne font pas de conversions. Ils ont des rites proche des nôtres mais par exemple ont une kasherouth moins rigoureuse ce qui fait qu’ils mangent notre kasherouth (comme d’ailleurs les musulmans) mais nous ne pouvons manger la leur. En particulier ils sont moins rigoureux dans la séparation entre les produits lactés et les produits carnés.
Je profite pour répondre au post de cœur de loi typiquement superficiel. L’interdit de la consommation du sang ne regarde que le monde animal. Que je sache personne ne mange du sang humain. De plus une transfusion n’a rien à voir avec une consommation. La consommation des aliments implique une jouissance ainsi dans l’absolu un malade juif nourrit en sonde gastrique peut sans problème être nourrit même avec du porc, cela ne passe pas par la bouche et il n’y a pas de jouissance.
De plus un principe dans le judaïsme est absolu : sauver la vie humaine. Cela s’appelle Pikou’h Nefesh. Pour sauver la vie la loi est suspendu, ainsi le shabbath peut être transgressé pour sauver une vie ou les autres règles sauf 3 : l’interdit de l’inceste, l’assassinat (qui n’est pas légitime défense), et l’idolâtrie. Si pour sauver ma vie ou celle d’un autre je dois accomplir un de ces 3 actes alors je dois me laisser tuer ou ne pas sauver. En dehors de cela tout doit être fait pour sauver la vie et donc aussi les transfusions sanguines. Interpréter comme les TJ ce point est absurde et prouve une incompétence totale dans l’exégèse du texte original en hébreu de la Torah.
Maimon2
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Re: Vigilance Halal
http://religion.blog.lemonde.fr/2013/07/21/violente-charge-du-consitoire-juif-contre-la-stigmatisation-de-la-viande-casher/Suite aux conclusions de la mission sénatoriale, -lancée dans la foulée du scandale de l'hiver dernier sur les lasagnes au cheval-, présentées jeudi 18 juillet par la rapporteure Sylvie Goy-Chavent (UDI), le président du consistoire central Joël Mergui s'est indigné d'une nouvelle "stigmatisation" de la filière casher. La sénatrice a par ailleurs fait l'objet de menaces et a porté plainte.
La communauté juive s'inquiète de l'une des recommandations de ce rapport qui prévoit l'instauration d'un "étiquetage obligatoire du mode d'abattage selon des modalités non stigmatisantes", visant de fait les modes d'abattage sans étourdissement, pratiqués par les juifs et les musulmans. "Des experts de l'Inra nous ont dit que l'agonie d'un bovin pouvait durer jusqu'à 14 minutes, d'où la nécessité d'instaurer un étiquetage précisant le mode d'abattage" a précisé la sénatrice UDI de l'Ain. Les communautés juive et musulmane contestent la souffrance de l'animal si l'égorgement est pratiqué par un sacrificateur bien formé.
Mais au delà des craintes sur la "liberté de culte" mises en avant par M.Mergui, la communauté juive, dont "les consommateurs représentent moins de 0,8% des Français", s'inquiète surtout des effets économiques d'un étiquetage particulier. Plus d'un tiers de chaque carcasse d'animaux tués pour la filière casher terminent en effet dans la filière traditionnelle car jugés impropres à la consommation des pratiquants.
C'est l'étiquetage de cette partie qui ajouterait selon M.Mergui un effet "stigmatisant", le consommateur lambda ne souhaitant peut-être pas contribuer à ce type d'abattage. "Dans la mesure où la viande casher se distingue déjà par un marquage spécifique, étiqueter un morceau non casher en le distinguant des autres par une mention, qui précise qu’il a fait l’objet d’un rejet de la filière casher est en soi une stigmatisation qui accréditerait le préjugé que les juifs seraient les êtres cruels dénoncés par les manifestants polonais". Le parlement polonais vient de confirmer l'interdiction de l'abattage rituel dans le pays, une décision condamnée par Israël.
