L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
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L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Ce n'est hélas pas nouveau, les gouvernements successifs cherchent toujours à attaquer l'excellent travail de l'Observatoire de la Laïcité au profit de leur vision partisane des choses... (pour mémoire, cf par ex https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2817-m-sifaoui-et-l-marchand-taillade-vs-coexister )
D'un autre côté, quand on garde au gouvernement une extrémiste comme M.Schiappa (dont le camp est clairement à la manoeuvre ici), comment s'étonner ? (souvenir de l'une des UV de mon DU sur le sujet, où j'ai dû acheter l'un de ses "livres" pour pouvoir décortiquer sa "vision" de la laïcité... sic)
Je lance ce fil de discussion pour garder un oeil sur ceci :
"l'homme démultiplie les prises de parole ambiguës"... sic.
L'art de manipuler le lecteur en posant un jugement subjectif comme s'il s'agissait d'un fait.
L'Observatoire de la Laïcité a un positionnement qui est celui des lois de 1905 ; mais ce positionnement est insupportable pour le camp laïcard qui avait perdu la partie il y a un siècle, mais qui tente de redéfinir la laïcité selon ses voeux un siècle après.
En 1905, la France avait réussi à trouver un point d'équilibre ; nous en aurions particulièrement besoin en ce moment, mais malheureusement, tout le monde semble rechercher la radicalisation...
D'un autre côté, quand on garde au gouvernement une extrémiste comme M.Schiappa (dont le camp est clairement à la manoeuvre ici), comment s'étonner ? (souvenir de l'une des UV de mon DU sur le sujet, où j'ai dû acheter l'un de ses "livres" pour pouvoir décortiquer sa "vision" de la laïcité... sic)
Je lance ce fil de discussion pour garder un oeil sur ceci :
https://www.lepoint.fr/politique/info-le-point-changement-en-vue-a-la-tete-de-l-observatoire-de-la-laicite-19-10-2020-2397125_20.phpSelon nos informations, le rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité, Nicolas Cadène, devrait être remplacé. « Il n'est plus crédible » (...)
Voilà plusieurs semaines que la ministre déléguée en charge des Citoyennetés, Marlène Schiappa, ronge son frein et s'agace en privé des prises de position publiques de Nicolas Cadène, le rapporteur général de l'Observatoire de la laïcité. L'organisme qu'il dirige, rattaché au Premier ministre, est officiellement chargé d'assister « le gouvernement dans son action visant au respect du principe de laïcité en France », en organisant notamment des formations auprès d'agents de l'État et de responsables associatifs. Dans les faits, l'homme démultiplie les prises de parole ambiguës qui agacent au sommet de l'État.
Outre le fait que ces prises de parole dissonantes ne font pas partie de la mission de l'Observatoire, c'est la conception de la laïcité de Nicolas Cadène qui est épinglée. « Il semble plus préoccupé par la lutte contre la stigmatisation des musulmans que par la défense de la laïcité. Le fait qu'il s'affiche et discute avec le CCIF [Collectif contre l'islamophobie en France, NDLR] a achevé d'agacer en très haut lieu », explique un proche de Marlène Schiappa. (...)
Chez les proches de la ministre, qui occupe le terrain sur les questions de laïcité, on considère que Nicolas Cadène ne peut plus poursuivre dans ses fonctions, qui plus est après l'attentat islamiste de Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines) : « Dans ce genre de structure, on a besoin de gens convaincus, de vrais laïques, pas de gens qui plaident pour une 'laïcité d'apaisement' ou qui sont obnubilés par les dérives d'extrême droite alors que les militants islamistes piétinent tous les jours la République » fait-on valoir (...)
« Il peut toujours expliquer qu'il est important de ne pas donner des armes au discours victimaire, c'est pourtant ce qu'il s'est employé à faire des dernières années, il n'est plus crédible », juge un proche de Schiappa. De sources ministérielles, la décision de le remplacer est actée. Ne reste qu'à la mettre en œuvre.
"l'homme démultiplie les prises de parole ambiguës"... sic.
L'art de manipuler le lecteur en posant un jugement subjectif comme s'il s'agissait d'un fait.
