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"Comprendre l’islam - ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien"

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"Comprendre l’islam - ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien" Empty "Comprendre l’islam - ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien"

Message  -Ren- Sam 1 Oct - 15:18

Merci à rosarum d'avoir attiré mon attention là-dessus sur le forum partenaire ; un plaisir pour moi de lire quelqu'un partageant à ce point mon propre point de vue ;)
Adrien Candiard a écrit:(...) Comme islamologue, membre d’un centre de recherche, l’Idéo, spécialisé sur l’islam, je me sens en ces jours une certaine responsabilité. Je n’ai pas la naïveté de penser que l’islam est une clef universelle qui ouvre la serrure de tous nos questionnements angoissés ; mais enfin, il faut que chacun s’y mette dans son domaine : la géopolitique, l’histoire, la sociologie, la psychiatrie mais aussi la théologie musulmane. Car mon domaine, l’islam, n’est sans doute pas le moins opaque.

On ne peut pas dire qu’on n’en parlait pas. Avant l’attentat contre Charlie hebdo et l’hyper-casher en janvier, déjà, il n’était question que d’islam. Depuis des années, nous sommes abreuvés d’informations et d’opinions sur l’islam. L’actualité tragique du monde comme les mutations profondes de la société française, tout ne cesse de pointer vers cet islam auquel journaux, sites Internet et émissions de télévisions consacrent tant de décryptages. Il sortait tous les mois trois essais sur l’islam, et je pense que la concurrence va s’intensifier. Déjà, il ne s’agissait pas de comprendre l’islam parce que le sujet est intéressant, mais parce qu’il inquiète (...)

Je comprends cette envie d’aller vite, de frapper fort, de ne pas faire nécessairement dans la dentelle. Mais je crois aussi que si nous ne voulons pas ressembler à Daech, alors, passée l’émotion légitime, il faut réfléchir, prendre le temps de comprendre (...) Et c’est là tout le problème : plus on explique, moins on comprend (...) Tous ces gens ont l’air bien informés, et ils ne parviennent pas à se mettre d’accord. Les uns disent que l’islam est une religion de paix, et que les barbares qui s’en réclament la pervertissent évidemment (...) D’autres, avec le même aplomb, nous disent que l’islam est évidemment une religion violente, et ils nous citent des versets insupportables tirés du même Coran (...) J’aimerais, pour faciliter nos efforts de compréhension, essayer de voir pourquoi il est si difficile de se faire une idée simple sur l’islam. Si nous comprenons pourquoi nous n’y comprenons rien, ce sera déjà une première étape.

Je crois d’abord que deux erreurs courantes empêchent d’y comprendre quoi que ce soit. La première, c’est de croire que l’islam existe ; la seconde, de croire qu’il n’existe pas (...)

La première erreur, croire que l’islam existe, c’est croire d’abord que les musulmans ne sont que des musulmans ; que leur identité religieuse recouvre tout le reste : opinions politiques, solidarités nationales ou ethniques, culture, fantaisie… Un ingénieur musulman pense-t-il comme un ingénieur ou comme un musulman ? Tout cela est évidemment plus complexe. J’ai fait profession de suivre le Christ, d’y consacrer ma vie, mais je ne suis pas dupe : mon christianisme est loin de tout expliquer de mes réactions, de mes idées, de mon attitude, parce que je suis quelqu’un de compliqué. Pourquoi les musulmans seraient-ils plus simples ? Quand bien même, comme certains l’affirment, l’islam serait une religion totale, englobant tous les aspects de la vie, quand bien même l’islam aurait cette ambition, elle serait à peu près irréalisable dans la pratique. Milieu familial, déterminisme social, vie sexuelle, disposition nerveuse, les facteurs sont innombrables, et les convictions théologiques n’en sont qu’un parmi d’autres. Même pour les musulmans, même pour les fanatiques – qu’ils le veuillent ou non. Ce serait leur faire trop d’honneur, il me semble, que de les croire sur parole quand ils se disent mus par de simples préoccupations religieuses.

Renoncer à croire que l’islam existe, c’est aussi ouvrir les yeux sur l’extrême diversité des manières de vivre l’islam. La diversité est culturelle, de l’Indonésie au Sénégal, même si l’islam arabe, celui dont nous sommes le plus familier, garde une autorité morale importante. Mais la diversité est aussi théologique. Il y a bien sûr la grande division, qui est aujourd’hui la principale source de violence, entre sunnites et chiites : la séparation est ancienne, mais ce n’est que récemment qu’elle semble atteindre un point de non-retour qui déstabilise tout le monde arabe. Mais cela va plus loin. Les points d’accord entre tous les musulmans du monde sont au fond très peu nombreux : croire qu’il n’y a qu’un Dieu, que Mahomet est son Prophète, que le Coran témoigne d’une manière ou d’une autre de la volonté de Dieu pour les hommes, qu’un Jugement divin nous attend au dernier jour. C’est à peu près tout. Dès qu’on essaie d’entrer dans davantage de détail, d’expliciter un peu une de ces formulations sommaires, la diversité saute aux yeux. Prenez une question comme celle, brûlante, du jihād, la fameuse guerre sainte, incontestablement mentionnée dans les sources islamiques. Un salafiste de Daech vous dira que c’est une obligation individuelle et que chacun doit aller tuer au plus vite tous les mécréants, les non-musulmans comme les faux musulmans (ceux qui ne sont pas de leur groupe), par des attentats au besoin. Un juriste classique vous dira qu’il s’agit d’une obligation collective, et non individuelle, et qu’elle ne peut être accomplie que par l’autorité politique légitime, certainement pas par le premier venu se croyant investi d’une mission ; et il ajoutera le plus souvent que le jihād est défensif, qu’il vise à défendre les territoires musulmans contre les agressions, et non à agresser. Enfin, un soufi vous expliquera que le véritable jihād, c’est la guerre contre le péché, contre nos passions mauvaises, et qu’il s’agit donc d’ascèse et de travail sur soi. Et entre ces trois positions bien distinctes, que de nuances il faudrait présenter (le terroriste ne fait pas l’unanimité, loin de là, chez les salafistes, et certains soufis sont favorables à la lutte armée) ! Qui a raison ? Qui est plus musulman que les autres ? Bien malin qui peut le dire. Notre choix serait dicté par nos préférences (on favorisera le soufi parce que cela nous paraît plus gentil, et nous permet donc de « sauver » l’islam) ou nos angoisses (le salafiste aurait raison, parce qu’ainsi au moins, nous serions fixés). Il faut commencer par ne pas choisir et accepter que cette diversité existe, irréductible.

