La ligature d'Isaac
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philouie
Roque
Nomade
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La ligature d'Isaac
Il m'a paru adéquat, sur un forum qui s'appelle Dialogue-Abraham, d'approfondir ici ce qui fut sans doute l'un des plus forts moments de sa vie.
On peut être étonné de voir Dieu demander à Abraham le sacrifice de son fils, son unique. Pourtant cet acte a une forte valeur symbolique. C'est ce que je vous propose de voir ensemble.
Dans cet acte du sacrifice d'Isaac, on trouve la signification profonde de Pessah, de la pâque juive.
Pour commencer, lisons ce qui est dit dans Exode 13: 1-16. Je ne peux citer ici que de brefs versets, à vous de lire tout le passage dans votre Bible.
Consacre-moi tout premier-né, tout premier-né parmi les enfants d'Israël, tant des hommes que des animaux: il m'appartient.
Tout premier-né appartient à Yahweh. Pourquoi ?
Et lorsque ton fils te demandera un jour: Que signifie cela? tu lui répondras: Par sa main puissante, l'Éternel nous a fait sortir d'Égypte, de la maison de servitude;
et, comme Pharaon s'obstinait à ne point nous laisser aller, l'Éternel fit mourir tous les premiers-nés dans le pays d'Égypte, depuis les premiers-nés des hommes jusqu'aux premiers-nés des animaux. Voilà pourquoi j'offre en sacrifice à l'Éternel tout premier-né des mâles, et je rachète tout premier-né de mes fils.
L'explication première est que Yahweh a dû faire mourir tous les premiers-nés Egyptiens pour que Pharaon accepte de laisser partir Israël hors d'Egypte. En échange, tous les premiers-nés hébreux, qui ne sont pas morts ce jour là, devront être consacrés à Yahweh.
C'est exact, mais c'est un peu court. Derrière cette explication première se cache quelque chose de bien plus beau.
Il n'en reste pas moins qu'en mémoire de Pâque (la Pâque juive, Pessah, la seule vraie), tous les premiers-nés doivent être offerts à Yahweh. C'est ce que s'apprêtait à faire Abraham avant l'heure, bien avant Moïse. Preuve que le symbole va bien au-delà de Pâque.
Dieu ne prenant pas plaisir aux sacrifices humains, Il accepte que le premier-né soit remplacé par un bélier pour le sacrifice. C'est ce qui a été instauré depuis la Loi de Moïse. C'est bien ce qui s'est passé ici "providentiellement".
Mais alors pourquoi ces sacrifices, puisque le symbole va bien au-delà de Pâque ?
L'explication se trouve dans 1 Cor 15:
Le premier homme, tiré de la terre, est terrestre; le second homme est du ciel. 1 Cor 15: 47
Il n'existe que 2 hommes pour Yahweh. Adam, et tout ceux qui sont semblables à lui, et Jésus-Christ, et tout ceux qui sont semblables à lui.
Adam est charnel, terrestre. Jésus-Christ est spirituel, céleste.
Adam était le premier homme, le premier-né. Il ne s'est pas consacré à Dieu. Il est mort. Tout ceux qui seront comme lui, qui ne se consacreront pas à Dieu, mourront.
Nous naissons tous dans la peau d'Adam. A nous de nous consacrer à Dieu. Si nous ne le faisons pas, comme Adam, nous mourrons. Et si nous le faisons, nous tuons nous-même cette vieille peau charnelle pour revêtir la spiritualité de l'homme nouveau, de l'homme céleste.
Voici donc ce que je dis et ce que je déclare dans le Seigneur, c'est que vous ne devez plus marcher comme les païens, qui marchent selon la vanité de leurs pensées.
Ils ont l'intelligence obscurcie, ils sont étrangers à la vie de Dieu, à cause de l'ignorance qui est en eux, à cause de l'endurcissement de leur coeur.
Ayant perdu tout sentiment, ils se sont livrés à la dissolution, pour commettre toute espèce d'impureté jointe à la cupidité.
Mais vous, ce n'est pas ainsi que vous avez appris Christ,
si du moins vous l'avez entendu, et si, conformément à la vérité qui est en Jésus, c'est en lui que vous avez été instruits à vous dépouiller,
eu égard à votre vie passée, du vieil homme qui se corrompt par les convoitises trompeuses,
à être renouvelés dans l'esprit de votre intelligence,
et à revêtir l'homme nouveau, créé selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité. Eph 4: 17-24
Ainsi le sacrifice d'Isaac représente la mort du premier-né, d'Adam, du "vieil homme", de l'homme charnel, pour que vive en nous le second homme, "l'homme nouveau", l'homme céleste en nous, Christ. Cet acte qui est toujours d'actualité, a une forme spirituelle, symbolique dans la nouvelle alliance, et une forme rituelle, sacrificielle dans l'ancienne alliance.
D'où l'apparition du bélier dans cette scène avec Isaac.
Si ce symbole a été inauguré avec Abraham et Isaac, et institutionnalisé avec la Loi de Moïse, il a pris naissance à la sortie du peuple d'Israël d'Egypte. Ce qui est lourd de significations symboliques.
L'Egypte est le symbole du monde. Des plaisirs du monde, de la chair. Du péché.
Israël est le symbole du peuple de Dieu.
C'est lorsque le peuple de Dieu a voulu sortir du monde du péché, que les premiers-nés du monde charnel sont morts, et les premiers-nés du monde spirituel ont été consacrés à Yahweh. Pour faire naître le second homme, qui est céleste.
Oui, il y a tout ça dans le sacrifice d'Isaac par Abraham.
On peut être étonné de voir Dieu demander à Abraham le sacrifice de son fils, son unique. Pourtant cet acte a une forte valeur symbolique. C'est ce que je vous propose de voir ensemble.
Dans cet acte du sacrifice d'Isaac, on trouve la signification profonde de Pessah, de la pâque juive.
Pour commencer, lisons ce qui est dit dans Exode 13: 1-16. Je ne peux citer ici que de brefs versets, à vous de lire tout le passage dans votre Bible.
Consacre-moi tout premier-né, tout premier-né parmi les enfants d'Israël, tant des hommes que des animaux: il m'appartient.
Tout premier-né appartient à Yahweh. Pourquoi ?
Et lorsque ton fils te demandera un jour: Que signifie cela? tu lui répondras: Par sa main puissante, l'Éternel nous a fait sortir d'Égypte, de la maison de servitude;
et, comme Pharaon s'obstinait à ne point nous laisser aller, l'Éternel fit mourir tous les premiers-nés dans le pays d'Égypte, depuis les premiers-nés des hommes jusqu'aux premiers-nés des animaux. Voilà pourquoi j'offre en sacrifice à l'Éternel tout premier-né des mâles, et je rachète tout premier-né de mes fils.
L'explication première est que Yahweh a dû faire mourir tous les premiers-nés Egyptiens pour que Pharaon accepte de laisser partir Israël hors d'Egypte. En échange, tous les premiers-nés hébreux, qui ne sont pas morts ce jour là, devront être consacrés à Yahweh.
C'est exact, mais c'est un peu court. Derrière cette explication première se cache quelque chose de bien plus beau.
Il n'en reste pas moins qu'en mémoire de Pâque (la Pâque juive, Pessah, la seule vraie), tous les premiers-nés doivent être offerts à Yahweh. C'est ce que s'apprêtait à faire Abraham avant l'heure, bien avant Moïse. Preuve que le symbole va bien au-delà de Pâque.
Dieu ne prenant pas plaisir aux sacrifices humains, Il accepte que le premier-né soit remplacé par un bélier pour le sacrifice. C'est ce qui a été instauré depuis la Loi de Moïse. C'est bien ce qui s'est passé ici "providentiellement".
Mais alors pourquoi ces sacrifices, puisque le symbole va bien au-delà de Pâque ?
L'explication se trouve dans 1 Cor 15:
Le premier homme, tiré de la terre, est terrestre; le second homme est du ciel. 1 Cor 15: 47
Il n'existe que 2 hommes pour Yahweh. Adam, et tout ceux qui sont semblables à lui, et Jésus-Christ, et tout ceux qui sont semblables à lui.
Adam est charnel, terrestre. Jésus-Christ est spirituel, céleste.
Adam était le premier homme, le premier-né. Il ne s'est pas consacré à Dieu. Il est mort. Tout ceux qui seront comme lui, qui ne se consacreront pas à Dieu, mourront.
Nous naissons tous dans la peau d'Adam. A nous de nous consacrer à Dieu. Si nous ne le faisons pas, comme Adam, nous mourrons. Et si nous le faisons, nous tuons nous-même cette vieille peau charnelle pour revêtir la spiritualité de l'homme nouveau, de l'homme céleste.
Voici donc ce que je dis et ce que je déclare dans le Seigneur, c'est que vous ne devez plus marcher comme les païens, qui marchent selon la vanité de leurs pensées.
Ils ont l'intelligence obscurcie, ils sont étrangers à la vie de Dieu, à cause de l'ignorance qui est en eux, à cause de l'endurcissement de leur coeur.
Ayant perdu tout sentiment, ils se sont livrés à la dissolution, pour commettre toute espèce d'impureté jointe à la cupidité.
Mais vous, ce n'est pas ainsi que vous avez appris Christ,
si du moins vous l'avez entendu, et si, conformément à la vérité qui est en Jésus, c'est en lui que vous avez été instruits à vous dépouiller,
eu égard à votre vie passée, du vieil homme qui se corrompt par les convoitises trompeuses,
à être renouvelés dans l'esprit de votre intelligence,
et à revêtir l'homme nouveau, créé selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité. Eph 4: 17-24
Ainsi le sacrifice d'Isaac représente la mort du premier-né, d'Adam, du "vieil homme", de l'homme charnel, pour que vive en nous le second homme, "l'homme nouveau", l'homme céleste en nous, Christ. Cet acte qui est toujours d'actualité, a une forme spirituelle, symbolique dans la nouvelle alliance, et une forme rituelle, sacrificielle dans l'ancienne alliance.
D'où l'apparition du bélier dans cette scène avec Isaac.
Si ce symbole a été inauguré avec Abraham et Isaac, et institutionnalisé avec la Loi de Moïse, il a pris naissance à la sortie du peuple d'Israël d'Egypte. Ce qui est lourd de significations symboliques.
L'Egypte est le symbole du monde. Des plaisirs du monde, de la chair. Du péché.
Israël est le symbole du peuple de Dieu.
C'est lorsque le peuple de Dieu a voulu sortir du monde du péché, que les premiers-nés du monde charnel sont morts, et les premiers-nés du monde spirituel ont été consacrés à Yahweh. Pour faire naître le second homme, qui est céleste.
Oui, il y a tout ça dans le sacrifice d'Isaac par Abraham.
Re: La ligature d'Isaac
Sais-tu que ton logo est juif messianique ? D'après un forum où je me rends de temps en temps, ils ne sont pas unitariens. C'est à dire qu'ils ne croient pas que Jésus est juste un homme.
Roque- Messages : 5064
Réputation : 23
Date d'inscription : 15/02/2011
Age : 80
Localisation : Paris
Re: La ligature d'Isaac
Oui, je sais tout cela.
Je sais aussi qu'un symbole n'appartient pas à un groupe ou à une église, mais véhicule plutôt un concept. Un peu comme les pictogrammes.
La légende veut que ce symbole ait été utilisé par les premiers chrétiens juifs. Sans que nous n'ayons aucun moyen de le vérifier.
Je sais aussi qu'un symbole n'appartient pas à un groupe ou à une église, mais véhicule plutôt un concept. Un peu comme les pictogrammes.
La légende veut que ce symbole ait été utilisé par les premiers chrétiens juifs. Sans que nous n'ayons aucun moyen de le vérifier.
La ligature d'Isaac ou le Sacrfice d'Abraham
Bonjour à tous,
je viens de m'inscrire sur ce forum. Engagé depuis plusieurs années dans le dialogue inter-religieux en particulier Islamo-chrétien, je me suis inscrit sur ce forum pour soumettre à votre sagacité, critique et controverse, une analyse que j'ai fait à propos du Sacrifice d'Abraham. Quelques années que l'idée couvait, mais un échange sur internet ma donné l'occasion d'approfondir cette analyse.
Bien que le texte ne soit pas très long, je vais vous en proposer la lecture en plusieurs tronçons. Merci de vos remarques.
Voila :
Le sacrifice d’Abraham a donné lieu à de multiples interprétations. Il présente en effet quelques difficultés. Dieu aurait-il ordonné le sacrifice d’Isaac ? Abraham aurait-il été suffisamment abruti pour le prendre au pied de la lettre ? Était-il un fanatique ? Est-il le père de tous les totalitarismes ?
Est-il la marque de la consécration du premier né ? Préfigure-t-il le sacrifice du Fils Jésus par Dieu le Père ?
Est-il le signe de la soumission à l’autorité, une expérience de Milgram avant l’heure ?
Abraham s’est-il trompé en croyant que Dieu lui demandait de sacrifier son fils ?
Ce sacrifice marque-t-il une étape dans la maturation de l’humanité qui subitement prendrait conscience que les Dieux ne demandent pas qu’on leur sacrifie nos enfants, franchissant une étape de la barbarie vers l’humanité ?
Le but de ce texte est de répondre à ces questions. De répondre à ces questions en explorant une autre voie, celle de voir le sacrifice d’Abraham comme un modèle éducatif. Cette voie n’est pas évidente de prime abords mais nous verrons que le texte même permet de la justifier.
Prétendre qu’il s’agirait de l’interdiction du sacrifice des enfants est une explication réductrice, elle ne tient pas compte du texte lui-même (par exemple si Isaac demande où est l’agneau pour la sacrifice, c’est qu’à l’évidence il s’attend à un sacrifice animal) et elle empêche d’approfondir le texte : au prétexte que l’on aurait une explication globale, il n’est plus nécessaire de chercher dans le détail le contenu réel du texte. Or dans notre approche, nous considérons que chacun des mots, chacun des personnages participent du sens général du récit et qu’il ne faut en escamoter aucun.
Un récit comme la Genèse qui est un récit mythologique ne doit pas se lire au premier degré, comme récit de faits historiques. Il doit se lire et s’interpréter comme l’on ferait d’un rêve ou d’un conte. Les personnages y sont des symboles, les évènements des images qui relèvent plus du sens que du fait.
La méthode employée est celle de la lecture symbolique. La lecture symbolique consiste à se rapprocher du texte non pas pour en considérer les faits qu’ils racontent mais les images qu’ils présentent. Les images sont alors enrichies par ce qu’elles signifient généralement dans les récits humains, les contes et légendes, c’est l’amplification. L’ensemble permet alors de dégager la signification du texte.