L'Observatoire de la Laïcité a un positionnement qui est celui des lois de 1905 ; mais ce positionnement est insupportable pour le camp laïcard qui avait perdu la partie il y a un siècle, mais qui tente de redéfinir la laïcité selon ses voeux un siècle après.
En 1905, la France avait réussi à trouver un point d'équilibre ; nous en aurions particulièrement besoin en ce moment, mais malheureusement, tout le monde semble rechercher la radicalisation...
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Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Pour alimenter le débat : https://www.causeur.fr/jean-louis-bianco-matignon-observatoire-laicite-islamisme-185642 (NB ce journal est bien sûr orienté, mais pas dans le sens du pouvoir actuel en général).
Extrait : "Pourtant nulle chasse aux sorcières là-dedans, mais la juste sanction de la trahison de ses devoirs et de sa mission par ce haut fonctionnaire, enfant gâté de la Mitterrandie. Il termine sa carrière dans l’opprobre, mais c’est lui qui l’a choisi. Parce que disons-le clairement, tous les laïques espèrent qu’à la sortie de ce rendez-vous à Matignon, ni Jean-Louis Bianco, ni Nicolas Cadène ne continueront un jour de plus à abîmer cet élément-clé de notre contrat social qu’est la laïcité, eux qui ont réussi à faire de cet observatoire la Société Protectrice des Religions ! On espère donc que le Premier ministre mettra fin aux hésitations et atermoiements qui ont caractérisé la gestion de ce dossier en prenant les décisions qui s’imposent, aussi froidement que fermement".
Extrait : "Pourtant nulle chasse aux sorcières là-dedans, mais la juste sanction de la trahison de ses devoirs et de sa mission par ce haut fonctionnaire, enfant gâté de la Mitterrandie. Il termine sa carrière dans l’opprobre, mais c’est lui qui l’a choisi. Parce que disons-le clairement, tous les laïques espèrent qu’à la sortie de ce rendez-vous à Matignon, ni Jean-Louis Bianco, ni Nicolas Cadène ne continueront un jour de plus à abîmer cet élément-clé de notre contrat social qu’est la laïcité, eux qui ont réussi à faire de cet observatoire la Société Protectrice des Religions ! On espère donc que le Premier ministre mettra fin aux hésitations et atermoiements qui ont caractérisé la gestion de ce dossier en prenant les décisions qui s’imposent, aussi froidement que fermement".
Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Nous sommes d'accord. Causeur a son orientation, qui n'a pas variée. Sans surprise, par exemple, on trouve aussi en lien dans l'article un article anti-Coexister : https://www.causeur.fr/business-coexister-samuel-grzybowski-vivre-ensemble-2-185098Spin a écrit:NB ce journal est bien sûr orienté, mais pas dans le sens du pouvoir actuel en général).
Ce qui est dramatique, c'est que le macronisme en perdition s'oriente volontairement en copie ratée de l'extrême-droite. "L'Histoire ne se répète jamais, mais elle bégaie souvent" : a y est, nous renouons avec le pire des années 30.
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Idriss aime ce message
Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
la suite (pour les abonnés) sur https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/10/31/jean-louis-bianco-la-priorite-est-de-former-les-enseignants-sur-la-laicite_6058024_3224.htmlIls restent. Des voix réclamaient le départ de Jean-Louis Bianco et de Nicolas Cadène, respectivement président et rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité. Depuis 2013, cet organisme indépendant, rattaché à Matignon, est chargé de conseiller le gouvernement. Périodiquement, il est accusé de mollesse face aux atteintes à la laïcité par les partisans d’une politique plus offensive. Le premier ministre, Jean Castex, a semblé donner raison à ces détracteurs, le 20 octobre, en annonçant qu’il allait « renouveler » l’Observatoire. Il a reçu Jean-Louis Bianco vendredi 30 octobre. L’Observatoire doit finalement être maintenu dans sa composition actuelle jusqu’au terme de son mandat, en avril 2021. « Il appartient au premier ministre de communiquer avant moi sur les décisions qu’il a prises », se contente d’indiquer M. Bianco.
Certains reprochent à l’Observatoire une approche trop juridique, qui l’aurait rendu aveugle à la montée du « séparatisme » islamiste. Y a-t-il eu défaillance dans le diagnostic ?