"Ne savent-ils pas tous ces négateurs de nos pratiques religieuses que la mauvaise foi a motivé les nazis pour interdire l’abattage religieux dès avril 1933? Qu’elle met en péril le lien social des communautés nationales ? Sans juif, cofondateurs de l’identité européenne depuis 2000 ans, l’Europe sera t-elle toujours la même ?" lance M.Mergui qui s'inquiète aussi "des déclarations mensongères sur la perception d'une taxe pour alimenter la politique israélienne"
La problématique est différente pour la communauté musulmane qui consomme tous les morceaux de l'animal et représente un marché de plusieurs millions de consommateurs potentiels. Aussi, même si le nouveau président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Dalil Boubakeur, a dénoncé, à l'instar de son homologue juif, "une stigmatisation", certains musulmans souhaitent au contraire un étiquetage clair du lode d'abattage afin de lutter contre le "faux-halal". Selon des chiffres officiels de 2010 portant sur l'ensemble des 255 abattoirs français, 14% du tonnage de la viande abattus en France l'est de façon rituelle. En 2011, le ministère de l'agriculture, reconnaissait toutefois que «10 % à 12 % des bovins et 75 % des ovins étaient abattus selon cette pratique» (...)
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Re: Vigilance Halal
Il y a quelques années, des gens ont tenté d'organiser des corridas en Pologne. Des réactions populaires indignées les ont vite dissuadés. Quoi qu'on en pense par ailleurs, le souci de bien-être de l'animal n'est pas qu'un prétexte."Dans la mesure où la viande casher se distingue déjà par un marquage spécifique, étiqueter un morceau non casher en le distinguant des autres par une mention, qui précise qu’il a fait l’objet d’un rejet de la filière casher est en soi une stigmatisation qui accréditerait le préjugé que les juifs seraient les êtres cruels dénoncés par les manifestants polonais". Le parlement polonais vient de confirmer l'interdiction de l'abattage rituel dans le pays, une décision condamnée par Israël.
à+
Re: Vigilance Halal
*Espérance* a écrit:En tout cas, il doit y avoir parfois des magouilles...http://www.al-kanz.org/2013/04/18/doux-faux-halal-maroc/
Or, il n’y a pas d’abattage rituel chez Doux, ni chez Tilly-Sabco et encore moins chez Salvel. Pourtant les poulets sont commercialisés jusque dans les magasins de la ville sainte de La Mecque, où des millions de pèlerins musulmans effectuent chacun omra (petit pèlerinage) et hajj (pèlerinage)… et consommant des poulets haram (illicites).
Je ferais tous de même remarquer que la critique viens de l'intérieur...Les débats ont lieu entre musulmans ce qui me semble sain...
Le halal, c’est manger bio et végétarienLes affaires de fraude et de corruption sur la production de viande halal se suivent et, malheureusement, se ressemblent, au grand dam des consommateurs. Si la pente se poursuit, pas un seul petit morceau de mouche ou de vermisseau ne résistera face à l’appétit des producteurs de « cochonneries » à destination des musulmans.
Par Omero Marongiu-Perria* Mardi 19 Mars 2013
Face à cette situation, des groupes de défense des intérêts du consommateur se développent et commencent à produire des rapports assez affinés de ce qui relève purement et simplement d’une fraude généralisée, largement entretenue depuis plus de 30 ans. La somme des pratiques frauduleuses est stupéfiante : mensonges sur la provenance des animaux ; estampillage « halal » de viandes non abattues selon le rite musulman ; fraude sur l’étiquetage de produits élaborés, etc. Sans compter toute l’opacité qui entoure l’orientation de certains bovins de « basse qualité » – on pardonnera l’euphémisme – vers la production halal.
Plus d’un musulman en contact avec des éleveurs français un tant soit peu intègres ont entendu la même diatribe : « De toute façon, vous, les Arabes, vous préférez les arrières des bovins pour pas cher, alors on vous refourgue même les animaux qui sont refusés dans le circuit normal ». Comprendra qui veut...