Par exemple, lorsqu’il est question de monter une montagne, ce qui compte c’est de voir qu’il s’agit d’un trajet fait en s’élevant, il s’agit alors de grandir, il s’agit d’un progrès, il s’agit d’une spiritualisation, ensemble d’interprétations qui peuvent être confirmées ou infirmées par d’autres indices.
Evidemment, dans notre cas, il s’agit de partir d’un présupposé et de voir comment le texte s’articule autour de notre présupposé. La lecture symbolique ayant l’avantage d’ouvrir le texte à maintes interprétations, elle a aussi l’inconvénient de permettre de raconter facilement n’importe quoi.
Il y a là, une façon de lire le texte comme on lirait le marc de café, une façon auberge espagnole où l’on ne consomme que ce que l’on apporte. Le tableau final se juge par sa cohérence d’ensemble, par sa proximité au texte ou au contraire par les impasses qui y sont faites.
La lecture qui est faite ici est une lecture de parti pris mais qui n’exclut pas forcément d’autres lectures, d’autres angles d’analyse, qui pourraient porter également des fruits, permettant d’élargir encore la compréhension du récit.
Abraham est considéré comme le premier des patriarches, il est en cela le père de nos pères. Avant Abraham, nous avons eu des ancêtres, mais des ancêtres primitifs, se furent Adam, Abel, Noe…
L'éternel, le Dieu de vos pères, le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac, le Dieu de Jacob, m'envoie vers vous.
Avec Abraham commence pour l’humanité un nouveau cycle. Celui de l’homme relié à Dieu, il quitte l’âge des ténèbres pour devenir l’homme civilisé, il fonde les rites qui nous ont fait passer de la préhistoire à l’histoire (Pratiques religieuses, sépultures …)
Dans le récit biblique l’acte fondateur de la civilisation s’articule autour du sacrifice d’Isaac
("Je ferai de toi le père d’une grande nation").
Ce sacrifice a un nom en français et s’appelle "l’éducation" et c’est ce que nous allons montrer.
c’est un sacrifice au cours duquel on ne meurt pas, c’est un sacrifice qui porte sa propre récompense, (l’agneau que l’on mange ensuite), mais c’est un sacrifice au cours duquel l’enfant perd sa liberté (Isaac est lié), c’est un sacrifice au cours duquel le père renonce à son désir (il tue celui dans lequel il a mis tout son espoir), c’est un sacrifice qui enjoint à donner la primauté à l’ordre universel plutôt qu’à son propre désir (Abraham se soumet à Dieu en dépit de ses choix propres),
C’est un sacrifice au cours duquel le père n’hésite pas à sacrifier plus que son propre désir, le désir de son propre enfant.
Si le grain ne meurt....
je viens de m'inscrire sur ce forum. Engagé depuis plusieurs années dans le dialogue inter-religieux en particulier Islamo-chrétien, je me suis inscrit sur ce forum pour soumettre à votre sagacité, critique et controverse, une analyse que j'ai fait à propos du Sacrifice d'Abraham. Quelques années que l'idée couvait, mais un échange sur internet ma donné l'occasion d'approfondir cette analyse.
Bien que le texte ne soit pas très long, je vais vous en proposer la lecture en plusieurs tronçons. Merci de vos remarques.
Voila :
Le sacrifice d’Abraham a donné lieu à de multiples interprétations. Il présente en effet quelques difficultés. Dieu aurait-il ordonné le sacrifice d’Isaac ? Abraham aurait-il été suffisamment abruti pour le prendre au pied de la lettre ? Était-il un fanatique ? Est-il le père de tous les totalitarismes ?
Est-il la marque de la consécration du premier né ? Préfigure-t-il le sacrifice du Fils Jésus par Dieu le Père ?
Est-il le signe de la soumission à l’autorité, une expérience de Milgram avant l’heure ?
Abraham s’est-il trompé en croyant que Dieu lui demandait de sacrifier son fils ?
Ce sacrifice marque-t-il une étape dans la maturation de l’humanité qui subitement prendrait conscience que les Dieux ne demandent pas qu’on leur sacrifie nos enfants, franchissant une étape de la barbarie vers l’humanité ?
Le but de ce texte est de répondre à ces questions. De répondre à ces questions en explorant une autre voie, celle de voir le sacrifice d’Abraham comme un modèle éducatif. Cette voie n’est pas évidente de prime abords mais nous verrons que le texte même permet de la justifier.
Prétendre qu’il s’agirait de l’interdiction du sacrifice des enfants est une explication réductrice, elle ne tient pas compte du texte lui-même (par exemple si Isaac demande où est l’agneau pour la sacrifice, c’est qu’à l’évidence il s’attend à un sacrifice animal) et elle empêche d’approfondir le texte : au prétexte que l’on aurait une explication globale, il n’est plus nécessaire de chercher dans le détail le contenu réel du texte. Or dans notre approche, nous considérons que chacun des mots, chacun des personnages participent du sens général du récit et qu’il ne faut en escamoter aucun.
Un récit comme la Genèse qui est un récit mythologique ne doit pas se lire au premier degré, comme récit de faits historiques. Il doit se lire et s’interpréter comme l’on ferait d’un rêve ou d’un conte. Les personnages y sont des symboles, les évènements des images qui relèvent plus du sens que du fait.
La méthode employée est celle de la lecture symbolique. La lecture symbolique consiste à se rapprocher du texte non pas pour en considérer les faits qu’ils racontent mais les images qu’ils présentent. Les images sont alors enrichies par ce qu’elles signifient généralement dans les récits humains, les contes et légendes, c’est l’amplification. L’ensemble permet alors de dégager la signification du texte.
Par exemple, lorsqu’il est question de monter une montagne, ce qui compte c’est de voir qu’il s’agit d’un trajet fait en s’élevant, il s’agit alors de grandir, il s’agit d’un progrès, il s’agit d’une spiritualisation, ensemble d’interprétations qui peuvent être confirmées ou infirmées par d’autres indices.
Evidemment, dans notre cas, il s’agit de partir d’un présupposé et de voir comment le texte s’articule autour de notre présupposé. La lecture symbolique ayant l’avantage d’ouvrir le texte à maintes interprétations, elle a aussi l’inconvénient de permettre de raconter facilement n’importe quoi.
Il y a là, une façon de lire le texte comme on lirait le marc de café, une façon auberge espagnole où l’on ne consomme que ce que l’on apporte. Le tableau final se juge par sa cohérence d’ensemble, par sa proximité au texte ou au contraire par les impasses qui y sont faites.
La lecture qui est faite ici est une lecture de parti pris mais qui n’exclut pas forcément d’autres lectures, d’autres angles d’analyse, qui pourraient porter également des fruits, permettant d’élargir encore la compréhension du récit.
Abraham est considéré comme le premier des patriarches, il est en cela le père de nos pères. Avant Abraham, nous avons eu des ancêtres, mais des ancêtres primitifs, se furent Adam, Abel, Noe…
L'éternel, le Dieu de vos pères, le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac, le Dieu de Jacob, m'envoie vers vous.
Avec Abraham commence pour l’humanité un nouveau cycle. Celui de l’homme relié à Dieu, il quitte l’âge des ténèbres pour devenir l’homme civilisé, il fonde les rites qui nous ont fait passer de la préhistoire à l’histoire (Pratiques religieuses, sépultures …)
Dans le récit biblique l’acte fondateur de la civilisation s’articule autour du sacrifice d’Isaac
("Je ferai de toi le père d’une grande nation").
Ce sacrifice a un nom en français et s’appelle "l’éducation" et c’est ce que nous allons montrer.
c’est un sacrifice au cours duquel on ne meurt pas, c’est un sacrifice qui porte sa propre récompense, (l’agneau que l’on mange ensuite), mais c’est un sacrifice au cours duquel l’enfant perd sa liberté (Isaac est lié), c’est un sacrifice au cours duquel le père renonce à son désir (il tue celui dans lequel il a mis tout son espoir), c’est un sacrifice qui enjoint à donner la primauté à l’ordre universel plutôt qu’à son propre désir (Abraham se soumet à Dieu en dépit de ses choix propres),
C’est un sacrifice au cours duquel le père n’hésite pas à sacrifier plus que son propre désir, le désir de son propre enfant.
Si le grain ne meurt....
philouie- Messages : 421
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Date d'inscription : 07/10/2012
La ligature d'Isaac 2
Manifestement on est dans une relation de père à fils, manifestement c’est par ce sacrifice qu’Abraham devient patriarche, c’est à dire, le père de tous les pères
Nous allons examiner le texte comme une allégorie du processus éducatif. Il n’y a évidemment pas de cahier, pas de maitre d’école, nous sommes à l’aube de l’humanité. Mais tout y est, rien ne manque.
Le texte, genèse 22 :
Après ces choses, Dieu mit Abraham à l’épreuve, et lui dit : Abraham ! Et il répondit : Me voici !
Dieu dit : Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac ; va, pour toi, en au pays de Morija, et là offre-le en holocauste sur l’une des montagnes que je te dirai.
Abraham se leva de bon matin, sella son âne, et prit avec lui deux serviteurs et son fils Isaac. Il fendit du bois pour l’holocauste, et partit pour aller au lieu que Dieu lui avait dit.
Le troisième jour, Abraham, levant les yeux, vit le lieu de loin.
Et Abraham dit à ses serviteurs : Restez ici avec l’âne ; moi et le jeune homme, nous irons jusque-là pour adorer, et nous reviendrons auprès de vous.
Abraham prit le bois pour l’holocauste, le chargea sur son fils Isaac, et porta dans sa main le feu et le couteau. Et ils marchèrent tous deux ensemble. Alors Isaac, parlant à Abraham, son père, dit : Mon père ! Et il répondit : Me voici, mon fils ! Isaac reprit : Voici le feu et le bois ; mais où est l’agneau pour l’holocauste ? Abraham répondit : Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau pour l’holocauste. Et ils marchèrent tous deux ensemble.
Lorsqu’ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait dit, Abraham y éleva un autel, et rangea le bois. Il lia son fils Isaac, et le mit sur l’autel, par-dessus le bois. Puis Abraham étendit la main, et prit le couteau, pour égorger son fils. Alors l’ange de l’Éternel l’appela des cieux, et dit : Abraham ! Abraham ! Et il répondit : Me voici ! L’ange dit : N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien ; car je sais maintenant que tu crains Dieu, et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique. Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes ; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils.
Abraham donna à ce lieu le nom de Jehova Jiré. C’est pourquoi l’on dit aujourd’hui : A la montagne de l’Éternel il sera pourvu. L’ange de l’Éternel appela une seconde fois Abraham des cieux, et dit : Je le jure par moi-même, parole de l’Éternel ! parce que tu as fait cela, et que tu n’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai et je multiplierai ta postérité, comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est sur le bord de la mer ; et ta postérité possédera la porte de ses ennemis. Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix.
Il y a un point d’une extrême importance à la fois pour la compréhension du texte et pour notre sujet, c’est que l’on ne peut évoquer le sacrifice d’Abraham sans parler de la circoncision.
C’est en mémoire d’Abraham que les juifs et les musulmans circoncisent les enfants mâles. Cette pratique concerne environ 600 millions d’hommes dans le monde. Nous verrons comment elle s’articule autour de notre texte et comment l’un et l’autre se justifient mutuellement.
Voici le texte : Genèse 17
Lorsqu’Abram fut âgé de 99 ans, l’Eternel apparut à Abram et lui dit : « Je suis le Dieu tout-puissant. Marche devant moi et sois intègre. J’établirai mon alliance entre moi et toi, et je te multiplierai considérablement. »
Abram tomba le visage contre terre, et Dieu lui dit :« Voici quelle est mon alliance avec toi. Tu deviendras le père d’un grand nombre de nations. On ne t’appellera plus Abram, mais ton nom sera Abraham, car je te rends père d’un grand nombre de nations. Je te ferai beaucoup proliférer, je ferai de toi des nations et des rois seront issus de toi. J’établirai mon alliance entre moi et toi, ainsi que tes descendants après toi, au fil des générations : ce sera une alliance perpétuelle en vertu de laquelle je serai ton Dieu et celui de ta descendance après toi. Je te donnerai, à toi et à tes descendants après toi, le pays où tu séjournes en étranger, tout le pays de Canaan ; il sera leur propriété pour toujours et je serai leur Dieu. »
Dieu dit à Abraham : « Quant à toi, tu garderas mon alliance, toi et tes descendants après toi au fil des générations. Voici quelle est mon alliance, celle que vous garderez entre moi et vous, ainsi que ta descendance après toi : tout garçon parmi vous sera circoncis. Vous vous circoncirez et ce sera un signe d’alliance entre moi et vous. A l’âge de 8 jours, tout garçon parmi vous sera circoncis, et ce à chacune de vos générations, qu’il soit né chez toi ou qu’il ait été acheté à un étranger, en dehors de ta descendance".
Dieu fait une promesse à Abraham en échange de la circoncision de chaque enfant mâle ; mais cette promesse, "tu seras le père d’une multitude de nation", ne devient effective que lorsqu’Abraham réussi l’épreuve du sacrifice. Ainsi la circoncision n’est pas simplement la marque de l’Alliance avec Dieu mais elle est le symbole de la réalisation du sacrifice.
Avant de nous intéresser plus avant à la relation Abraham-Isaac, relation analogue à la relation Dieu-Abraham, laissons Isaac comme personne, pour ne retenir de lui que ce qu’il représente pour Abraham. Nous aurons l’impression de nous éloigner de notre sujet, mais il faut faire ce détour.
Ce que représente Isaac est donné par le texte lui-même : "Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac" Isaac est l’être le plus cher qui soit pour Abraham, il y a mis toutes ses espérances. sans lui, plus rien qui vaille. Remarquons comme le texte insiste : Isaac, ton fils, ton unique, celui que tu aimes.
Dieu demande à Abraham le sacrifice d’Isaac. Mais cet Isaac c’est quoi ?.
Or la réponse est aussi dans le texte : on a vu que la réalisation de la promesse découlait du sacrifice et que ce qui symbolisait l’alliance dont découlait la promesse est la circoncision. La séquence est ainsi faites : il s’agit d’une alliance symbolisée par la circoncision et de laquelle découle une promesse qui ne devient effective que lors du passage de l’épreuve, c’est-à-dire du sacrifice.
Donc sacrifice et circoncision sont liés, l’un symbolisant l’autre.
Et la circoncision est une façon de mimer la castration.
Donc, première indication, la castration. Or la castration c’est se rendre impuissant et se rendre impuissant est perdre le pouvoir. Le sacrifice est renoncement au pouvoir.