Vous allez me dire que j’exagère et qu’il y a, tout de même, un islam un peu objectif : celui du Coran. Les musulmans peuvent bien dire ce qu’ils veulent, mais pour découvrir le « vrai visage » de l’islam, pour en capturer l’essence et juger sur pièces du danger qu’il nous fait ou non courir, il suffirait d’aller à la source et de lire les textes fondateurs. Le procédé semble très simple, mais il va vite tourner court. Tout d’abord, le Coran est un texte à peu près incompréhensible. Certains de ses versets sont très clairs, mais le livre lui-même est extrêmement difficile. Le sens même des mots arabes dans ce texte très ancien est, dans beaucoup de cas, absolument conjecturel. Et même lu en traduction, c’est-à-dire après un choix d’interprétation, il reste mystérieux. Ceux qui vous disent que le Coran est très clair ne l’ont manifestement jamais ouvert (...)

Cela ne signifie pas, bien sûr, qu’on puisse absolument tout lui faire dire : impossible de fonder un polythéisme sur le Coran, ou un athéisme ; on n’y trouvera pas la Trinité chrétienne, on n’y trouvera pas non plus la philosophie de Spinoza. On ne peut pas tout lui faire dire, mais reste qu’il a le dos large. Et surtout, il ne parle pas tout seul. Croire qu’un texte, et spécialement un texte considéré comme saint, parle de lui-même et qu’il suffit de l’ouvrir pour le comprendre est une illusion. Tout texte appelle nécessairement une interprétation, et ceux-là même qui en nient la nécessité, qui prétendent pratiquer le littéralisme le plus rigoureux, proposent en fait eux aussi une méthode de lecture et d’interprétation (...) Ce qui fera l’unité de la lecture, ce qui donnera le sens du texte, et pas d’un verset par-ci par-là, c’est l’interprétation. Et force est de constater que l’islam a proposé historiquement et propose toujours des interprétations très différentes. Impossible de définir laquelle est la plus juste.

Il ne faut pas forcer le trait, évidemment : le Coran fourni un cadre à ces interprétations, mais aussi un imaginaire, et cet imaginaire n’est pas un imaginaire non-violent. Cela interdit-il toute lecture radicalement non-violente du Coran ? Non. Mais à l’inverse, le Coran n’oblige pas à une lecture violente. Pour tenter d’aller un peu plus loin, je dirais que le Coran n’est pas un texte violent, mais qu’il offre une certaine disponibilité à un usage violent. Une comparaison peut être éclairante, si on en ôte l’effet « point Godwin » tout à fait fâcheux : Wagner n’était pas nazi, Nietzsche n’était pas nazi, mais ils ont pu être récupérés par le nazisme ; ce que le nazisme n’aurait jamais pu faire avec la philosophie de Kant ou la musique de Haydn. Faut-il condamner Wagner et Nietzsche pour cette disponibilité ? Je ne le crois nullement. Ils méritent qu’on les connaisse pour eux-mêmes, pas qu’on les condamne par l’usage que des criminels en ont fait.

D’autant qu’il n’y a pas, en matière de texte sacré, que le Coran. L’islam, c’est aussi des dizaines de milliers de ḥadīṯs (...) On dit que l’islam, c’est le Coran, et c’est effectivement la théorie ; mais dans la pratique, l’islam, c’est bien plutôt le ḥadīṯ (...) Là encore, il y a des écoles, qui ne partagent pas le même corpus. Et quand, aux différentes écoles sur le Coran, vous ajoutez les différentes traditions sur le ḥadīṯ, vous arrivez à une infinité de nuances.

Il n’y a pas, sur ce point comme sur tant d’autre, de « vrai visage » à découvrir : il nous faut admettre qu’il y en a plusieurs. Une essence de l’islam, l’islam réduit à un concept manipulable, ce serait tout à fait commode, mais cela n’existe pas. On a le droit de le regretter, mais pas de l’ignorer (...)

On a raison de souligner, bien sûr, que l’islam est divers, qu’il faut toujours parler des islams, que l’essence de l’islam n’existe pas. Mais cela ne suffit pas : si la première erreur était de croire que l’islam existe, la seconde est bien de croire qu’il n’existe pas.

Certains nous l’assurent encore ces jours-ci. Tout ce à quoi nous assistons ne serait que l’effet de la misère sociale, des politiques néo-impérialistes de l’Occident, du passé colonial, de tout ce qu’on voudra, mais c’est évidemment sans lien avec l’islam. C’est aussi absurde que de vouloir tout expliquer par l’islam (...)

Autre façon de croire que l’islam n’existe pas : le réduire à sa diversité, comme s’il n’avait aucune forme d’unité. Sa diversité est réelle, mais au moins dans la conscience des musulmans, l’islam, c’est quelque chose, pas un patchwork d’interprétations. Le sentiment est au contraire celui d’appartenir à un mouvement commencé par la révélation prophétique à Mahomet ; les contours de ce mouvement sont mouvants, l’accord ne se fait pas sur les limites, mais précisément : ce désaccord même prouve qu’il y a une aspiration à l’unité, et l’idée que certaines formes d’islam sont plus légitimes que d’autres. C’est ce qui explique qu’un mouvement arabe comme le califat de Daech puisse trouver un écho aux quatre coins de la planète. C’est aussi ce qui provoque la crise actuelle qui déchire l’islam et nous saute au visage. Car à mon sens, la crise de l’islam est d’abord une crise interne, et même une double crise interne : l’opposition sunnites-chiites est chauffée à blanc ; et se fait jour, au sein même du sunnisme, une guerre très dure pour la définition de l’orthodoxie.

