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À Tibhirine, l’harmonie entre chrétiens et musulmans reste une réalité

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À Tibhirine, l’harmonie entre chrétiens et musulmans reste une réalité Empty À Tibhirine, l’harmonie entre chrétiens et musulmans reste une réalité

Message  Invité Jeu 25 Jan - 8:05

http://www.lemondedesreligions.fr/une/a-tibhirine-l-harmonie-entre-chretiens-et-musulmans-reste-une-realite-23-01-2018-6995_115.php


Propos recueillis par Marie Chabbert - publié le 23/01/2018


Cinq ans après l’assassinat des sept moines de Thibirine (Algérie) en 1996, le père Jean-Marie Lassausse a pris en charge le monastère et son exploitation agricole. Dans N’oublions pas Tibhirine*, il témoigne sur ces quinze dernières années et défend la vocation sociale et humaniste du monastère.


Depuis 1980, le père Jean-Marie Lassausse dédie sa vie à la Mission de France. Après quatre années en Tanzanie et douze en Égypte, celui qui se décrit volontiers comme un «prêtre-paysan» est appelé en renfort en Algérie. Nous sommes alors à la fin des «années noires» (1991-2002), décennie durant laquelle l’opposition musclée entre le gouvernement algérien et des groupuscules islamistes a ravagé le pays. Les étrangers – journalistes, ambassadeurs, mais aussi le clergé catholique composé en majorité de religieux étrangers –, pris en tenaille dans le conflit, ont, pour la plupart, fui le pays. Dix-neuf religieux et religieuses français, belges et espagnols ayant refusé de quitter le pays sont assassinés entre 1994 et 1996. C’est le cas de sept des neuf moines trappistes de Tibhirine, enlevés puis tués au printemps 1996, dans des circonstances troubles. Si la version officielle accuse les islamistes du Groupe islamiste armé, d’autres hypothèses en font porter la responsabilité au gouvernement algérien. C’est donc dans un climat tendu que Jean-Marie Lassausse arrive à Alger à l’appel de l’évêque Mgr Teissier. Seulement cinq ans après l’assassinat des moines de Tibhirine, en mai 2001, il accepte pourtant de prendre la charge du monastère et de son exploitation agricole.


Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre la responsabilité du monastère malgré les risques que cela représentait alors ?


Lorsque j’ai été invité à me rendre pour la première fois à Tibhirine, le jour de l’anniversaire de la mort des frères, le 21 mai 2001, j’ai été frappé par l’empreinte que cinquante-huit années de présence cistercienne avaient laissée sur la région. Au gré de mes rencontres avec les quelques habitants du monastère et la population locale, j’ai rapidement constaté que le bilan était extrêmement positif. Cela a touché quelque chose en moi : la vocation première de la Mission de France est en effet de partager la vie des gens dans la société civile et de tisser avec eux des liens forts. C’est ce qu’ont fait les moines trappistes à Tibhirine, développant une harmonie fraternelle et une profonde amitié avec la population locale musulmane. Un tel héritage ne devait pas être perdu par la faute d’un acte déraisonné de violence – qu’il soit l’œuvre d’islamistes ou du gouvernement importe peu. Après vingt-quatre heures de réflexion, j’ai estimé que c’était un clin d’œil de l’Esprit de m’envoyer à Tibhirine et j’ai accepté la proposition du père André Barbeau.


C’est non seulement en tant que prêtre de la Mission de France, mais aussi en tant qu’ingénieur agronome de formation, que vous avez pris vos fonctions…


Tibhirine se décline en trois volets. C’est bien entendu un lieu d’Église, un lieu de prière, de célébrations. C’est aussi un lieu d’accueil où musulmans et chrétiens se croisent. Les musulmans sont bien plus nombreux, étant donné qu’environ 80 % des visiteurs sont des Algériens. Nous remplissons cette mission d’accueil au quotidien avec l’aide de volontaires laïcs venus de France, de Belgique et d’ailleurs.


Mais Tibhirine, c’est aussi une exploitation agricole. Depuis 58 ans, les habitants du monastère sont enregistrés auprès des autorités algériennes, pour des raisons administratives et d’assurance sociale, comme des « religieux-agriculteurs ». Ces dernières années, nous avons appelé deux salariés, habitants du village, en renfort. L’agriculture fait donc partie intégrante de l’identité du monastère… ainsi que de la mienne. Étant d’une famille paysanne des Vosges, j’ai toujours aimé le contact de la terre. Cultiver la terre est pour moi une manière de cultiver sa foi. Je crois en effet que la Création est l’œuvre de Dieu et que l’homme est inséré dans la Création pour l’embellir – et non pas la détruire. L’encyclique du pape François, Laudato Si , nous rappelle nos responsabilités envers la Création.


Vous écrivez que le monastère a aussi une vocation sociale, qu’il existe « une raison sociale d’être là », à Tibhirine. Que voulez-vous dire ?