JL Bianco - Cette accusation est scandaleuse. Elle provient de gens qui ne lisent pas ce que nous écrivons. D’abord, sur l’approche juridique, nous sommes dans un Etat de droit. Ne pas appliquer le droit serait choquant. Cela permettrait à la loi du plus fort de s’imposer. Ensuite, dans tous nos rapports, nous avons attiré l’attention sur la montée des tensions et des conflits autour de la gestion du fait religieux, dans toutes les structures. Dès 2013, j’alertais sur les pressions communautaristes. Si ça, c’est une mollesse de diagnostic, je ne sais pas ce qu’est un diagnostic ferme (...)
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Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Quels attentats menaçaient tellement la France dans les années 1930 ?-Ren- a écrit:Ce qui est dramatique, c'est que le macronisme en perdition s'oriente volontairement en copie ratée de l'extrême-droite. "L'Histoire ne se répète jamais, mais elle bégaie souvent" : a y est, nous renouons avec le pire des années 30.
Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Quand la France (tout comme le Québec) sera véritablement laïc, ca ira mieux.
indian- Messages : 2844
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Date d'inscription : 10/10/2014
"La République ne doit pas devenir une Religion d'Etat"
Tribune particulièrement intéressante de Stéphane Lavignotte, pasteur protestant :
https://www.nouvelobs.com/idees/20201105.OBS35730/la-republique-ne-doit-pas-devenir-une-religion-d-etat.htmlPour répondre à la violence inouïe du terrorisme islamiste, la société française est tentée par un bond en arrière lourd de conséquences : non seulement passer d’une démocratie libérale à une démocratie « illibérale » et « militante » – « pas de liberté aux ennemis de la liberté » – mais aussi revenir à une vieille théologie politique, celle de « la France catholique » qui vit l’État catholique abroger l’édit de Nantes en 1685.
- Spoiler:
On voit poindre, en effet, la tentation de transformer « la République » en religion d’État et de transformer la lutte contre le terrorisme en lutte contre un « courant religieux », au risque de réveiller le vieux démon français des guerres de religions – dorénavant républicanisme contre islamisme (et espérons pas islam) – dont la loi de 1905 libérale de Briand et Jaurès fut la réelle extinction. Il serait ainsi fait un cadeau incroyable aux intégristes musulmans qui veulent eux aussi installer une « guerre de religions ». Précision : ce texte a été écrit avant la nouvelle de l’attaque de Nice, qui s’en prend à un lieu de culte et alimente à son tour la tentation de la guerre de religion. La mise en garde que propose ce texte n’en devient que plus urgente.
L’État n’a pas seulement déclaré la guerre au terrorisme islamiste mais aussi à certains courants de l’islam.
- Spoiler:
La mosquée de Pantin n’est pas tant fermée parce que son compte Facebook a partagé la vidéo du parent d’élève de Conflans-Sainte-Honorine que parce qu’elle a des responsables soupçonnés d’être salafistes. L’association BarakaCity a été dissoute pour sa participation au même courant, ce n’est pas seulement son président qui a été poursuivi pour le harcèlement électronique d’une ancienne journaliste de « Charlie-Hebdo ». Le CCIF n’est pas menacé pour avoir soutenu le même parent d’élève – et pour cause : il ne l’ai pas fait ! – mais parce qu’il est accusé d’être une « vitrine des Frères musulmans ». Dans les discours politiques, le concours Lépine – comme le dit Samuel Gontier dans « Télerama » – des idées par lesquelles l’État doit anéantir le salafisme et les frères musulmans est lancé.
En France, la liberté d’expression a des limites : l’insulte, la négation du génocide des Juifs, l’incitation à la haine raciale. On retrouve, dans les intentions de ces lois, une partie du raisonnement actuel de l’État. Il y a des idées qui non seulement sont en elles-mêmes des agressions contre des personnes, mais dont l’expression peut inciter à la violence contre des personnes ou un groupe réel ou supposé. Des raisonnements qui « arment » la violence, pour reprendre les termes du Ministre de l’Intérieur. Mais on le voit bien : une chose est de pouvoir interdire la négation d’un génocide ou un raisonnement raciste – assez définissable – et une autre est de pouvoir cerner une idéologie, aux contours trop flous et changeants, pour qu’un juge puisse se prononcer.