Pour mieux le comprendre nous allons partir d’une petite scène : on appelle Abraham et il répond : "Me voici", par trois fois, à Dieu, à son fils et à l’ange, Abraham réponds "Me voici"
Ce que nous montre cette scène, c’est la disponibilité d’Abraham, il est là, présent, attentif. On l’appelle et il répond, il répond présent parce qu’il n’est pas occupé à tirer des plans sur la comète, à calculer les avantages qu’il pourrait tirer de telle situation. Il est là. Et le texte encore nous donne la réponse "Où est le mouton ? Dieu y pourvoira !" et le texte insiste pour ceux à qui cela aurait échappé : "Abraham donna à ce lieu le nom de Jehova Jiré. C’est pourquoi l’on dit aujourd’hui : A la montagne de l’Éternel il sera pourvu."
"Dieu pourvoira" Ainsi si Abraham répond présent quand on le questionne c’est parce qu’il laisse le futur à Dieu.
Ainsi nous avons ici une première grille de lecture de notre récit. Le sacrifice, qui est renoncement au pouvoir consiste à remettre le futur entre les mains de Dieu.
Ce "Dieu pourvoira" fait écho à de nombreuses doctrines dans quasi toutes les religions.
Chacun sait que pour les musulmans pour qui Abraham est un personnage immense, cette question de remise du futur entre les mains de Dieu est un point central, c’est le mektoub, la fatalité, c’est l’expression si commune de l’inch’allah, si Dieu Veut.
Rien de ce qui advient ne peut advenir sans que cela ne soit le fait de la volonté divine.
"Dieu pourvoira" est aussi présent dans les évangiles, c’est la parabole dite de l’oiseau dans le ciel ou du lys dans le pré"
« Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous serez vêtus. La vie est plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement. Regardez les oiseaux du ciel ; ils ne sèment ni ne moissonnent, ils n’ont ni cellier ni grenier ; cependant Dieu les nourrit. Ne valez vous pas beaucoup plus qu’eux ? Considérez les lys, comme ils croissent ; ils ne travaillent ni ne filent cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’était pas vêtu comme l’un d’eux. Ne vous mettez donc pas en peine de ce que vous mangerez et de ce que vous boirez et n’ayez pas l’esprit inquiet. Tout cela, les païens s’en préoccupent ; mais votre Père sait bien que vous en avez besoin. Cherchez seulement son Royaume et tout cela vous sera donné par surcroît. (Luc XII, 22 24, 27 »
Mais c’est surtout dans la Bhagavad Gita qui à la mieux théorisée cette doctrine "du renoncement aux fruits de ses actes".
On se souvient qu’Arjuna, à l’heure de rentrer dans le combat, renonce parce qu’il refuse d’aller tuer ses propres frères. Et Khrishna de dire :
BGG II-37
« Si tu meurs en combattant, tu atteindras les planètes de délices ; vainqueur, tu jouiras du royaume de la Terre. Lève-toi donc, ô fils de Kuntî, et combats fermement.
Combats par devoir, sans compter tes joies ni tes peines, la perte ni le gain, la victoire ni la défaite ; ainsi, jamais tu n’encourras le péché »
Ainsi l’on voit qu’Abraham faisant fi des gains et des pertes n’accomplit que son devoir, parce qu’il l’a reçu en commandement divin.
BGG III-19 :
« C’est pourquoi, sans t’y attacher, ne cesse jamais d’accomplir les actions prescrites. L’homme qui, détaché, s’en acquitte atteint le bien souverain. »
Le sacrifice d’Abraham est ainsi un renoncement aux fruits des actes.
Nous allons examiner le texte comme une allégorie du processus éducatif. Il n’y a évidemment pas de cahier, pas de maitre d’école, nous sommes à l’aube de l’humanité. Mais tout y est, rien ne manque.
Le texte, genèse 22 :
Après ces choses, Dieu mit Abraham à l’épreuve, et lui dit : Abraham ! Et il répondit : Me voici !
Dieu dit : Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac ; va, pour toi, en au pays de Morija, et là offre-le en holocauste sur l’une des montagnes que je te dirai.
Abraham se leva de bon matin, sella son âne, et prit avec lui deux serviteurs et son fils Isaac. Il fendit du bois pour l’holocauste, et partit pour aller au lieu que Dieu lui avait dit.
Le troisième jour, Abraham, levant les yeux, vit le lieu de loin.
Et Abraham dit à ses serviteurs : Restez ici avec l’âne ; moi et le jeune homme, nous irons jusque-là pour adorer, et nous reviendrons auprès de vous.
Abraham prit le bois pour l’holocauste, le chargea sur son fils Isaac, et porta dans sa main le feu et le couteau. Et ils marchèrent tous deux ensemble. Alors Isaac, parlant à Abraham, son père, dit : Mon père ! Et il répondit : Me voici, mon fils ! Isaac reprit : Voici le feu et le bois ; mais où est l’agneau pour l’holocauste ? Abraham répondit : Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau pour l’holocauste. Et ils marchèrent tous deux ensemble.
Lorsqu’ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait dit, Abraham y éleva un autel, et rangea le bois. Il lia son fils Isaac, et le mit sur l’autel, par-dessus le bois. Puis Abraham étendit la main, et prit le couteau, pour égorger son fils. Alors l’ange de l’Éternel l’appela des cieux, et dit : Abraham ! Abraham ! Et il répondit : Me voici ! L’ange dit : N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien ; car je sais maintenant que tu crains Dieu, et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique. Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes ; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils.
Abraham donna à ce lieu le nom de Jehova Jiré. C’est pourquoi l’on dit aujourd’hui : A la montagne de l’Éternel il sera pourvu. L’ange de l’Éternel appela une seconde fois Abraham des cieux, et dit : Je le jure par moi-même, parole de l’Éternel ! parce que tu as fait cela, et que tu n’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai et je multiplierai ta postérité, comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est sur le bord de la mer ; et ta postérité possédera la porte de ses ennemis. Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix.
Il y a un point d’une extrême importance à la fois pour la compréhension du texte et pour notre sujet, c’est que l’on ne peut évoquer le sacrifice d’Abraham sans parler de la circoncision.
C’est en mémoire d’Abraham que les juifs et les musulmans circoncisent les enfants mâles. Cette pratique concerne environ 600 millions d’hommes dans le monde. Nous verrons comment elle s’articule autour de notre texte et comment l’un et l’autre se justifient mutuellement.
Voici le texte : Genèse 17
Lorsqu’Abram fut âgé de 99 ans, l’Eternel apparut à Abram et lui dit : « Je suis le Dieu tout-puissant. Marche devant moi et sois intègre. J’établirai mon alliance entre moi et toi, et je te multiplierai considérablement. »
Abram tomba le visage contre terre, et Dieu lui dit :« Voici quelle est mon alliance avec toi. Tu deviendras le père d’un grand nombre de nations. On ne t’appellera plus Abram, mais ton nom sera Abraham, car je te rends père d’un grand nombre de nations. Je te ferai beaucoup proliférer, je ferai de toi des nations et des rois seront issus de toi. J’établirai mon alliance entre moi et toi, ainsi que tes descendants après toi, au fil des générations : ce sera une alliance perpétuelle en vertu de laquelle je serai ton Dieu et celui de ta descendance après toi. Je te donnerai, à toi et à tes descendants après toi, le pays où tu séjournes en étranger, tout le pays de Canaan ; il sera leur propriété pour toujours et je serai leur Dieu. »
Dieu dit à Abraham : « Quant à toi, tu garderas mon alliance, toi et tes descendants après toi au fil des générations. Voici quelle est mon alliance, celle que vous garderez entre moi et vous, ainsi que ta descendance après toi : tout garçon parmi vous sera circoncis. Vous vous circoncirez et ce sera un signe d’alliance entre moi et vous. A l’âge de 8 jours, tout garçon parmi vous sera circoncis, et ce à chacune de vos générations, qu’il soit né chez toi ou qu’il ait été acheté à un étranger, en dehors de ta descendance".
Dieu fait une promesse à Abraham en échange de la circoncision de chaque enfant mâle ; mais cette promesse, "tu seras le père d’une multitude de nation", ne devient effective que lorsqu’Abraham réussi l’épreuve du sacrifice. Ainsi la circoncision n’est pas simplement la marque de l’Alliance avec Dieu mais elle est le symbole de la réalisation du sacrifice.
Avant de nous intéresser plus avant à la relation Abraham-Isaac, relation analogue à la relation Dieu-Abraham, laissons Isaac comme personne, pour ne retenir de lui que ce qu’il représente pour Abraham. Nous aurons l’impression de nous éloigner de notre sujet, mais il faut faire ce détour.
Ce que représente Isaac est donné par le texte lui-même : "Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac" Isaac est l’être le plus cher qui soit pour Abraham, il y a mis toutes ses espérances. sans lui, plus rien qui vaille. Remarquons comme le texte insiste : Isaac, ton fils, ton unique, celui que tu aimes.
Dieu demande à Abraham le sacrifice d’Isaac. Mais cet Isaac c’est quoi ?.
Or la réponse est aussi dans le texte : on a vu que la réalisation de la promesse découlait du sacrifice et que ce qui symbolisait l’alliance dont découlait la promesse est la circoncision. La séquence est ainsi faites : il s’agit d’une alliance symbolisée par la circoncision et de laquelle découle une promesse qui ne devient effective que lors du passage de l’épreuve, c’est-à-dire du sacrifice.
Donc sacrifice et circoncision sont liés, l’un symbolisant l’autre.
Et la circoncision est une façon de mimer la castration.
Donc, première indication, la castration. Or la castration c’est se rendre impuissant et se rendre impuissant est perdre le pouvoir. Le sacrifice est renoncement au pouvoir.
Pour mieux le comprendre nous allons partir d’une petite scène : on appelle Abraham et il répond : "Me voici", par trois fois, à Dieu, à son fils et à l’ange, Abraham réponds "Me voici"
Ce que nous montre cette scène, c’est la disponibilité d’Abraham, il est là, présent, attentif. On l’appelle et il répond, il répond présent parce qu’il n’est pas occupé à tirer des plans sur la comète, à calculer les avantages qu’il pourrait tirer de telle situation. Il est là. Et le texte encore nous donne la réponse "Où est le mouton ? Dieu y pourvoira !" et le texte insiste pour ceux à qui cela aurait échappé : "Abraham donna à ce lieu le nom de Jehova Jiré. C’est pourquoi l’on dit aujourd’hui : A la montagne de l’Éternel il sera pourvu."
"Dieu pourvoira" Ainsi si Abraham répond présent quand on le questionne c’est parce qu’il laisse le futur à Dieu.
Ainsi nous avons ici une première grille de lecture de notre récit. Le sacrifice, qui est renoncement au pouvoir consiste à remettre le futur entre les mains de Dieu.
Ce "Dieu pourvoira" fait écho à de nombreuses doctrines dans quasi toutes les religions.
Chacun sait que pour les musulmans pour qui Abraham est un personnage immense, cette question de remise du futur entre les mains de Dieu est un point central, c’est le mektoub, la fatalité, c’est l’expression si commune de l’inch’allah, si Dieu Veut.
Rien de ce qui advient ne peut advenir sans que cela ne soit le fait de la volonté divine.
"Dieu pourvoira" est aussi présent dans les évangiles, c’est la parabole dite de l’oiseau dans le ciel ou du lys dans le pré"
« Ne vous inquiétez pas pour votre vie de ce que vous mangerez, ni pour votre corps de quoi vous serez vêtus. La vie est plus que la nourriture et le corps plus que le vêtement. Regardez les oiseaux du ciel ; ils ne sèment ni ne moissonnent, ils n’ont ni cellier ni grenier ; cependant Dieu les nourrit. Ne valez vous pas beaucoup plus qu’eux ? Considérez les lys, comme ils croissent ; ils ne travaillent ni ne filent cependant je vous dis que Salomon même, dans toute sa gloire, n’était pas vêtu comme l’un d’eux. Ne vous mettez donc pas en peine de ce que vous mangerez et de ce que vous boirez et n’ayez pas l’esprit inquiet. Tout cela, les païens s’en préoccupent ; mais votre Père sait bien que vous en avez besoin. Cherchez seulement son Royaume et tout cela vous sera donné par surcroît. (Luc XII, 22 24, 27 »
Mais c’est surtout dans la Bhagavad Gita qui à la mieux théorisée cette doctrine "du renoncement aux fruits de ses actes".
On se souvient qu’Arjuna, à l’heure de rentrer dans le combat, renonce parce qu’il refuse d’aller tuer ses propres frères. Et Khrishna de dire :
BGG II-37
« Si tu meurs en combattant, tu atteindras les planètes de délices ; vainqueur, tu jouiras du royaume de la Terre. Lève-toi donc, ô fils de Kuntî, et combats fermement.
Combats par devoir, sans compter tes joies ni tes peines, la perte ni le gain, la victoire ni la défaite ; ainsi, jamais tu n’encourras le péché »
Ainsi l’on voit qu’Abraham faisant fi des gains et des pertes n’accomplit que son devoir, parce qu’il l’a reçu en commandement divin.
BGG III-19 :
« C’est pourquoi, sans t’y attacher, ne cesse jamais d’accomplir les actions prescrites. L’homme qui, détaché, s’en acquitte atteint le bien souverain. »
Le sacrifice d’Abraham est ainsi un renoncement aux fruits des actes.
philouie- Messages : 421
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Date d'inscription : 07/10/2012
la ligature d'Isaac 3
Jephté.
Il y a dans la bible un autre récit de sacrifice d’enfants. C’est un pendant au récit du sacrifice d’Abraham, mais un pendant obscure quand celui d’Abraham est lumineux.
Juges 11.29
Et l’Esprit de l’Eternel fut sur Jephté, et il traversa Galaad et Manassé et passa jusqu’à Mitspa de Galaad, et de Mitspa de Galaad il marcha contre les fils d’Ammon. Et Jephté fit un voeu à l’Eternel et dit : Si tu livres en ma main les fils d’Ammon, celui qui sortira des portes de ma maison, venant à ma rencontre, quand je reviendrai en paix de chez les fils d’Ammon, sera à l’Eternel, et je l’offrirai en holocauste. Et Jephté s’avança contre les fils d’Ammon pour les combattre, et l’Eternel les livra en sa main. Et il les battit, d’Aroër jusque vers Minnith, leur prenant vingt villes, et jusqu’à Abel-Kéramim ; ce fut une très grande défaite, et les fils d’Ammon furent abaissés devant les fils d’Israël. Et Jephté arriva à Mitspa, chez lui. Et voici sa fille sortait à sa rencontre avec des tambourins et avec des danses. Et elle était fille unique ; à part elle, il n’avait ni fils, ni fille. Et quand il la vit, il déchira ses vêtements et dit : Ah ! ma fille ! Comme tu m’accables ! Tu te mets parmi ceux qui me troublent ! J’ai ouvert la bouche [en parlant] à l’Eternel et je ne puis revenir en arrière. Et elle lui dit : Mon père, tu as ouvert la bouche en parlant à l’Eternel ; fais-moi selon ce qui est sorti de ta bouche, après que l’Eternel t’a donné de tirer vengeance de tes ennemis, les fils d’Ammon. Et elle dit à son père : Que ceci me soit accordé : laisse-moi pendant deux mois ! Et je m’en irai, et je descendrai [pour aller] sur les montagnes, et je pleurerai ma virginité, moi et mes compagnes. Et il répondit : Va ! Et il la laissa aller pour deux mois. Et elle s’en alla, elle et ses compagnes, et elle pleura sa virginité sur les montagnes. Et au bout de deux mois elle revint vers son père, et il accomplit à son égard le voeu qu’il avait fait ; et elle n’avait pas connu d’homme. Et de là vint la coutume en lsraël que d’année en année les filles d’Israël vont célébrer la fille de Jephté le Galaadite, quatre jours par an.
