"Coming out" du P.Charamsa
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"Coming out" du P.Charamsa
Je lance ce sujet à partir de ce billet posté par Manu :
http://aigreurs-administratives.blogspot.fr/2015/10/quelques-remarques-sur-le-coming-out-de.html?spref=fbOr donc, Monseigneur Charamsa, prêtre polonais, Monsignore (et non évêque), théologien, membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi et secrétaire adjoint de la Commission théologique internationale, a choisi, à la veille du synode sur la famille, de faire son coming out :
"Le père Krysztof Olaf Charamsa, 43 ans, membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi (l’ex-Saint-Office, organisme romain chargé de veiller à la cohérence de la doctrine), a révélé être homosexuel et avoir un compagnon, samedi 3 octobre, afin que, sans « attendre encore cinquante ans », « l’Eglise ouvre les yeux face aux gays croyants et comprenne que la solution qu’elle propose, à savoir l’abstinence totale et une vie sans amour, n’est pas humaine »." (Le Monde, "le coming out d'un prêtre polonais provoque la colère du Vatican")
Cette intervention a presque été immédiatement condamnée par le porte-parole du pape, le père Lombardi s.j.:
"Le Vatican n’a pas tardé à sanctionner l’homme d’Eglise, jugeant ce coming out« très grave et irresponsable » à la veille de l’ouverture du synode. « Evidemment, Mgr Charamsa ne pourra plus continuer à assurer ses fonctions précédentes auprès de la Congrégation pour la doctrine de la foi », ajoute le Vatican dans un communiqué. L’Eglise catholique précise que son statut de prêtre, qu’il pourra difficilement conserver après avoir reconnu vivre en couple avec son partenaire, sera discuté par les supérieurs hiérarchiques de son diocèse." (idem)
Quelques remarques à chaud de ma part, qui sont essentiellement une compilation de tweets et de statuts facebook publiés aujourd'hui (...) :
- Objectivement, il a pris un risque (j'espère) assumé en mettant le Vatican dos au mur, et politiquement, Lombardi et le pape n'ont guère le choix, s'ils ne veulent pas complètement faire dérailler les débats du synode et radicaliser la frange conservatrice. A moyen terme, ce coming out peut libérer la parole des prêtres homosexuels et avoir des des conséquences bénéfiques, mais compte tenu de l'enjeu immédiat du synode, la colère de Lombardi peut se comprendre (...)
- J'exprime cette inquiétude tout en étant conscient que je parle en tant que laïc hétérosexuel, citoyen d'un pays relativement ouvert au fait de l'homosexualité, observateur distant de la vie institutionnelle de l'Eglise, à propos de la vie d'un prêtre homosexuel, ressortissant d'un pays très conservateur sur les questions religieuses et de moeurs, qui est au coeur des coulisses vaticanes et qui vient de décider, avec un courage indiscutable, de sacrifier sa notoriété académique, son statut ecclésial et sa profession au nom de ce qu'il croit juste. Autant dire que je ne suis pas dans le registre de la condamnation ferme.
- Je note par ailleurs que son choix semble largement motivé par la situation intérieure de l'Eglise polonaise (...)
- J'espère au moins qu'on ne fera pas grief à un théologien important de la congrégation pour la doctrine de la foi de ne "pas avoir compris" l'enseignement si subtil et secrètement merveilleux de l'Eglise sur l'homosexualité.
- Je note que certains insistent sur l'idée que son renvoi serait dû à la rupture de son célibat sacerdotal, sans réel rapport avec son homosexualité. Sans nier que sa rupture de célibat consacré constitue formellement au regard de l'Eglise une faute, ce n'est pas vraiment ce qui ressort selon moi de la déclaration du Père Lombardi (...)
- Sur le rapport célibat sacerdotal/ homosexualité: se pose à mon avis la question de la différence des vocations, selon qu'on soit hétérosexuel ou homosexuels, reconnues comme possibles par l'Eglise: quand le seul choix canoniquement possible est celui du célibat , le choix de la continence dans le célibat a-t-il le même sens pour un séminariste ou un novice homosexuel que pour un autre hétérosexuel ? Et peut-on, quand on est un catholique respectueux du magistère et sans balayer devant sa propre porte, faire grief à quelqu'un de ne pas avoir assumé jusqu'au bout un choix qui lui a été présenté comme le seul viable, celui, au delà du sacerdoce, du célibat dans la continence ? Ce prêtre a tenté de joué le jeu des possibilités autorisées par l'Eglise pour vivre une vie de foi sainte. La réalité en a jugé autrement. L'essentiel de la remise en question ne devrait pas à mon sens lui incomber (...)