Le tableau ne serait pas complet si on omettait d’y ajouter la somme des produits confectionnés à base de VSM, cette fameuse « viande séparée mécaniquement » issue, dans la plupart des cas, de volailles élevées en batterie et tuées sans avoir vu la lumière du jour.
Arrêter la spirale infernale
Une fois tout cela dit et redit, il est toujours tentant de pointer le ou les coupables, en portant au grand jour toutes les collusions politico-financières qui gangrènent la filière halal, depuis l’échelle internationale jusqu’au petit boucher du coin.
Certes, il est de notoriété publique, aujourd’hui, que la plupart des organismes de certification profitent du flou artistique entourant la notion d’abattage islamique pour proposer à qui mieux mieux sa charte ou sa contre-charte éthique. Cependant, cette spirale infernale perdurera tant qu’on n’agira pas sur trois éléments au moins : à savoir le traitement des animaux, le volume de la production de viande et les conflits d’intérêt.
De son côté, le consommateur aura tout à gagner en entrant dans l’arène et en cessant de se donner bonne conscience à la vue d’un simple tampon sur une carcasse ou d’un étiquetage le plus souvent équivoque.
Une approche volontairement biaisée du halal ?
La grande question qui anime actuellement les débats sur la production de viande halal est de savoir si les animaux sont égorgés en la forme accoutumée, en tenant compte des divergences entre les différentes écoles juridiques musulmanes. Les polémiques sont parfois très vives, les anathèmes fusant ici et là à l’encontre des organismes accusés de jouer le jeu des gros bonnets de l’industrie agroalimentaire en transigeant sur la norme islamique.
Pourtant, la question de fond, bien plus grave que cela et qui semble complètement marginalisée, voire purement et simplement occultée des débats, est celle de la façon dont on se représente l’animal, sa fonction et son traitement.
De ce point de vue, il est absolument consternant d’observer la dérive sémantique autour de la notion d’« abattage rituel ». Comme pour bien d’autres domaines, les protagonistes de l’islam hexagonal intègrent dans le champ cultuel (ibâdât) des pratiques relevant des règles de la vie sociale (mu’âmalât), en les détournant de leur fonction première et en sélectionnant de manière arbitraire les aspects confortant une vision prédéterminée et pour le moins « orientée ».
- Spoiler:
Les règles liées à l’abattage, dans les ouvrages de droit musulman, sont incluses dans le chapitre intitulé généralement « Des règles de la chasse et de l’abattage ». Les savants musulmans ont accolé les deux termes à partir d’une vision du monde dans laquelle manger de la viande ou du poisson est une nécessité liée à la survie de l’être humain. Ils ont donc cherché à faciliter la consommation de nourriture carnée à partir d’une règle d’hygiène fondamentale consistant à vider la bête de son sang avant de la consommer.
Ces juristes se sont penchés, en premier lieu, sur la typologie des animaux pouvant être abattus, à partir de différents paramètres. On citera notamment le régime alimentaire (herbivore, omnivore, carnivore), le mode de vie (domestique, sauvage, prédateur ou non), la fonction et l’utilité générale pour l’homme (comme le cheval, par exemple) et, enfin, la façon dont ils peuvent être appréhendés (élevage, chasse).
Sur la base de cette typologie, différente en fonction des écoles et de l’interprétation des sources scripturaires, d’autres considérations vont venir se greffer. Citons, entre autres, les techniques propres à la façon de tuer l’animal puis de le vider de son sang (dont les considérations éthiques liées au traitement avant, pendant et après l’abattage), l’identité de la personne habilitée à tuer l’animal (musulman ou non, exclusivement un homme ou non, etc.) et l’intention – formulée par la basmala ou non – qui doit être strictement liée à la nécessité de se nourrir pour ne pas tomber dans la transgression (i’tidâ’) ni dans l’exagération (isrâf).
Lorsqu’on est familier des subtilités et de la profondeur du droit musulman, on ne peut qu’être dépité face à la pauvreté des débats contemporains sur la production de la viande halal. Aujourd’hui, parler des caractéristiques de la lame ou de la souffrance liée aux techniques d’immobilisation de l’animal, c’est comme parler de la nature et de la pertinence des soins palliatifs chez un patient atteint d’un cancer en phase terminale.