Dans ce texte on voit que la situation est strictement inverse :
Isaac est un garçon, solaire, lumineux. La fille de Jephté, est une fille, aspect lunaire, chtonien, obscure.
C’est Jephté qui fait un vœu de sacrifice, ce n’est pas Dieu qui demande.ET il fait vœu pour que Dieu lui octroie ce qu’il demande, et non seulement Dieu lui octroie, mais en plus Dieu lui désigne l’objet du sacrifice qui est sa fille unique. Jephté tue sa fille, Dieu ne retient pas son bras et cette fille n’a pas de descendance.
Notons aussi que les deux textes se terminent par des histoires de naissances, dans le cas d’Abraham, pour souligner la réalisation de la promesse, dans le cas de Jephté, pour bien montrer que c’est d’autres que lui qui auront les enfants.
Dieu a permis que le désir de Jephté se réalise mais en conséquence de quoi Jephté subit un châtiment terrible. c’est du désir de puissance de Jephté que découle ses malheurs quand c’est du renoncement d’Abraham que provient son bonheur.
"Et l’esprit de l’éternel fut sur Jephté"
Jephté donc.
Petite précision : j’ai dit qu’il ne fallait pas lire ces récits au premier degré comme étant le récit de faits qui se seraient réellement passés mais que ces récits devaient se lire comme des rêves en cela qu’ils font sens.
Cela ne veut en aucun cas dire que ce que relatent ces récits ne relève pas de la réalité. Nous ne sommes pas dans l’histoire, nous sommes dans la métahistoire, celle qui traite des évènements qui surviennent au cœur de l’humanité, non pas dans la succession du temps mais dans la structure même de notre humanité.
D’aucun s’interroge : Jephté a-t-il réellement sacrifié sa fille ? Clairement, à l’évidence oui.
De même qu’à la question de savoir si Abraham n’a-t-il pas réellement épargné Isaac ? la réponse est clairement aussi : oui.
Quand bien même aucuns de ces évènements n’auraient de réalité historique, ils ont l’un et l’autre une réalité symbolique que nous sommes tous en possibilité de sauver Isaac ou de perdre la fille de Jephté.
Mais il faut aller plus loin.
"Et l’esprit de l’Eternel fut sur Jephté". cruelle formule quand on sait le dénouement de de l’histoire. L’esprit de l’éternel fut sur Jephté, comme l’esprit de l’éternel fut sur Abraham : Disons le tout net : c’est la même main divine qui retient celle d’Abraham au moment de plonger la lame que celle qui accompagne Jephté quand il égorge sa fille.
La même main, le même geste, une même, seul et unique main, qui en un seul et unique mouvement tue et sauve à la fois.
C’est dire notre responsabilité.
C’est dire que ce sont nos actes eux-mêmes qui sont porteurs de leur propres conséquences : Jephté tue sa fille, tue sa propre descendance, tue son propre avenir mais il en porte l’entière responsabilité et pire il exécute lui-même la sentence à laquelle il s’est condamné.
Or qu’elle est le crime que commet Jephté ? n’est-il pas lui-même, tel Arjuna, un simple combattant qui s’engage dans la bataille?
Que dit Krishna ?
"Combats par devoir, sans compter tes joies ni tes peines, la perte ni le gain, la victoire ni la défaite ; ainsi, jamais tu n’encourras le péché."
Mais Jephté ne combat pas par devoir, il combat pour le gain, de plus il se croit nanti de la puissance divine, il se pense tout puissant, que sa victoire est certaine, que ses ennemis seront terrassés.
Et effectivement il remporte la victoire.
Mais la victoire est la perte, de sorte qu’il est obligé de payer à la fin de ce qu’il n’avait pas sacrifié au début.
Jephté éclaire Abraham de sa lumière obscure, si Abraham ne tue pas Isaac c’est qu’Abraham ne se comporte pas comme Jephté.
A ce point de l’analyse nous savons davantage qui est Abraham : ce qui le caractérise c’est l’obéissance, (la soumission) et que l’obéissance d’Abraham consiste à faire son devoir sans se préoccuper des gains et des pertes, dans se soucier du fruit de ses actes ; au contraire de Jephté qui n’en fait qu’à sa tête en laissant libre cours à son désir. Jephté est puni, Abraham est récompensé.
Il faut ici donner une petite explication, nous avons vu que punition et récompense ne sont pas le résultat d’un choix divin, mais la simple conséquence des actes accomplis. Il y a le chemin ascendant, celui de la vie, il y a le chemin descendant celui de la mort. Jephté marche sur le chemin descendant.
Abraham, en renonçant à l’accomplissement de son propre désir pour n’accomplir que l’ordre divin, permet que le projet créateur advienne librement et il en est rassasié de bienfait. L’acte créateur est don généreux, il est profusion, il est abondance.
Jephté au contraire, en donnant libre cours à son désir contrarie l’acte créateur qui n’a plus la possibilité de se déployer en sa grande simplicité. mais comme l’eau coule toujours en direction de la mer en se jouant des obstacles qui encombrent sa route, l’acte créateur renverse ceux qui se mettent en travers.
Nous comprenons ici que nous sommes à la croisée des chemins, il y a la voie de Jephté et il y a la voie d’Abraham, soit nous construisons l’avenir en permettant l’expression de l’acte créateur soit nous détruisons notre avenir en croyant le maitriser
Avant de revenir à notre sujet, c’est à dire le sacrifice d’Abraham comme modèle éducatif, je voudrais tordre le cou - mais un peu seulement pour qu’elle vienne un peu flotter autour de notre discours- à une autre possibilité d’interprétation. Cette possibilité n’est pas souvent mise en avant, mais elle pourrait tout à fait l’être : c’est de voir le sacrifice d’Abraham comme rite initiatique.
Nous savons que dans les sociétés archaïques la transmission chamanique passe par la mise à mort du postulant. Cette mise à mort est vécu à travers un état de conscience spécifique, le disciple est tué, dépecé, ses os sont dispersés. Survient ensuite la résurrection, renaissance de l’homme nouveau doté des pouvoirs chamaniques. La mort du Christ en croix relève davantage de cette lecture tandis que rien dans notre récit ne permet de l’étayer. Isaac n’est ni tué, ni il ne ressuscite.
Il y a dans la bible un autre récit de sacrifice d’enfants. C’est un pendant au récit du sacrifice d’Abraham, mais un pendant obscure quand celui d’Abraham est lumineux.
Juges 11.29
Et l’Esprit de l’Eternel fut sur Jephté, et il traversa Galaad et Manassé et passa jusqu’à Mitspa de Galaad, et de Mitspa de Galaad il marcha contre les fils d’Ammon. Et Jephté fit un voeu à l’Eternel et dit : Si tu livres en ma main les fils d’Ammon, celui qui sortira des portes de ma maison, venant à ma rencontre, quand je reviendrai en paix de chez les fils d’Ammon, sera à l’Eternel, et je l’offrirai en holocauste. Et Jephté s’avança contre les fils d’Ammon pour les combattre, et l’Eternel les livra en sa main. Et il les battit, d’Aroër jusque vers Minnith, leur prenant vingt villes, et jusqu’à Abel-Kéramim ; ce fut une très grande défaite, et les fils d’Ammon furent abaissés devant les fils d’Israël. Et Jephté arriva à Mitspa, chez lui. Et voici sa fille sortait à sa rencontre avec des tambourins et avec des danses. Et elle était fille unique ; à part elle, il n’avait ni fils, ni fille. Et quand il la vit, il déchira ses vêtements et dit : Ah ! ma fille ! Comme tu m’accables ! Tu te mets parmi ceux qui me troublent ! J’ai ouvert la bouche [en parlant] à l’Eternel et je ne puis revenir en arrière. Et elle lui dit : Mon père, tu as ouvert la bouche en parlant à l’Eternel ; fais-moi selon ce qui est sorti de ta bouche, après que l’Eternel t’a donné de tirer vengeance de tes ennemis, les fils d’Ammon. Et elle dit à son père : Que ceci me soit accordé : laisse-moi pendant deux mois ! Et je m’en irai, et je descendrai [pour aller] sur les montagnes, et je pleurerai ma virginité, moi et mes compagnes. Et il répondit : Va ! Et il la laissa aller pour deux mois. Et elle s’en alla, elle et ses compagnes, et elle pleura sa virginité sur les montagnes. Et au bout de deux mois elle revint vers son père, et il accomplit à son égard le voeu qu’il avait fait ; et elle n’avait pas connu d’homme. Et de là vint la coutume en lsraël que d’année en année les filles d’Israël vont célébrer la fille de Jephté le Galaadite, quatre jours par an.
Dans ce texte on voit que la situation est strictement inverse :
Isaac est un garçon, solaire, lumineux. La fille de Jephté, est une fille, aspect lunaire, chtonien, obscure.
C’est Jephté qui fait un vœu de sacrifice, ce n’est pas Dieu qui demande.ET il fait vœu pour que Dieu lui octroie ce qu’il demande, et non seulement Dieu lui octroie, mais en plus Dieu lui désigne l’objet du sacrifice qui est sa fille unique. Jephté tue sa fille, Dieu ne retient pas son bras et cette fille n’a pas de descendance.
Notons aussi que les deux textes se terminent par des histoires de naissances, dans le cas d’Abraham, pour souligner la réalisation de la promesse, dans le cas de Jephté, pour bien montrer que c’est d’autres que lui qui auront les enfants.
Dieu a permis que le désir de Jephté se réalise mais en conséquence de quoi Jephté subit un châtiment terrible. c’est du désir de puissance de Jephté que découle ses malheurs quand c’est du renoncement d’Abraham que provient son bonheur.
"Et l’esprit de l’éternel fut sur Jephté"
Jephté donc.
Petite précision : j’ai dit qu’il ne fallait pas lire ces récits au premier degré comme étant le récit de faits qui se seraient réellement passés mais que ces récits devaient se lire comme des rêves en cela qu’ils font sens.
Cela ne veut en aucun cas dire que ce que relatent ces récits ne relève pas de la réalité. Nous ne sommes pas dans l’histoire, nous sommes dans la métahistoire, celle qui traite des évènements qui surviennent au cœur de l’humanité, non pas dans la succession du temps mais dans la structure même de notre humanité.
D’aucun s’interroge : Jephté a-t-il réellement sacrifié sa fille ? Clairement, à l’évidence oui.
De même qu’à la question de savoir si Abraham n’a-t-il pas réellement épargné Isaac ? la réponse est clairement aussi : oui.
Quand bien même aucuns de ces évènements n’auraient de réalité historique, ils ont l’un et l’autre une réalité symbolique que nous sommes tous en possibilité de sauver Isaac ou de perdre la fille de Jephté.
Mais il faut aller plus loin.
"Et l’esprit de l’Eternel fut sur Jephté". cruelle formule quand on sait le dénouement de de l’histoire. L’esprit de l’éternel fut sur Jephté, comme l’esprit de l’éternel fut sur Abraham : Disons le tout net : c’est la même main divine qui retient celle d’Abraham au moment de plonger la lame que celle qui accompagne Jephté quand il égorge sa fille.
La même main, le même geste, une même, seul et unique main, qui en un seul et unique mouvement tue et sauve à la fois.
C’est dire notre responsabilité.
C’est dire que ce sont nos actes eux-mêmes qui sont porteurs de leur propres conséquences : Jephté tue sa fille, tue sa propre descendance, tue son propre avenir mais il en porte l’entière responsabilité et pire il exécute lui-même la sentence à laquelle il s’est condamné.
Or qu’elle est le crime que commet Jephté ? n’est-il pas lui-même, tel Arjuna, un simple combattant qui s’engage dans la bataille?
Que dit Krishna ?
"Combats par devoir, sans compter tes joies ni tes peines, la perte ni le gain, la victoire ni la défaite ; ainsi, jamais tu n’encourras le péché."
Mais Jephté ne combat pas par devoir, il combat pour le gain, de plus il se croit nanti de la puissance divine, il se pense tout puissant, que sa victoire est certaine, que ses ennemis seront terrassés.
Et effectivement il remporte la victoire.
Mais la victoire est la perte, de sorte qu’il est obligé de payer à la fin de ce qu’il n’avait pas sacrifié au début.
Jephté éclaire Abraham de sa lumière obscure, si Abraham ne tue pas Isaac c’est qu’Abraham ne se comporte pas comme Jephté.
A ce point de l’analyse nous savons davantage qui est Abraham : ce qui le caractérise c’est l’obéissance, (la soumission) et que l’obéissance d’Abraham consiste à faire son devoir sans se préoccuper des gains et des pertes, dans se soucier du fruit de ses actes ; au contraire de Jephté qui n’en fait qu’à sa tête en laissant libre cours à son désir. Jephté est puni, Abraham est récompensé.
Il faut ici donner une petite explication, nous avons vu que punition et récompense ne sont pas le résultat d’un choix divin, mais la simple conséquence des actes accomplis. Il y a le chemin ascendant, celui de la vie, il y a le chemin descendant celui de la mort. Jephté marche sur le chemin descendant.
Abraham, en renonçant à l’accomplissement de son propre désir pour n’accomplir que l’ordre divin, permet que le projet créateur advienne librement et il en est rassasié de bienfait. L’acte créateur est don généreux, il est profusion, il est abondance.
Jephté au contraire, en donnant libre cours à son désir contrarie l’acte créateur qui n’a plus la possibilité de se déployer en sa grande simplicité. mais comme l’eau coule toujours en direction de la mer en se jouant des obstacles qui encombrent sa route, l’acte créateur renverse ceux qui se mettent en travers.
Nous comprenons ici que nous sommes à la croisée des chemins, il y a la voie de Jephté et il y a la voie d’Abraham, soit nous construisons l’avenir en permettant l’expression de l’acte créateur soit nous détruisons notre avenir en croyant le maitriser
Avant de revenir à notre sujet, c’est à dire le sacrifice d’Abraham comme modèle éducatif, je voudrais tordre le cou - mais un peu seulement pour qu’elle vienne un peu flotter autour de notre discours- à une autre possibilité d’interprétation. Cette possibilité n’est pas souvent mise en avant, mais elle pourrait tout à fait l’être : c’est de voir le sacrifice d’Abraham comme rite initiatique.