Je vous propose d’ailleurs, à présent que nous avons admis que rien n’est simple, de ne pas nous arrêter à ce constat et d’entrer un peu dans cette complexité. L’islam sunnite explose parce qu’il se déchire entre au moins deux définitions concurrentes de ce que signifie être musulman.

Ce conflit nous est souvent largement opaque, non seulement parce qu’il touche à des points parfois très techniques, mais parce que nous n’avons pas nécessairement le bon cadre. Nous sommes marqués par un schéma d’explication très européen, celui des Lumières, selon lequel nous assisterions à une opposition au sein de l’islam entre des traditionnalistes rétrogrades, voulant conserver des pratiques totalement médiévales, et des modernisateurs qu’il conviendrait d’épauler dans leur tâche d’avant-garde éclairée. Nous avons en tête, parce que c’est notre arrière-plan culturel, que la tradition est rétrograde et que la modernité est ouverte et rationnelle. Les méchants ne seraient donc qu’une queue de comète menant un combat désespéré, et sans doute d’autant plus violent qu’il est désespéré, contre le progrès. Le problème, c’est que cela n’a rien à voir avec la situation

Pour résumer les acteurs en présence, et simplifier évidemment, deux forces se disputent la définition de l’orthodoxie musulmane sunnite et s’opposent.

La première, c’est l’islam sunnite traditionnel, l’islam impérial – c’est-à-dire celui qui s’est élaboré dans le cadre des empires arabes et ottoman et qui a servi de cadre religieux, législatif et spirituel à ces empires du passé. Cette longue expérience du pouvoir, et du pouvoir sur des populations très diverses, l’a obligé à élaborer des outils de gestion de la diversité. Pour quiconque travaille sur cet islam classique, la diversité est un élément essentiel, à rebours de ce qu’on imagine souvent sur un islam qui serait obsédé par l’unité et l’uniformité. L’islam impérial ne se contente pas de donner un cadre, évidemment tout à fait dépassé aujourd’hui mais relativement généreux au moyen-âge, pour organiser la diversité confessionnelle dans l’empire, en permettant aux juifs et aux chrétiens de pratiquer leur culte, en trouvant des astuces pour intégrer dans ce cadre d’autres traditions religieuses comme l’hindouisme ; il organise également la diversité en son sein : diversité théologique, diversité juridique (ce n’est pas rien : l’islam classique accepte au moins quatre écoles de droit, qui se reconnaissent entre elles comme légitimes. Quatre manières de comprendre la volonté de Dieu, distinctes mais pouvant cohabiter en bonne intelligence ! Quatre versions de la sharīʿa, dont il est dès lors difficile de faire un absolu), diversité spirituelle aussi.

Cet islam-là a élaboré au fil des siècles une tradition de sagesse pratique. Il est notable par exemple que la fameuse lapidation prévue par les sources musulmanes pour punir les femmes adultères n’ait été, semble-t-il, au cours des quatre siècles qu’a duré l’empire ottoman, mise en pratique qu’une seule fois, à Istanbul ; et les chroniqueurs qui rapportent le fait en sont absolument horrifiés. Les savants musulmans classiques n’avaient en général guère plus d’appétit que nous pour un châtiment aussi barbare qu’ils cherchent à tout prix à éviter et qui, d’ailleurs, ne vient même pas du Coran (...)

Cet islam classique est aussi un islam culturel. Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas religieux, mais qu’il s’inscrivait dans un cadre culturel, dans une société, dont il n’était pas facilement dissociable. C’est-à-dire qu’il était possible, dans cet univers, d’être authentiquement musulman sans être constamment mobilisé sur des questions religieuses : le religieux fait partie de la vie, il ne vient pas constamment la bouleverser pour tout le monde. L’islam, à la période classique, ne se prétend pas une doctrine pour une élite de militants sur-engagés. C’est une maison large, ouverte à la société dans son ensemble.

Vous vous en doutez, quand on essaie de démontrer que l’islam est pacifique et tolérant, c’est en général à cet islam-là qu’on va se référer, d’autant plus facilement que ce cadre, l’islam classique et impérial, est celui qui fait référence, ou du moins qui faisait référence jusqu’à récemment.

Car cet islam impérial a connu quelques soucis. Au XIXe siècle, quand la supériorité technique et scientifique de l’Occident est devenue évidente en se doublant d’une supériorité militaire qui a permis la colonisation d’immenses territoires musulmans, on l’a accusé, chez les musulmans eux-mêmes, d’être la cause de la décadence de la civilisation arabo-musulmane, d’avoir trahi, de s’être sclérosé, d’avoir perdu la vigueur de l’islam des origines à force de subtilité juridique et théologique. Des mouvements de réforme sont apparus, qui ont voulu moderniser l’islam ; certains en le laïcisant, en l’occidentalisant, et d’autres en revenant à l’origine.

C’est dans ce dernier mouvement que va apparaître le salafisme. Les « salaf », ce sont les pieux anciens, les premières générations musulmanes, considérées comme un modèle indépassable, encore préservé de la dégradation progressive de la tradition. Cette préoccupation pour l’origine comme source d’un possible renouveau apparaît chez des penseurs qui veulent moderniser l’islam à la fin du XIXe siècle ; et cette volonté modernisatrice va rencontrer sur sa route un mouvement théologique totalement marginal, le wahhabisme, né à la fin du XVIIIe siècle dans une oasis des déserts d’Arabie, qui promeut un islam bédouin à la fois très simple et très rigoriste, loin de la décadence de l’islam des villes. Ces deux mouvements assez différents vont faire, au début du XXe siècle, une forme de jonction inattendue. L’argent du pétrole de la monarchie séoudienne, salafiste par excellence, et la mobilisation du jihād contre les Soviétiques en Afghanistan, qui a rassemblé des musulmans du monde entier, ont permis à cette idéologie de se répandre, au point de devenir, d’une hérésie condamnée et prise de très haut par les autorités musulmanes à ses débuts, un candidat sérieux à la nouvelle orthodoxie.