- Cette question de la rupture du célibat sacerdotal, dans ce contexte de coming out homosexuel, ne renvoie pas seulement au discernement vocationnel, mais également à des questions de théologie morale. Dans la grâce ( mariage ou sacerdoce) comme dans le péché (rupture d'un engagement en principe définitif et pris en connaissance de cause), homos et hétéros sont soumis à des régimes différents. Je ne crois pas contraire à l'Evangile de considérer que le péché (en l'occurrence la rupture d'un célibat sacerdotal) n'annule pas la valeur d'un témoignage qui engage une vie toute entière. Le message est brouillé, c'est dommage, mais il s'agit là encore, et comme toujours, de séparer le bon grain de l'ivraie, dans la vie des "pécheurs" comme dans celle des présumés "justes" (...)
- Quoiqu'il en soit, et si je comprends que des catholiques espérant du synode plus d'ouverture envers les relations homosexuels puissent être inquiets des retombées politiques et ecclésiales de ce coup d'éclat, il peut aussi contribuer à libérer la parole d'autres prêtres homosexuels vis à vis de leur hiérarchie (...)
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Re: "Coming out" du P.Charamsa
Autre réaction :
http://ndundurants.tumblr.com/post/130488055923/le-moucheron-et-le-chameauMgr Charamsa est passé de l’ombre à la lumière - ce qui, pour un chrétien, n’est jamais une mauvaise chose. En faisant cette déclaration publique, il n’a pas “créé” un scandale, il a mis fin à une situation qui, du point de vue de la discipline ecclésiastique, peut être qualifiée de scandaleuse. Il renonce à son emploi, à une position d’influence et de prestige, probablement à ses moyens d’existence à court ou moyen terme. Tout le monde n’a pas ce courage (...)
Il a fait cela juste avant le synode. On me dira qu’il a blessé l’Église, qu’il a fait passer sa situation personnelle avant le bien de l’Église, avant le bien de tous. Oui, j’entends bien. En manquant à son obligation de chasteté, en secret, et maintenant de façon publique, il a blessé l’Église - comme nous la blessons tous les jours par le moindre de nos péchés. Il ne favorise pas l’ouverture d’un débat serein - mais, soyons honnêtes, l’était-il tant que ça auparavant ? (...)
Avez-vous une idée de ce qu’un jeune homme, séminariste, puis prêtre, homosexuel, en Pologne, puis à Rome, a dû endurer ? Avez-vous une idée de ce qu’endurent, chaque jour, de notre part, oui, de notre part à nous, directement et indirectement, catholiques et autres chrétiens affiliés à des Églises ouvertement homophobes, des millions de personnes homosexuelles à travers le monde ? En Afrique, nous soutenons la criminalisation de l’homosexualité. En Occident, nous combattons les droits des personnes homosexuelles. Et ce qui vous afflige, c’est le manquement d’un monsignore à son obligation de chasteté ? Mais quand allons-nous sortir la tête du sable ? Quand allons-nous avoir le courage de reconnaître que nous nous sommes plantés ? (...)
De fait, une chose que cette affaire montre (une fois de plus), c’est la pertinence d’une réflexion de Matthew Vines (...)
“Dans l’état actuel de la doctrine, l’abstinence signifie quelque chose de différent pour les chrétiens hétérosexuels et pour les chrétiens homosexuels : pour les premiers, elle est une affirmation que le mariage est bon (et que la sexualité dans le cadre du mariage est bonne) ; pour les seconds, elle signifie que toute sexualité est mauvaise. Les homosexuels sont censés chercher à éviter, rejeter ou sublimer tout désir homosexuel, forcément désordonné. Certes, cela a du sens d’éviter les tentations, de rejeter, de sublimer son désir quand celui-ci nous oriente vers la débauche, les excès, les abus, etc. ; mais quel sens cela a-t-il quand ce désir oriente et est orienté vers une relation engagée, d’amour mutuel, de souci de l’autre et de sacrifice de soi (celle à laquelle l’auteur, comme de très nombreux homosexuels chrétiens, se sent appelé) ? Il faut, d’après lui, avoir le courage de reconnaître que l’enseignement traditionnel des Églises chrétiennes au sujet de l’homosexualité ne porte pas de bons fruits, mais de mauvais : dissimulation, marginalisation, dépression, aliénation d’avec soi-même, d’avec Dieu et d’avec l’Église. Le célibat est peut-être la vocation de nombreux homosexuels : mais comment peut-on se dire certain qu’il est leur vocation à tous ?“
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Re: "Coming out" du P.Charamsa
Autre réaction :
https://ryosai.wordpress.com/2015/10/04/quelques-elements-de-reflexion-sur-laffaire-charamsa/Un théologien doté d’une relative renommée, assez bien placé dans les institutions ecclésiales et notament à la célèbre Congrégation pour la doctrine de la foi, professeur à la Grégorienne, lance un pavé dans la mare, parfaitement sciemment, en faisant son « coming out », annonçant dans un même mouvement qu’il est homosexuel d’une part, a un compagnon d’autre part (...)