Lorsque les céréales transgéniques, les farines animales et les antibiotiques deviennent monnaie courante dans les techniques d’élevage, lorsque des volailles sont engraissées en un peu plus d’un mois sans avoir pu marcher un seul jour ni voir la lumière naturelle, peut-on encore prétendre manger du « halal » parce que l’animal a été égorgé ? Les spécialistes de la filière ont tendance à tellement restreindre la notion à l’acte d’abattage lui-même qu’ils évacuent les considérations liées à la licéité ou non, à la base, des animaux destinés à la consommation.
- Spoiler:
À ce stade, les quelques traces d’ADN de porc que l’on retrouve dans les produits estampillés halal relèvent carrément de l’anecdotique. Sauf que les termes de « porc » et de « cochon » sont à ce point connotés, chez les musulmans, en termes de souillure, que leur simple évocation donne parfois la nausée aux moins pratiquants des fidèles de l’islam.
Si l’on pouvait accorder la même importance à un autre terme, bien connu des juristes musulmans, pour qualifier des animaux impropres à la consommation, on pourrait déjà avancer d’un grand pas. Ce terme est celui de jallâlah, qui signifie à la fois l’animal pouvant avoir un régime omnivore ou pouvant s’alimenter de souillures diverses et variées, lui conférant parfois une odeur nauséabonde. Les cas les plus connus sont ceux du chameau et de la poule. Les anciens avaient ainsi développé toute une approche intuitive, par la proximité et la connaissance du monde animal, leur permettant d’élaborer une taxinomie évolutive en fonction des textes, des cultures et des pratiques de chasse et d’élevage.
On se demande alors bien pourquoi les musulmans s’alignent aujourd’hui comme des moutons de Panurge sur la logique de la consommation de masse. Les organismes de contrôle et de certification sont ici concernés au premier chef, puisqu’ils doivent représenter les premières forces de proposition en la matière.
L’éthique musulmane de l’abattage incompatible avec l’approche industrielle ?
Faire du halal dans un système de consommation de masse n’est possible qu’en entretenant l’illusion d’une sacralité de l’égorgement et d’un bien-être de l’animal prétendument « consacré » par cet acte, d’où l’insistance exagérée sur la notion d’« abattage rituel ».
Cela suppose également de relativiser toute la part de mécanisation de l’abattage – que l’acte final d’égorgement soit manuel ou non –, en la taisant, en la rendant présentable ou en diminuant sa dimension normative. Les sophistes des temps modernes n’hésitent d’ailleurs pas à user d’arguments spécieux pour mentionner que les juristes musulmans ont rangé le mauvais traitement de l’animal non pas dans le champ de l’illicite (harâm), mais dans celui du répréhensible (makroûh).
Ils dévoient ainsi complètement la logique consistant à trouver des « issues » pour permettre au musulman la consommation d’animaux dans une situation où l’accès à la viande était bien plus rare. Nous sommes ici face à une rhétorique qui sied d’ailleurs parfaitement aux mentalités françaises, puisque l’illusion du « bifteck issu du terroir » est largement diffusée alors même que plus de 95 % de la viande que l’on consomme est issu de l’élevage industriel.
Quelques chiffres nous ramènent à la réalité : chaque année, ce ne sont pas moins de 1 milliard d’animaux domestiques qui partent sur les chaînes d’abattage en France, dont plus de 900 millions de volailles. Le sous-ensemble « musulman » de ce marché est à la fois considérable et en constante progression : selon certains cabinets, la filière halal concernerait potentiellement 10 % de la population française, pour un marché estimé à plus de 5 milliards d’euros en 2012 et en progression constante de plus de 10 % par an durant la décennie 2000.
De quoi attiser les appétits des industriels, à l’intérieur de l’Hexagone comme à l’exportation, car les musulmans consomment de la viande, beaucoup de viande... Cette consommation accentue toutes les contradictions entre la volonté d’avoir toujours plus de viande dans son assiette, mais qu’elle soit en même temps saine et de qualité.