Nous savons que dans les sociétés archaïques la transmission chamanique passe par la mise à mort du postulant. Cette mise à mort est vécu à travers un état de conscience spécifique, le disciple est tué, dépecé, ses os sont dispersés. Survient ensuite la résurrection, renaissance de l’homme nouveau doté des pouvoirs chamaniques. La mort du Christ en croix relève davantage de cette lecture tandis que rien dans notre récit ne permet de l’étayer. Isaac n’est ni tué, ni il ne ressuscite.
philouie- Messages : 421
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Date d'inscription : 07/10/2012
Re: La ligature d'Isaac
Hum... Ils sont déjà bien longs, vos tronçonsphilouie a écrit:Bien que le texte ne soit pas très long, je vais vous en proposer la lecture en plusieurs tronçons
NB: votre sujet vient d'être fusionné avec une discussion plus ancienne, selon le point 4 de notre charte ; merci de votre compréhension
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La ligature d'Abraham 3
Le sacrifice d’Abraham comme modèle éducatif ?
Ces récits mythologiques sont des récits à tiroirs qui peuvent se lire à plusieurs niveaux sans que chacune des lectures ne viennent contredire l’autre. Nous avons fait la lecture dans laquelle Isaac est à la fois le symbole du désir d’Abraham (ce qu’il a de plus cher) mais aussi le symbole de son avenir (à travers sa descendance). J’ai dit que l’un n’allait pas sans l’autre puisque le désir est une projection sur l’avenir.
Réintégrons donc Isaac comme fils d’Abraham et Abraham comme père d’Isaac.
Qu’est-ce qui, dans le texte, permet d’en faire le récit d’un modèle éducation ?
Nous avons d’abord des indications d’ordres générales.
Nous avons laissé en route l’âne, symbole de l’ignorance. Nous avons laissé les deux serviteurs, nous savons que ce sont deux adolescents, mais nous ne savons pas pourquoi ils sont laissés là. Avec l’âne. ?
Il y est question d’élévation, élévation sur le plan spirituel, puisque le mot "holocauste", par lequel Dieu ordonne à Abraham le sacrifice, signifie "élever vers Dieu", il y est question d’élévation sur le plan physique puisque Dieu ordonne à Abraham de conduire Isaac sur une montagne. Or lorsqu’un père élève un enfant il s’agit bien d’éducation. Les mots le disent d’eux même.
Il est question aussi d’un voyage. Nous dirons qu’il s’agit d’un pèlerinage pour en faire ressortir le caractère sacré, et nous savons que dans le pèlerinage, ce n’est pas le but qui compte mais le chemin.
Le voyage, symbole du temps qui passe, est un temps à la fois passif et à la fois actif. Il est passif parce que dans le voyage on se retire de l’activité mondaine, c’est un temps de retraite. Il est actif parce que, du coup, c’est un temps où l’on est entièrement centré sur soi donc sur le monde. Le voyage donne une liberté d’esprit, il permet d’être attentif et réceptif puisque ce qui fait les soucis de la vie quotidienne sont mis entre parenthèse.
"Ils marchèrent tous deux ensemble" Abraham accompagne Isaac, Isaac accompagne Abraham, c’est le temps de l’échange, l’un écoute l’autre, chacun est attentif à l’autre.
C’est donc le temps où l’enseignement coule naturellement d’Abraham vers Isaac, Isaac qui est disponible pour le recevoir.
Nombreux sont les commentateurs qui ont voulu dramatiser le récit en mettant en avant les doutes d’Abraham et les angoisses d’Isaac, alors qu’il est bien clair qu’à aucun moment du récit ces points n’apparaissent. Rappelons "Dieu pourvoira", Abraham et Isaac sont présents, disponibles, attentifs. Ils ne sont ni soucieux, ni angoissés.
Le dernier point est celui des trois objets que transportent nos personnages et qui sont le feu, le couteau et le bois. Ces trois objets représentent respectivement l’esprit, la raison et la connaissance.
On pourrait arguer que ces trois objet apparaissent ici simplement parce qu’ils ont nécessaire au sacrifice et qu’il n’y a donc pas à chercher plus loin la raison de leur présence en ce point du récit.
Or à l’évidence, ils auraient tout aussi bien pu ne pas être mentionné là, en parler à ce moment du récit n’apporte rien, s’ils ne sont qu’utiles au sacrifice. Il aurait suffi que le narrateur les fasse apparaître quand il en avait besoin, avec le stratagème de son choix, et ça aurait paru tout naturel : Abraham sort le couteau de poche, c’est donc qu’il l’avait dans la poche.
Non, s’ils sont mentionnés au début du voyage , c’est bien qu’ils sont les attributs du voyage et qu’ils signifient ce qui est train de se passer au cours du chemin.
Je ne développerai pas l’idée du feu comme symbole de l’esprit, ce point est assez habituel pour qu’il ne nécessite pas plus d’explication.
Le couteau se rattache à la symbolique des instruments tranchants tel le glaive ou les ciseaux.
Il y a le glaive qui sort de la bouche de l’ange qui garde le paradis et qui symbolise la parole, Il y a le glaive qui symbolise la justice à la fois parce qu’il permet de trancher le litige, en faisant la part des choses entre vérité et mensonge, entre droit et du, mais aussi en ce qu’il permet l’exécution du verdict. Il matérialise alors la force qui réordonne un monde qui subissait l’injustice. En ce sens le glaive dit la loi, en cela qu’il l’exprime par ces qualités discriminantes, et qu’il l’applique par la force qu’il représente.
Dans le dictionnaire des symboles (Chevalier et Geerbrandt) on trouve : "Le glaive tranche : il est une arme de décision ; l’instrument de la vérité agissante. Dans la perspective éthico-biologique de P DIel, il est le symbole de la force lucide de l’Esprit qui ose trancher le vif du problème, l’aveuglement vaniteux et ses fausses valorisations contradictoires et ambivalentes".
Nous résumerons cela en disant qu’il symbolise la raison, c’est à dire l’esprit discriminant.
Le bois.
Toujours dans le dictionnaire des symboles :
"
Dans les traditions nordiques, sous toutes ses formes et tous ces aspects le bois ou l’arbre, participe à la science. L’écriture traditionnelle irlandaise est le plus souvent gravée sur du bois, elle n’est gravée sur pierre que dans intentions funéraires. Il existe une homonymie complète du nom du bois et du nom de la science dans toutes les langues celtiques.
....
Mais le symbolisme du bois reste constant : Il recèle une science et une sagesse surhumaine.
"
Le bois représente la connaissance.
Esprit, raison et connaissances forment ensemble la conscience, sans qu’il ne soit possible d’ôter l’un sans que le tout ne s’effondre.
Mais dans notre récit, c’est bien Abraham qui porte le feu et le couteau alors qu’il fait porter à Isaac le bois. Il a l’esprit et la raison et il transmet la connaissance.
Nous avons donc montré que le récit traite bien d’éducation, et c’est bien normal puisque la relation d’un père et d’un fils est nécessairement une relation d’éducation.
Nous ne saurons pas davantage quelles connaissances sont transmises pas Abraham, mais peu importe. Examinons le cœur du voyage, le moment de l’échange :
"Alors Isaac, parlant à Abraham, son père, dit : Mon père ! Et il répondit : Me voici, mon fils ! Isaac reprit : Voici le feu et le bois ; mais où est l’agneau pour l’holocauste ? Abraham répondit : Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau pour l’holocauste. "
Ce passage est inclus dans une répétition "Et ils marchèrent tous deux ensemble."
Cette répétition sous entends un état fusionnel que nous allons développer.
Isaac interroge : "Mais où est-le mouton ?", Abraham répond "Dieu pourvoira".
Nous avons vu que ce "Dieu pourvoira" caractérise Abraham en cela qu’il est soumis à Dieu, puisque sa soumission résulte de la confiance qu’il a envers Dieu, ce qui lui permet d’accomplir ses devoirs sans se soucier du gain ou de la perte. C’est le cœur de l’enseignement d’Abraham et c’est un enseignement moral. Mais l’enseignement moral ne se transmet pas comme une connaissance morte, de celles qu’Isaac transporte sur son dos sous la forme du bois.
Le but de l’enseignement moral est la reproduction de la personne Abraham en ce qu’elle est porteuse de valeurs : il faut qu’Isaac devienne Abraham, c’est à dire qu’il acquière les qualités de celui-ci.
L’enseignement moral ne consiste pas à apprendre par exemple que "le vol c’est mal" mais à devenir une personne qui ne vole pas, par la transmission des qualités morales de celui qui instruit. Ce n’est pas une transmission de connaissances, c’est une transmission de l’être. De l’être en tant qu’il est doté de qualités morales.
Aussi le "Et ils marchèrent tous deux ensemble" signifie une relation fusionnelle, que je qualifierai de relation d’amour, par laquelle, la qualité d’être des amants se transfuse de l’un à l’autre. Nous sommes typiquement dans une relation de maître à disciple tel qu’elle pourrait être vécue dans une confrérie initiatique. Importance de la relation d’amour, importance de la transmission orale, de bouche à bouche, de cœur à cœur.
Nous comprenons aussi ici que l’enseignement moral est vain en dehors des qualités morales de l’instructeur.
Pour finir cette étape, une petite digression sur le "Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau " qui montre Dieu comme à la fois réalisant l’offrande et à la fois recevant l’offrande, pour rappelle que tout provient de Dieu et que tout retourne à Dieu.
Lorsqu’ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait dit, Abraham y éleva un autel, et rangea le bois. Il lia son fils Isaac, et le mit sur l’autel, par-dessus le bois. Puis Abraham étendit la main, et prit le couteau, pour égorger son fils. Alors l’ange de l’Éternel l’appela des cieux, et dit : Abraham ! Abraham ! Et il répondit : Me voici ! L’ange dit : N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien ; car je sais maintenant que tu crains Dieu, et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique. Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes ; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils.
Nous arrivons à la scène centrale, celle qui a fait couler beaucoup d’encre. On a beaucoup discuté du geste qui arrête Abraham, de son supposé fanatisme, d’un Dieu qui ferait prendre conscience à Abraham de l’inutilité des sacrifices d’enfants. Des montagnes de commentaires existent.
Comme je l’ai dit, je les récuse et je les récuse pour parler d’autre chose. Autre chose que les commentateurs ne commentent pas, ou si peu.
Revenons au texte, toujours dans notre perspective de leçon éducative. On a vu dans l’épisode précédent, le processus éducatif qui s’inscrit dans la durée, dans un temps qui est temps de retraite, nous avons vu qu’il s’agit de transmettre des connaissances mais aussi de la qualité d’être.
Dans ce dernier épisode nous voyons l’éducation en action, nous assistons à l’acte même de l’éducation. ouh, ouh, Abraham avec son couteau s’apprête à égorger Isaac et vous parlez d’éducation ? Au fou, au fou !
Scène 1
Abraham élève un autel et range le bois. : le monde est ordonné, ordonné horizontalement en cela que la création réponds à des règles (il range le bois) , ordonné verticalement en cela que la création est subordonnée au créateur. (il élève un autel) L’acte éducatif consiste à inscrire l’enfant dans un monde ordonné verticalement et horizontalement. L’autel pourrait tout aussi bien représenter l’espace sacré de l’école.
Scène 2
La ligature d’Abraham, c’est le nom que donnent les juifs pour désigner ce récit. Il ne parle pas du sacrifice d’Abraham mais de la ligature d’Isaac. Signe de l’importance de cette image.
La ligature représente la discipline et la discipline consiste à donner des limites.
Les liens représentent les obligations, les obligations découlent de l’ordre du monde et des règles que se fixent les hommes afin de vivre en communauté.
Par la ligature Abraham impose à Isaac à respecter les règles, ainsi il l’inscrit au sein de la communauté des hommes, comme individu respectant l’ordre commun.
Scène 3
Puis Abraham étendit la main et pris le couteau pour égorger son fils.
Le couteau sous la gorge renvoie au couteau sous le gland qui coupe le prépuce, c’est la circoncision, c’est dire que l’acte d’Abraham est castrateur.
Castrateur cela signifie que le désir d’Isaac est anéanti. A ce point, avant même que l’ange n’intervienne pour sauver Isaac, le désir d’Isaac est déjà mis à mort, c’est à dire qu’il renonce à son désir, à ce qu’il a de plus cher comme Abraham a renoncé à ce qu’il a de plus cher en sacrifiant Isaac.
Cette scène représente la punition. L’amour que porte le père pour son fils ne doit pas être un frein à la punition lorsque la situation l’exige. Abraham est ici intraitable.
Scène 4
L’ange dit : N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien.
L’ange est clair, ce n’est pas de violence qu’il est nécessaire.
En est-on sûr ?
Nous sommes ici au cœur de notre sujet, c’est à dire la violence éducative. Lorsque l’ange arrête la main d’Abraham celui-ci est bien en train de menacer Isaac d’un couteau sous la gorge. Nous sommes déjà dans le cadre d’une violence. De même, lorsqu’Abraham attache Isaac nous sommes aussi dans la violence.
Et pour cette violence l’ange n’est pas intervenu.
Or dans notre récit, il y a le temps où l’ange n’intervient pas et pour lequel on peut dire qu’il autorise la violence et le moment où il intervient et pour lequel on peut dire qu’il interdit la violence. On peut alors déjà dire qu’il y a ici une limite au-delà de laquelle la violence éducative - nécessaire - devient inacceptable.
Et, à mon sens, l’ange intervient pour faire cesser la violence au moment où le sacrifice a précisément déjà eu lieu : c’est parce que le désir d’Isaac est déjà mort qu’Isaac ne doit pas mourir. Tout est accompli. Au moment de l’intervention de l’ange tout est accompli.
Je voudrais revenir sur Jephté parce que dans le cas de Jephté l’ange n’arrête pas le bras du père et la fille finie égorgée. C’est le bélier qui va nous servir de transition
Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes ; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils.
Alors qu’on espérait un agneau, symbole de l’innocence et victime habituelle des sacrifices, nous avons un bélier, pris par ses cornes dans une haie.
Ce bélier représente un homme qui combat avec ses armes (les cornes) et se retrouvent dans un piège de la nature. S’il est piégé dans la haie c’est qu’il ne l’a pas vu venir et s’il ne l’a pas vu venir c’est qu’il fonce tête baissée et s’il fonce tête baissée c’est qu’il est à la poursuite de son désir. Le bélier n’est pas l’agneau, il a perdu son innocence.