Le synode a largement botté en touche la question de l’homosexualité, alors qu’elle est d’une part la cause de divisions profondes et douloureuses dans l’Eglise, d’autre part une question qui touche profondément les concernés – et je ne redirai pas ici ce que j’ai raconté sur Twitter qui fait que je suis particulièrement sensible à cette question, mais il serait temps que l’Eglise admette qu’elle peut faire des dégâts irrémédiables. En prenant la parole publiquement, K. Charamsa dit aussi indirectement les espoirs qui ont été mis dans le synode sur la famille à l’annonce de sa réunion, et la responsabilité des pères synodaux. En bref, il empêche qu’on continue à faire comme si tout cela n’existait pas, ou était secondaire, ou était le fait d’agitateurs un peu sots incapables de comprendre le génie de l’Eglise (...)
Le prélat, comme tout prêtre, s’était engagé au célibat, et à son corollaire dans la doctrine catholique, l’abstinence sexuelle. Son coming-out jette donc en fait deux pavés dans la mare, à propos de la doctrine catholique sur l’homosexualité et à propos de la règle de l’abstinence sexuelle des prêtres. Cela brouille un peu le discours, indéniablement. Ceci dit, en le lisant, il me semble bien que c’est sur l’homosexualité qu’il souhaite faire réagir. C’est bien celle-ci qu’il met en avant, et lorsqu’il évoque la question du célibat ecclésiastique, c’est pour souligner combien il est un moyen pour des hommes catholiques homosexuels de tenter de « sublimer » ce que l’Eglise leur présente comme « intrinsèquement désordonné ». Il assume parfaitement, par ailleurs, devoir quitter ses ministères. Ceux qui l’attaquent spécifiquement sur la rupture de l’engagement au célibat me semblent soit à côté de la plaque, en refusant de voir cette réalité, soit, j’ose le dire sans charité aucune, assez hypocrites, en profitant de cette question pour éluder celle de l’homosexualité (...) En sortant du placard, K. Charamsa en tout cas donne chair à cette réflexion, il l’inscrit dans la réalité, et j’ai tendance à penser que c’est une bonne chose (...)
Il me semble clair que ce qui est reproché au prélat, plus encore que les faits, c’est la manière, la publication, le timing, qui lui sont reprochés. Lombardi parle d’un acte « très grave et irresponsable », qui placerait le synode sous la pression médiatique. D’une part, rien de nouveau sous le soleil : la pression médiatique existait avant, et elle existait déjà il y a 50 ans, de Lubac et Congar en témoignent. L’Eglise devrait plutôt se réjouir de ce que les médias s’intéressent à elle, après tout (mauvais esprit inside). D’autre part, on peut s’interroger sur la gravité relative du coming-out dont il est question par rapport à la manière dont l’Eglise refuse de voir, ou refuse de parler publiquement du fait, que sa position doctrinale en matière sexuelle (et en matière matrimoniale, et en matière de célibat ecclésiastique) est discutée, remise en cause à juste titre, blesse des personnes. Le plus irresponsable n’est pas, à mon sens, de faire son coming-out pour tenter de contraindre le magistère à plonger dans les débats (et ce, quoique je pense par ailleurs de l’efficacité de cette tentative), mais bien de continuer à tenter de mettre les débats en question sous le boisseau. On reproche à Krzystof Charamsa d’avoir voulu « faire le buzz » sans se demander comment il en est arrivé à ce choix et si, éventuellement, l’attitude de l’Eglise n’y serait pas un tout petit peu pour quelque chose (...)
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