La réalité juridique éclairante en la matière n’est pas la comparaison avec ces limitations légitimes de la liberté d’expression, mais la différence entre démocratie libérale et « démocratie militante ». L’État est train de passer – sans discussion de fond et sous la pression des violents chocs émotionnels que nous avons subis (de l’attentat contre « Charlie Hebdo » en 2015 au meurtre de Samuel Paty) – de ce que les politistes appellent une démocratie libérale, à une démocratie militante, comme en Allemagne, qui a dans son droit des outils pour interdire des organisations qui ne commettraient aucun délit mais défendraient une idéologie menaçant la liberté – ce qui a conduit par exemple ainsi à l’interdiction, à l’Ouest, pendant des années, du Parti communiste aussi bien que des mouvements néo-nazis.
En France, il n’en est rien. Nous acceptons des organisations anarchistes, de gauches radicales, d’extrême-droite, royalistes, qui ont dans leurs objectifs politiques un autre système politique que la République, sans les interdire tant qu’elles ne commettent pas de violences. L’État a lutté avec ses moyens de répression contre des organisations qui voulaient la sécession de régions en France (la Corse, le Pays basque, la Bretagne, etc.) parce qu’elles le faisaient par des moyens militaires, mais toléré les organisations qui le font par des moyens légaux. Il faut remonter au régime de Vichy – et donc à une période non-démocratique – pour que l’État réprime pour elles-mêmes (et non pour des actions illégales) des idéologies ou des sensibilités spirituelles (en l’occurrence le communisme, la franc-maçonnerie, le judaïsme), et auparavant, en 1835, aux « lois scélérates » contre l’anarchisme.
C’est bien pour cette raison qu’il y a scandale quand l’État s’est commis à réprimer en sous-main des organisations pour leur idéologie et non pour leurs modes d’action.
- Spoiler:
Souvenons-nous récemment de l’affaire de Tarnac, ou il y a bien plus longtemps de l’affaire Duclos : l’arrestation de Jacques Duclos, secrétaire général par intérim du PCF, en mai 1952, pour avoir transporté un revolver, une matraque et deux pigeons… et pour freiner les communistes dans leur mobilisation antiaméricaine de l’époque. Il ne faut pas sous-estimer ce qu’a de dérangeant l’idée de « harceler », de « faire changer la peur de camp », ce qui signifie de sanctionner des personnes et des groupes pour des actions dont on n’a pas prouvé le caractère illégal, et de détourner pour cela d’autres textes de loi de leurs buts véritables. Il y a là une instrumentalisation – voir une perversion – du droit qui n’est pas anodine.
Il y a vingt-cinq ans, nous avions eu un débat sur le passage d’une démocratie libérale à une démocratie militante, la possibilité donc de réprimer des organisations pour leur idéologie et non leurs modes d’action : « Charlie-Hebdo », précisément, avait lancé une pétition pour interdire le Front National, qui recueillit 173 704 signatures en huit mois. Les uns défendirent le « pas de liberté aux ennemis de la liberté », les autres avancèrent que ce serait donner raison aux ennemis de la liberté, qu’interdire la conséquence n’entraînerait pas la disparition des causes du vote, qu’on ne pouvait pas interdire un phénomène sociopolitique de cette importance… Nous sommes restés une démocratie libérale. Et les arguments avancés alors d’un côté comme de l’autre seraient en grande partie valables aujourd’hui face à l’islam intégriste. Si ce débat était clairement posé et non tranché par des initiatives du gouvernement avant tout débat.
Mais il est à craindre que nous connaissions un bond en arrière encore plus conséquent, qui nous ferait revenir à une vieille théologie politique – nous ramenant au temps de la royauté catholique – avec comme conséquence de voir la République transformée en religion d’État, en lutte contre des religions concurrentes dans la société.
Le vocabulaire religieux est omniprésent dans nos débats depuis les attentats de 2005.