Ces récits mythologiques sont des récits à tiroirs qui peuvent se lire à plusieurs niveaux sans que chacune des lectures ne viennent contredire l’autre. Nous avons fait la lecture dans laquelle Isaac est à la fois le symbole du désir d’Abraham (ce qu’il a de plus cher) mais aussi le symbole de son avenir (à travers sa descendance). J’ai dit que l’un n’allait pas sans l’autre puisque le désir est une projection sur l’avenir.
Réintégrons donc Isaac comme fils d’Abraham et Abraham comme père d’Isaac.
Qu’est-ce qui, dans le texte, permet d’en faire le récit d’un modèle éducation ?
Nous avons d’abord des indications d’ordres générales.
Nous avons laissé en route l’âne, symbole de l’ignorance. Nous avons laissé les deux serviteurs, nous savons que ce sont deux adolescents, mais nous ne savons pas pourquoi ils sont laissés là. Avec l’âne. ?
Il y est question d’élévation, élévation sur le plan spirituel, puisque le mot "holocauste", par lequel Dieu ordonne à Abraham le sacrifice, signifie "élever vers Dieu", il y est question d’élévation sur le plan physique puisque Dieu ordonne à Abraham de conduire Isaac sur une montagne. Or lorsqu’un père élève un enfant il s’agit bien d’éducation. Les mots le disent d’eux même.
Il est question aussi d’un voyage. Nous dirons qu’il s’agit d’un pèlerinage pour en faire ressortir le caractère sacré, et nous savons que dans le pèlerinage, ce n’est pas le but qui compte mais le chemin.
Le voyage, symbole du temps qui passe, est un temps à la fois passif et à la fois actif. Il est passif parce que dans le voyage on se retire de l’activité mondaine, c’est un temps de retraite. Il est actif parce que, du coup, c’est un temps où l’on est entièrement centré sur soi donc sur le monde. Le voyage donne une liberté d’esprit, il permet d’être attentif et réceptif puisque ce qui fait les soucis de la vie quotidienne sont mis entre parenthèse.
"Ils marchèrent tous deux ensemble" Abraham accompagne Isaac, Isaac accompagne Abraham, c’est le temps de l’échange, l’un écoute l’autre, chacun est attentif à l’autre.
C’est donc le temps où l’enseignement coule naturellement d’Abraham vers Isaac, Isaac qui est disponible pour le recevoir.
Nombreux sont les commentateurs qui ont voulu dramatiser le récit en mettant en avant les doutes d’Abraham et les angoisses d’Isaac, alors qu’il est bien clair qu’à aucun moment du récit ces points n’apparaissent. Rappelons "Dieu pourvoira", Abraham et Isaac sont présents, disponibles, attentifs. Ils ne sont ni soucieux, ni angoissés.
Le dernier point est celui des trois objets que transportent nos personnages et qui sont le feu, le couteau et le bois. Ces trois objets représentent respectivement l’esprit, la raison et la connaissance.
On pourrait arguer que ces trois objet apparaissent ici simplement parce qu’ils ont nécessaire au sacrifice et qu’il n’y a donc pas à chercher plus loin la raison de leur présence en ce point du récit.
Or à l’évidence, ils auraient tout aussi bien pu ne pas être mentionné là, en parler à ce moment du récit n’apporte rien, s’ils ne sont qu’utiles au sacrifice. Il aurait suffi que le narrateur les fasse apparaître quand il en avait besoin, avec le stratagème de son choix, et ça aurait paru tout naturel : Abraham sort le couteau de poche, c’est donc qu’il l’avait dans la poche.
Non, s’ils sont mentionnés au début du voyage , c’est bien qu’ils sont les attributs du voyage et qu’ils signifient ce qui est train de se passer au cours du chemin.
Je ne développerai pas l’idée du feu comme symbole de l’esprit, ce point est assez habituel pour qu’il ne nécessite pas plus d’explication.
Le couteau se rattache à la symbolique des instruments tranchants tel le glaive ou les ciseaux.
Il y a le glaive qui sort de la bouche de l’ange qui garde le paradis et qui symbolise la parole, Il y a le glaive qui symbolise la justice à la fois parce qu’il permet de trancher le litige, en faisant la part des choses entre vérité et mensonge, entre droit et du, mais aussi en ce qu’il permet l’exécution du verdict. Il matérialise alors la force qui réordonne un monde qui subissait l’injustice. En ce sens le glaive dit la loi, en cela qu’il l’exprime par ces qualités discriminantes, et qu’il l’applique par la force qu’il représente.
Dans le dictionnaire des symboles (Chevalier et Geerbrandt) on trouve : "Le glaive tranche : il est une arme de décision ; l’instrument de la vérité agissante. Dans la perspective éthico-biologique de P DIel, il est le symbole de la force lucide de l’Esprit qui ose trancher le vif du problème, l’aveuglement vaniteux et ses fausses valorisations contradictoires et ambivalentes".
Nous résumerons cela en disant qu’il symbolise la raison, c’est à dire l’esprit discriminant.
Le bois.
Toujours dans le dictionnaire des symboles :
"
Dans les traditions nordiques, sous toutes ses formes et tous ces aspects le bois ou l’arbre, participe à la science. L’écriture traditionnelle irlandaise est le plus souvent gravée sur du bois, elle n’est gravée sur pierre que dans intentions funéraires. Il existe une homonymie complète du nom du bois et du nom de la science dans toutes les langues celtiques.
....
Mais le symbolisme du bois reste constant : Il recèle une science et une sagesse surhumaine.
"
Le bois représente la connaissance.
Esprit, raison et connaissances forment ensemble la conscience, sans qu’il ne soit possible d’ôter l’un sans que le tout ne s’effondre.
Mais dans notre récit, c’est bien Abraham qui porte le feu et le couteau alors qu’il fait porter à Isaac le bois. Il a l’esprit et la raison et il transmet la connaissance.
Nous avons donc montré que le récit traite bien d’éducation, et c’est bien normal puisque la relation d’un père et d’un fils est nécessairement une relation d’éducation.
Nous ne saurons pas davantage quelles connaissances sont transmises pas Abraham, mais peu importe. Examinons le cœur du voyage, le moment de l’échange :
"Alors Isaac, parlant à Abraham, son père, dit : Mon père ! Et il répondit : Me voici, mon fils ! Isaac reprit : Voici le feu et le bois ; mais où est l’agneau pour l’holocauste ? Abraham répondit : Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau pour l’holocauste. "
Ce passage est inclus dans une répétition "Et ils marchèrent tous deux ensemble."
Cette répétition sous entends un état fusionnel que nous allons développer.
Isaac interroge : "Mais où est-le mouton ?", Abraham répond "Dieu pourvoira".
Nous avons vu que ce "Dieu pourvoira" caractérise Abraham en cela qu’il est soumis à Dieu, puisque sa soumission résulte de la confiance qu’il a envers Dieu, ce qui lui permet d’accomplir ses devoirs sans se soucier du gain ou de la perte. C’est le cœur de l’enseignement d’Abraham et c’est un enseignement moral. Mais l’enseignement moral ne se transmet pas comme une connaissance morte, de celles qu’Isaac transporte sur son dos sous la forme du bois.
Le but de l’enseignement moral est la reproduction de la personne Abraham en ce qu’elle est porteuse de valeurs : il faut qu’Isaac devienne Abraham, c’est à dire qu’il acquière les qualités de celui-ci.
L’enseignement moral ne consiste pas à apprendre par exemple que "le vol c’est mal" mais à devenir une personne qui ne vole pas, par la transmission des qualités morales de celui qui instruit. Ce n’est pas une transmission de connaissances, c’est une transmission de l’être. De l’être en tant qu’il est doté de qualités morales.
Aussi le "Et ils marchèrent tous deux ensemble" signifie une relation fusionnelle, que je qualifierai de relation d’amour, par laquelle, la qualité d’être des amants se transfuse de l’un à l’autre. Nous sommes typiquement dans une relation de maître à disciple tel qu’elle pourrait être vécue dans une confrérie initiatique. Importance de la relation d’amour, importance de la transmission orale, de bouche à bouche, de cœur à cœur.
Nous comprenons aussi ici que l’enseignement moral est vain en dehors des qualités morales de l’instructeur.
Pour finir cette étape, une petite digression sur le "Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau " qui montre Dieu comme à la fois réalisant l’offrande et à la fois recevant l’offrande, pour rappelle que tout provient de Dieu et que tout retourne à Dieu.
Lorsqu’ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait dit, Abraham y éleva un autel, et rangea le bois. Il lia son fils Isaac, et le mit sur l’autel, par-dessus le bois. Puis Abraham étendit la main, et prit le couteau, pour égorger son fils. Alors l’ange de l’Éternel l’appela des cieux, et dit : Abraham ! Abraham ! Et il répondit : Me voici ! L’ange dit : N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien ; car je sais maintenant que tu crains Dieu, et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique. Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes ; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils.
Nous arrivons à la scène centrale, celle qui a fait couler beaucoup d’encre. On a beaucoup discuté du geste qui arrête Abraham, de son supposé fanatisme, d’un Dieu qui ferait prendre conscience à Abraham de l’inutilité des sacrifices d’enfants. Des montagnes de commentaires existent.
Comme je l’ai dit, je les récuse et je les récuse pour parler d’autre chose. Autre chose que les commentateurs ne commentent pas, ou si peu.
Revenons au texte, toujours dans notre perspective de leçon éducative. On a vu dans l’épisode précédent, le processus éducatif qui s’inscrit dans la durée, dans un temps qui est temps de retraite, nous avons vu qu’il s’agit de transmettre des connaissances mais aussi de la qualité d’être.
Dans ce dernier épisode nous voyons l’éducation en action, nous assistons à l’acte même de l’éducation. ouh, ouh, Abraham avec son couteau s’apprête à égorger Isaac et vous parlez d’éducation ? Au fou, au fou !
Scène 1
Abraham élève un autel et range le bois. : le monde est ordonné, ordonné horizontalement en cela que la création réponds à des règles (il range le bois) , ordonné verticalement en cela que la création est subordonnée au créateur. (il élève un autel) L’acte éducatif consiste à inscrire l’enfant dans un monde ordonné verticalement et horizontalement. L’autel pourrait tout aussi bien représenter l’espace sacré de l’école.
Scène 2
La ligature d’Abraham, c’est le nom que donnent les juifs pour désigner ce récit. Il ne parle pas du sacrifice d’Abraham mais de la ligature d’Isaac. Signe de l’importance de cette image.
La ligature représente la discipline et la discipline consiste à donner des limites.
Les liens représentent les obligations, les obligations découlent de l’ordre du monde et des règles que se fixent les hommes afin de vivre en communauté.
Par la ligature Abraham impose à Isaac à respecter les règles, ainsi il l’inscrit au sein de la communauté des hommes, comme individu respectant l’ordre commun.
Scène 3
Puis Abraham étendit la main et pris le couteau pour égorger son fils.
Le couteau sous la gorge renvoie au couteau sous le gland qui coupe le prépuce, c’est la circoncision, c’est dire que l’acte d’Abraham est castrateur.
Castrateur cela signifie que le désir d’Isaac est anéanti. A ce point, avant même que l’ange n’intervienne pour sauver Isaac, le désir d’Isaac est déjà mis à mort, c’est à dire qu’il renonce à son désir, à ce qu’il a de plus cher comme Abraham a renoncé à ce qu’il a de plus cher en sacrifiant Isaac.
Cette scène représente la punition. L’amour que porte le père pour son fils ne doit pas être un frein à la punition lorsque la situation l’exige. Abraham est ici intraitable.
Scène 4
L’ange dit : N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien.
L’ange est clair, ce n’est pas de violence qu’il est nécessaire.
En est-on sûr ?
Nous sommes ici au cœur de notre sujet, c’est à dire la violence éducative. Lorsque l’ange arrête la main d’Abraham celui-ci est bien en train de menacer Isaac d’un couteau sous la gorge. Nous sommes déjà dans le cadre d’une violence. De même, lorsqu’Abraham attache Isaac nous sommes aussi dans la violence.
Et pour cette violence l’ange n’est pas intervenu.
Or dans notre récit, il y a le temps où l’ange n’intervient pas et pour lequel on peut dire qu’il autorise la violence et le moment où il intervient et pour lequel on peut dire qu’il interdit la violence. On peut alors déjà dire qu’il y a ici une limite au-delà de laquelle la violence éducative - nécessaire - devient inacceptable.
Et, à mon sens, l’ange intervient pour faire cesser la violence au moment où le sacrifice a précisément déjà eu lieu : c’est parce que le désir d’Isaac est déjà mort qu’Isaac ne doit pas mourir. Tout est accompli. Au moment de l’intervention de l’ange tout est accompli.
Je voudrais revenir sur Jephté parce que dans le cas de Jephté l’ange n’arrête pas le bras du père et la fille finie égorgée. C’est le bélier qui va nous servir de transition
Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes ; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils.
Alors qu’on espérait un agneau, symbole de l’innocence et victime habituelle des sacrifices, nous avons un bélier, pris par ses cornes dans une haie.
Ce bélier représente un homme qui combat avec ses armes (les cornes) et se retrouvent dans un piège de la nature. S’il est piégé dans la haie c’est qu’il ne l’a pas vu venir et s’il ne l’a pas vu venir c’est qu’il fonce tête baissée et s’il fonce tête baissée c’est qu’il est à la poursuite de son désir. Le bélier n’est pas l’agneau, il a perdu son innocence.
philouie- Messages : 421
Réputation : 0
Date d'inscription : 07/10/2012
Re: La ligature d'Isaac
Salut,
désolé pour la longueur, je sais que ce n'est pas un format très adapté aux forums. Mais le texte est comme ça.
Pouvez vous raccrocher aux wagons le tronçon qui c'est perdu ?
il m'en restera un autre pour conclure. je le posterai après.
Merci.
désolé pour la longueur, je sais que ce n'est pas un format très adapté aux forums. Mais le texte est comme ça.
Pouvez vous raccrocher aux wagons le tronçon qui c'est perdu ?
il m'en restera un autre pour conclure. je le posterai après.
Merci.
philouie- Messages : 421
Réputation : 0
Date d'inscription : 07/10/2012
Re: La ligature d'Isaac
ça décourage souvent le lecteur, en effet. Un conseil : rééditez vos messages en enfermant les développements dans des spoilers, ça permet au visiteur de voir plus vite la structure de votre raisonnement et donc, éventuellement, de vous répondre.philouie a écrit:désolé pour la longueur, je sais que ce n'est pas un format très adapté aux forums
Alors que des pavés, en général, personne ne lit.
(NB:comme vous pouvez le voir, j'ai rapatrié votre fragment manquant)
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...S'il me manque l'amour, je suis un métal qui résonne, une cymbale retentissante (1 Cor XIII, 1)
>> Mon blog change d'adresse pour fuir la pub : https://blogrenblog.wordpress.com/ <<
Re: La ligature d'Isaac
Merci de vos conseils.