Le salafisme n’est pas un mouvement traditionnel. C’est même exactement le contraire : il refuse l’islam traditionnel, il refuse la tradition, ce qui se passe de générations en générations, au nom d’un rapport direct à l’origine. Ils jouent leurs arrière-arrière-arrière-arrière-grands-parents contre leurs parents et grands-parents. Ils refusent l’islam qu’ils ont reçu, qui est l’islam traditionnel, classique, impérial, au nom d’un autre islam, jugé plus authentique. Ce n’est pas un mouvement conservateur : au contraire, il cherche à dynamiter le passé, l’héritage, au nom d’un passé nettement plus lointain et donc nécessairement fantasmé (...)

Cet islam-là ne s’embarrasse pas de culture : il est religieux, et rêve que toute la vie des individus soit réglée par des préceptes religieux. Il rêve de musulmans chimiquement purs, qui ne seraient que musulmans et pas en même temps égyptiens, pharmaciens, fans de football, sensibles à la poésie classique et allergiques au poil de chat. Cela atteint des niveaux absurdes (...)

Cet islam total a un problème, on s’en doute, avec la diversité. Que l’islam classique ait pu admettre quatre écoles de droit, quatre interprétations différentes de la Loi divine (comme il y a quatre évangiles pour un seul Jésus), leur est insupportable. La Loi divine doit être univoque, identique, claire. Elle repose sur un présupposé littéraliste : il suffit d’ouvrir le Coran pour le comprendre. Les plus rigoristes, les plus littéralistes de l’islam classique n’allaient pas jusque-là (...) Ce littéralisme est une illusion grave, qui laisse croire qu’un texte du VIIe siècle écrit en Arabie est immédiatement compréhensible par un musulman français du XXIe, sans place pour le raisonnement, la hiérarchisation, l’élaboration intellectuelle (...)

Guerrier ou non, le salafisme crée les conditions intellectuelles et spirituelles de la violence.

Cet islam-là est-il conforme à l’islam des origines ? Certainement pas. Tout d’abord parce que l’imitation du passé n’est pas le passé (...) De plus, nous connaissons mal l’islam des origines : les sources sont tardives, et laissent donc tout l’espace à une reconstruction imaginaire digne des remparts de Carcassonne.

Le salafisme n’est pas l’islam des origines, mais est-il la vérité de l’islam ? Certainement pas. Ceux qui le répètent aujourd’hui, en nous disant que l’islam est nécessairement littéraliste, hostile à toute diversité, brutal, etc., ne font que reprendre les thèses salafistes. Ils se laissent convaincre par les salafistes. Notre devoir devrait être, au contraire, de résister à ces thèses. Nous n’avons pas à choisir quel est le « vrai visage » de l’islam, mais continuer à tenir qu’il en a plusieurs – pas parce que cela nous fait plaisir, mais parce que c’est vrai.

La crise de l’islam à laquelle nous assistons, c’est donc une crise de modèle, sur fond de concurrence entre ces deux manières bien différentes de vivre l’islam. Longtemps en position écrasante de force, l’islam classique, traditionnel, a d’abord considéré le salafisme naissant comme une hérésie ridicule, un simplisme de Bédouins illettrés. La condamnation du salafisme était alors sans appel. Aujourd’hui, la concurrence est rude entre ces deux conceptions radicalement différentes, et le salafisme parvient à contester au premier son monopole séculaire de définition de l’orthodoxie. L’hérésie semble même en passe, dans beaucoup d’esprit, d’être devenue l’orthodoxie elle-même. Car la frontière, si elle est claire au plan doctrinal, ne l’est pas tant que cela dans les appartenances. Les musulmans ne sont pas, pour la plupart, dans un camp ou un autre ; mais ils en subissent plus ou moins l’influence, et force est de reconnaître que l’influence du salafisme est grandissante, dans le monde arabe comme en Europe.

Ce succès du salafisme profite de la faiblesse déjà ancienne des institutions de l’islam classique. Le discours de ces dernières manque de prises sur le réel depuis des décennies et reste prisonnier, sans créativité, des schémas anciens élaborés patiemment au moyen-âge, avec sagesse et mesure. Depuis trop longtemps, cet islam-là, qui nous est bien plus sympathique que le salafisme, est incapable de répondre avec netteté aux questions posées par la modernité (...) Car le salafisme, mouvement moderne, né en réaction à la modernité, a quant à lui des réponses claires à proposer dans tous ces domaines (...) Il est remarquablement plus adapté pour dire, aujourd’hui, ce qu’il faut penser. La réponse qu’il donne aux questions du temps ne nous plaît pas, mais il a au moins le mérite d’en donner. C’est d’ailleurs pour cela que je ne suis pas à l’aise avec le discours fréquent qui nous répète que l’islam doit procéder à son aggiornamento. Il l’a déjà fait, et cet aggiornamento, c’est le salafisme. L’urgence n’est pas, pour l’islam, de rompre avec sa tradition, mais au contraire de retrouver un rapport apaisé, constructif, avec sa tradition.