- Spoiler:
Il est revendiqué un droit au « blasphème » (et pas seulement à la caricature). Le « Professeur » et l’Education deviennent « sacrés ». Jusqu’à la « une » incroyable de « Paris-Match » cette semaine : « Samuel Paty, prof et martyr ». Ces mots fonctionnent initialement dans une compréhension religieuse du monde. Et encore, ils ont perdu beaucoup de sens dans une grande partie du catholicisme et surtout du judaïsme ou du protestantisme qui sont, petit à petit, devenus depuis le XIXe siècle des « théologies démocratiques », pour reprendre l’expression d’Éric Fassin dans la préface à mon ouvrage sur la théologie queer d’Elisabeth Stuart : des théologies où il n’y a plus rien d’indiscutable – ni sacré, ni « nature » du sexe par exemple. Des théologies démocratiques car en évolution par leur caractère historique, politique, c’est-à-dire soumises au débat et aux rapports de force de la politique, emportées dans le mouvement de l’extension sans fin du domaine de la démocratie, où plus rien n’est indiscutable.
D’ailleurs, il ne faut pas s’y tromper, cela concerne aussi l’Islam : si les courants institutionnellement minoritaires du salafisme ont une telle audience chez une partie des musulmans de France, c’est que ces derniers se renseignent par eux-mêmes et débattent sans cesse, notamment sur Internet. Hors des institutions établies.
Le recours à ce vocabulaire dit la tentation de certains de faire – à rebours des évolutions des religions et des sociétés – de la République une nouvelle religion, avec de l’indiscutable. D’où un certain court-circuit dans les débats : on demande aux enseignants d’apprendre aux élèves l’esprit critique et la liberté d’expression, tout en leur demandant de respecter le caractère indiscutable de la parole professorale, des programmes, de la République, de la théorie de l’évolution des espèces, du Big Bang…
Cette tentation religieuse de la République montre qu’opèrent toujours, en dessous de nos débats, de vieux théologèmes, ces catégories ou concepts issus de la théologie qui font tourner nos débats et productions contemporaines en « sous-terrain », quand bien même beaucoup ne croient plus en Dieu, et qui montrent – comme nous l’avions défendu avec Olivier Abel – que nous avons besoin de davantage de théologie pour comprendre les sociétés sécularisées.
Le rôle du théologien, comme le faisait André Dumas, dans les années 1960 à 1990, consisterait à donner aux participants du débat public cet éclairage théologique qui permet de savoir ce qu’on pense, plutôt qu’être pensé par un inconscient religieux.
- Spoiler:
Par exemple, depuis des années, comme je le critiquais dans « Les religions sont-elles réactionnaires ? », des théologèmes catholiques font tourner la façon qu’a l’État de « gérer » l’islam : vouloir un contrôle des imams par une instance centralisée comme un clergé catholique, un enseignement centralisé de la théologie comme dans les séminaires catholiques, pas de financement de l’étranger comme dans le vieux rêve de la royauté et des évêques français d’un « catholicisme de France », ce qu’on a appelé le gallicanisme, etc.
Depuis quelques semaines, la République semble tentée de reprendre le flambeau du théologème de la « France Catholique » : la France n’aurait eu hier qu’une religion, le catholicisme, aujourd’hui qu’une idéologie, la République, transformée en religion (le républicanisme), avec ses intouchables et indiscutables ; et l’État aurait pour mission d’en assurer la domination contre toute autre idéologie/religion concurrente dans la société.
Dans notre histoire, cela a abouti aux guerres entre catholiques et protestants. L’Édit de Nantes en 1598 y met fin en reconnaissant la pluralité religieuse en France, Louis XIV l’abroge en 1685, après une série de décrets qui éliminent petit à petit les protestants des différents métiers et de toute visibilité publique. La fin véritable de cette tentation n’est-elle pas la loi de 1905, raison pour laquelle il est crucial d’en défendre l’acquis comme le font avec intelligence Jean-Louis Bianco et Nicolas Cadène ? L’État dit sa neutralité du point de vue religieux, et assure la liberté de croyance et de débat sur ces sujets. Il est aussi affirmé que la « France Républicaine » n’est pas la « France catholique », et qu’elle n’est pas républicaine dans le même sens qu’elle était catholique : la République n’est pas une idéologie (elle n’est pas un républicanisme) qui s’impose face à d’autres idéologies (en l’occurrence religieuses) comme l’auraient aimé les partisans laïcistes d’Emile Combes, mais un régime politique avec comme composantes la démocratie, le vivre ensemble, une vision un peu naïve de l’intérêt général, le tout basé sur des valeurs assez inclusives, appropriables par la plupart des idéologies et religions : liberté, égalité, fraternité, solidarité, tolérance.