J'ai hésité sur la forme.
je voulais au départ ne donner qu'un "tronçon" par jour, pour donner de la respiration.
le problème,c 'est qu'ils ne valent que comme un tout.
je me suis sans doute précipité.
il me reste un tronçon, je le garde pour demain. je verrai de l'utilité de le découper.
merci.
J'ai hésité sur la forme.
je voulais au départ ne donner qu'un "tronçon" par jour, pour donner de la respiration.
le problème,c 'est qu'ils ne valent que comme un tout.
je me suis sans doute précipité.
il me reste un tronçon, je le garde pour demain. je verrai de l'utilité de le découper.
merci.
philouie- Messages : 421
Réputation : 0
Date d'inscription : 07/10/2012
Re: La ligature d'Isaac
C'est très intéressant, pour un personnage de légende, comme Moïse d'ailleurs. Peut-être serait-il indiqué de revenir à une réalité. Avant Abraham, il a existé des civilisations, qui n'avaient que faire de nos croyances. Aujourd'hui encore, les 2/3 de l'humanité n'adhèrent pas au christianisme. Sont-ils maudits, sans aucun espoir de Salut ???
Ecossais- Messages : 103
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Date d'inscription : 01/10/2012
Localisation : Les Hautes terres d'Austrasie
Re: La ligature d'Isaac
La question ne se pose pas du tout en ses termes.
Il y a un texte et le crédit qu'on lui accorde.
celui qui n'y accorde pas de crédit, ne lui accorde pas de crédit. Il n'est donc pas concerné.
qu'Abraham soit historique ou pas n'a ici aucun intérêt.
Il y a un texte et le crédit qu'on lui accorde.
celui qui n'y accorde pas de crédit, ne lui accorde pas de crédit. Il n'est donc pas concerné.
qu'Abraham soit historique ou pas n'a ici aucun intérêt.
philouie- Messages : 421
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Date d'inscription : 07/10/2012
Re: La ligature d'Isaac
philouie a écrit:La question ne se pose pas du tout en ses termes.
Il y a un texte et le crédit qu'on lui accorde.
celui qui n'y accorde pas de crédit, ne lui accorde pas de crédit. Il n'est donc pas concerné.
qu'Abraham soit historique ou pas n'a ici aucun intérêt.
On ne peut pas accorder de crédit à un personnage fictif. Sauf, à vouloir faire passer un message allégorique, qui compose la quasi totalité de l'AT...
Ecossais- Messages : 103
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Localisation : Les Hautes terres d'Austrasie
Re: La ligature d'Isaac
philouie a écrit:Par exemple, lorsqu’il est question de monter une montagne, ce qui compte c’est de voir qu’il s’agit d’un trajet fait en s’élevant, il s’agit alors de grandir, il s’agit d’un progrès, il s’agit d’une spiritualisation, ensemble d’interprétations qui peuvent être confirmées ou infirmées par d’autres indices..
La méthode : le principe de l'analogie si cher aux hermétistes?
Idriss- Messages : 7124
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Re: La ligature d'Isaac
Highlander a écrit:C'est très intéressant, pour un personnage de légende, comme Moïse d'ailleurs. Peut-être serait-il indiqué de revenir à une réalité.
Abraham, Isaac seraient donc des légendes et Moïse un personnage fictif. Mais alors les hébreux, La Torah, le judaïsme c'est peut-être aussi une simple vue de l'esprit, un malentendu ? Peux-tu me dire - selon toi - quel personnage biblique a vraiment existé ? En dehors de toi, bien sûrHignlander a écrit:On ne peut pas accorder de crédit à un personnage fictif. Sauf, à vouloir faire passer un message allégorique, qui compose la quasi totalité de l'AT...
Si on livre un texte quelconque à l'interprétation pure (allégorie, sens figuré, etc.) en le coupant de son ancrage dans la réalité historique, on réalise les meilleures conditions pour faire dire au texte n'importe quoi et son contraire. C'est un peu sur ce principe que fonctionnent les hallucinations.Idriss a écrit:La méthode : le principe de l'analogie si cher aux hermétistes ?
On est dans l'arbitraire gnostique, des rêveries, des fantasmes ... totalement illusoires. Si tu fumes ta moquette, ça fait le même effet. Je ne vois pas du tout ce qu'il peut y avoir de catholique dans tout ce fatras contraire à toute la méthode pratiquée et enseignée par la tradition de nos Eglise chrétiennes.
Roque- Messages : 5064
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La ligature d'Isaac
à Highlander
Comme je l'ai dit, la lecture qui est faite ici, fait fi de la réalité historique d'ABraham. Mais si nous ne savons pas si il a exister ici, nous sommes sûr que le récit dont nous parlons et qui fait l'objet de ce commentaire existe.
Un récit qui existe et qui a eu une importance considérable dans l'histoire de l'humanité puisque aujourd'hui encore des centaines de millions d'hommes sont circoncis dans le monde. L’intérêt de l'analyse symbolique c'est qu'elle s’intéresse au texte en cela qu'il s'insère dans notre actualité : Abraham et Jephté ne sont plus deux personnages historiques mais deux facettes de notre humanité que nous pouvons actualiser ou pas dans notre quotidien. Comme je le dis dans le texte, nous avons le choix entre être Abraham ou être Jephté.
à Idriss : la méthode est celle de la lecture symbolique;méthode initié par des psychologue du XX° siècle en particulier ceux issu de l'école Jungienne.
Il peut effectivement y avoir un rapport avec l'hermétisme, mais à la fois, la finalité que les moyens diffèrent. Nous sommes dans un autre registre, celui de la psychologie.
à Roque.
Rien de catholique ici.
Il s'agit d'un texte hébraïque qui s'insère dans les traditions juives, chrétiennes et musulmanes. Aucune de ces traditions n'en a le monopole.
La lecture qui en est faite ici est une lecture qui de toute façon s'affranchit de chacune de ses traditions.
Comme je l'ai dit, la lecture qui est faite ici, fait fi de la réalité historique d'ABraham. Mais si nous ne savons pas si il a exister ici, nous sommes sûr que le récit dont nous parlons et qui fait l'objet de ce commentaire existe.
Un récit qui existe et qui a eu une importance considérable dans l'histoire de l'humanité puisque aujourd'hui encore des centaines de millions d'hommes sont circoncis dans le monde. L’intérêt de l'analyse symbolique c'est qu'elle s’intéresse au texte en cela qu'il s'insère dans notre actualité : Abraham et Jephté ne sont plus deux personnages historiques mais deux facettes de notre humanité que nous pouvons actualiser ou pas dans notre quotidien. Comme je le dis dans le texte, nous avons le choix entre être Abraham ou être Jephté.
à Idriss : la méthode est celle de la lecture symbolique;méthode initié par des psychologue du XX° siècle en particulier ceux issu de l'école Jungienne.
Il peut effectivement y avoir un rapport avec l'hermétisme, mais à la fois, la finalité que les moyens diffèrent. Nous sommes dans un autre registre, celui de la psychologie.
à Roque.
Rien de catholique ici.
Il s'agit d'un texte hébraïque qui s'insère dans les traditions juives, chrétiennes et musulmanes. Aucune de ces traditions n'en a le monopole.
La lecture qui en est faite ici est une lecture qui de toute façon s'affranchit de chacune de ses traditions.
philouie- Messages : 421
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La ligature d'Isaac
Résumé des épisodes précédents :
Au cours d'une lecture croisée des deux sacrifices d'enfants relatés dans la bible, nous avons vu que :
ce qui caractérise Abraham est son obéissance et que cette obéissance consiste à exécuter les actions prescrites sans soucis du gain et de la perte.
au contraire, jephté agit en vu de plier le monde à sa volonté : mal lui en prend.
Nous avons vu Abraham et Isaac gravissant la montagne à l'occasion duquel Abraham prodigue son enseignement à Isaac. Il s'agit de la transmission d'un savoir et d'un enseignement moral qui est transmission de qualité de l'être.
Nous avons vu Abraham inscrire Isaac dans le monde humain et le monde sacré au moyen de la discipline.
Nous avons vu que l'acte même d'éducation est castration du désir.
Dans l'épisode suivant nous allons retourner avec Jephté car :
Le bélier est Jephté.
Au cours d'une lecture croisée des deux sacrifices d'enfants relatés dans la bible, nous avons vu que :
ce qui caractérise Abraham est son obéissance et que cette obéissance consiste à exécuter les actions prescrites sans soucis du gain et de la perte.
au contraire, jephté agit en vu de plier le monde à sa volonté : mal lui en prend.
Nous avons vu Abraham et Isaac gravissant la montagne à l'occasion duquel Abraham prodigue son enseignement à Isaac. Il s'agit de la transmission d'un savoir et d'un enseignement moral qui est transmission de qualité de l'être.
Nous avons vu Abraham inscrire Isaac dans le monde humain et le monde sacré au moyen de la discipline.
Nous avons vu que l'acte même d'éducation est castration du désir.
Dans l'épisode suivant nous allons retourner avec Jephté car :
Le bélier est Jephté.
philouie- Messages : 421
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Re: La ligature d'Isaac
Par principe, il me semble que la lecture d'un texte qui s'affranchit complètement du contexte pratique, concret, histoire et culturel d'un texte ne peut que produire des contresens ... mais il faudrait d'abord que je lise un peu ce que tu as écrit. Je n'en ai pas eu le temps. Ma critique s'adressait à Hignhlander, pas à toi.philouie a écrit:à Roque.
Rien de catholique ici.
Il s'agit d'un texte hébraïque qui s'insère dans les traditions juives, chrétiennes et musulmanes. Aucune de ces traditions n'en a le monopole. La lecture qui en est faite ici est une lecture qui de toute façon s'affranchit de chacune de ses traditions.
Bien qu'ayant été immergé dans la psychologie (freudienne, il est vrai) je ne crois pas à une symbolique universelle. Je ne " crois " à l'interprétation que dans la relation de transfert - l'image, la représentation est toujours relative, jamais absolue.
Roque- Messages : 5064
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Re: La ligature d'Isaac
Les lectures religieuses traditionnelles abordent le texte comme fait historique et c'est de cal dont je m’affranchis.
Cette approche ne permet pas une lecture symbolique, puisque la symbolique ignore les faits pour s’intéresser aux images.
Quoiqu'il en soit mon interprétation est fait dans le cadre de la croyance en Dieu et ne vient pas en contradiction avec d'autre lecture.
J'ai parlé par exemple de la question de l'obéissance, qui est ce que retiens l'Islam, on pourrait aussi parler de la question de l'homme nouveau, qui est plus chrétienne. L'approche d'un Dieu qui serait éducateur est plus judaIque.
La lecture symbolique est à la fois plus ouverte et plus englobante, comme elle se fonde sur l'imaginaire plus que sur la raison, elle donne plus de liberté.
Cette approche ne permet pas une lecture symbolique, puisque la symbolique ignore les faits pour s’intéresser aux images.
Quoiqu'il en soit mon interprétation est fait dans le cadre de la croyance en Dieu et ne vient pas en contradiction avec d'autre lecture.
J'ai parlé par exemple de la question de l'obéissance, qui est ce que retiens l'Islam, on pourrait aussi parler de la question de l'homme nouveau, qui est plus chrétienne. L'approche d'un Dieu qui serait éducateur est plus judaIque.
La lecture symbolique est à la fois plus ouverte et plus englobante, comme elle se fonde sur l'imaginaire plus que sur la raison, elle donne plus de liberté.
philouie- Messages : 421
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La ligature d'Isaac
Le bélier est Jephté
Nous allons retourner avec Jephté pour voir comment il éclaire le chemin que nous avons parcouru avec Abraham. Nous allons trouver encore deux ou trois détails qui confortent notre propos.
Ce que symbolise le bélier, et qu’Abraham doit sacrifier, ce n’est pas un animal qui vient remplacer son fils, mais c’est l’image de la part animal présente en Isaac et qui doit être détruite.
Rappelons le, le sacrifice d’Isaac à bien eu lieu, il a dû porter le bois, il a été attaché, il a été sous la menace du couteau de son père et la mort du bélier symbolise ce sacrifice.
Ce meurtre de la part animale à lieu dans le travail éducatif, et c’est par le travail éducatif que l’homme quitte la bestialité pour entrer dans le monde civilisé.
Ainsi, Abraham, en tant que patriarche, c’est à dire père de tous les pères, fait entrer l’homme dans la civilisation en sacrifiant son fils sur l’autel de l’éducation pour détruire en lui toute bestialité.
Nous sommes donc à l’exact opposé de l’idée que l’homme sacrifie un animal pour ne pas sacrifier ses enfants : il sacrifie la part animale présente en ses enfants et c’est bien du sacrifice du fils, du sacrifice d’Isaac qu’il s’agit et pas de celui d’un animal. L’animal n’est qu’un symbole du sacrifice réel d’Isaac.
(...)
Nous allons retourner avec Jephté pour voir comment il éclaire le chemin que nous avons parcouru avec Abraham. Nous allons trouver encore deux ou trois détails qui confortent notre propos.
Ce que symbolise le bélier, et qu’Abraham doit sacrifier, ce n’est pas un animal qui vient remplacer son fils, mais c’est l’image de la part animal présente en Isaac et qui doit être détruite.
Rappelons le, le sacrifice d’Isaac à bien eu lieu, il a dû porter le bois, il a été attaché, il a été sous la menace du couteau de son père et la mort du bélier symbolise ce sacrifice.
Ce meurtre de la part animale à lieu dans le travail éducatif, et c’est par le travail éducatif que l’homme quitte la bestialité pour entrer dans le monde civilisé.
Ainsi, Abraham, en tant que patriarche, c’est à dire père de tous les pères, fait entrer l’homme dans la civilisation en sacrifiant son fils sur l’autel de l’éducation pour détruire en lui toute bestialité.
Nous sommes donc à l’exact opposé de l’idée que l’homme sacrifie un animal pour ne pas sacrifier ses enfants : il sacrifie la part animale présente en ses enfants et c’est bien du sacrifice du fils, du sacrifice d’Isaac qu’il s’agit et pas de celui d’un animal. L’animal n’est qu’un symbole du sacrifice réel d’Isaac.
(...)
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La ligature d'Isaac
Retour à Jephté
Nous avons vu qu’il n’était pas pensable que la main qui arrête Abraham n’ai pas été présente quand Jephté tue sa fille. Nous avons vu qu’il n’est pas possible de dire que Dieu n’a pas voulu ce meurtre parce qu’il aurait tout aussi bien pu l’empêcher. Nous avons vu aussi qu’on ne peut en imputer la responsabilité à Dieu puisqu’à l’évidence c’est par sa conduite que Jephté condamne sa fille et qu’il l’égorge de ses propres mains. Nous dirons alors que la mort de la fille de Jephté est un processus naturel découlant des actes de Jephté. C’est ce que j’ai appelé le chemin descendant.