Cette raison sociale est en premier lieu l’agriculture. Grâce à notre production agricole, nous nous insérons dans le tissu économique de la région, notamment par des échanges commerciaux avec la population locale. Tout le voisinage du monastère profite des retombées économiques. Il faut bien faire vivre notre petite communauté ! Au cours de ces dernières années, j’ai aussi mis sur pied d’autres projets pour développer le rôle social de Tibhirine. Ils n’ont malheureusement pas pu aboutir. Je pense, par exemple, que Tibhirine aurait tout intérêt à s’inscrire dans un projet d’apprentissage incluant des jeunes fragiles, en difficulté ou handicapés. Par ailleurs, des artistes du monde entier ont produit des œuvres au sujet du monastère. Il aurait donc été intéressant d’en faire un lieu de culture où sont réalisés et exposés peintures, sculptures, vitraux, livres d’art et autres projets artistiques. Cela se fera peut-être un jour.


Pour des raisons de sécurité, de nombreuses mesures de contrôle et de protection ont été mises en place depuis 1996. Vous souhaitez cependant que le monastère reste un lieu d’ouverture et d’accueil…


Cela fait partie des contradictions de Tibhirine. Le monastère représente un tel contentieux entre la France et l’Algérie que des mesures de sécurité s’imposent. Mais comment être accessible, comment remplir la mission d’accueil du monastère, si l’on croule sous les mesures de sécurité ? Nous faisons aujourd’hui notre possible pour que ces mesures soient allégées, de façon à ce que Tibhirine reste une plateforme de rencontre et d’échange entre chrétiens et musulmans.


En quoi consiste le Ribat es-Salam, dont vous parlez dans votre livre ?


Le Ribat es-Salam est une création de monseigneur Claude Rault, aujourd’hui évêque émérite de Laghouat, en Algérie, et du père Christian de Chergé [un des moines assassinés en 1996, ndlr]. L’idée était de rencontrer les membres de la zaouïa, c’est-à-dire de la confrérie soufie Alawiyya, non seulement pour apprendre à se connaître, parler de la pluie et du beau temps, mais aussi et surtout pour être ensemble à l’écoute de l’Esprit, entre musulmans et chrétiens. Les soufis sont, pour moi, les gens avec qui nous avons une plus grande facilité de dialogue spirituel. Après une petite mise en veilleuse pendant les années noires, le Ribat es-Salam a repris avec deux rencontres par an au monastère.


Pourriez-vous expliquer les mots de Christian de Chergé : « L’Algérie et l’islam, pour moi, c’est (…) un corps et une âme » ?


L’islam est avant tout une communauté, l’oumma. Les musulmans sont unis, et prient, quel que soit leur rang social, les uns à côté des autres. Dans l’islam, il y a donc un très fort esprit de corps. C’est aussi une spiritualité que l’on doit approcher au travers des musulmans et pas seulement de manière théorique et littérale. La religion musulmane est d’abord ce qu’en font les croyants qui sont, comme nous les chrétiens, bien différents les uns des autres dans leur cheminement de foi. L’islam est donc bien un corps, l’oumma, et une âme, spirituelle, vivante, celle de chaque musulman.


Selon vous, dans un climat parfois tendu dans les pays occidentaux lorsqu’il s’agit de la cohabitation de plusieurs traditions religieuses et culturelles, que peut nous enseigner l’expérience pratique de coexistence interreligieuse à Tibhirine ?


Vous savez, je rentre une fois par an et il m’est facile de constater, au sein de ma propre famille, que la relation des Français avec les musulmans vient avant tout d’une méconnaissance de l’Autre. Beaucoup de Français n’ont jamais rencontré d’étrangers ! Ils les ont peut-être croisés dans le métro, mais n’ont jamais construit une relation avec un étranger, et encore moins avec un musulman. À la base de nos difficultés en Europe, je crois qu’il y a un grave déficit de relations humaines. Tibhirine doit constituer pour nous une sorte d’aiguillon, car c’est la preuve vivante qu’il est possible pour des chrétiens de vivre en harmonie avec la population musulmane.


De nombreux journaux annoncent une possible béatification de religieux et religieuses assassinés en Algérie entre 1994 et 1996, dont les sept moines de Tibhirine, d’ici fin janvier.


Inch’Allah !


Qu’est-ce que cette décision représente pour vous ?


J’ai suivi ce projet depuis sa genèse en 2006, avec l’ouverture du procès en béatification au niveau diocésain. J’ai trouvé particulièrement enrichissante la première étape de collecte de témoignages sur le quotidien et le travail des moines, ainsi que les auditions par le tribunal ecclésiastique. Maintenant, le stade final approche : le décret de béatification est attendu sous peu. C’est pour moi une grande joie, principalement parce que cela montre que l’Église honore, sanctifie, béatifie, non seulement des papes ou des évêques, mais aussi des gens ordinaires. La plupart des dix-neuf religieux et religieuses qui vont être béatifiés étaient des gens simples, du peuple, comme vous et moi. Ça, c’est extraordinaire.


Selon vous, que doit nous inspirer le martyre des moines de Tibhirine ?


L’ouverture à l’Autre. Il faut engager le dialogue avec les autres croyants ! Avec la mondialisation, nos sociétés sont appelées à devenir de plus en plus multiculturelles, et les religions à se côtoyer. Il est donc fondamental d’apprendre à se connaître, à dialoguer, pour vivre en harmonie plutôt que de s’inscrire dans une confrontation des cultures et des religions. Les moines nous ont donné un exemple qui est parlant aujourd’hui : ils étaient une minorité chrétienne vivant en harmonie fraternelle avec une population à grande majorité musulmane. La communauté du Chemin-Neuf, qui est œcuménique, perpétue maintenant cet héritage.

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