L’exemple de la volaille est parfaitement illustratif de la situation : protagonistes et concurrents de la filière halal de la volaille sont à couteaux tirés sur les conditions d’allègement de la souffrance de la bête avant et après l’abattage, sachant que les poulets issus d’élevage intensifs arrivent déjà à l’abattoir après des conditions d’élevage et de transport absolument scandaleuses. Pendant ce temps, on trouvera toujours une tête musulmane bien- pensante pour rappeler au fidèle que la bonne pratique (sunnah) consiste à prendre de la viande avec les trois doigts de la main droite, sans l’alarmer sur la toxicité, à long terme, de ce qu’il ingurgite. Cela nous renvoie directement à la façon dont chacun envisage son mode de consommation, point qui fait l’objet d’un cruel déficit de conscientisation chez les consommateurs, y compris musulmans.
L’éducation à la consommation
Chez les musulmans, l’adjectif « rituel » est à l’abattage ce que l’« islamique » est à la finance : de jolis mots utilisés pour rassurer le consommateur que « tout est en ordre » sur le plan religieux, sans finalement rien changer sur le fond des problèmes.
L’un des aspects les plus problématiques de cet état de fait est la multiplication des entités – organismes, associations, entreprises – spécialisées à la fois dans le contrôle de l’abattage et/ou le conseil du consommateur, tout en œuvrant dans une logique commerciale avec, parfois, des conflits d’intérêt assez flagrants.
Un autre aspect tout aussi problématique concerne la bigoterie extrêmement répandue chez les musulmans. En langue française, le bigot est une personne très superstitieuse qui s’attache aux petits détails de la religion et qui gobe les discours d’une façon crédule, parfois au détriment du simple bon sens. Et en matière d’excès dans les détails au détriment des fondamentaux, les musulmans ne sont pas à la traîne.
Pour sortir de cette situation, il faudra commencer par l’option personnelle pour le « moindre mal » : que chacun fasse déjà l’effort de limiter au minimum sa consommation de viande. Lorsqu’on nous rabâche la capacité des marchés à s’adapter à la demande, il revient à chaque consommateur de considérer qu’il est un acteur à part entière et qu’il peut avoir du poids pour changer les choses.
Parallèlement, c’est toute l’éducation à la consommation qui est concernée, et là aussi les choses ne pourront évoluer sans une éthique partagée collectivement, au moins à l’échelle familiale et au sein des réseaux de sociabilité.
Ensuite, il faudra bien que les musulmans se creusent les méninges s’ils veulent être une force de proposition. Certains pays d’islam commencent à prendre au sérieux les questions environnementales liées à la production intensive de viande. Pour sortir de cette spirale, il est nécessaire de relire l’ensemble des sources scripturaires pour refonder une éthique islamique du rapport au monde et à l’animal. Cela pourrait aboutir à élaborer une taxinomie contemporaine des animaux consommables et la « normalisation » des manières de les appréhender, avec un cahier des charges strict sur le plan environnemental global.
Les accusations d’utopisme ne manqueront certainement pas, avec pour argument premier l’impossibilité de répondre à une demande énorme en viande sans transiger avec les règles de la production intensive.
Pourtant, les musulmans français ont avec eux une double opportunité.
La première est celle de vivre dans un pays suffisamment développé pour leur permettre d’expérimenter de nouvelles manières d’envisager le rapport à l’alimentation, à la lumière de leurs sources scripturaires.
La seconde est de pouvoir revivifier la production locale, autour des abattoirs de petite et de moyenne capacité, en développant le suivi complet de la filière, depuis l’élevage jusqu’au produit fini. Il y a là un chantier d’envergure pour pas mal d’années, pour peu que les acteurs musulmans du secteur osent s’affirmer et s’organiser.
* Omero Marongiu-Perria est sociologue, spécialiste de l'islam en Europe.
source: http://www.saphirnews.com/Le-halal-c-est-manger-bio-et-vegetarien_a16442.html
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