Ces constats trop schématiques, et pourtant déjà bien longs, nous indiquent également que demander aux autorités musulmanes de se démarquer des terroristes à coup de pancartes « Not in my name ! » et de condamner les attentats est tout à fait insuffisant. Il ne suffit pas non plus de proposer, comme on le demande souvent, un islam « modéré » face aux extrémistes. J’espère n’être pas un chrétien modéré, et je crois que la demande sous-entendue qui est faite par là n’est pas qu’on ait des musulmans modérés, mais des gens modérément musulmans. L’expression suppose que les salafistes sont davantage musulmans que les autres. Quelle efficacité peut avoir, en ce cas, un tel discours de la modération pour des jeunes précisément attirés par la radicalité du discours salafiste. Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle : la recherche de Dieu en soi, la rencontre de Dieu dans la prière personnelle plutôt que dans l’attentat-suicide me paraissent une aventure nettement plus radicale, si on la poursuit sérieusement. Dans cette voie, la tradition islamique aurait bien des richesses, aujourd’hui largement inexploitées, à faire valoir. Saura-t-elle le faire dans les années qui viennent ? Ce serait, il me semble, une des rares façons de sortir par le haut de ces luttes sanglantes ; mais la réponse appartient évidemment aux musulmans eux-mêmes.
http://www.orne.catholique.fr/Comprendre-l-islam-ou-plutot.html

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Message  Idriss Sam 1 Oct - 16:05

-Ren- a écrit: un plaisir pour moi de lire quelqu'un partageant à ce point mon propre point de vue ;)

Salam -Ren-  
tu peux aussi le voir et l'entendre sur arrêt sur image et sur notre forum depuis hier  :mm:
https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2946p25-zemmour-la-responsabilite-des-medias#61658

Spoiler:


J'ai payé mes un euro pour voir  le reportage ( c'est ballot entre temps j'avais été parrainé pour avoir l’accès gratuit ...peut-être que je peux parrainer quelqu'un à mon tour? )
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Message  Idriss Sam 1 Oct - 16:30

Adrien Candiard a une page facebook

https://www.facebook.com/adrien.candiard
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Message  -Ren- Sam 1 Oct - 16:34

Idriss a écrit:tu peux aussi le voir et l'entendre sur arrêt sur image et sur notre forum depuis hier  :mm:
J'avais vu ^^
...mais n'ayant pas le temps pour des vidéos, tout en ayant déjà le sentiment grâce à ton message d'avoir enfin la possibilité de lire quelqu'un développant mieux que je ne le ferai jamais un point de vue reflétant le mien, je suis très heureux d'avoir découvert cette retranscription :)

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Message  Idriss Sam 1 Oct - 17:39

Idriss a écrit:Adrien Candiard a une page facebook

https://www.facebook.com/adrien.candiard

Le texte de facebook qui a été à l'origine du livre :"Comprendre l’islam - ou plutôt : pourquoi on n’y comprend rien"

https://www.facebook.com/notes/adrien-candiard/comprendre-lislam-ou-plut%C3%B4t-pourquoi-on-ny-comprend-rien/10156260954685603
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Message  Idriss Sam 1 Oct - 18:01

-Ren- a écrit:
...mais n'ayant pas le temps pour des vidéos

Pas la peine que je te parraine pour arrêt sur image si je comprend bien :mm:

Moi aussi j'ai peu de temps ..Aussi je n'avais vu ni Zemmour , ni le reportage choc sur l'islam de la Vilardiére ...J'ai eu un résumé commenté sur arrêt sur image ...un espèce de compromis.


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Message  Idriss Sam 1 Oct - 18:12

-Ren- a écrit:enfin la possibilité de lire quelqu'un développant mieux que je ne le ferai jamais un point de vue reflétant le mien

Son point de vu a aussi beaucoup de convergence avec mon point de vu ...
Il dit des choses que j'ai dit et écrit noir sur blanc ...Comme lui revendique ne pas être un chrétien j'ai revendiqué ne pas être un musulman modéré :

Adrien Candiard a écrit: Il ne suffit pas non plus de proposer, comme on le demande souvent, un islam « modéré » face aux extrémistes. J’espère n’être pas un chrétien modéré, et je crois que la demande sous-entendue qui est faite par là n’est pas qu’on ait des musulmans modérés, mais des gens modérément musulmans. L’expression suppose que les salafistes sont davantage musulmans que les autres. Quelle efficacité peut avoir, en ce cas, un tel discours de la modération pour des jeunes précisément attirés par la radicalité du discours salafiste. Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle : la recherche de Dieu en soi, la rencontre de Dieu dans la prière personnelle plutôt que dans l’attentat-suicide me paraissent une aventure nettement plus radicale, si on la poursuit sérieusement.

Je souscris , c'est ma voie
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Message  rosarum Sam 1 Oct - 18:42

si tout le monde semble d'accord sur l'analyse, que penser de la solution qu'il propose ?

. Quelle efficacité peut avoir, en ce cas, un tel discours de la modération pour des jeunes précisément attirés par la radicalité du discours salafiste. Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle
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Message  Anoushirvan Sam 1 Oct - 19:01

rosarum a écrit:si tout le monde semble d'accord sur l'analyse, que penser de la solution qu'il propose ?

. Quelle efficacité peut avoir, en ce cas, un tel discours de la modération pour des jeunes précisément attirés par la radicalité du discours salafiste. Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle

Le salafisme a du succès parce que fondamentalement, il explique que le salut de l'âme au Jour du Jugement Dernier n'est pas garanti si le musulman ne se comporte pas exactement dans sa vie quotidienne, dans ses actes, comme le faisaient les Compagnons du Prophète, en particulier ceux à qui le Prophète a annoncé de leur vivant qu'ils seraient sauvés, le moindre écart pouvant être fatal.

Ce discours est très puissant, d'autant qu'il est protégé par toute sorte de barrières, comme l'interdiction de l'innovation (bida'at).

Mais il est totalement démenti par le Coran lui-même. Encore faut-il le lire. Or là aussi le discours islamique en général (pas seulement salafiste) réserve l'interprétation du Coran à quelques uns, sous prétexte que "la Parole de Dieu égare".





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Message  -Ren- Sam 1 Oct - 19:06

rosarum a écrit:si tout le monde semble d'accord sur l'analyse, que penser de la solution qu'il propose ?

. Quelle efficacité peut avoir, en ce cas, un tel discours de la modération pour des jeunes précisément attirés par la radicalité du discours salafiste. Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle
Sa remarque pointe une réalité : les jeunes ont besoin de radicalité (et ce n'est pas l'ancien antifa que je suis qui pourra le nier)
Avant de commettre ses attentats, Merah a tenté d'incorporer l'armée, qui n'a pas voulu de lui : comme disait O.Roy, "Aujourd’hui, le jihad est la seule cause sur le marché" ( https://dialogueabraham.forum-pro.fr/t2426-djihadistes-francais-crise-de-l-islam-ou-crise-de-la-republique#51690 )
Maintenant, proposer "une cause", "une radicalité spirituelle", ce n'est pas forcément religieux.

