"Ces islams d'Afrique que l'Occident ne veut pas voir"
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"Ces islams d'Afrique que l'Occident ne veut pas voir"
L'Institut du monde arabe propose jusqu'au 30 juillet 2017 une exposition sur l'influence de l'Islam au sud du Sahara ; interview de l'anthropologue et ethnologue Jean-Loup Amselle :
http://www.lepoint.fr/culture/ces-islams-d-afrique-que-l-occident-ne-veut-pas-voir-11-05-2017-2126442_3.phpC'est justement l'idée même d'un islam qui serait spécifique à l'Afrique noire que je condamne dans mon livre Islams africains : la préférence soufie. L'islam est l'islam, où qu'il soit pratiqué. Simplement, du fait des coutumes locales, il peut présenter des variantes, mais ce n'est pas vrai seulement pour l'Afrique, c'est vrai pour tous les pays. Le Maroc connaît ainsi un culte des saints. Et la manière de vivre et de pratiquer l'islam au Mali n'est pas la même qu'au Sénégal. Donc, non, il n'existe pas un « islam africain », et surtout pas un « islam noir ». C'est une création coloniale (...)
Ce concept a été « inventé » au XIXe siècle par une cohorte d'administrateurs coloniaux qui se voulaient ethnologues comme Faidherbe, Gallieni, Binger, Delafosse, Charles Monteil, le propre père de Vincent Monteil, etc. (...)
Pour les coloniaux, l'islam maghrébin était promu par les Arabes, leurs ennemis, puisqu'ils s'opposaient à la conquête : il était donc despotique et violent. Ils l'opposaient à celui des Berbères, qu'ils jugeaient – à tort – moins fondamentalistes dans leur pratique, et surtout beaucoup plus démocrates. Faidherbe, qui avait commencé sa carrière au sein des « Bureaux arabes » au Maghreb, a ensuite transposé au Sénégal les méthodes utilisées en Algérie avec les Arabes et les Berbères : diviser pour mieux régner. Il opposait ainsi les Maures et les Peuls, races jugées violentes et despotiques, aux « bons Noirs », ceux qui n'étaient pas de bons musulmans, soit parce qu'ils étaient païens, soit parce qu'ils étaient porteurs d'un islam mêlé de paganisme, comme les Wolofs et les Sérères (...)
Prenez l'exemple de Marcel Griaule et de sa compagne Germaine Dieterlen. Ces chercheurs étaient pétris de culture antique. Ils se sont intéressés aux Dogons et aux Bambaras parce qu'ils pensaient trouver en eux une population « vierge », animiste, qui leur rappelait la Grèce archaïque, et la Théogonie d'Hésiode. Ils n'ont pas hésité à occulter la présence de l'islam dans les mythes dogons, alors qu'ils sont porteurs d'influences coraniques. Griaule lui-même a fait en sorte que tous les dignitaires du pays Dogon qui représentaient l'empire d'El Hadj Omar soient écartés au profit des chefs rituels, les fameux « Hogons ». Quand je suis arrivé pour la première fois en pays Dogon en 1967, Germaine Dieterlen était en train de préparer un documentaire avec Jean Rouch sur le « sigui », un rituel d'inversion des genres censé avoir lieu tous les 60 ans. Or le pays Dogon comptait de nombreuses mosquées : d'après ce que l'on m'a dit, c'est Germaine Dieterlen qui a demandé qu'elles n'apparaissent pas dans le film. Les ethnologues ont ainsi construit de toutes pièces une société dogon déislamisée, dépolitisée et déhistorisée (...)
Hier, les Français ont donc encouragé le développement des confréries, notamment celle des Mourides, pour gérer et encadrer les populations. Certaines ont certes résisté, comme au Mali le hammalisme, une dissidence de la grande confrérie tidjaniya. Mais l'écrivain Hampaté Ba était un hammaliste et il a pourtant collaboré avec les coloniaux contre les wahhabites... Aujourd'hui, on oppose le soufisme au wahhabisme, au salafisme et bien sûr au djihadisme. Ce serait même le remède contre le djihadisme. Au Maroc, Mohammed VI encourage ainsi les « moussem », les pèlerinages soufis, ainsi que de nombreuses manifestations culturelles comme les festivals des musiques sacrées de Fez ou celui des Gnaoua d'Essaouira, pour montrer que le véritable islam sur le continent africain, c'est le soufisme. Mais c'est une illusion, voire une falsification : le soufisme n'est pas le « véritable » islam en Afrique ; il n'est pas forcément pacifique et tolérant et peut très bien s'accompagner d'actions violentes. Au XIXe siècle, des djihads ont été menés en Afrique noire par des soufis. Et, inversement, tous les wahhabites et salafistes ne sont pas djihadistes (...)
Le wahhabisme au Mali n'est pas le même qu'en Côte d'Ivoire ou en Arabie saoudite. Mahmoud Dicko est un quiétiste qui refuse le djihad et l'application des règles les plus violentes de la charia, comme le fait de couper les mains des voleurs. Alors que les fondamentalistes wahhabites refusent tout ce qui s'est passé avant l'islam, lui affirme que ce qui fait tenir ensemble la société malienne, ce sont l'islam et les traditions pré-islamiques, d'où l'importance de s'appuyer sur ces traditions, garantes de l'ordre (...)
Le problème de l'excision est différent. C'est devenu un marqueur politique qui oppose la bourgeoisie laïque, féministe, pro-occidentale – et soit dit en passant, passablement opportuniste parce qu'elle veut récupérer l'argent que propose l'Occident pour lutter contre cette pratique – aux religieux nationalistes et anti-occidentaux. Ce qui explique que Mahmoud Dicko se soit opposé à la loi que le ministre de la Santé du Mali se faisait fort de faire voter avant la fin 2017 pour interdire l'excision. C'est la même chose pour le combat contre l'homosexualité. Fondamentalement, ceux qui veulent que les homosexuels soient criminalisés ne s'y intéressent que parce que c'est un moyen de s'opposer au libéralisme occidental en matière sexuelle. Mais, là encore, ce n'est pas seulement un phénomène africain. On le voit en Tunisie, les islamistes peuvent avoir des positions plus cool que les laïcs, notamment sur l'homosexualité. C'est donc moins un problème religieux que politique. Ce qui est important, cependant, c'est que la société malienne évolue. Un imam wahhabite m'a dit : « Mes premières filles ont été excisées et les autres, non. C'est une tradition dans l'islam, ce n'est pas une règle fondamentale de la religion. » (...)
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Re: "Ces islams d'Afrique que l'Occident ne veut pas voir"
Je suis né en France mes parents sont maliens je me pose des questions sur l'avenir de mon pays
bakary- Messages : 14
Réputation : 0
Date d'inscription : 10/08/2017
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Re: "Ces islams d'Afrique que l'Occident ne veut pas voir"
Bonjour et bienvenue.bakary a écrit:Je suis né en France mes parents sont maliens je me pose des questions sur l'avenir de mon pays
Sur ce forum, nous avions tenté, depuis 2012, de comprendre un peu plus la situation malienne sur ce fil de discussion : https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t1470-islamistes-au-mali
Merci d'avance pour tout éclairage supplémentaire !
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Re: "Ces islams d'Afrique que l'Occident ne veut pas voir"
Merci pour votre accueil je vais lire ce que vous me proposez
bakary- Messages : 14
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Date d'inscription : 10/08/2017
Age : 26
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