C’est cela qu’il faut préserver, car il en va de la défense de la République comme inspirée par ces principes mêmes, contre le passage à une démocratie militante et le retour à une théologie politique. Bien plus : faire de la République une nouvelle religion en lutte contre un courant religieux (même minoritaire), religion contre religion, bande contre bande, comme les policiers dans les quartiers populaires avec les résultats catastrophiques que l’on sait, c’est « donner raison », en tout cas alimenter la machine à propagande de ce courant minoritaire islamiste réactionnaire qui voudrait enrôler tous et toutes les musulmans et musulmanes dans une guerre de l’occident contre les musulmans. Nous y perdrions la paix civile, et l’âme de ce qui nous fait vivre ensemble.
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Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
la liberté d'expression sans les limites du maintien de l'ordre public, n'est en rien la laïcité.
indian- Messages : 2844
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Date d'inscription : 10/10/2014
Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Sans surprise hélas, le camp des extrémistes a une nouvelle victoire :
https://www.bfmtv.com/politique/marlene-schiappa-confirme-que-l-observatoire-de-la-laicite-va-evoluer-sous-une-autre-structure_AN-202012130151.html(...) Marlène Schiappa a confirmé ce dimanche que l'Observatoire de la laïcité, créé en 2007, allait "évoluer" vers une nouvelle "structure". Invitée de Radio J, la ministre déléguée chargée de la citoyenneté a réaffirmé la position du gouvernement sur le non-renouvellement de son président, Jean-Louis Blanco, ainsi que de son rapporteur général Nicolas Cadène.
Interrogée sur cet observatoire, dont ses détracteurs lui reprochent une conception trop ouverte de la laïcité, Marlène Schiappa a déclaré que la dissolution était la piste privilégiée par le gouvernement : "Le premier ministre m’a demandé de lui faire des propositions d’évolution sur le portage de la laïcité dans l’appareil d’État. J’ai fait des propositions au Premier ministre pour faire évoluer l’Observatoire de la laïcité, pour renforcer le rôle d’une structure, qui ne serait pas forcément un observatoire, mais une structure qui porterait la parole de l’État."
Sur les personnes envisagées pour porter cette nouvelle structure, la ministre prend le soin de ne pas répondre : "La vraie question est quelle structure et quelle feuille de route. La question des personnes est importante mais secondaire."
Elle reconnaît toutefois que le Premier ministre souhaite que Jean-Louis Blanco et Nicolas Cadène aillent au bout de leur mandat, le 2 avril, mais qu'ils ne soient pas reconduits. "Chacun fini son mandat", tranche-t-elle, ajoutant, "Nicolas Cadène a dit dans une interview récente qu’il se voyait dans d’autres responsabilités pour la suite, c’est légitime." (...)
Jean-Louic Blanco s'était défendu en affirmant que l'Observatoire "n’adjective jamais la laïcité et rappelle très strictement le droit." Il avait également rappelé que l’Observatoire "est à l’origine de la circulaire contre l’islamisme et pour la laïcité de février 2020 et que plusieurs de ses préconisations ont été reprises dans le discours du 2 octobre du Président de la République à propos du projet de loi (sur le séparatisme)."
L'Observatoire est également "à l’origine de l’obligation pour les imams détachés et les aumôniers d’être formés à la laïcité", et a formé "plus de 350.000 acteurs de terrain", ajoute Jean-Louis Bianco qui appelle à "faire bloc" dans "le combat contre l’islamisme et contre tous les fanatismes". Des justifications insuffisantes, aux yeux du gouvernement.
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Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Je vois bien Zemmour et Badinter succéder à Bianco et Cadène .
red1- Messages : 831
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Re: L'Observatoire de la Laïcité à nouveau remis en question
Très juste, merci, Ren !
L'Observatoire de la Laïcité a un positionnement qui est celui des lois de 1905 ; mais ce positionnement est insupportable pour le camp laïcard qui avait perdu la partie il y a un siècle, mais qui tente de redéfinir la laïcité selon ses voeux un siècle après.
Jans- Messages : 3583
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