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Message  Idriss Sam 1 Oct - 21:01

Pourquoi tronquer la citation ?
Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle : la recherche de Dieu en soi, la rencontre de Dieu dans la prière personnelle plutôt que dans l’attentat-suicide .




Il me semble que le soufisme répond à la définition:

« O toi qui cherches le chemin qui conduit au secret , reviens sur tes pas : car c’est en toi que se trouve le secret tout entier ».
Ibn ‘Arabî

Le cœur malade va bien, car en réalité son seul remède c'est Dieu.
Kharaqani

"Si vous ne trouvez pas Dieu parmi les humains, vous ne le trouverez nulle part."
Cheikh al Alawi

Le paradis est un jouet pour les enfants. Un seul atome d'amour de Dieu vaut mieux que cent mille paradis.
Bayazid Bistami

Vous voulez de la radicalité, de la pratique , un cadre , une méthode , une alternative à la société marchande , de la fraternité et de l'universalisme , une ambition spirituelle sans limites ... le grand djihad quoi !









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Message  rosarum Dim 2 Oct - 16:49

Idriss a écrit:Pourquoi tronquer la citation ?
Seul un discours radical peut, en retour, les en détourner. Mais une radicalité plus profonde, plus authentique, qui peut être, comme le proposent certaines voies musulmanes, une radicalité spirituelle : la recherche de Dieu en soi, la rencontre de Dieu dans la prière personnelle plutôt que dans l’attentat-suicide .

Il me semble que  le soufisme répond à la définition:

pourquoi tronquer ?
justement pour ne pas limiter à priori la recherche à la voie soufi ou au grand jihad, même si c"est bien entendu une option possible
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Message  Idriss Dim 2 Oct - 17:13

rosarum a écrit:
pourquoi tronquer ?
justement pour ne pas limiter à priori la recherche à la voie soufi ou au grand jihad, même si c"est bien entendu une option possible

D'autant plus qu'il ne faut pas idéaliser le soufisme confrérique qui n'est pas a l'abri de dérives , tant vers un certain "folklorisme" ou "sectarisme" , ou "intellectualisme stérile" ..etc . Mais globalement il y a un fort potentiel pour atteindre une certaine jeunesse:

Des héros positifs comme l’Émir Abdel Kader ou le commandant Massoud.
Une structure structurante avec des rites propres, des pratiques ..etc
Une éthique qui donne la primauté à l'intention sur la forme , à l'adab sur les prescription...
Un épanouissement possible dans différentes forme d'arts traditionnels comme le chant , la poésie , la musique , voir la danse...Même si le soufisme n'est pas du développement personnel , la pratique peut l'apporter comme bénéfice secondaire .
Il y a dans le soufisme un certain romantisme et un certain lyrisme , du surnaturel , des trucs de jeunes quoi! Des trucs qui sont autant de voiles à dépasser , mais qui sont nécessaires au départ...


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Message  Idriss Lun 3 Oct - 18:40

Adrien Candiard


Adrien Candiard a écrit: Parce qu'assez d'internautes ont voté pour la faire reconnaître d'"utilité publique", la vidéo de mon passage à Arrêt sur images est gratuite pour 24h. Pour ceux que ça intéresse, ça se passe ici :
http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-09-30/Sur-l-islam-les-medias-choisissent-l-angle-pour-ou-contre-id9125

Ce contenu est accessible gratuitement 24 heures. Partagez-le !


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Message  Roque Lun 3 Oct - 22:42

Idriss a écrit:http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-09-30/Sur-l-islam-les-medias-choisissent-l-angle-pour-ou-contre-id9125
Intéressant, mais dommage que ces propos ne soient pas tenus par un musulman.

Le biais sur le " 28 % de musulmans mettant la charia au dessus des lois de la République " dans l'enquête de l'Institur Montaigne sur les musulmans en France est très bien expliqué. Adrien Candiard fait un parallèle tout à fait juste avec le christianisme : pour un chrétiens, les Évangiles sont également au dessus des lois de la République. En bonne logique, ce " 28 % " est surprenant parce que trop bas.

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Message  Emmanuelle78 Lun 3 Oct - 23:19

Idriss a écrit:Adrien Candiard


Adrien Candiard a écrit: Parce qu'assez d'internautes ont voté pour la faire reconnaître d'"utilité publique", la vidéo de mon passage à Arrêt sur images est gratuite pour 24h. Pour ceux que ça intéresse, ça se passe ici :
http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-09-30/Sur-l-islam-les-medias-choisissent-l-angle-pour-ou-contre-id9125

Ce contenu est accessible gratuitement 24 heures. Partagez-le !


http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-09-30/Sur-l-islam-les-medias-choisissent-l-angle-pour-ou-contre-id9125

merci pour le partage. C'est clairement d'utilité publique.

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Message  rosarum Jeu 6 Oct - 20:16

Roque a écrit:
Idriss a écrit:http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-09-30/Sur-l-islam-les-medias-choisissent-l-angle-pour-ou-contre-id9125
Intéressant, mais dommage que ces propos ne soient pas tenus par un musulman.