Je voudrai revenir sur les actes de Jephté pour voir si dans une perspective éducative il nous enseigne quelque chose sur le sacrifice d’Isaac. L’histoire de Jephté étant le récit en négatif du sacrifice d’Abraham.
En disant "le bélier est Jephté", je dis que Jephté est l’image de ce que Dieu a demandé à Abraham de sacrifier.
Nous avons vu qu’il n’était pas pensable que la main qui arrête Abraham n’ai pas été présente quand Jephté tue sa fille. Nous avons vu qu’il n’est pas possible de dire que Dieu n’a pas voulu ce meurtre parce qu’il aurait tout aussi bien pu l’empêcher. Nous avons vu aussi qu’on ne peut en imputer la responsabilité à Dieu puisqu’à l’évidence c’est par sa conduite que Jephté condamne sa fille et qu’il l’égorge de ses propres mains. Nous dirons alors que la mort de la fille de Jephté est un processus naturel découlant des actes de Jephté. C’est ce que j’ai appelé le chemin descendant.
Je voudrai revenir sur les actes de Jephté pour voir si dans une perspective éducative il nous enseigne quelque chose sur le sacrifice d’Isaac. L’histoire de Jephté étant le récit en négatif du sacrifice d’Abraham.
En disant "le bélier est Jephté", je dis que Jephté est l’image de ce que Dieu a demandé à Abraham de sacrifier.
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La ligature d'Isaac
Jephté est un vaillant guerrier, son histoire telle qu’elle est contée montre qu’il est querelleur et vaniteux. Né d’une courtisane, rejeté par sa famille, élevé par des errants, il n’a lui-même pas d’éducation. Il passe son temps à guerroyer. La bible lui attribue la mort de 42 000 hommes de la tribu d’Ephraïm. Au sens contemporain, c’est un barbare.
Un verset éclaire la promesse qu’il fit à Dieu : il voulait être le chef de la tribu des Galaad :
9 : Et Jephté répondit aux anciens de Galaad : Si vous me ramenez pour combattre contre les enfants d’Ammon, et que l’Éternel les livre entre mes mains, je serai votre chef.
C’est à la poursuite de ce but qu’il fit le vœu à l’éternel :
30 Et Jephté fit un vœu à l’Éternel, et dit : Si tu livres les enfants d’Ammon entre mes mains, Ce qui sortira au-devant de moi des portes de ma maison, quand je retournerai en paix de chez les enfants d’Ammon, sera à l’Éternel, et je l’offrirai en holocauste.
Or évidement ce désir d’être le chef renvoie à la question de la castration et de la circoncision, puisqu’être le chef c’est être la tête et que la castration est une décapitation, telle qu’elle se joue, soit dans la scène de l’égorgement, soit dans la scène de la circoncision.
Jephté est donc non-circoncis en ce sens que c’est son désir qui le mène et non lui qui maitrise son désir.
Un verset éclaire la promesse qu’il fit à Dieu : il voulait être le chef de la tribu des Galaad :
9 : Et Jephté répondit aux anciens de Galaad : Si vous me ramenez pour combattre contre les enfants d’Ammon, et que l’Éternel les livre entre mes mains, je serai votre chef.
C’est à la poursuite de ce but qu’il fit le vœu à l’éternel :
30 Et Jephté fit un vœu à l’Éternel, et dit : Si tu livres les enfants d’Ammon entre mes mains, Ce qui sortira au-devant de moi des portes de ma maison, quand je retournerai en paix de chez les enfants d’Ammon, sera à l’Éternel, et je l’offrirai en holocauste.
Or évidement ce désir d’être le chef renvoie à la question de la castration et de la circoncision, puisqu’être le chef c’est être la tête et que la castration est une décapitation, telle qu’elle se joue, soit dans la scène de l’égorgement, soit dans la scène de la circoncision.
Jephté est donc non-circoncis en ce sens que c’est son désir qui le mène et non lui qui maitrise son désir.
philouie- Messages : 421
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La ligature d'Isaac
Examinons maintenant la relation qu’il a avec sa fille. Celle-ci n’apparaît dans le récit qu’au moment où rentrant chez lui, il se rend compte de la bourde qu’il a fait en promettant l’holocauste. C’est à croire que trop absorbé par les batailles, il ne pensait plus à elle au moment de s’engager.
On n’imagine mal qu’il puisse y avoir eu un moment où la fille appelle "Père" et qu’il réponde "Me voici, je t’écoute".
Non Jephté est sur le champ de bataille et ne s’occupe pas de sa fille.
34 Et Jephté arriva à Mitspa, chez lui. Et voici sa fille sortait à sa rencontre avec des tambourins et avec des danses.
Quand il rentre à la maison la fille est dans les jeux et dans les danses, si elle avait été attachée au pupitre d’étude, elle ne serait pas morte.
Notons au passage que la fille de Jephté n’est jamais nommée. Elle demeure anonyme, soit comme un animal que l’on ne nomme pas et cela signifie qu’elle n’a pas un statut humain, et si elle n’a pas de statut humain c’est qu’elle n’a pas reçu l’éducation qui lui aurait permis de quitter le stade de l’enfant sauvage pour accéder à celui de personne humaine.
soit qu’elle n’a pas d’individualité propre et qu’elle n’est considérée que relativement à la dépendance envers son père, elle n’acquiert pas l’autonomie.
Et elle était fille unique ; à part elle, il n’avait ni fils, ni fille.
Pour rappel de la similitude du récit d’Abraham.
Suit un passage où l’on voit la fille de Jephté qui accepte sa situation - pas de commentaires pour l’instant.
37 Et elle dit à son père : Que ceci me soit accordé : laisse-moi pendant deux mois ! Et je m’en irai, et je descendrai [pour aller] sur les montagnes, et je pleurerai ma virginité, moi et mes compagnes. 38 Et il répondit : Va ! Et il la laissa aller pour deux mois. Et elle s’en alla, elle et ses compagnes, et elle pleura sa virginité sur les montagnes.
Ce passage est très important. Certains y ont vu la possibilité qu’en réalité le sacrifice de la vie soit commuée en une consécration au temple, justifiant ainsi que Jephté n’ai pas tué sa fille.
Je ne retiens pas cette option d’une part parce que le texte ne le dit pas, d’autre part parce qu’on voit bien qu’il s’agit d’une interprétation à l’eau de rose qui refuse la cruauté d’un texte qui annonce ensuite la mort de 42 000 hommes ...
Mais surtout, dans la perspective d’une version en négatif de l’histoire d’Abraham, Jephté tue sa fille parce qu’Abraham n’a pas tué Isaac : il n’y a pas d’autre hypothèse logique que celle-là.
"et je descendrai sur les montages», On ne sait pas trop de quelles montagnes il s’agit, mais on imagine un monde archaïque, païen - dans le sens non civilisé. Les montagnes sont en effet un lieu sauvage, non urbanisé, hors des villes.
Si elles renvoient à la montagne que gravissent Abraham et Isaac, il y a là un "je descendrai" qui peut paraître bizarre, mais qui s’explique fort bien dans notre perspective : il souligne que, si, là, il y avait élévation, ici, il y a abaissement, c’est un retour en arrière, une dégradation, en langage psychologique une régression.
On voit aussi ici que la fille est laissée en complète liberté avec ses compagnes, sans cadre, sans obligation, elle va simplement et sans retenue.
Les points qu’on a mis en évidence, sont donc l’absence du père, l’absence d’encadrement et l’absence de directive. La fille est laissée à sa seule divagation comme un animal qui n’aurait ni longe ni enclos, par un père obsédé par son avidité.
et elle pleura sa virginité sur les montagnes.
Qu’elle est donc cette virginité que pleure la fille de Jephté ?
On n’imagine mal qu’il puisse y avoir eu un moment où la fille appelle "Père" et qu’il réponde "Me voici, je t’écoute".
Non Jephté est sur le champ de bataille et ne s’occupe pas de sa fille.
34 Et Jephté arriva à Mitspa, chez lui. Et voici sa fille sortait à sa rencontre avec des tambourins et avec des danses.
Quand il rentre à la maison la fille est dans les jeux et dans les danses, si elle avait été attachée au pupitre d’étude, elle ne serait pas morte.
Notons au passage que la fille de Jephté n’est jamais nommée. Elle demeure anonyme, soit comme un animal que l’on ne nomme pas et cela signifie qu’elle n’a pas un statut humain, et si elle n’a pas de statut humain c’est qu’elle n’a pas reçu l’éducation qui lui aurait permis de quitter le stade de l’enfant sauvage pour accéder à celui de personne humaine.
soit qu’elle n’a pas d’individualité propre et qu’elle n’est considérée que relativement à la dépendance envers son père, elle n’acquiert pas l’autonomie.
Et elle était fille unique ; à part elle, il n’avait ni fils, ni fille.
Pour rappel de la similitude du récit d’Abraham.
Suit un passage où l’on voit la fille de Jephté qui accepte sa situation - pas de commentaires pour l’instant.
37 Et elle dit à son père : Que ceci me soit accordé : laisse-moi pendant deux mois ! Et je m’en irai, et je descendrai [pour aller] sur les montagnes, et je pleurerai ma virginité, moi et mes compagnes. 38 Et il répondit : Va ! Et il la laissa aller pour deux mois. Et elle s’en alla, elle et ses compagnes, et elle pleura sa virginité sur les montagnes.
Ce passage est très important. Certains y ont vu la possibilité qu’en réalité le sacrifice de la vie soit commuée en une consécration au temple, justifiant ainsi que Jephté n’ai pas tué sa fille.
Je ne retiens pas cette option d’une part parce que le texte ne le dit pas, d’autre part parce qu’on voit bien qu’il s’agit d’une interprétation à l’eau de rose qui refuse la cruauté d’un texte qui annonce ensuite la mort de 42 000 hommes ...
Mais surtout, dans la perspective d’une version en négatif de l’histoire d’Abraham, Jephté tue sa fille parce qu’Abraham n’a pas tué Isaac : il n’y a pas d’autre hypothèse logique que celle-là.
"et je descendrai sur les montages», On ne sait pas trop de quelles montagnes il s’agit, mais on imagine un monde archaïque, païen - dans le sens non civilisé. Les montagnes sont en effet un lieu sauvage, non urbanisé, hors des villes.
Si elles renvoient à la montagne que gravissent Abraham et Isaac, il y a là un "je descendrai" qui peut paraître bizarre, mais qui s’explique fort bien dans notre perspective : il souligne que, si, là, il y avait élévation, ici, il y a abaissement, c’est un retour en arrière, une dégradation, en langage psychologique une régression.
On voit aussi ici que la fille est laissée en complète liberté avec ses compagnes, sans cadre, sans obligation, elle va simplement et sans retenue.
Les points qu’on a mis en évidence, sont donc l’absence du père, l’absence d’encadrement et l’absence de directive. La fille est laissée à sa seule divagation comme un animal qui n’aurait ni longe ni enclos, par un père obsédé par son avidité.
et elle pleura sa virginité sur les montagnes.
Qu’elle est donc cette virginité que pleure la fille de Jephté ?
philouie- Messages : 421
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Re: La ligature d'Isaac
Roque a écrit:
Abraham, Isaac seraient donc des légendes et Moïse un personnage fictif. Mais alors les hébreux, La Torah, le judaïsme c'est peut-être aussi une simple vue de l'esprit, un malentendu ? Peux-tu me dire - selon toi - quel personnage biblique a vraiment existé ? En dehors de toi, bien sûr
Ta réponse m'avait échappée. Merci de me prêter autant d'importance, mais je ne figure pas encore dans les Écritures, bien qu'un certain nombre de mes homonymes ont été béatifiés, d'autres canonisés... Faisons donc un peu d'histoire. Tu n'es pas obligé d'adhérer... Oui, ceux qui sont appelés les "patriarches", sont des personnages de légende, particulièrement violents et intransigeants sur la condition féminine, apparentée au "cheptel". Eh oui, c'est ça, la réalité. Juste pour l'anecdote, les quatre femmes, que revendiquent les prétentieux mâles misogynes de cette époque trouble, correspondent aux quatre phases lunaires, de même que les douze tribus d'Israël, pure invention, correspondent aux 12 signes du zodiaque.
Venons-en aux hébreux. Ce peuple n'a jamais existé en tant que tel, pas plus qu'il n'a traversé la mer rouge. L'archéologie en témoigne. Un peuple asiatique, nomade et conquérant (tiens ça m'en rappelle un autre, moins glorieux), a envahi l'Égypte et dépossédé Pharaon de son trône. Il s'agit des Hyksôs, (la question n'est pas complètement tranchée par les historiens, mais une majorité s'accorde sur cette thèse) qui ont envahi l'Égypte et réduit le peuple à l'esclavage. Les Hyksôs ont régné durant 108 ans sur ce Pays (deux dynasties). Les égyptiens les dénommaient "hapiru ou habiru", les deux orthographes sont admises. Les égyptiens ont fini par se révolter contre ces barbares et les ont chassés d'Égypte, afin de redonner le trône au Pharaon légitime. Seule ombre au tableau, on ne sait pas avec précision qui était le Pharaon qui régnait à cette époque. Les historiens ne sont pas d'accord sur ce sujet. Toujours est-il, que ces mêmes Hyksôs, ont eu leur traversée du désert (fable de l'Exode) durant laquelle ils ont élu un chef, le légendaire Moïse, dont l'histoire est un copié collé du roi Sargon, fondateur de l'Akkadie. Le reste de l'histoire de ce personnage n'est que littérature. A lire, "L'invention du peuple juif", par le professeur en archéologie Israël Finkelstein...
Roque a écrit:On est dans l'arbitraire gnostique, des rêveries, des fantasmes ... totalement illusoires. Si tu fumes ta moquette, ça fait le même effet. Je ne vois pas du tout ce qu'il peut y avoir de catholique dans tout ce fatras contraire à toute la méthode pratiquée et enseignée par la tradition de nos Eglise chrétiennes.
C'est ton point de vue, pas le mien. Quant à la méthode pratiquée, bien évidemment elle n'a rien à voir avec la méthode pseudo moderne. Nous faisons appel à une intelligence plus subtile, celle du coeur, inconnue au monde moderne qui nage dans les compromis et corruptions de toutes natures. C'est d'ailleurs cette intelligence purement intellectuelle, qui a accouché de cette monstruosité que fût la Révolution, ayant elle même accouché d'un autre monstre, appelé la "Ripoublique". Merci aux protestants et aux pseudo Francs-Maçons du siècle des ténèbres. Et Tenebrae Eam Non Comprehenderunt; Sic Transit Gloria Mundi...
Dernière édition par Ecossais le Jeu 11 Oct - 19:52, édité 1 fois
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