Le biais sur le " 28 % de musulmans mettant la charia au dessus des lois de la République " dans l'enquête de l'Institur Montaigne sur les musulmans en France est très bien expliqué. Adrien Candiard fait un parallèle tout à fait juste avec le christianisme : pour un chrétiens, les Évangiles sont également au dessus des lois de la République. En bonne logique, ce " 28 % " est surprenant parce que trop bas.

si c'est le cas il  faut aller au bout du raisonnement et opter pour une théocratie. (ce qu'est l'islam mais pas le christianisme puisque le royaume de Dieu n'est pas de ce monde qu"il faut rendre à César ce qui revient à César)
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Message  Roque Jeu 6 Oct - 21:06

rosarum a écrit: ... mais pas le christianisme puisque le royaume de Dieu n'est pas de ce monde qu"il faut rendre à César ce qui revient à César)
Oui, on est d'accord. Cette division des domaines de compétence entre le religieux et le politique est très précieuse. On pourrait même dire qu'une certaine conception de la laïcité (modérée comme la loi de 1905) s'en inspire (mais pas le laïcisme radical cependant, lequel règle le problème par l'éradication pure et simple des religions). Mais il existe - historiquement - de multiples tentatives d’empiétement d'un domaine sur l'autre - dans les deux sens.

Par exemple, il y a eu une longue période où c'est le roi qui nommait Évêques et prêtres en France, où le roi nommait les bénéficiaires de charges et reversait une partie convenue au pape en la rognant par périodes. Ce système favorisait une grande corruption dans le clergé et une grande docilité du clergé à l'égard du roi. Il interdisait par moments la diffusion des écrits du pape ou des conciles (interdiction de diffusion des conclusions du Concile de Trente en France pendant une longue période, par exemple). C'est l'Eglise gallicane, celle qui a prévalu en France jusqu'à la la Révolution française. Les relations aujourd'hui des catholiques avec leur pape sont certainement beaucoup plus importantes grâce à la séparation de l'Eglise et de l'Etat et cela peut paraître un inconvénient pour l'Etat (voir les divergences entre le pape François et l'idéologie libéro-libertaire diffusée par une partie du pouvoir socialiste), mais ce genre de relation était impensable au moment du gallicanisme.

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Message  Idriss Ven 7 Oct - 21:40

rosarum a écrit:
si c'est le cas il  faut aller au bout du raisonnement et opter pour une théocratie. (ce qu'est l'islam mais pas le christianisme puisque le royaume de Dieu n'est pas de ce monde qu"il faut rendre à César ce qui revient à César)

Raccourcis simplistes une fois de plus . qu'est ce que l'on met derrière le mot charia!???
Si demain une loi de la république stipulait que l'on coupe la main des voleurs , je m'y opposerai et placerai ma conscience , ma compréhension de la charia , au au-dessus des lois de cette république là.

Il y a en Iran ou en Arabie saoudite des musulmans qui s'opposent aux châtiments corporel , sont-ils moins musulmans que ceux qui les imposent?

Quand aux chrétiens qui rendent à César ...C'est connu les chrétiens ne font que cela depuis 2000 ans , depuis 2000 ans ils vendent et distribuent tous ce qu'ils possèdent pour suivre le christ , ils aiment leur ennemis et tendent la joue gauche quand on les frappe sur la droite....


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Message  rosarum Ven 7 Oct - 22:07

Idriss a écrit:
rosarum a écrit:
si c'est le cas il  faut aller au bout du raisonnement et opter pour une théocratie. (ce qu'est l'islam mais pas le christianisme puisque le royaume de Dieu n'est pas de ce monde qu"il faut rendre à César ce qui revient à César)

Raccourcis simplistes une fois de plus . qu'est ce que l'on met derrière le mot charia!???

je n'ai pas parlé de charia mais de théocratie
si tu penses que la "parole de Dieu" est la référence suprême alors elle doit primer sur les lois humaines.
dans une démocratie c'est la loi décidée par les citoyens (ou leurs représentants) qui prime.

à l'origine le fondateur de l'islam cumulait les pouvoirs spirituels et temporels alors que cela n'a jamais été le cas dans le christianisme.




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Message  Idriss Ven 7 Oct - 22:44

rosarum a écrit:
à l'origine le fondateur de l'islam cumulait les pouvoirs spirituels et temporels alors que cela n'a jamais été le cas dans le christianisme.

1, A l'origine notre Prophète (Saws) pratiquait la concertation et n'hésitait pas à consulter ses concitoyens .
2Comparaison n'est pas raison :
A l'origine les premiers chrétiens croyaient la fin du monde imminente  pourquoi se seraient-ils préoccupé de temporel?
Puis sous domination Romaine , ils n'étaient pas en mesure de s’opposer, au contraire ils leur fallaient donner des gages de bon sujets loyaux à l'empire romain , pas comme leurs cousins juifs toujours prêt à se révolter et à en découdre ...
3. Si nous étions dans une démocratie cela se saurait ! Soyons réalistes ce que nous nommons démocratie est un système mis au service d'une ploutocratie ...les citoyens décident de quoi?

A l'adolescence j'étais un idéaliste tenant des grands discours politiques  humanistes et utopiques .
Un jour j'ai fait mon petit numéro a une personne qui m' avait prise en stop et elle m'a dit :
Tant que les hommes chercheront à imposer des loi d'hommes aux hommes toutes les utopie échouerons ..et cela m'est resté  et plus tard cela a fait écho à ma lecture de Roger Garaudy : Promesses de l'islam..
Mais voilà, l'homme qui m'avait pris en stop quelques années au par avant  était pasteur.

Rosarum a écrit:
je n'ai pas parlé de charia mais de théocratie

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Message  DenisLouis Sam 8 Oct - 9:46

rosarum a écrit:
Roque a écrit:
Idriss a écrit:http://www.arretsurimages.net/emissions/2016-09-30/Sur-l-islam-les-medias-choisissent-l-angle-pour-ou-contre-id9125
Intéressant, mais dommage que ces propos ne soient pas tenus par un musulman.

Le biais sur le " 28 % de musulmans mettant la charia au dessus des lois de la République " dans l'enquête de l'Institur Montaigne sur les musulmans en France est très bien expliqué. Adrien Candiard fait un parallèle tout à fait juste avec le christianisme : pour un chrétiens, les Évangiles sont également au dessus des lois de la République. En bonne logique, ce " 28 % " est surprenant parce que trop bas.

si c'est le cas il  faut aller au bout du raisonnement et opter pour une théocratie. (ce qu'est l'islam mais pas le christianisme puisque le royaume de Dieu n'est pas de ce monde qu"il faut rendre à César ce qui revient à César)

Le christianisme a été une théocratie dans l'empire byzantin, et même en occident

"Le césaropapisme tire ses origines de la conception romaine du pouvoir impérial. Depuis Auguste, l’empereur réunit dans sa personne les destinées politiques de l’empire et le pouvoir religieux. Il est en effet pontifex maximus, grand pontife, c’est-à-dire le chef de la religion romaine."
"Dès le IVe siècle, donc, la confusion entre pouvoir temporel et pouvoir spirituel est totale dans l’Empire"

https://fr.wikipedia.org/wiki/C%C3%A9saropapisme

Ensuite dans les deux empires, orient et occident, il y a eu des évolutions différentes.
L'héritage impérial romain, qui cumulait les deux pouvoirs, a été transmis à la chrétienté,  les armoiries papales en portent toujours l'indication avec les deux clés, la clé d'argent pour le monde temporel, et la clé d'or pour le monde spirituel.
Le fondateur du christianisme n'a pas eu le pouvoir temporel, les premiers temps il y avait l'abri de la paix romaine, la voie n'était pas politique, parce que le problème n'existait pas,  les disciples étaient encore parmi les juifs, et que les problèmes politiques étaient surtout entre les juifs et les romains. Dès que Constantin s'est converti, la situation a changé.



Inversement dans  l'islam s'il a bien eu dans la personne de Mohammed une confusion des deux pouvoirs (mais pour une ville pas très importante par rapport à Rome, et un pays pauvre et peu peuplé ;  il y a eu dans les faits très vite une séparation entre les dirigeants et les religieux, dès qu'il y a eu installation à Damas et Bagdad  (en plus il n'y a pas de pouvoir religieux centralisé qui pouvait tenter d'imposer une autorité d'une manière simple à un calife ou un sultan).

L'idée d"une séparation des pouvoirs en occident est relativement tardive, elle date de l'abolition de la royauté et des mouvements politiques ultérieurs qui ont abouti à la notion de laïcité (cela s'est fait en France à travers une lutte contre l'Eglise).
Ce qui a dominé la période médiévale, c'est la lutte entre Rome et l'Empire, ou entre Rome et la Royauté. Selon la manière de voir les choses, c'est parce que les deux domaines étaient imbriqués (du point de vue moderne et profane, ils ne doivent pas l'être) ou parce que la hiérarchie entre le spirituel et le temporel était contestée par ce dernier (du point de vue traditionnel et religieux médiéval, cette hiérarchie  était la norme). Le Protestantisme, soutenu par les princes est une étape de l'émancipation du pouvoir temporel vis à vis de Rome, le gallicanisme en France avait des ambitions analogues, même s'il reconnait l'autorité spirituelle du pape.

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Message  rosarum Sam 8 Oct - 21:30

@ Idriss
je répète que je ne parle pas de charia mais de hiérarchie des normes entre les lois décidées par les hommes se réclamant des hommes et les lois décidées par les hommes se réclamant de Dieu.

au sujet de la video disons qu'il y a a charia de salon, celle dont parle la video et la charia de terrain, celle qui lapide et coupe les mains.

@DenisLouis

je suis d'accord que dans la pratique les choses sont plus nuancées et imbriquées, mais les modèles de départ sont différents.

la séparation entre spirituel et temporel et en effet récente à l'échelle de l'histoire mais ne semble pas encore avoir pénétré le monde musulman.

au fond il y avait peut être moins de différence entre un croisé et Saladin qu'entre un occidental et un musulman actuels qui sont en décalage temporels alors que le croisé et Saladin vivaient dans le même monde et pouvaient se comprendre même s'ils se combattaient.
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Message  Idriss Sam 8 Oct - 23:55

rosarum a écrit:
au sujet de la video disons qu'il y a a charia de salon, celle dont parle la video et la charia de terrain, celle qui lapide et coupe les mains.

Disons que votre vision de la charia de terrain vous vous l'êtes forgé dans les salons de la facho-sphère et c'est ce qui crée une certaine distorsion de la réalité dans votre esprit !

Il y a la démocratie de salon , celle qui parle de liberté , de droit du peuples , de souveraineté et il y a la démocratie de terrain celle qui fait la guerre pour des intérêts privées sous couvert de Realpolitik avec son cortège de mains arrachées et des femmes lapidées par des bombes à fragmentations ... Dégâts collatéraux ? Mais comme les pauvres victimes de la barbarie fondamentaliste servant les intérêts de quelques dictatures se réclamant de l'islam, dictatures elle mêmes souvent au service plus ou moins volontaire, des démocraties guerrières précitées.
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Message  Idriss Dim 9 Oct - 0:18

rosarum a écrit:au fond il y avait peut être moins de différence entre un croisé et Saladin qu'entre un occidental et un musulman actuels qui sont en décalage temporels alors que le croisé et Saladin vivaient dans le même monde et pouvaient se comprendre même s'ils se combattaient.

C'est une posture de votre part de croire aux vernis de civilisation de l'occident moderne ?
En tous cas dans votre camp, Zemmour prétend n'avoir aucune difficulté à comprendre la mentalité des abrutis de djihadistes dont il ne manque pas de louer les vertus.
Paradoxalement , les pseudo djihadiste de Daesh sont complétement hermétique à l'esprit des nobles combattants qu'ont été Saladin, Abdel Kader, ou Massoud!
Saladin envoyant ses médecins soigner les blessés chrétiens sur les champs de bataille , Abdelkader sauvant la vie à des milliers de chrétiens au Liban . Les chrétiens russes eux bombardent les hôpitaux d'Alep et les occidentaux moderne ne font pas beaucoup d'efforts pour sauver les civiles pris au piège..Souvent même il n'hésite pas à les sacrifier si leurs intérêts stratégiques sont en jeu ...Par exemple en assurant une couverture aérienne à Daesh contre Bashar par pure stratégie pour rééquilibrer le jeu des forces en présence....

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